Décision judiciaire de Conseil d'État, 31 août 2012

Date de Résolution31 août 2012
JuridictionVI
Nature Arrêt

CONSEIL D'ETAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF.

A R R E T

nº 220.493 du 31 août 2012

G./A.206.043/VI-19.672

En cause : la société anonyme GABRIEL DANNEELS,

ayant élu domicile chez

Mes Jean-Marie RIKKERS, Jean-Luc TEHEUX et Nicolas BOTTIN, avocats, rue Denis Lecocq, nº 35, 4031 Liège,

contre :

le Centre public d'action sociale de la ville de Namur,

ayant élu domicile chez

Me Gilles VANDERMEEREN, avocat, rue Lelièvre, nº 9, 5000 Namur.

Partie intervenante :

la société anonyme ETABLISSEMENTS KARL BOUVE,

ayant élu domicile chez

Me Philippe HOREMANS, avocat, rue de la Souvenance, nº 17, 7522 Blandain.

------------------------------------------------------------------------------------------------------ LE PRESIDENT F.F. DE LA VIe CHAMBRE DES VACATIONS DU CONSEIL D'ETAT, SIEGEANT EN REFERE,

I. OBJET DE LA REQUETE

Par une requête introduite le 17 août 2012, la société anonyme GABRIEL DANNEELS sollicite, selon la procédure d'extrême urgence, la suspension de l'exécution de la "décision prise le 28 juin 2012 par le CENTRE PUBLIC D’ACTION SOCIALE DE LA VILLE DE NAMUR, ayant pour objet d’adjuger à la S.A. ETS BOUVE KARL (rue de Douvrain, 3 à 7011 GHLIN) le lot n° 3 (sanitaires) du marché de travaux de reconditionnement de la maison de repos et du centre d’accueil du jour au CMS «LES CHARDONNERETS» pour le prix de 946.911,26 euros" et de ne pas retenir son offre.

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II. PROCEDURE DEVANT LE CONSEIL D'ETAT

Par une requête introduite le 24 août 2012, la société anonyme ETABLISSEMENTS KARL BOUVE demande à être reçue en qualité de partie intervenante dans la procédure en référé d'extrême urgence.

Une ordonnance du 20 août 2012, notifiée aux parties, convoque celles-ci à comparaître le 30 août 2012 à 10 heures 30.

La partie adverse a fait parvenir une note d'observations et le dossier administratif.

M. le Conseiller d'Etat, Président f.f., David DE ROY, a exposé son rapport.

Mes Jean-Luc TEHEUX et Nicolas BOTTIN, avocats, comparaissant pour la partie requérante, Me Gilles VANDERMEEREN, avocat, comparaissant pour la partie adverse, et Me Nicolas VAN BALLAER, loco Me Philippe HOREMANS, avocat, comparaissant pour la partie intervenante, ont présenté leurs observations.

M. le Premier auditeur au Conseil d'Etat, Eric THIBAUT, a été entendu en son avis conforme.

Il est fait application du titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées le 12 janvier 1973.

III. EXPOSE DES FAITS

Tels que les expose la requête, les faits utiles à l'examen de la demande peuvent être exposés comme suit :

" La requérante participe à une procédure d’adjudication publique du lot n° 3

(sanitaires) du marché de travaux de reconditionnement de la maison de repos et du centre d’accueil du jour au CMS «LES CHARDONNERETS».

Les quatre offres suivantes ont été reçues par le pouvoir adjudicateur :

- S.A. ETS KARL BOUVE pour un montant de 977.650,00 € - S.A. SOTRELCO pour un montant de 968.256,23 € - S.A. ETS GOESSENS – PIRENNE pour un montant de 1.141.311,88 € - S.A. GABRIEL DANNEELS pour un montant de 813.368,03 €.

L’offre de la requérante constituait donc l’offre la moins-disante.

Le rapport de soumission du lot 3, annexé à la décision attaquée, fait état des éléments suivants […] :

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- La soumission de la S.A. ETS GOESSENS – PIRENNE a été jugée irrégulière au motif qu’elle ne contenait pas le plan particulier de santé et de sécurité requis par le Cahier Général des Charges.

- Les offres de la S.A. ETS KARL BOUVE, de la S.A. SOTRELCO et de la S.A. GABRIEL DANNEELS ont été jugées régulières.

- Le montant de la soumission de la requérante a été modifié et fixé par le pouvoir adjudicateur à la somme de 988.088,03 € aux motifs suivants […] :

Le prix unitaire de l’article 02.02.01.01 "cabine de toilette préfabriquée" a été modifié pour correspondre à la cabine type "Tourmaline" telle que prévue aux plans et CSCH du dossier de consultation (le prix unitaire du récapitulatif de l’entrepreneur a donc été corrigé pour permettre la comparaison des soumissions sur une base commune)

.

L’offre de la requérante, en ce qui concerne le poste 02.02.01.01 «cabine de toilette préfabriquée», contenait un produit différent des cabines de type «tourmaline» mais dont les caractéristiques étaient tout à fait identiques, ce qui est démontré par le fait que ladite offre a été jugée régulière par le pouvoir adjudicateur.

