9 JUILLET 2000. - Arrêté royal portant règlement de procédure particulier au contentieux des décisions relatives à l'accès au territoire, au séjour, à l'établissement et à l'éloignement des étrangers

RAPPORT AU ROI

Sire,

L'article 30 des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées le 12 janvier 1973, tel qu'il a été modifié par la loi du 18 avril 2.000, habilite le Roi à fixer, par arrêté délibéré en Conseil des Ministres, des règles de procédure particulières pour le contentieux des étrangers afin de faire face à l'ampleur des recours en la matière.

Le projet d'arrêté que j'ai l'honneur de soumettre à Votre Majesté a été rédigé par le Conseil d'Etat en vertu de l'article 6 des lois précitées.

La section de législation du Conseil d'Etat a veillé à ce que ce projet soit aisément lisible. Elle a, dans cette perspective, limité les renvois au seul règlement général de procédure et à divers articles de l'arrêté royal du 5 décembre 1991 déterminant la procédure en référé devant le Conseil d'Etat. Elle a, à l'occasion, effectué des corrections de forme mineures de quelques dispositions, sans pour autant en altérer le sens.

Nonobstant la recherche de la meilleure lisibilité possible, les textes qui n'auraient d'autre objet que de rappeler une disposition de force obligatoire supérieure ont été omis, afin d'éviter toute confusion.

Ainsi, la règle selon laquelle les arrêts prononçant une suspension ou ordonnant des mesures provisoires ne sont susceptibles ni d'opposition ni de tierce opposition ni de révision n'a pas été reprise, parce qu'elle figure dans le nouvel article 30 des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat.

De même, malgré qu'il n'y est pas renvoyé, il sera procédé conformément :

  1. à l'article 15 des lois coordonnées en cas de cassation;

  2. à l'article 17, § 5, des lois coordonnées, en vue de l'imposition éventuelle d'une astreinte;

  3. à l'article 17, § 6, alinéas 2 et 3, des mêmes lois et à l'article 21 de l'arrêté royal du 5 décembre 1991, au cas où la suspension est ordonnée pour détournement de pouvoir ou pour violation des articles 10, 11 et 24 de la Constitution;

  4. à l'article 17, § 7, des mêmes lois pour la levée d'une suspension, lorsque la chambre compétente n'annule pas l'acte attaqué préalablement suspendu;

  5. à l'article 21bis, §§ 1er et 2, des mêmes lois en ce qui concerne l'intervention;

  6. à l'article 24 des mêmes lois, tel qu'il est actuellement en vigueur et au regard duquel l'article 23 du projet doit être lu;

  7. à l'article 28 des mêmes lois, ce qui rend inutile un renvoi à l'article 33 du règlement général de procédure;

  8. à l'article 90, § 2, des mêmes lois quant à la composition des chambres en référé;

  9. à l'article 90, § 3, des mêmes lois quant à la possibilité de siéger à trois conseillers;

  10. à l'article 91 des mêmes lois, lorsqu'une chambre a retenu le détournement de pouvoir;

  11. aux articles 92 à 98 des mêmes lois en cas de renvoi à l'assemblée générale.

    Ne devaient, par ailleurs, pas faire l'objet de renvois :

  12. les articles 33 à 35 des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat, car ils ne règlent pas la procédure devant le Conseil d'Etat mais les recours contre ses arrêts;

  13. l'article 36 des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat, car il organise davantage une voie de droit qu'il ne règle une procédure.

    Ces dispositions sont donc en toutes hypothèses applicables.

    Il faut signaler enfin que les articles 51 et suivants des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat demeureront applicables dans tous les cas auxquels l'article 51/4 de la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers ne s'applique pas.

    L'économie générale du projet

    Les délais pour l'introduction des recours, des mémoires et pour demander la poursuite de la procédure ont été réduits afin d'accélérer la procédure et de lutter contre son usage à des fins dilatoires. De ce point de vue, il convient de rappeler qu'au contentieux des étrangers, l'efficacité des recours n'est pas liée au délai traditionnel de soixante jours, comme en témoigne singulièrement le succès de la procédure en référé d'extrême urgence. Par ailleurs, le délai de trente jours, qui est prévu pour l'introduction des recours, se retrouve dans d'autres procédures particulières; il est même supérieur à celui que certaines d'entre elles fixent. Il est aussi égal ou supérieur aux délais applicables au contentieux des étrangers dans d'autres Etats de l'Union européenne.

    La procédure en référé a été réaménagée. Le rapport de l'auditeur y est supprimé et est remplacé par un avis provisoire (provisoire, parce que l'avis définitif est donné à l'audience) plus synthétique. Toutefois, l'auditeur en est dispensé lorsqu'il estime que la demande en suspension ne requiert que des débats succincts. Dans ce cas, et conformément à ses instructions, le greffe indiquera de manière concise, dans l'avis de fixation, son opinion, afin que les parties puissent "cibler" leurs plaidoiries en conséquence.

