Extrait de l'arrêt n° 36/2019 du 28 février 2019 Numéro du rôle : 6721 En cause : le recours en annulation de la loi du 19 mars 2017 modifiant la législation en vue de l'instauration d'un statut

Extrait de l'arrêt n° 36/2019 du 28 février 2019

Numéro du rôle : 6721

En cause : le recours en annulation de la loi du 19 mars 2017 modifiant la législation en vue de l'instauration d'un statut pour les accueillants familiaux, ou, à titre subsidiaire, de ses articles 8, 9 (partiellement) et 10 (totalement), introduit par R.M. et autres.

La Cour constitutionnelle,

composée des présidents F. Daoût et A. Alen, et des juges L. Lavrysen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke, T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul, T. Giet, R. Leysen, J. Moerman et M. Pâques, assistée du greffier F. Meersschaut, présidée par le président F. Daoût,

après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant :

  1. Objet du recours et procédure

    Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 28 août 2017 et parvenue au greffe le 29 août 2017, un recours en annulation de la loi du 19 mars 2017 modifiant la législation en vue de l'instauration d'un statut pour les accueillants familiaux (publiée au Moniteur belge du 5 avril 2017), ou, à titre subsidiaire, de ses articles 8, 9 (partiellement) et 10 (totalement) a été introduit par R.M., I.H., A.M. et l'ASBL « Défense des Enfants - International - Belgique - Branche francophone (D.E.I. Belgique) », assistés et représentés par Me J. Fierens et Me M. Genot, avocats au Barreau de Bruxelles.

    La demande de suspension des mêmes dispositions législatives, introduite par les mêmes parties requérantes, a été rejetée par l'arrêt n° 126/2017 du 19 octobre 2017, publié au Moniteur belge du 9 janvier 2018.

    (...)

  2. En droit

    (...)

    Quant aux dispositions attaquées

    B.1.1. Les parties requérantes demandent l'annulation de la loi du 19 mars 2017 modifiant la législation en vue de l'instauration d'un statut pour les accueillants familiaux (ci-après : la loi du 19 mars 2017) ou, subsidiairement, l'annulation :

    - des mots « L'homologation peut uniquement être refusée si elle est contraire à l'intérêt de l'enfant », figurant dans l'article 387sexies, alinéa 2, du Code civil, inséré par l'article 8 de la loi du 19 mars 2017;

    - des mots « L'homologation ne peut être refusée que si elle est contraire à l'intérêt de l'enfant », figurant dans l'article 387septies, alinéa 2, du Code civil, inséré par l'article 9 de la loi du 19 mars 2017;

    - de l'article 387octies du Code civil, inséré par l'article 10 de la loi du 19 mars 2017.

    B.1.2. L'article 8 de la loi du 19 mars 2017 insère, dans le Code civil, un article 387sexies, qui dispose :

    Les parents ou le tuteur et les accueillants familiaux conviennent par écrit, à l'intervention de l'organe compétent en matière d'accueil familial, de la manière dont les parents ou le tuteur peuvent exercer leur droit aux relations personnelles prévu par l'article 387undecies, compte tenu des possibilités et des conditions de vie des parents.

    Conformément aux articles 1253ter/4 et 1253ter/6 du Code judiciaire, l'accord peut être soumis à l'homologation du tribunal de la famille. L'homologation peut uniquement être refusée si elle est contraire à l'intérêt de l'enfant.

    Si les parents ou le tuteur et les accueillants familiaux ne peuvent parvenir à un accord, le juge statue sur requête de la partie la plus diligente

    .

    B.1.3. L'article 9 de la loi du 19 mars 2017 insère, dans le Code civil, un article 387septies, qui dispose :

    § 1er. Les parents ou le tuteur et les accueillants familiaux peuvent convenir, par écrit, avec l'intervention de l'organe compétent en matière d'accueil familial, d'également déléguer aux accueillants familiaux, complètement ou partiellement, y compris en dehors des cas d'urgence, la compétence de prendre les décisions importantes concernant la santé, l'éducation, la formation, les loisirs et l'orientation religieuse ou philosophique de l'enfant, à l'exception des droits et des devoirs relatifs à l'état de la personne de l'enfant. Les droits et les devoirs concernant l'administration des biens de l'enfant peuvent également être délégués aux accueillants familiaux par voie de convention.

    La convention mentionne explicitement les droits et devoirs qui sont délégués aux accueillants familiaux en vue de l'exercice de l'autorité parentale. La convention fixe les modalités de l'exercice des compétences déléguées entre les parents et les accueillants familiaux.

    § 2. La convention est soumise pour homologation au tribunal de la famille, conformément aux articles 1253ter/4 et 1253ter/6 du Code judiciaire. L'homologation ne peut être refusée que si elle est contraire à l'intérêt de l'enfant.

    La convention homologuée ne peut pas porter préjudice à la durée de l'accueil familial fixée par les organes compétents en matière d'accueil familial

    .