- Après la modification précitée, le classement des soumissions s’établissait comme suit :

- S.A. ETS KARL BOUVE : 946.911,26 € - S.A. SOTRELCO : 974.789,56 € - S.A. GABRIEL DANNEELS : 988.088,03 €

En conséquence, le marché a été adjugé à la S.A. ETS BOUVE KARL par décision du 28 juin 2012 […]."

IV. REQUETE EN INTERVENTION

IV. 1. Thèse de la requérante en suspension

A l'audience du 30 août 2012, la requérante en suspension a contesté la recevabilité de la requête en intervention, au motif que la décision d'agir aurait été prise par l'administrateur-délégué de la société anonyme ETABLISSEMENTS KARL BOUVE, et non par le conseil d'administration de celle-ci. Au soutien de cette exception, elle se prévaut d'un arrêt n° 212.298, rendu par le Conseil d'Etat le 29 mars 2011 et dont l'enseignement lui paraît transposable en l'espèce.

IV. 2. Décision du Conseil d'Etat

Par une requête introduite le 24 août 2012, la société anonyme ETABLISSEMENTS KARL BOUVE demande à être reçue en qualité de partie intervenante.

Sans qu'il soit nécessaire de se prononcer sur les pouvoirs respectifs du conseil d'administration et de l'administrateur délégué de cette société, à l'égard de

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l'adoption d'une décision d'ester en justice, il y a lieu de constater qu'à l'appui de la requête en intervention, est produit un document duquel il ressort que le conseil d'administration, réuni le mercredi 22 août 2012, a décidé d'intervenir dans le cadre de la présente procédure, de désigner Maître Philippe HOREMANS pour assumer la défense de ses intérêts et de faire élection de domicile au sein du cabinet de son conseil. Ce document est signé par l'administrateur délégué Karl BOUVE, conformément au prescrit de l'article 17, alinéa 4, des statuts de la requérante en intervention, lequel est libellé comme suit :

" Les copies ou extraits [des procès-verbaux des délibérations du conseil d'administration] sont signés par deux administrateurs, par le président du conseil d'administration ou par un administrateur délégué".

Sur la base de ces éléments, et au terme d'un examen effectué en extrême urgence, l'exception d'irrecevabilité soulevée par la requérante en suspension doit être rejetée.

Par ailleurs, en tant qu'attributaire du marché litigieux, ladite société a intérêt à intervenir, de sorte que sa requête en intervention doit être accueillie.

V. RECEVABILITE DE LA DEMANDE

V. 1. Thèses de l'intervenante

Dans sa requête en intervention, l'intervenante oppose à la demande une exception d'irrecevabilité, déduite du défaut d'intérêt légitime de la requérante. Cette exception est formulée comme suit :

" C’est à tort que la partie adverse a considéré comme régulière l’offre de la requérante.

A ce stade, la partie intervenante a relevé 3 causes (au moins) d’irrégularité de l’offre DANNEELS à savoir : • Non-respect des impositions techniques du Cahier spécial des charges. C’est indirectement l’objet du recours (infra, page 5, point b).

• Le montant de l’offre DANNEELS est présumé anormalement bas jusqu’à preuve du contraire. En effet, la partie adverse, si elle s’était contentée du prix DANNEELS proclamé à l’ouverture des soumissions (813.368,03 €) aurait dû, avant de déclarer l’offre régulière, vérifier la normalité des prix (article 110 § 4 A-R 8 janvier 1996), dès lors que cette offre s’écartait de 22,89 % de la moyenne des autres soumissions. Jusqu’à preuve du contraire, et pour ce motif, l’offre de la requérante est et reste présumée irrégulière.

• Un troisième motif d’irrégularité de l’offre DANNEELS réside dans le fait que, sauf preuve contraire, ce soumissionnaire n’a pas participé à la visite préalable imposée par le Cahier spécial des charges. La sanction est l’exclusion de la procédure d’attribution (Cahier spécial des charges, page 3, point 8).

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En raison de l’irrégularité de son offre, la requérante n’a pas un intérêt légitime à solliciter la suspension d’extrême urgence de la décision intervenue le 28 juin 2012.".

V. 2. Avis du Premier auditeur

Dans son avis rendu à l'audience, le Premier auditeur considère que la demande est irrecevable en son second objet, c'est-à-dire en tant qu'elle tend à la suspension de l’exécution de la décision implicite de la partie adverse de ne pas attribuer la marché litigieux à la partie requérante.

V. 3. Décision du Conseil d'Etat

L'exception soulevée par l'intervenante appelle les constatations suivantes :

- la partie adverse, qui a retenu pour prix unitaire de l'article 02.02.01.01, le prix proposé par la requérante pour une cabine de type "Tourmaline", et non l'un des prix unitaires offerts pour les deux autres modèles proposés, n'a nullement estimé que l'offre de la requérante n'était pas régulière pour non-conformité aux impositions techniques. L'intervenante n'expose toutefois pas pourquoi c'est à tort que la partie adverse n'a pas considéré l'offre de la requérante comme étant irrégulière à cet égard; - l'affirmation selon laquelle le montant de la soumission de la requérante est anormalement...

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