Arrêt Nº276768 de Conseil du Contentieux des Etrangers, 31/08/2022

Judgment Date31 août 2022
Procedure TypePlein contentieux
Judgement Number276768
CourtXe CHAMBRE (Conseil du Contentieux des Etrangers)
CCE x - Page 1
276 768
du
31 août
2022
dans l’affaire x
En cause
:
x
:
au cabinet de Maître D
.
DAGYARAN
Rue de l'Aurore 44
1000 BRUXELLES
contre :
le Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides
LE PRÉSIDENT F.F. DE LA Xe CHAMBRE,
Vu la requête introduite le 15 septembre 2021 par x, qui déclare être de nationalité palestinienne, contre
la décision du Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides, prise le 26 août 2021.
Vu l’article 51/4 de la loi du 15 décembre 1980 sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et
l’éloignement des étrangers (ci-après dénommée la « loi du 15 décembre 1980 »).
Vu le dossier administratif.
Vu l’ordonnance du 31 mars 2022 convoquant les parties à l’audience du 26 avril 2022.
Entendu, en son rapport, G. de GUCHTENEERE, président de chambre f.f.
Entendu, en leurs observations, la partie requérante assistée par Me J.P. DOCQUIR loco Me D.
DAGYARAN, avocat, et M. M. LISMONDE, attaché, qui comparaît pour la partie défenderesse.
APRES EN AVOIR DELIBERE, REND L’ARRET SUIVANT :
1. L’acte attaqué
Le recours est dirigé contre une décision de « refus du statut de réfugié et refus du statut de protection
subsidiaire », prise par le Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides, qui est motivée comme
suit :
«A. Faits invoqués
Selon vos déclarations, vous êtes arabe d’origine palestinienne et de religion musulmane. Vous êtes
le 16 juillet 1996 dans la Bande de Gaza. Vous provenez d’une famille pro-Fatah. Votre père, votre frère
[B.] et vous-même êtes par ailleurs impliqué au sein du mouvement. Le 9 juillet 2019, vous introduisez
une demande de protection internationale auprès de l’Office des étrangers (ci-après OE). À l’appui de
votre demande, vous invoquez les faits suivants :
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Début janvier 2013, trois jeeps des forces de l’ordre du Hamas se présentent dans votre quartier, dans
la région de Gizan Abou Rashwan, à Khan Younes. Ils viennent chercher votre cousin paternel, un
policier de l’Autorité palestinienne. Ne trouvant pas votre cousin, les membres du Hamas commencent à
vous provoquer, vos frères, vos autres cousins paternels et vous-même. Une bagarre éclate. Les
policiers tirent des balles en l’air. Vos frères [Aa.] et [Ad..], vos cousins [T.] et [B.], et vous-même êtes
arrêtés. Vous êtes détenus durant trois semaines à un mois. Le 3 février 2013, vous comparaissez
devant le tribunal. Vous êtes condamnés, soit à passer un mois supplémentaire en prison, soit à payer
une amende de 300 shekels.
Fin 2015, vous adhérez au mouvement de jeunesse du Fatah, alors que vous commencez vos études
universitaires. En tant que membre de ce mouvement, vous participez à divers événements sociaux et
activités sociales. Vous aidez ainsi les nouveaux étudiants, vous rendez visite aux malades, et vous
organisez des manifestations dans le cadre de l’université.
Le 2 juin 2016, vous manifestez en compagnie d’autres membres de la jeunesse du Fatah contre le
schisme, la pauvreté et les pots de vin. Vous êtes arrêté en compagnie d’autres manifestants. Vous êtes
accusé de collaborer avec Ramallah, et d’inciter la population gazaouie à se rebeller contre le
gouvernement du Hamas. Vous êtes détenu durant une semaine, puis libéré.
Le 13 novembre 2016, vous êtes arrêté à la suite de la publication de plusieurs posts Facebook. Vous
êtes de nouveau accusé de collaborer avec Ramallah, et d’inciter les Gazaouïs à se rebeller. Vous êtes
détenu durant neuf jours avant d’être libéré.
Le 8 mai 2017, des policiers appartenant au Hamas perquisitionnent votre maison à la recherche de
votre frère [B.]. Une dispute éclate entre votre mère et un policier. Celui-ci frappe votre mère. Vous
intervenez. Vous vous battez avec le policier. Vous êtes alors arrêté et détenu durant un mois et demi
pour agression d’un agent de police.
Le 20 juillet 2017, vous rencontrez [R.I.A.A.], avec laquelle vous commencez à entretenir une relation
amoureuse.
Le 16 octobre 2017, la police perquisitionne votre quartier. Vous êtes arrêté en compagnie de deux de
vos frères et de plusieurs de vos cousins paternels. Vous êtes détenu une semaine.
Quatre mois après que vous avez commencé à parler à [R.], environ à la fin novembre 2017, le frère de
[R.] la surprend alors qu’elle est au téléphone avec vous. Il la frappe et confisque son téléphone
portable. Par la suite, le père de [R.] envoie des Mokhtars pour discuter avec votre père. Ils vous
mettent en garde et vous indiquent que vous ne pouvez plus parler à [R.] .
Trois semaines plus tard, aux environs de la mi-décembre 2017, [R.] vous appelle en pleurs. Elle vous
dit que vous lui manquez et qu’elle ne peut pas vivre sans vous. Vous lui promettez d’envoyer votre
famille pour demander sa main.
Une semaine plus tard, aux alentours de fin décembre 2017, votre mère et votre soeur se rendent chez
la famille de [R.] pour demander sa main en votre nom. Le père de [R.] refuse de les recevoir et déclare
qu’il ne souhaite pas que vous deveniez son gendre.
