Décision judiciaire de Conseil d'État, 9 mai 2018

Date de Résolution 9 mai 2018
JuridictionXV
Nature Arrêt

CONSEIL D’ÉTAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF

XVe CHAMBRE

A R R Ê T

nº 241.462 du 9 mai 2018

219.813/XV-3147

En cause : MEDJAHED Madjid, ayant élu domicile chez Me Siham NAJMI, avocat, rue de Florence 13

1000 Bruxelles,

contre :

la ville de Tournai.

219.821/XV-3150

En cause : LANTRI Rabia, ayant élu domicile chez Me Siham NAJMI, avocat, rue de Florence 13

1000 Bruxelles,

contre :

la ville de Tournai.

------------------------------------------------------------------------------------------------------ I. Objet des recours

Vu la requête introduite le 20 juillet 2016 par Madjid MEDJAHED qui demande l’annulation de:

 «la décision du collège communal de la ville de Tournai du 13 mai 2016 de modifier la composition de ménage de M. Madjid Medjahed et de Mme Rabia Lantri et de les inscrire, en ménage, à l’adresse rue de la Prévoyance, 16, à 7500 Tournai, et ce, entre le 18 mars 2015 et le 28 janvier 2016, et

 la décision implicite du collège communal de la ville de Tournai du 13 mai

2016 de ne pas faire droit à la demande de rectification du requérant fondée sur l’article 8 de l’arrêté royal du 16 juillet 1992 relatif au droit d’accès aux registres de la population et au registre des étrangers ainsi qu’au droit de rectification desdits registres» (affaire 219.813/XV-3147);

Vu la requête introduite le même jour par Rabia LANTRI, qui demande l’annulation des mêmes actes (affaire 219.821/XV-3150);

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II. Procédure

Un arrêt n° 238.042 du 27 avril 2017 a joint les affaires, rouvert les débats et réservé les dépens. Il a été notifié aux parties.

Le dossier administratif a été déposé.

M. le premier auditeur Christian AMELYNCK a rédigé un rapport complémentaire sur les deux affaires sur la base de l’article 13 du Règlement général de procédure.

Le rapport a été notifié aux parties.

Les derniers mémoires complémentaires ont été régulièrement échangés.

Par une ordonnance du 17 octobre 2017, les affaires ont été fixées à l’audience publique du 14 novembre 2017 à 9 heures 30.

M. Michel LEROY, président de chambre, a fait rapport.

Me Siham NAJMI, avocat, comparaissant pour les parties requérantes, a été entendue en ses observations.

M. Christian AMELYNCK, premier auditeur, a été entendu en son avis conforme.

Il est fait application des dispositions relatives à l’emploi des langues, inscrites au titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d’État, coordonnées le 12 janvier 1973.

III. Faits

Les faits utiles à l’examen des recours ont été exposés dans l’arrêt nº 238.042 du 27 avril 2017, précité.

IV. Recevabilité

Considérant que l’avocat des requérants a écrit au Conseil d’État le 25 avril 2017 que la partie adverse avait pris, le 13 janvier 2017, un nouvel acte par lequel elle décidé «de ne pas faire droit à la demande de rectification formée par M. Madjid Medjahed, par courrier du 12 février 2016, en ce qui concerne sa composition

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de ménage pour la période allant du 11 décembre 2013 au 17 mars 2015», et que cette décision fait l’objet de recours en annulation introduits le 31 mars 2017 par les requérants et pendants sous les numéros de rôle 221.847/XV-3372 et 221.848/XV-3373;

Considérant que cette nouvelle décision se substitue à la décision implicite qui est le second objet des recours présentement examinés, la confirme, et en donne une motivation plus développée; qu’elle ne fait pas perdre leur premier objet aux présents recours;

