Décision judiciaire de Conseil d'État, 8 janvier 2019

Date de Résolution 8 janvier 2019
JuridictionXIII
Nature Arrêt

CONSEIL D'ÉTAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF.

XIIIe CHAMBRE

A R R Ê T

nº 243.357 du 8 janvier 2019

A. 220.630/XIII-7825

En cause : l'Association sans but lucratif GREENPEACE BELGIUM, ayant élu domicile chez

Me Marc NEVE, avocat, rue de Joie 56 4000 Liège,

contre :

la Commission fédérale de recours pour l'accès aux informations environnementales, rue des Colonies 11

Atrium - 6ème étage 1000 Bruxelles.

Partie intervenante :

l'État belge, représenté par le Ministre de l'Environnement, ayant élu domicile chez

Me Jean LAURENT, avocat, avenue Louise 250 1050 Bruxelles.

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I. Objet de la requête

Par une requête introduite le 31 octobre 2016, l'association sans but lucratif (A.S.B.L.) GREENPEACE BELGIUM demande l'annulation de la décision de la Commission fédérale de recours pour l'accès aux informations environnementales du 1er août 2016, rejetant son recours tendant à obtenir communication des informations environnementales du service public fédéral (S.P.F.) Santé publique, Sécurité de la chaîne alimentaire et Environnement, visant les contrôles opérés en 2015 sur les systèmes de diligence raisonnée de plusieurs opérateurs qui mettent du bois et des produits dérivés sur le marché.

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II. Procédure

Par une requête introduite le 2 janvier 2017, l'État belge, représenté par le Ministre de l'Environnement, demande à être reçu en qualité de partie intervenante.

Cette intervention a été accueillie par une ordonnance du 25 janvier 2017.

Le dossier administratif a été déposé.

Les mémoires en réponse, en réplique et en intervention ont été régulièrement échangés.

M. Lionel RENDERS, auditeur au Conseil d'État, a rédigé un rapport sur la base de l'article 12 du règlement général de procédure.

Le rapport a été notifié aux parties.

Les parties adverse et intervenante ont déposé un dernier mémoire.

Par une ordonnance du 26 juillet 2018, l'affaire a été fixée à l'audience du 4 octobre 2018 à 9.30 heures.

Mme Simone GUFFENS, président de chambre, a exposé son rapport.

Me Éric LEMMENS, loco Me Marc NEVE, avocat, comparaissant pour la partie requérante, M. Frankie SCHRAM, secrétaire, comparaissant pour la partie adverse, et Me Charline SERVAIS, loco Me Jean LAURENT, avocat, comparaissant pour la partie intervenante, ont été entendus en leurs observations.

M. Lionel RENDERS, auditeur, a été entendu en son avis contraire.

Il est fait application des dispositions relatives à l'emploi des langues, inscrites au titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'État, coordonnées le 12 janvier 1973.

III. Faits

1. Le 6 janvier 2016, l'A.S.B.L. GREENPEACE BELGIUM adresse une demande de communication d'informations environnementales au S.P.F. Santé

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publique, Sécurité de la chaîne alimentaire et Environnement. Cette demande vise les contrôles opérés en 2015 sur les systèmes de diligence raisonnée de plusieurs opérateurs qui mettent du bois et des produits dérivés sur le marché. Elle est présentée comme suit :

" [...]

Contrôles concernés : 1. Opérateur étranger, juin 2015 2. Leary, Août 2015 3. Somex, Août 2015 4. Van Hoorebeke, Août 2015 5. Vandecasteele, Août 2015 6. Vogel Import, Août 2015 7. Callens, Septembre 2015 8. Decolvenaere, 21/10/2015 9. Lemahieu, 16/11/2015 10. Bellimer, 17/11/2015

Pour chacun de ces contrôles, l'information sollicitée est la suivante :

  1. Correspondance (lettres et emails) avec : a. Les autorités belges (ex. douanes et Affaires étrangères) b. Les autorités étrangères dans les pays d'origine du bois contrôlé c. Les autorités des autre États membres de l'UE et spécialement leurs Autorités compétentes (RBUE [lire : Règlement Bois de l'Union Européenne])

    1. La Commission européenne e. L'entreprise visée par le contrôle f. Les autres acteurs privés, dont, le cas échéant, les fédérations professionnelles impliquées et les Organisations de contrôles (RBUE)

    2. Toute autre correspondance pertinente liée au contrôle

  2. L'information relative : a. Aux mesures prises par l'opérateur pour récolter l'information nécessaire et identifier le risque d'illégalité du bois*

    1. Aux mesures prises par l'opérateur pour évaluer le risque d'illégalité : contrôler l'information par rapport aux critères de risque et ses conclusions sur le degré de risque*

    2. Aux mesures prises par l'opérateur pour atténuer le(s) risque(s) identifié(s)

      d'illégalité*

    3. L'évaluation de ses mesures par l'Autorité compétente au regard des dispositions du RBUE

    4. Le cas échéant, les conclusions et recommandations formulées par l'Autorité compétente à l'issue du contrôle

  3. Toute autre information pertinente relative au contrôle concerné.

    *Art. 6.1 RBUE et Art. 5.2 du Règlement (UE) Nº 607/2012

    [...]".

