1er SEPTEMBRE 2004. - Arrêté royal portant exécution du règlement (CE) n° 2157/2001 du Conseil du 8 octobre 2001 relatif au statut de la Société européenne

RAPPORT AU ROI

Sire,

Le projet d'arrêté que nous avons l'honneur de soumettre à la signature de Votre Majesté a pour objet d'intégrer dans notre législation nationale un type nouveau de société commerciale : la société européenne, telle que prévue par le règlement européen (CE) n° 2157/2001 adopté le 8 octobre 2001 par le Conseil des Ministres de l'Union européenne et relatif au statut de la Société européenne (SE).

Ce règlement est le fruit d'un long processus initié il y a plus de 50 ans.

Son ambition est précisée dans le premier considérant libellé comme suit : « L'achèvement du marché intérieur et l'amélioration de la situation économique et sociale qu'il entraîne dans l'ensemble de la Communauté impliquent, outre l'élimination des entraves aux échanges, une adaptation des structures de production à la dimension de la Communauté. A cette fin, il est indispensable que les entreprises dont l'activité n'est pas limitée à la satisfaction de besoins purement locaux puissent concevoir et entreprendre la réorganisation de leurs activités au niveau communautaire. ».

Il s'inscrit dans le processus communautaire devant conduire à la réalisation d'un marché unique au sein de l'Union européenne. A l'heure actuelle, malgré la mise en place du marché unique et le fait que les entreprises opèrent de plus en plus sur une base paneuropéenne, ces entreprises sont contraintes d'exercer leurs activités communautaires dans un cadre juridique qui reste principalement fondé sur des législations nationales disparates et ne correspond donc plus au cadre économique dans lequel elles devraient se développer. L'unité économique et juridique des entreprises paneuropéennes doit, dans la mesure du possible, coïncider.

La société européenne constituera un instrument unique d'adéquation structurelle des alliances d'entreprises européennes. Elle se présente comme le moyen le plus simple et le moins coûteux pour organiser la coopération et l'intégration de sociétés d'Etats membres différents.

Le statut de société européenne devrait également faciliter les restructurations d'entreprises en permettant les fusions transfrontalières de sociétés et les opérations de transfert de siège au sein de l'espace communautaire. Ces deux opérations, prévues par le Traité de Rome, ne disposaient pas d'un encadrement juridique clair, protecteur de tous les intérêts en présence.

Les avantages que revêt cette réglementation européenne pour les différents milieux intéressés ne sont pas uniquement d'ordre juridique ou psychologique. Ils sont aussi financiers : le fait de substituer une structure juridique unique à plusieurs cadres juridiques nationaux devrait éviter des frais inutiles.

Bien que le sixième considérant du règlement rappelle que les dispositions du règlement s'insèrent directement dans l'ordre juridique interne des Etats membres, il y a lieu de constater que le texte ne règle pas l'ensemble des questions liées à la SE et renvoie largement à la législation des Etats membres pour régler de nombreux points. La SE constitue ainsi une société hybride, fruit d'un croisement entre droit communautaire et droit interne de l'Etat du siège de la SE.

Afin de traduire symboliquement les accents unificateurs du texte relatif à la société anonyme européenne, le législateur européen a jugé utile et heureux de pouvoir disposer, par delà la barrière des différentes langues officielles usitées au sein des Etats membres, d'une dénomination commune et d'un sigle commun identifiant ce véhicule juridique. Le choix de la langue latine a ainsi été retenu et la société anonyme européenne s'intitule officiellement « Societas Europaea ». Ceci explique pourquoi le sigle officiel de la société anonyme européenne est « SE », dans toutes les langues de l'Union européenne.

Ce règlement entrant en vigueur le 8 octobre 2004, il s'impose que le droit belge prévoie les dispositions légales permettant la constitution de SE ayant leur siège statutaire en Belgique.

Le projet d'arrêté qui Vous est soumis a été élaboré par un groupe de travail mis en place à l'initiative du Ministre de la Justice. Ce groupe, dénommé « Commission Anne Benoît-Moury », à la mémoire de celle qui en fut l'un des principaux initiateurs, était composé de représentants des différents milieux académiques et de praticiens du droit des sociétés.

En étaient membres sous la présidence de Pierre NICAISE :

Herman BRAECKMANS, Olivier CAPRASSE, Michel COIPEL, Christine DARVILLE, Anne-Catherine EYBEN, Audrey FAYT, Koen GEENS, Hilde JACOBS, Jean-Louis JEGHERS, Guy KEUTGEN, Philippe LAMBRECHT, Patrick LECLERCQ, Paul MASELIS, Hilde PELGROMS, Chantal PLUGERS, Gilberte RAUCQ, Jan VAN BAEL, Pierre VAN OMMESLAGHE, Filip WUYTS, Eddy WYMEERSCH.

Les principales caractéristiques de ce texte sont les suivantes.