V. Moyens

A. Premier moyen du premier recours (affaire 219.813/XV-3.147)

  1. Exposé du moyen

    Considérant que le requérant prend un premier moyen de la violation des articles 1er et 3 de la loi du 19 juillet 1991 relative aux registres de la population, aux cartes d’identité, aux cartes d’étranger et aux documents de séjour et modifiant la loi du 8 août 1983 organisant un Registre national des personnes physiques, de l’article 8 de l’arrêté royal du 16 juillet 1992 relatif au droit d’accès aux registres de la population et au registre des étrangers, ainsi qu’au droit de rectification desdits registres, du principe général audi alteram partem et des droits de la défense, du principe de bonne administration et du devoir de minutie et de l’excès de pouvoir; qu’il expose qu’il a introduit, le 12 février 2016, une demande de rectification fondée sur l’article 8 de l’arrêté royal du 16 juillet 1992, précité, et que cette disposition n’a pas été respectée pour plusieurs raisons:

     la partie adverse n’a statué sur cette demande que le 13 mai 2016, soit hors délai;

     elle est restée en défaut de motiver précisément les raisons pour lesquelles elle a implicitement refusé de donner droit à sa demande de rectification, relative à la période du 11 décembre 2013 au 18 mars 2015;

     elle ne l’a pas invité à fournir des éléments de preuve pour la période du 18 mars 2015 au 28 janvier 2016, de telle sorte qu’il n’a pas été mis en mesure de faire valoir ses arguments en ce qui concerne cette période;

     elle a modifié les informations relatives à sa situation pour la période entre le

    18 mars 2015 et le 28 janvier 2016 sans lui adresser un document reprenant de manière claire les informations modifiées et les données complètes la concernant, telles qu’elles figurent dans les registres de la population; qu’en réplique, il ajoute que:  «le seul fait que la partie adverse ait précédemment décidé, lors de sa séance du

    26 février 2016, d’inviter le requérant à fournir des éléments de preuve n’a aucune incidence en l’espèce» car «l’article 8, § 2, de l’arrêté royal du 16 juillet 1992 impose à la commune de motiver et de notifier son refus de rectification dans le délai de quinze jours […]. Or, ce n’est que lors de sa séance du 13 mai 2016 que le collège communal a implicitement décidé de refuser la demande de rectification introduite par le requérant»;

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     «s’il est vrai que l’arrêté royal du 16 juillet 1992 ne précise pas quelles sont les sanctions applicables en cas de dépassement des délais prévus, une telle circonstance est sans incidence en l’espèce dès lors qu’un tel dépassement constitue manifestement une violation des dispositions visées au moyen et suffit à entraîner l’illégalité de l’acte attaqué;

     le délai prévu par l’article 8 de l’arrêté royal du 16 juillet 1992 doit en outre être considéré comme un délai de rigueur de sorte que lorsque ce délai est expiré, l’administration perd sa compétence et tout acte pris après cette expiration, tel que l’acte attaqué, doit alors être considéré comme illégal;

     la délibération adoptée par le collège communal le 13 mai 2016 ne porte que sur la période du 18 mars 2015 au 18 janvier 2016, mais non sur la période antérieure, visée par la demande de rectification;

     l’acte attaqué ne pourrait, à lui seul, être considéré comme une décision motivée de refus de rectification au sens de l’article 8 susmentionné;

    que, dans le dernier mémoire, il fait valoir que:  l’article 8, § 2, impose expressément que le refus motivé de la rectification soit notifié dans les quinze jours;  il n’est pas question de se borner à demander des informations supplémentaires dans ce délai mais bien de prendre une décision;  quatorze jours après la demande, la partie adverse s’est contentée d’inviter le requérant à produire des documents à l’appui de sa demande, ce qui aurait pu être fait immédiatement;  ce n’est que le 13 mai 2016 qu’elle a pris la décision de rectifier d’autorité la composition de ménage;  le requérant a par ailleurs retrouvé des photographies de sa rue datant de 2015, à l’époque où son voisin du n° 14 a mis sa maison en vente, et l’annonce de l’agence comportait une photographie de la façade montrant qu’il y avait deux boîtes aux lettres au n° 16;  après le départ de sa mère, le requérant a entamé des travaux et retiré une boîte aux lettres;  les rapports de 2016 ne peuvent rendre compte de la situation d’avant 2016;  cette motivation ne saurait justifier la modification d’autorité de la composition de ménage du requérant pour la période non visée par la demande de rectification, d’autant plus sans laisser la possibilité à ce dernier de faire valoir ses documents et arguments concernant cette autre période;

    2. Appréciation du Conseil d’État

    Considérant que, selon l’article 8, § 2, de l’arrêté royal du 16 juillet 1992 relatif au droit d’accès aux registres de la population et au registre des étrangers ainsi qu’au droit de rectification desdits registres, «la commune où la demande de rectification a été introduite est tenue de donner suite à cette demande dans le délai prescrit à l’article 3, alinéa 2», c’est-à-dire «immédiatement après...

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