  4. Le 4 février 2016, le S.P.F. Santé publique, Sécurité de la chaîne alimentaire et Environnement refuse la demande de communication de l'A.S.B.L. GREENPEACE BELGIUM.

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    3. Le 19 février 2016, l'A.S.B.L. GREENPEACE BELGIUM introduit un recours administratif organisé auprès de la Commission fédérale de recours pour l'accès aux informations environnementales (ci-après : la Commission).

  5. Le 23 mai 2016, la Commission adopte une décision "intérimaire" nº 2016-5, aux termes de laquelle elle décide ce qui suit :

    " Un premier examen montre que la Commission de recours ne dispose pas de suffisamment d'informations pour déterminer si toutes les informations doivent être qualifiées d'informations environnementales au sens de la loi du 5 août 2006, bien que le SPF Santé publique, Sécurité de la Chaîne alimentaire et Environnement n'avance aucune objection en la matière. La Commission doit toutefois vérifier de [sa] propre initiative si cela est le cas.

    De plus, la Commission constate que les motifs d'exception invoqués ne sont pas motivés de manière suffisamment concrète et que dans certains cas, il est déjà manifeste qu'ils ne constituent aucun fondement juridique suffisant pour refuser la publicité. En tout cas, il manque à la Commission un fondement suffisant pour justifier la non-publicité globale étant donné que seules les informations tombant sous la définition d'un motif d'exception peuvent être soustraites à la publicité.

    Sur la base de l'article 40 de la loi du 5 août 2006, la Commission demande au SPF Santé publique, Sécurité de la Chaîne alimentaire et Environnement de fournir tous les documents concernés à la Commission d'ici le 13 juin 2016 au plus tard".

    Cette décision est notifiée à l'A.S.B.L. GREENPEACE BELGIUM par un courrier du 6 juin 2016.

  6. Le 1er août 2016, la Commission rejette, par une décision nº 2016-17, le recours introduit par l'A.S.B.L. GREENPEACE BELGIUM pour les motifs suivants :

    " [...]

  7. La recevabilité du recours

    Dans sa décision 2016-5, la Commission a estimé que le recours était recevable de sorte que la décision de la Commission ne doit plus aborder ce point.

  8. Le bien-fondé du recours

    La Commission doit préalablement déterminer si les informations demandées tombent sous le champ d'application de la loi du 5 août 2006. La loi du 5 août 2006 s'applique aux instances environnementales visées à l'article 3, 1º, a) et b), dont l'organisation et le fonctionnement sont régis par l'autorité fédérale ainsi qu'aux instances environnementales visées à l'article 3, 1°, c), qui sont sous leur contrôle (article 4, § 1er, de la loi du 5 août 2006) et disposent d'informations environnementales (article 18, § 1er, de la loi).

    3.1 Le champ d'application personnel

    Le SPF Santé publique, Sécurité de la Chaîne alimentaire et Environnement ne conteste pas devoir être considéré comme une instance environnementale au sens

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    de l'article 4, § 1er de la loi du 5 août 2006, de sorte que la Commission estime inutile d'examiner cela plus en détail vu le fait qu'elle a déjà confirmé explicitement cet aspect dans d'autres décisions.

    3.2 Le champ d'application matériel

    3.2.1. La loi du 5 août 2006 octroie un droit d'accès aux informations environnementales. La notion «d'information environnementale» est décrite à l'article 3, 4º comme :

    toute information, peu importe le support et la forme matérielle, dont dispose une instance environnementale concernant : a) l'état des éléments de l'environnement, tels que l'atmosphère, l'air, le sol, les terres, l'eau, le paysage, les sites naturels, y compris les biotopes humides, les zones côtières et maritimes, la diversité biologique et ses composantes, y compris les organismes génétiquement modifiés, et l'interaction entre ces éléments; b) l'état de santé de l'homme et sa sécurité y compris la contamination de la chaîne alimentaire, les conditions de vie des personnes, pour autant qu'ils soient ou puissent être altérés par l'un des éléments de l'environnement visés au point a) ou, par l'intermédiaire de ces éléments, par l'un des facteurs tels que visés au point d) ou par les mesures et activités telles que visées au point e); c) l'état de sites culturels de valeur et de constructions, pour autant qu'ils soient ou puissent être altérés par les éléments de l'environnement tels que visés au point a) ou, par l'intermédiaire de ces éléments, par l'un des facteurs tels que visés au point d) ou par les mesures et activités telles que visées au point e); d) des facteurs, tels que les substances, l'énergie, le bruit, les rayonnements ou les déchets, y compris les déchets radioactifs, les émissions, les déversements et autres rejets dans l'environnement qui ont ou sont susceptibles d'avoir des incidences sur les éléments de l'environnement tels que visés au point a) ou l'état de santé de l'homme et sa sécurité tels que visés au point b); e) les mesures et activités ayant ou étant susceptibles d'avoir des incidences sur les éléments tels que visés aux points a), b), c) ou d); f) les mesures et activités ayant pour objectif de garder en état, protéger...

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