Décision judiciaire de Conseil d'État, 16 juillet 2010

Date de Résolution16 juillet 2010
JuridictionVI
Nature Arrêt

CONSEIL D'ÉTAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF.

A R R ÊT

no 206.751 du 16 juillet 2010 A.197.044/VIII-7383

En cause : WAUTERS Benoît, ayant élu domicile chez Me Marc UYTTENDAELE, avocat, rue de la Source 68 1060 Bruxelles,

contre :

l'État belge, représenté par le Ministre de l'Intérieur.

------------------------------------------------------------------------------------------------------LE PRÉSIDENT F.F. DE LA VI e CHAMBRE DES VACATIONS, SIÉGEANT EN RÉFÉRÉ

Vu la demande introduite le 13 juillet 2010 par Benoît WAUTERS, tendant à la suspension, selon la procédure d'extrême urgence, de l'exécution de la décision "du 9 juillet [lire : du 8 juillet] 2010, par laquelle il a été décidé de le suspendre provisoirement de ses fonctions avec une retenue de traitement de 5%";

Vu l'ordonnance du 13 juillet 2010 fixant l'affaire à l'audience publique du 16 juillet 2010;

Vu le dossier administratif et la note d'audience;

Entendu, en son rapport, M. HOUYET, conseiller d'État;

Entendu, en leurs observations, Me Marc UYTTENDAELE, avocat, comparaissant pour la partie requérante, et Mme Bénédicte FLAMEND, conseiller juriste, comparaissant pour la partie adverse;

VIvac - 7383 - 1/13

Entendu, en son avis conforme, M. HERBIGNAT, premier auditeur chef de section au Conseil d'État;

Vu le titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'État, coordonnées le 12 janvier 1973;

Considérant que les faits utiles à l'examen de la cause sont les suivants :

  1. Le requérant est inspecteur principal de police à la police des chemins de fer.

  2. En 2006-2007, un scandale a éclaté au sein de cette police, certains agents étant soupçonnés d'avoir eu des comportements très graves. À la suite d'une enquête de l'Inspection générale, plusieurs agents ont soit l'objet de mesures de suspension provisoire soit quitté, momentanément ou définitivement, la police fédérale. À cette occasion, le requérant a été entendu mais n'a pas été inquiété. Les autorités judiciaires ont mis le dossier à l'instruction.

  3. La presse a diffusé, dès le mois de février 2010, l'information selon laquelle le parquet avait décidé de demander le renvoi de 14 agents de la police fédérale des transports devant le tribunal correctionnel.

  4. Le 4 mars 2010, le Procureur du Roi de Bruxelles communique, par courrier, au Service de contrôle interne de la Direction générale de l'Appui et de la Gestion de la police fédérale une copie de son réquisitoire écrit visant l'ensemble des policiers inculpés ainsi que les préventions retenues à leur charge dans le cadre du dossier judiciaire BR.43.IN.101194/06. Cette information est fournie en réponse à une demande écrite du 15 février 2010 de la Direction générale de l'Appui et de la Gestion de la police fédérale. Le nom du requérant figure dans le réquisitoire précité pour deux inculpations. Le réquisitoire se conclut par la proposition de son renvoi devant le tribunal correctionnel, non sans avoir précisé qu'il fallait "admettre les circonstances atténuantes en ce qui concerne les inculpations A1 à 15, B, C, D, E, F, G et H" en raison de l'absence d'antécédents judiciaires.

  5. À la suite de la réception du réquisitoire précité, le Directeur général de la police administrative, O. LIBOIS, décide de formuler une proposition de suspension provisoire par mesure d'ordre à l'encontre du requérant. Cette proposition lui est notifiée en annexe à un courrier daté du 15 mars 2010. La date de l'audition est fixée le 24 mars 2010.

    VIvac - 7383 - 2/13

    6. Le 19 mars 2010, le requérant saisit le Conseil d'État d'un recours en suspension, sous le bénéfice de l'extrême urgence, dirigé contre une décision du Directeur général de la police administrative "de ne plus le mettre en service à partir du 16 mars 2010".

    Dans son arrêt n/ 202.380 du 25 mars 2010, le Conseil d'État a jugé ce qui suit : " Considérant qu'une certaine ambiguïté planait sur la nature exacte de cette mesure; que cette ambiguïté a été levée par la déclaration écrite faite par le commissaire divisionnaire WAUTELET, chef de service de la police des chemins de fer; que celui-ci affirme qu'il a placé la partie requérante en dispense de service afin qu'elle puisse préparer sa défense dans le cadre de la proposition de suspension dont elle fait l'objet; qu'il ajoute avoir personnellement informé la partie requérante le 16 mars 2010 du fait que 07h36 lui seraient comptabilisées par jour "jusqu'à la décision" [et qu'elle pourrait préparer sa défense à domicile]".

    Le Conseil d'État a ainsi considéré qu'une simple mesure de dispense de service n'était pas susceptible de recours dès lors qu'elle ne faisait pas grief au requérant.

  6. Le requérant est entendu, le 24 mars 2010, par l'autorité dans le cadre de la procédure en suspension provisoire au cours de laquelle il a déposé un mémoire en défense.