Par la suite, la famille de [R.] arrange son mariage avec l’un de ses cousins paternels. [R.] ne souhaite
cependant pas se marier avec lui. Le jour précédent son mariage, [R.] avale un certain nombre de
comprimés et tente ainsi de se suicider. Elle est hospitalisée. Elle passe deux semaines à l’hôpital
Nasser, dont trois à quatre jours aux soins intensifs.
Après l’hospitalisation de [R.], vous envoyez des Mokhtars chez le père de [R.] pour demander sa main
une nouvelle fois. Son père refuse de les recevoir. Vous recommencez alors à avoir des contacts
téléphoniques fréquents avec [R.] . Quelque temps après, son père la surprend au téléphone avec vous.
Il la frappe et l’enferme dans sa chambre. Il vous appelle et vous menace.
Deux semaines plus tard, alors que vous rentrez de l’université à moto, une personne sur le bord de la
route vous fait signe de vous arrêter, ce que vous faites. À ce moment, vous vous rendez compte que
les frères et cousins de [R.] vous ont tendu un piège. Ils vous agressent, vous poignardent, et vous
portent un coup à la tête. Vous perdez connaissance. Après un certain temps, vous êtes retrouvé par un
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chauffeur. Vous êtes emmené à l’hôpital car vous êtes blessé et avez perdu beaucoup de sang. Vous
restez à l’hôpital trois à quatre semaines.
À votre retour de l’hôpital, vous expliquez à votre famille que ce sont les frères et cousins de [R.] qui
vous ont agressé. Vos oncles paternels, vos cousins et votre père se rendent au magasin du père de
[R.] . Son père et son frère y sont présents. Une bagarre éclate entre vos deux familles. Le frère de [R.]
ainsi que deux de ses cousins paternels sont blessés et hospitalisés. Suite à cela, quinze membres de
votre famille dont vos cousins paternels, vos trois frères et vous-même et dix membres de la famille
de [R.] sont arrêtés. Vous êtes emprisonné durant trois semaines. Les Mokhtars interviennent ensuite
pour vous faire libérer.
Aux environs de fin janvier/début février 2018, des policiers perquisitionnent votre maison à la recherche
de votre père. Vous vous interposez et une bagarre éclate. Votre père, plusieurs de vos cousins
paternels, et vous-même êtes arrêtés. Vous êtes détenus durant deux semaines. Le 12 février 2018,
votre père et vous-même êtes emmenés devant le tribunal. Vous êtes condamnés, pour l’agression d’un
agent de police, à passer un mois en prison ou à payer une amende de 300 shekels. Vous payez donc
l’amende et êtes libérés.
En février/mars 2018, alors que vous prenez votre petit-déjeuner à la cafétéria de l’université vous
étudiez, des policiers vous interpellent et vous arrêtent, vous-même ainsi que plusieurs autres
personnes. Vous êtes détenu durant trois semaines. Pendant cette détention, vous êtes interrogé au
sujet de votre participation à la commémoration de la fondation du Fatah, et quant à vos postes
Facebook invitant les gens à participer à cette commémoration. Vous êtes ensuite libéré.
Vers fin mars 2018, les Mokhtars organisent une réunion à laquelle ils convient votre famille ainsi que
celle de [R.] , dans le but de parvenir à une réconciliation entre vos deux familles. Chacun y prend la
parole. À la fin de cette réunion, vos deux familles parviennent à un accord. Vous ne pouvez plus
contacter [R.], sous peine d’être emprisonné ou agressé. Il est également convenu que votre père
puisse être emprisonné si vous ne respectez pas vos engagements.
Deux semaines plus tard, [R.] vous appelle. Elle vous dit ne plus supporter tous les problèmes causés
par votre relation et vous demande de l’oublier.
En mai 2018, des membres du Hamas attaquent votre quartier. Les membres de votre famille envoient
des pierres et des cailloux sur les policiers. Ceux-ci ouvrent le feu sur vous. Vous êtes alors blessé à la
cuisse. Suite à ce dernier événement, vous décidez de quitter Gaza.
À la fin de l’année académique, en 2018, vous obtenez votre diplôme universitaire.
Le 19 juin 2018, vous quittez la Bande de Gaza via le point de passage de Rafah. Vous passez par
l’Egypte, puis par le Turquie, pour arriver en Grèce. De là, vous entreprenez de vous rendre en
Belgique, vous arrivez le 4 juillet 2019.
Après votre départ de Gaza, [R.] reprend contact avec vous. Vous vous appelez de temps à autres
pendant environ cinq minutes.
Vous continuez à critiquer le Hamas sur votre compte Facebook. Suite à cela, plusieurs convocations
vous sont adressées par le mouvement Hamas, en date du 16 septembre 2018, du 5 mars 2019, et du
10 juillet 2019.
En janvier 2020, votre compte Facebook est piraté. À la même période, vous recevez une citation à
comparaître, vous demandant de vous présenter au tribunal, à Khan Younes, le 13 avril 2021.
Six mois environ avant votre premier entretien personnel au CGRA, à savoir aux alentours de début
mars 2020, le père de [R.] surprend sa fille au téléphone avec vous. Il lui prend alors le téléphone des
mains pour vous parler. Il vous menace et vous en met en garde du fait que vous pouvez être tué si
vous rentrez à Gaza.
En avril 2020, vous créez un nouveau compte Facebook. Sur ce compte, vous publiez des posts
critiquant le gouvernement du Hamas.

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