Le début du mandat
Auteur | André-Pierre André Dumont; Jean Pierre Renard |
Occupation de l'auteur | Avocat et assistant , UCL; Avocat juge suppléant , Tribunal de Commerce de Nivelles |
Pages | 29-43 |
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5. Le droit belge est sur ce point très libéral. En effet, toute personne peut, sous réserve de certaines interdictions (nº 22) ou incompatibilités (nº 31), être appelée à exercer une fonction d'administrateur sans qu'elle ait à justifier de qualifications ou compétences particulières.
L'absence de connaissances ou de qualifications ne permet pas de s'exonérer de sa responsabilité2. Par conséquent, il est déconseillé d'accepter un mandat d'administrateur si la capacité d'exercer réellement cette fonction n'existe pas.
De même, il est déconseillé d'accepter un mandat d'administrateur juste pour «faire plaisir». En effet, la «passivité» n'est nullement un moyen d'échapper à toute responsabilité3.
Aucune condition de nationalité ou de participation au capital n'est requise.
6. Dans certains cas, le choix d'un ou plusieurs administrateurs peut être limité par la loi.
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Ainsi, la loi programme du 10 février 1998 pour la promotion de l'entreprise indépendante, impose à la société de compter, parmi «sa direction technique journalière», une personne disposant des compétences particulières édictées par cette loi et ses arrêtés royaux d'exécution. Il appartient aux guichets d'entreprise de vérifier si tel est bien le cas.
Les statuts peuvent également limiter ce choix en prévoyant des conditions relatives à la compétence, l'âge, ... des administrateurs, dès lors qu'il s'agit de caractéristiques objectives4.
7. Dans le cadre de la réflexion menée sur la corporate governance (nº 108), diverses recommandations notamment au sujet de la composition du conseil d'administration ont été formulées par les Codes Lippens et Buysse.
Ainsi, elle recommande de nommer des administrateurs dits indépendants, c'est-à-dire des administrateurs qui ne sont «soumis» ni à la direction ni aux actionnaires dominants5.
8. Sous réserve des incompatibilités (nº 21) et des interdictions (nº 22), il est admis que toute personne physique peut être appelée à cette fonction, quels que soient sa nationalité6, son âge, son domicile, ...
Le Code civil contient divers régimes spécifiques en faveur de personnes dont on estime qu'elles méritent une protection particulière. Tel est par exemple le cas du mineur. Ces régimes de protection peuvent gêner, voire empêcher la désignation de la personne protégée en qualité d'administrateur. En outre, ils pourraient faire obstacle à l'application normale des règles du droit des sociétés relatives notamment à la responsabilité. C'est pourquoi, il est déconseillé d'appeler à la fonction d'administrateur une personne protégée.
9. Une personne morale est une entité, autre qu'une personne physique, apte à être titulaire de droits et obligations et à ester en justice.
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Sont des personnes morales : les sociétés commerciales, les associations sans but lucratif, ...
10. La Cour de cassation a admis, dans plusieurs arrêts7, qu'une personne morale pouvait être administrateur d'une société anonyme.
Encore faut-il en ce cas déterminer comment cette personne va exercer son mandat.
11. Dans la première édition de cet ouvrage, nous conseillions de désigner une personne chargée d'exercer le mandat confié à la personne morale.
Depuis l'entrée en vigueur de la loi du 2 août 2002 intervenue le 1er septembre 2002, il s'agit d'une obligation. En effet, l'article 61, § 2 du Code des sociétés impose à la personne morale nommée comme administrateur8, gérant ou membre d'un comité de direction, de désigner parmi ses associés, gérants, administrateurs ou travailleurs, un représentant permanent chargé de l'exécution de cette mission au nom et pour compte de ladite personne morale9.
Selon l'exposé des motifs, cette désignation a pour but d'éviter que la personnalité morale [soit] utilisée pour compliquer la responsabilité civile et la responsabilité pénale10. C'est pourquoi, outre cette obligation de désignation d'un représentant légal, le législateur a prévu que ce représentant encourt les mêmes responsabilités civiles et pénales que s'il exerçait cette fonction en son nom et pour son compte, le tout sans préjudice d'une responsabilité solidaire de la personne morale administrateur.
12. Dès lors qu'une personne morale est désignée comme administrateur, gérant ou membre d'un comité de direction, elle se doit de désigner un représentant permanent.
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Par contre, la loi du 2 août 2002 n'impose pas de nommer un représentant permanent pour les personnes morales exerçant les fonctions de délégués à la gestion journalière.
13. Bien que la loi ne le prévoit pas expressément, il n'est pas douteux que le représentant permanent doit être une personne physique.
Pour être nommé, il doit répondre aux mêmes conditions que celles auxquelles la personne morale administrateur doit satisfaire11.
Conseil
Pour éviter toute discussion quant à l'obligation pour le représentant permanent de satisfaire aux conditions édictées par les statuts de la société administrée, pour être administrateur, il s'impose d'indiquer, dans les statuts, que les éventuels représentants permanents doivent également remplir ces conditions.
14. Peuvent être désignés comme représentant permanent, un associé, un gérant, un administrateur ou un travailleur.
Cette énumération limitative a pour conséquence qu'un membre du comité de direction, un délégué à la gestion journalière, un liquidateur ne peuvent être le représentant permanent d'une personne morale s'ils n'entrent pas par ailleurs dans une des catégories visées ci-dessus12.
15. Pour le reste, la personne morale administrateur dispose d'une très grande liberté pour désigner son représentant permanent.
Elle pourrait ainsi désigner quelqu'un qui est déjà administrateur, à titre personnel, de la société administrée.
De même, il n'existe aucune interdiction de principe à la désignation par plusieurs personnes morales administrateurs, d'un même représentant permanent, sous réserve, bien entendu, du respect de la règle de la collégialité.
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En revanche, une même personne morale ne peut, à notre avis, désigner plusieurs représentants permanents, même en recourant au système de la suppléance. Une telle solution est en effet contraire à l'idée de «permanence».
16. Il appartient à la personne morale administrateur de désigner son représentant permanent. L'organe compétent est le conseil d'administration - sous réserve de l'existence d'un comité de direction -, le gérant, l'administrateur ou, le cas échéant, le délégué à la gestion journalière de la dite personne morale.
Le Code des sociétés ne prévoit pas que la société dans laquelle la personne morale est administrateur dispose d'un droit de veto.
17. Le représentant permanent est chargé d'exécuter l'ensemble des missions de la personne morale administrateur, c'est-à-dire tant les pouvoirs de gestion que les pouvoirs de représentation.
Il n'est pas certain que ce rôle soit exclusif.
En effet, lorsque la personne morale administrateur est une société anonyme ayant créé un organe de représentation, conformément à l'article 522 du Code de sociétés, les membres de cet organe pourraient représenter, à l'égard des tiers, la société anonyme lorsqu'elle agit en sa qualité d'administrateur de gérant ou de membre d'un comité de direction13.
18. S'agissant d'un mandat, il prend fin pour les mêmes raisons que celles pour lesquelles un mandat d'administrateur prend fin (infra nº 59 et suivants), si ce n'est la durée de la fonction de représentant permanent qui n'est pas limitée à 6 ans.
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Il existe néanmoins une particularité en ce qui concerne la révocation : la personne morale administrateur ne peut révoquer son représentant légal qu'à la condition d'en avoir désigné un nouveau.
19. La désignation du représentant permanent et la cessation de ses fonctions sont soumises aux mêmes règles de publicité que s'il avait exercé cette fonction en son nom et pour son compte (art. 74 CS).
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