Jugement/arrêt, Cour constitutionnelle (Cour d'arbitrage), 2019-11-28

JurisdictionBélgica
Judgment Date28 novembre 2019
ECLIECLI:BE:GHCC:2019:ARR.192
Link to Original Sourcehttps://juportal.be/content/ECLI:BE:GHCC:2019:ARR.192
Docket Number192/2019
CourtCour constitutionnelle (Cour d'arbitrage)

Numéro du rôle : 7039
Arrêt n° 192/2019
du 28 novembre 2019
En cause : la question préjudicielle relative à l’article 1022 du Code judiciaire, posée par le Juge de paix du canton de Kapellen.
La Cour constitutionnelle,
composée des présidents A. Alen et F. Daoût, des juges L. Lavrysen, J.-P. Moerman, T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul, T. Giet, R. Leysen et M. Pâques, et, conformément à l’article 60bis de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, du juge émérite E. Derycke, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président A. Alen,
après en avoir délibéré, rend l’arrêt suivant :
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I. Objet de la question préjudicielle et procédure
Par jugement du 6 novembre 2018, dont l’expédition est parvenue au greffe de la Cour le 13 novembre 2018, le Juge de paix du canton de Kapellen a posé la question préjudicielle suivante :
« L’article 1022 du Code judiciaire viole-t-il l’article 16 de la Constitution, juncto l’article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme, de même que les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce que, dans la procédure particulière fondée sur la loi du 26 juillet 1962 devant le juge de paix, les frais d’avocat (défense par un conseil juridique) - contrairement aux frais d’un conseiller technique - sont indemnisés de manière forfaitaire/sur la base d’un plafond par l’octroi d’une indemnité de procédure, alors que l’article 16 de la Constitution s’oppose à une indemnisation forfaitaire en cas d’expropriation et que les expropriés ne reçoivent donc pas d’indemnité d’expropriation juste/correcte (lire : juste) au sens de l’article 16 de la Constitution, à supposer que les frais d’avocat soient en lien direct et causal avec la décision d’expropriation et que la nécessité d’une aide juridique ait déjà été reconnue par le passé ? ».
Des mémoires et mémoires en réponse ont été introduits par :
- la province d’Anvers, représentée par sa députation, assistée et représentée par Me K. De Puydt, avocat au barreau de Bruxelles;
- Guy Van De Wiel et Ankie Mestdagh, assistés et représentés par Me J. Toury, avocat au barreau de Bruxelles;
- le Conseil des ministres, assisté et représenté par Me A. Wirtgen et Me E. Loncke, avocats au barreau de Bruxelles.
Par ordonnance du 25 septembre 2019, la Cour, après avoir entendu les juges-rapporteurs T. Merckx-Van Goey et P. Nihoul, a décidé que l’affaire était en état, qu’aucune audience ne serait tenue, à moins qu’une partie n’ait demandé, dans le délai de sept jours suivant la réception de la notification de cette ordonnance, à être entendue, et qu’en l’absence d’une telle demande, les débats seraient clos le 9 octobre 2019 et l’affaire mise en délibéré.
Aucune demande d’audience n’ayant été introduite, l’affaire a été mise en délibéré le 9 octobre 2019.
Les dispositions de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle relatives à la procédure et à l’emploi des langues ont été appliquées.
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II. Les faits et la procédure antérieure
Par jugement du 10 octobre 2017, le Juge de paix de Kapellen a accueilli la demande d’expropriation de deux parcelles de terrain appartenant à Guy Van De Wiel et Ankie Mestdagh introduite par la province d’Anvers sur la base de l’article 3 de la loi du 26 juillet 1962 « relative à la procédure d’extrême urgence en matière d’expropriation pour cause d’utilité publique ». Il a également fixé une indemnité d’expropriation provisionnelle et désigné un expert qu’il a chargé de déterminer la valeur des biens immeubles expropriés.
Après le dépôt, par l’expert, du procès-verbal d’état descriptif des lieux et du rapport d’évaluation concernant l’expropriation précitée, le juge de paix doit se prononcer sur la fixation définitive de l’indemnité d’expropriation provisoire.
Guy Van De Wiel et Ankie Mestdagh, parties défenderesses devant le juge a quo, demande une indemnisation complète des frais d’avocat qu’ils ont dû supporter dans le cadre de la procédure devant le juge de paix, et ce, sur la base de l’article 16 de la Constitution. Ils contestent le point de vue développé par la Cour de cassation dans son arrêt du 14 avril 2016, selon lequel les frais d’avocat ne peuvent faire partie de l’indemnité d’expropriation, puisque le législateur a prévu de les indemniser forfaitairement au moyen de l’indemnité de procédure. Ils demandent au juge de poser, le cas échéant, à la Cour une question préjudicielle à ce sujet. C’est dans cette circonstance que le juge a quo décide de poser la question préjudicielle reproduite plus haut.
III. En droit
-A-
A.1.1. Guy Van De Wiel et Ankie Mestdagh, parties défenderesses devant le juge a quo, font valoir que les frais qu’un exproprié doit payer à son avocat découlent directement de l’expropriation proprement dite. Du fait de la décision de l’autorité publique d’exproprier un bien, le propriétaire de ce bien devient, par la force des choses, partie à une procédure judiciaire. En raison du caractère juridique et technique de la procédure d’expropriation, il est nécessaire qu’il se fasse assister par un conseil juridique et par un conseil technique en vue de faire valoir ses droits. Eu égard au principe de l’indemnisation intégrale, tel qu’il est inscrit à l’article 16 de la Constitution, les frais d’avocat réels doivent être indemnisés par l’expropriant et une indemnité forfaitaire n’est pas admise.
En tout cas, l’indemnité que l’exproprié reçoit en dédommagement de...

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