Effet interruptif des anciens commandements : l'interprétation rétroactive est contraire à la Convention des Droits de l'Homme

AuteurPascale Hautfenne
Fonction Licenciée en droit (1994) avec grande distinction de l'Université Catholique de Louvain, elle est également licenciée en droit fiscal de l'Université Libre de Bruxelles

Notre équipe a déjà eu l'occasion d'évoquer la controverse relative à l'effet interruptif des anciens commandements signifiés par l'administration fiscale et à la disposition interprétative édictée par le législateur en 2004 afin d'éviter la prescription d'un nombre important de dettes d'impôts contestées suite à une jurisprudence de la Cour de cassation favorable au contribuable.

Une nouvelle jurisprudence intéressante tend à dénier aux anciens commandements interruptifs tout effet d'interruption de la prescription sur la base de l'article 6 de la Convention européenne des Droits de l'Homme, qui édicte le principe du droit à un procès équitable.

L'évolution est importante, notamment en ce que cette jurisprudence applique l'article 6 à des litiges fiscaux, alors que l'administration a toujours soutenu que cet article ne s'appliquait pas en matière fiscale.

Le tribunal de première instance de Liège a récemment confirmé qu'un litige portant sur le recouvrement de l'impôt relève d'une contestation civile, lorsque le moyen principal est tiré des règles relatives à la prescription. L'article 6 de la CEDH est donc applicable.

Ce principe posé, le juge souligne que l'exigence de procès équitable implique que soit respecté le principe de l'égalité des armes. Or, en modifiant en cours de litige les données légales du procès, l'article 49 de la loi de juillet 2004, entendu comme un texte rétroactif, prive le contribuable de la possibilité de faire valoir la jurisprudence favorable de la Cour de cassation en matière de prescription.

Le tribunal de Liège précise qu'il est ainsi empêché de contrôler la nature et les effets des commandements litigieux puisque l'acte illégal pour la Cour de cassation est relevé de cette illégalité par ratification législative. Le tribunal s'estime donc privé de statuer sur une question de droit dont il est saisi. Jugeant cela inacceptable, le tribunal de Liège estime que «l'article 49 s'immisce, de la sorte, dans une procédure judiciaire en cours, en dicte la solution et influence de manière définitive et rétroactive les termes du débat soumis au tribunal et l'issue de la procédure» (Civ. Liège, 7 juin 2007, RG n°00/2683/A).

Le tribunal donne donc raison au contribuable et déclare les cotisations litigieuses prescrites.

Ce jugement doit...

Pour continuer la lecture

SOLLICITEZ VOTRE ESSAI

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT