Arrêt Nº198665 de Conseil du Contentieux des Etrangers, 25/01/2018

Judgment Date25 janvier 2018
CourtVe CHAMBRE (Conseil du Contentieux des Etrangers)
Judgement Number198665
Procedure TypePlein contentieux
CCE X - Page 1
198 665
du
25
janvier
201
8
dans l’affaire X / V
En cause
1.
X
2. X
ayant élu domicile
:
X
contre :
le Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides
LE PRESIDENT F.F. DE LA Ve CHAMBRE,
Vu la requête introduite le 21 septembre 2017 par X alias X et X, qui déclarent être de nationalité
djiboutienne, contre les décisions du Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides, prises le
22 août 2017.
Vu l’article 51/4 de la loi du 15 décembre 1980 sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et
l’éloignement des étrangers.
Vu le dossier administratif et la note d’observations.
Vu l’ordonnance du 17 octobre 2017 convoquant les parties à l’audience du 10 novembre 2017.
Entendu, en son rapport, J.-F. HAYEZ, juge au contentieux des étrangers.
Entendu, en leurs observations, les parties requérantes assistées par Me S. BENKHELIFA, avocat, et K.
GUENDIL, attaché, qui comparaît pour la partie défenderesse.
APRES EN AVOIR DELIBERE, REND L’ARRET SUIVANT :
1. Les actes attaqués
Le recours est dirigé contre deux décisions de refus du statut de réfugié et de refus du statut de
protection subsidiaire, prises par le Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides, qui sont
motivées comme suit :
- Concernant Madame A. A. A., alias A. M. A. (ci-après « la première requérante ») :
«A. Faits invoqués
Selon vos déclarations, vous êtes née le 31 juillet 1969 à Djibouti-ville, êtes de nationalité djiboutienne,
d’origine ethnique afar et pratiquez l’islam sunnite. Vous êtes scolarisée à l’école des soeurs à Djibouti-
ville jusqu’à votre départ pour la Tunisie en 1981 où votre père occupe le poste d’ambassadeur. En
Tunisie, vous êtes scolarisée dans une école française. A votre retour à Djibouti en 1988, vous
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fréquentez le lycée d’Etat, arrêtez vos études en seconde et trouvez un emploi à la BCI (Banque pour le
Commerce et l'Industrie), emploi que vous occupez jusqu’à votre départ du pays.
Alors que votre fille [F], née le 28 décembre 1995, se trouve avec votre fils [A-S] en vacances à
Tadjourah durant le mois de juillet 2007, elle est excisée par la famille de votre mari. L'intervention se
passe mal et elle décède alors qu'elle est âgée de 12 ans.
A partir de 2012, la famille de votre mari commence à exercer une pression afin de faire exciser votre
fille [D] et de la marier. Vous refusez mais personne ne vous écoute. Finalement, vous arrivez à obtenir
un délai pour que [D] puisse passer son baccalauréat. Vous vivez dans la peur vu ce qui est arrivé à [F].
De plus, vous êtes vous-même infibulée et ne voulez pas que votre fille vive cela. Vos accouchements
ont été très difficiles et après chaque naissance, vous avez été recousue, sauf après l'accouchement de
votre dernier fils à Londres en 2005. Compte tenu de cette situation, en 2015, vous décidez de fuir votre
pays d’origine pour sauver votre fille de l’excision et du mariage forcé.
Vous quittez Djibouti le 16 août 2015 avec vos quatre enfants. Votre mari reste au pays pour couvrir
votre fuite. Vous arrivez en Belgique le 18 août 2015 et demandez l’asile le 21 août 2015.
Le 29 novembre 2016, le Commissariat général (CGRA) prend dans votre dossier une décision de refus
du statut de réfugié et refus d'octroi de la protection subsidiaire, tout comme dans celui de votre fils
[A.S], né le 28 novembre 1996 (voir dossier CGRA 15/21239 - SP 8.110.095). Ces décisions sont
annulées par le Conseil du contentieux des étrangers (CCE) le 17 mai 2017 dans son arrêt numéro 186
927. Dans cet arrêt, le CCE reproche au CGRA de ne pas avoir pris une décision spécifique au nom de
votre fille [D], née le 28 octobre 1998, dès lors que son accession à la majorité lui a conféré la capacité
juridique et le droit de défendre sa demande d'asile personnellement et en son nom propre. De plus, en
ce qui vous concerne, il constate que vous avez spontanément évoqué le fait que vous avez été
infibulée durant votre enfance puis subi plusieurs épisodes de "désinfibulation" - "réinfibulation" au gré
de vos accouchements. A ce sujet, le CCE demande au CGRA de vous entendre à nouveau à propos
des conséquences permanentes sur le plan physique ou psychologique qu'une infibulation peut
engendrer, du caractère continu de la mutilation subie ainsi qu'au sujet de l'existence d'un risque de
reproduction de la persécution initiale. Suite à cet arrêt, vous êtes tous les trois réentendus par le
Commissariat général en date 24 juillet 2017.
B. Motivation
Le Commissariat général constate qu’il ne ressort pas de vos propos qu’il existe, dans votre chef, une
crainte fondée de persécution au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951. A ceci s’ajoute le
fait qu’il n’existe pas de motifs sérieux et avérés indiquant que vous encourez un risque réel de subir
des atteintes graves telles que définies à l’article 48/4 de la Loi sur les étrangers (loi du 15 décembre
1980).
Tout d'abord, vous dites que votre principale crainte en cas de retour dans votre pays, c'est que
votre fille [D] (voir dossier CGRA XX/XXX - SP XXX) soit mariée de force et excisée (voir audition
du 24 juillet 2017, pages 4/13, 5/13 et 10/13). Or, cette crainte n'a pas été jugée crédible par le CGRA.
Le CGRA motive sa décision de refus de reconnaissance de la qualité de réfugié et refus d'octroi de la
protection subsidiaire en ce qui concerne votre fille [D] en ces termes :
"Le Commissariat général constate qu’il ne ressort pas de vos propos qu’il existe, dans votre
chef, une crainte fondée de persécution au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951. A
ceci s’ajoute le fait qu’il n’existe pas de motifs sérieux et avérés indiquant que vous encourez un
risque réel de subir des atteintes graves telles que définies à l’article 48/4 de la Loi sur les
étrangers (loi du 15 décembre 1980).
En effet, vous déclarez craindre d’être mariée de force, d’être excisée et infibulée et d’être battue
en cas de retour dans votre pays d’origine. Pourtant, plusieurs éléments compromettent
sérieusement la crédibilité de vos déclarations.
Premièrement, vous basez votre crainte d’être excisée et infibulée sur le fait que votre soeur [F]
aurait été excisée et serait décédée des suites de cette excision. Cependant,vos propos
concernant votre soeur [F] sont à ce point inconsistants et en contradiction avec les propos

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