    B.1.4. L'article 10 de la loi du 19 mars 2017 insère, dans le Code civil, un article 387octies, qui dispose :

    § 1er. A défaut de convention telle que visée à l'article 387septies et à condition que pendant au moins un an avant la demande, l'enfant ait été placé de manière permanente dans la famille des accueillants familiaux, les accueillants familiaux peuvent demander au tribunal de la famille de leur déléguer, également hors le cas d'urgence, en tout ou en partie, la compétence de prendre des décisions importantes concernant la santé, l'éducation, la formation, les loisirs et l'orientation religieuse ou philosophique de l'enfant, à l'exception des droits et devoirs relatifs à l'état de la personne de l'enfant. Les droits et devoirs relatifs à la gestion des biens de l'enfant peuvent également être délégués aux accueillants familiaux.

    La demande est introduite conformément aux articles 1253ter/4 à 1253ter/6 du Code judiciaire.

    Le jugement ne peut pas porter atteinte à la durée de l'accueil familial fixée par les organes compétents pour l'accueil familial.

    Ils intentent leur action contre, selon le cas, les deux parents, le parent unique ou le tuteur de l'enfant.

    § 2. Le jugement ou l'arrêt mentionne explicitement les droits et devoirs qui sont délégués aux accueillants familiaux en vue de l'exercice de l'autorité parentale

    .

    B.1.5. Par ailleurs, l'article 20 de la loi attaquée rétablit l'article 7 de la loi du 8 avril 1965 « relative à la protection de la jeunesse, à la prise en charge des mineurs ayant commis un fait qualifié infraction et à la réparation du dommage causé par ce fait », dans la rédaction suivante :

    Art. 7. Le tribunal de la jeunesse peut statuer sur toutes les mesures en matière d'autorité parentale visées au livre Ier, titre IX, du Code civil, pourvu qu'il y ait une connexité entre celles-ci et les mesures de protection de la jeunesse qui ont été ordonnées

    .

    B.2.1. Par la loi du 19 mars 2017, le législateur entend créer un statut pour les accueillants familiaux, de façon à assurer la sécurité juridique des relations entre l'enfant accueilli, ses parents ou son tuteur et les accueillants, et à mettre un terme à « la confusion quant aux droits et obligations des parents d'accueil et [au] fait qu'ils n'ont pas la possibilité de faire valoir leur opinion » (Doc. parl., Chambre, 2014-2015, DOC 54-0697/001, p. 7).

    B.2.2. L'article 7 de la loi du 17 mars 2017, à l'encontre duquel aucun grief n'est formulé, insère, dans le Code civil, un article 387quinquies, qui organise le partage de certains attributs de l'autorité parentale entre les parents ou le tuteur et les accueillants, durant la période du placement de l'enfant. Cette disposition prévoit que les accueillants exercent le droit d'hébergement et le droit de prendre toutes les décisions quotidiennes relatives à l'enfant, et que les parents ou le tuteur gardent, sauf en cas d'extrême urgence, la compétence de prendre les décisions importantes relatives à la santé, à l'éducation, à la formation, aux loisirs et aux choix religieux et philosophiques de l'enfant.

    Quant à la recevabilité

    B.3.1. Le Gouvernement flamand fait valoir que le recours n'est que partiellement recevable, dans la mesure où les griefs exposés dans la requête ne portent que sur les articles 8, 9, 10 et 20 de la loi du 19 mars 2017.

    Il estime en outre que la requête en intervention est irrecevable, dès lors que les griefs exposés par les parties intervenantes diffèrent des griefs exposés par les parties requérantes.

    B.3.2. La Cour limite son examen aux dispositions de la loi attaquée contre lesquelles des griefs sont effectivement formulés.

    B.3.3. Les griefs formulés par les ASBL intervenantes ne peuvent être examinés que dans la mesure où ils correspondent aux moyens formulés dans la requête. En effet, l'article 87, § 2, de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle ne permet pas, contrairement à l'article 85 de la même loi spéciale, que de nouveaux moyens soient formulés dans un mémoire en intervention.

    Quant aux moyens pris de la violation des règles répartitrices de compétences

    En ce qui concerne le premier moyen des parties requérantes

    B.4. Les parties requérantes, rejointes sur ce point par le Gouvernement de la Communauté française, prennent un premier moyen de la violation de l'article 128, § 1er, de la Constitution et de l'article 5, § 1er, II, 1° et 6°, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles. Elles estiment que la loi attaquée et, singulièrement, ses articles 8, 9 et 20, portent atteinte à la compétence communautaire d'organiser le placement provisoire des enfants.

    B.5.1. En vertu de l'article 128, § 1er, de la Constitution, les communautés sont compétentes pour les matières personnalisables. L'article 5, § 1er, II, de la loi spéciale du 8 août 1980 précitée dispose que les matières personnalisables sont, en matière d'aide aux personnes :

    1° la politique familiale en ce compris toutes les formes d'aide et d'assistance aux familles et aux enfants;

    [...]

    6° La protection de la jeunesse, en ce compris la protection sociale et la protection judiciaire, à l'exception :

    a) des règles du droit civil relatives au statut des mineurs et de la famille, telles qu'elles sont établies par le Code civil et les lois qui le complètent;

    ...

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