  1. Puisque le règlement fait un large renvoi à la législation interne sur les sociétés anonymes (SA), il a été jugé indispensable d'insérer les dispositions nationales spécifiques à la SE dans le Code des sociétés. Dès lors, dans la mesure où il n'y est pas dérogé par le règlement ou le Code des sociétés, toutes les dispositions communes de celui-ci ainsi que celles relatives à la SA sont applicables à la SE.

  2. L'insertion dans le Code des sociétés a suivi, dans toute la mesure du possible, la structuration prévue par celui-ci.

  3. Le droit belge ne connaissant pas le système dualiste pour l'administration de la SA, une partie importante du travail a consisté à prévoir les règles adéquates pour les SE qui feraient usage de cette option prévue par le règlement. A cet égard, le texte s'inspire en s'actualisant du projet 387 du 5 décembre 1979 modifiant les lois coordonnées sur les sociétés commerciales.

  4. En outre, le règlement prévoit à de nombreuses reprises que les Etats membres peuvent choisir entre plusieurs solutions qu'il établit. Dans l'exercice de ces choix, le texte vise d'une part à favoriser la perception du système juridique belge comme compétitif et attractif pour les investisseurs étrangers et, d'autre part, à accorder à la société européenne une plus grande souplesse, notamment en laissant aux statuts la liberté de régler certains choix. Le cadre légal se veut donc simple et avantageux, mais également précis.

  5. A de nombreuses reprises le règlement laisse le choix aux Etats membres pour désigner soit des experts indépendants soit des autorités compétentes dans le cadre de missions spécifiques. Ces choix ont été opérés dans le respect des traditions de notre système juridique et dans un souci de cohérence avec les dispositions des troisième et sixième directives européennes relatives aux fusions et scissions de sociétés.

    La technique légistique utilisée est imposée par le règlement et la hiérarchie des normes. Il s'ensuit que ce texte doit être lu en parallèle avec le règlement et le Code des sociétés.

    Dans son avis du 16 juin 2004, le Conseil d'Etat s'est élevé contre la circonstance que de nombreux articles du présent projet reproduisent des dispositions du règlement (CE) N° 2157/2001 relatif au statut de la société européenne, au motif que toute incorporation ou intégration dans le droit national de chaque Etat membre, sous quelque forme que ce soit, d'une disposition d'un règlement européen, est prohibée, comme susceptible d'entraver l'application immédiate et uniforme des règlements, ainsi que d'occulter leur nature communautaire.

    Le Gouvernement, tout en souscrivant aux considérations du Conseil d'Etat sur ce point, considère que le principe rappelé au paragraphe qui précède doit être appliqué raisonnablement et au regard des objectifs cités. La reproduction d'une disposition d'un règlement dans la loi nationale peut être justifiée si ladite reproduction a pour objet de clarifier ou de faciliter l'application de celle-ci, spécialement si, comme en l'espèce, le règlement est incomplet sur des nombreux points, ne se suffit pas à lui-même et doit s'articuler avec des dispositions nationales de complément et le régime de droit commun des sociétés anonymes belges.

    Au vu de la remarque précitée, les dispositions suivantes ont été biffées du projet soumis au Haut-Collège : l'article 875, alinéa 1er et alinéa 2, 1ère phrase, les deux premiers alinéas de l'article 876, les articles 877, 891, 897, 899, 900, 915, alinéa 1er, de même que les articles 919, 928, 931 et le premier alinéa de l'article 937. La numérotation a en conséquence été modifiée.

    En revanche, les articles 880, 892, 903, alinéa 1er, 905, § 1er, première phrase, 908, alinéa 1er et 937, alinéa 2, ont été maintenus au sein du projet.

    S'agissant de l'article 880 et de ceux qui lui sont apparentés (opérations de constitution de la SE par voie de fusion, de constitution par voie de holding, de constitution par voie de transformation, de transfert du siège de la SE), il est certes vrai que le règlement, notamment en son article 20, 1, dispose que « les organes de direction ou d'administration des sociétés qui fusionnent établissent un projet de fusion ». Le gouvernement estime toutefois nécessaire de préciser au sein d'une disposition légale que le projet de fusion - de même que les autres projets qui sont envisagés par le règlement - soit établi par le conseil d'administration. A défaut, et compte tenu de la formulation de l'article 524bis du Code des sociétés, un tel acte pourrait être délégué au comité de direction. Compte tenu de l'importance de ces projets pour les droits des actionnaires de la société anonyme, le gouvernement considère que l'établissement de ceux-ci doit rester une compétence exclusive du conseil d'administration.

    Les articles 903, alinéa 1er et 905, § 1er, alinéa 1er, sont pareillement maintenus car il s'indique d'identifier en droit positif belge les organes de la SE pour le cas où celle-ci a fait élection soit du système moniste, soit du système dualiste.

    En ce qui concerne l'article 908, en projet, du Code des sociétés, Le gouvernement est d'avis de maintenir cette disposition au sein du projet pour des motifs de...

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