    Il convient de mettre en exergue qu'une demande de suspension ne peut être instruite et jugée, en procédure ordinaire ou en débats succincts, que s'il n'est pas possible de recourir aux procédures abrégées en annulation. L'intention est de faire, dans toute la mesure du possible, l'économie de la procédure en référé.

    Outre l'abréviation des délais, la procédure en annulation est caractérisée par la suppression des derniers mémoires, toujours pour lutter contre les procédés dilatoires.

    L'attention est spécialement attirée sur les deux procédures abrégées qui sont mises en place et qui peuvent jouer tant en faveur du requérant que de la partie adverse.

    La première procédure abrégée (article 27) est circonscrite aux litiges dans lesquels la solution paraît d'emblée évidente. Elle sera appliquée aux recours pour lesquels le Conseil d'Etat est manifestement incompétent, ainsi qu'aux requêtes sans objet, manifestement irrecevables, manifestement non fondées ou manifestement fondées ou encore dans l'hypothèse où il y a matière à désistement. S'agissant d'évidences, la procédure sera orale. L'auditeur se limitera à indiquer très succinctement la solution qu'il préconise et la raison de celle-ci, à l'attention du greffe qui la reproduira dans l'avis de fixation et, à l'audience, il interviendra en premier afin d'expliciter son point de vue. Il sera ensuite procédé comme à l'ordinaire.

    La deuxième procédure abrégée (article 26) concerne les requêtes qui, en annulation, ne requièrent que des débats succincts. Il s'agit d'affaires dont la solution, sans être immédiatement évidente, peut toutefois être aisément découverte grâce à un bref débat.

    La procédure ordinaire est réservée aux affaires présentant une difficulté nécessitant un approfondissement des débats et de l'instruction.

    Un tel agencement de procédures est réalisable au contentieux des étrangers où il est possible de distinguer les affaires simples des affaires complexes.

    Une précision s'impose concernant la notion de débats succincts et la combinaison des procédures en référé et au fond.

    La notion d'affaires ne requérant que des débats succincts en référé a un contenu spécifique, distinct en principe de celui qu'elle a au contentieux de l'annulation. En substance, les affaires qui seront prises en débats succincts au stade du référé, sont celles qui, pour des motifs propres au référé, peuvent être aisément jugées, sans, pour autant, pouvoir l'être au fond (sinon il y aurait lieu de recourir aux procédures abrégées en annulation). Il s'agit, par exemple, de demandes de suspension irrecevables sans pour autant que la requête en annulation le soit : demandes de suspension ne comportant pas d'exposé des faits justifiant le préjudice grave; demandes de suspension contre des décisions prises par une juridiction administrative, etc... Il peut aussi s'agir d'affaires dans lesquelles la demande de suspension seule peut apparaître non fondée, entre autre lorsque le préjudice grave invoqué n'est plus actuel. Il peut enfin s'agir d'affaires dans lesquelles le préjudice grave est établi et où l'auditeur est convaincu du sérieux d'un moyen en raison d'une jurisprudence bien établie en référé, mais dans lesquelles il serait hasardeux d'abréger la procédure au fond, par exemple parce qu'un arrêt de principe (éventuellement de l'assemblée générale ou après une question préjudicielle) est attendu.

    Il faut, enfin, observer que le projet de règlement est conçu de manière à décanter les affaires et à n'amener à l'audience au fond que celles qui présentent toujours un intérêt et qui posent des questions de droit délicates à résoudre.

    Commentaire des articles

    Article 1er. Définitions

    L'article 1er du projet est partiellement repris de l'article 1er de l'arrêté royal du 22 juillet 1981 déterminant la procédure devant la section d'administration du Conseil d'Etat en cas de recours contre des décisions prévues par la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers, lequel arrêté est toujours en vigueur, à l'exception de son article 3 et du chapitre II, devenus sans objet à la suite de la suppression du sursis à exécution au 1er juin 1993 (article 33 de la loi du 6 mai 1993, ayant remplacé l'article 70 de la loi du 15 décembre 1980).

    Article 3. Introduction de la demande de suspension

  14. Il ressort de la combinaison de l'article 17, § 3, alinéa 1er, des lois coordonnées et de l'article 20 de l'arrêté en projet que le délai pour introduire une demande de suspension est au plus de trente jours. Ce délai est nouveau : il s'agit de rendre à la suspension le caractère urgent qui lui est inhérent et d'éviter qu'elle ne soit encore utilisée à des fins dilatoires, comme le Conseil d'Etat l'a observé dans ses rapports annuels 1994-1995 (p. 250) et 1995-1996 (p. 156).

  15. Comme l'indication de la partie adverse, la mention du numéro de dossier n'est une condition de recevabilité que si elle empêche de cerner l'objet du recours. Elle sert avant tout à faciliter l'identification du requérant par l'administration et à hâter la transmission du dossier. En revanche, le domicile élu est une condition de recevabilité (voyez l'article 34).

  16. L'article...

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