  7. À la suite de cette audition, la Ministre de l'Intérieur souhaite avoir une connaissance plus complète du dossier judiciaire et demande au Procureur du Roi de Bruxelles, par un courrier de date inconnue, l'autorisation de pouvoir consulter celui-ci. Ce courrier est réceptionné par le parquet le 31 mars 2010.

  8. Le 16 avril 2010, le Procureur du Roi donne son autorisation et la Ministre de l'Intérieur communique ensuite à celui-ci les noms des policiers qu'elle délègue à cet effet.

  9. Selon la partie adverse, le 27 mai 2010, le délégué de la Ministre lui fait un rapport verbal à propos de la consultation du dossier judiciaire qui comprendrait plus de 1700 pages.

  10. Le 9 juin 2010, la Ministre de l'Intérieur suspend le requérant pour une durée de quatre mois et accompagne cette mesure d'une retenue de traitement de 25%.

    VIvac - 7383 - 3/13

    Cette décision fait l'objet d'un recours en suspension selon la procédure d'extrême urgence et est suspendue par un arrêt n/ 205.417 du 18 juin 2010.

  11. Le 2 juillet 2010, une mise en dispense de service est accordée au requérant dans l'attente de l'adoption éventuelle d'une nouvelle suspension provisoire le concernant. Le requérant sollicite la suspension, selon la procédure d'extrême urgence, de cette décision qui est suspendue par un arrêt n/ 206.615 du 14 juillet 2010.

  12. Le 8 juillet 2010, la Ministre de l'Intérieur suspend le requérant pour une durée de quatre mois et accompagne cette mesure d'une retenue de traitement de 5%. Il s'agit de la décision attaquée qui est rédigée de la manière suivante: " 2 Exposé des faits :

    Début juin 2006 une information judiciaire a été ouverte par le Parquet de Bruxelles à charge de plusieurs fonctionnaires de police de la police des chemins de fer, section Bruxelles, dont I'INPP WAUTERS Benoît ne faisait pas partie. L'enquête a été confiée à l'inspection Générale de la Police Fédérale et de la Police Locale.

    Par son courrier en référence 1.3, le Procureur du Roi de Bruxelles porte à la connaissance du service du Contrôle Interne l'inculpation de plusieurs policiers, parmi lesquels figure cette fois l'INPP WAUTERS Benoît, ceci dans le cadre du dossier judiciaire n/ BR.43JNL.101194/06. Le Directeur-général de la police administrative a pris connaissance de ce courrier le 11-03-2010.

    l'INPP WAUTERS Benoît est notamment inculpé pour avoir,

    Dans l'arrondissement judiciaire de Bruxelles,

    - exécuté les...

Pour continuer la lecture

SOLLICITEZ VOTRE ESSAI
3 temas prácticos
  • Décision judiciaire de Conseil d'État, 24 août 2011
    • Belgique
    • August 24, 2011
    ...et correspondant à une époque d'activité de l'agent au sein de la police fédérale. Qu'enfin, l'enseignement de l'arrêt Wauters, n° 206.751 du 16 juillet 2010 – où des collègues auraient commis ensemble des faits délictueux semblables et où seuls certains d'entre eux avaient été suspendus – ......
  • Décision judiciaire de Conseil d'État, 27 décembre 2012
    • Belgique
    • December 27, 2012
    ...requérant pour une durée de quatre mois, en assortissant cette mesure d'une retenue de traitement de cinq pour cent. Par son arrêt n° 206.751 du 16 juillet 2010, le Conseil d’Etat, saisi en extrême urgence, a suspendu l’exécution de cette décision, en jugeant sérieux le moyen pris de ce qu'......
  • Décision judiciaire de Conseil d'État, 12 décembre 2011
    • Belgique
    • December 12, 2011
    ...collègues, également visés par le réquisitoire de renvoi du Procureur du Roi pour des préventions similaires; qu'il invoque l'arrêt n° 206.751 du 16 juillet 2010 et cite le nom de Y. DE BIASIO, qui ne ferait l'objet d'aucune suspension préventive malgré sa position hiérarchique élevée, et d......
3 sentencias
  • Décision judiciaire de Conseil d'État, 24 août 2011
    • Belgique
    • August 24, 2011
    ...et correspondant à une époque d'activité de l'agent au sein de la police fédérale. Qu'enfin, l'enseignement de l'arrêt Wauters, n° 206.751 du 16 juillet 2010 – où des collègues auraient commis ensemble des faits délictueux semblables et où seuls certains d'entre eux avaient été suspendus – ......
  • Décision judiciaire de Conseil d'État, 27 décembre 2012
    • Belgique
    • December 27, 2012
    ...requérant pour une durée de quatre mois, en assortissant cette mesure d'une retenue de traitement de cinq pour cent. Par son arrêt n° 206.751 du 16 juillet 2010, le Conseil d’Etat, saisi en extrême urgence, a suspendu l’exécution de cette décision, en jugeant sérieux le moyen pris de ce qu'......
  • Décision judiciaire de Conseil d'État, 12 décembre 2011
    • Belgique
    • December 12, 2011
    ...collègues, également visés par le réquisitoire de renvoi du Procureur du Roi pour des préventions similaires; qu'il invoque l'arrêt n° 206.751 du 16 juillet 2010 et cite le nom de Y. DE BIASIO, qui ne ferait l'objet d'aucune suspension préventive malgré sa position hiérarchique élevée, et d......

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT