Décision judiciaire de Conseil d'État, 12 août 2016

Date de Résolution12 août 2016
JuridictionVI
Nature Arrêt

CONSEIL D'ÉTAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF

A R R Ê T

nº 235.618 du 12 août 2016

A.219.761/XI-21.187 A.219.762/XI-21.189

En cause : 1. SACI Mehdi, 2. DI BARTOLOMEO Linda, 3. LEDON Camille, 4. FABRE Odile, 5. DZEITOVA Milana, 6. HABRI Sarah, 7. VERBRUGGEN Jason,

ayant élu domicile chez

Me J. LAURENT, avocat, avenue Louise 250 1050 Bruxelles,

contre :

1. l'Université de Liège, 2. le Jury des études des 60 premiers crédits du 1er cycle en sciences médicales et en sciences dentaires de l'Université de Liège, ayant élu domicile chez

Me P. HENRY, Me J. MERODIO & Me Fl. NATALIS, avocats, place des Nations Unies 7 4020 Lièges, 3. la Communauté française, représentée

par son Gouvernement, ayant élu domicile chez Me Ph. LEVERT & Me M. VELGHE, avocats,

rue Defacqz 78/80

1060 Bruxelles, 4. L'État belge, représenté par le ministre de la Santé publique, ayant élu domicile chez Me E. JACUBOWITZ, avocat, avenue Tedesco 7 1160 Bruxelles.

------------------------------------------------------------------------------------------------- LE PRÉSIDENT DE LA VI e CHAMBRE DES VACATIONS, SIÉGEANT EN RÉFÉRÉ,

Vu la requête introduite le 18 juillet 2016 par Mehdi SACI, Linda DI BARTOLOMEO et Camille LEDON, tendant à la suspension, selon la procédure d'extrême urgence, de l'exécution des "résultats du concours organisé

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par [l'Université de Liège et le Jury des études des 60 premiers crédits du 1er

cycle en sciences médicales et sciences dentaires de l'Université de Liège] pour [la] première année de Bachelier en médecine auprès de l'Université de Liège et porté à la connaissance des étudiants par affichage le vendredi 8 juillet 2016" (recours A.219.761/XI-21.187);

Vu la requête introduite le même jour par Odile FABRE, Milana DZEITOVA, Sarah HABRI et Jason VERBRUGGEN, tendant à la suspension, selon la procédure d'extrême urgence, de l'exécution des "résultats du concours organisé par [l'Université de Liège et le Jury des études des 60 premiers crédits du 1er cycle en sciences médicales et sciences dentaires de l'Université de Liège] pour [la] première année de Bachelier en médecine auprès de l'Université de Liège et porté à la connaissance des étudiants par affichage le vendredi 8 juillet 2016" (recours A.219.762/XI-21.189);

Vu le dossier administratif et les notes d’observations;

Vu les ordonnances du 25 juillet 2016 notifiées aux parties, convoquant celles-ci à comparaître le 5 août 2016 à 10 heures;

Entendu, en son rapport, Mme S. GUFFENS, président de chambre;

Entendu, en leurs observations, Me O. LOUPPE et Me Ch. SERVAIS, loco Me J. LAURENT, avocats, comparaissant pour les parties requérantes, Me A. DELVAUX et Me Fl. NATALIS, avocats, comparaissant pour la première partie adverse, Me M. VELGHE, avocat, comparaissant pour la troisième partie adverse et Me D. VERMERE et Me Cl. CAILLET, loco Me E. JACUBOWITZ, avocats, comparaissant pour la quatrième partie adverse;

Entendu, en son avis partiellement conforme, M. G. SCOHY, auditeur au Conseil d'État;

Vu le titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'État, coordonnées le 12 janvier 1973;

Considérant que les faits utiles à l'examen des demandes se présentent comme suit :

  1. En application du décret de la Communauté française du 7 novembre 2013 définissant le paysage de l'enseignement supérieur et

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    l'organisation académique des études, le programme d'études de premier cycle de bachelier comprend des cours équivalant à soixante crédits. Le premier cycle est réussi si quarante-cinq des soixante crédits de ce cycle sont acquis au terme de l'année académique concernée (article 100 du décret précité).

    Pour accéder à la suite du programme du cycle, l'étudiant inscrit en sciences médicales ou dentaires doit en outre obtenir une attestation d'accès à la suite du programme, laquelle est délivrée, par chaque université organisant ces filières, à la suite d'un concours, au prorata du nombre d'attestations délivrées à chaque université (articles 110/1 à 110/7 du même décret tel que modifié par le décret du 9 juillet 2015 relatif aux études de sciences médicales et dentaires).

    Pour inscrire dans son programme d'études les unités d'enseignement de la suite du programme du premier cycle en sciences médicales et dentaires, l'étudiant en sciences médicales et dentaires doit donc au minimum avoir acquis quarante-cinq des soixante crédits de son programme annuel et être en ordre utile dans le classement du concours.

  2. Le Gouvernement de la Communauté française a, par un arrêté du 17 juillet 2015 fixant le nombre global d'attestations d'accès à la suite du programme du cycle qui seront délivrées lors de l'année académique 2015-2016, fixé à six cent cinq le nombre global d'attestations d'accès à la suite du programme d'études, pour l'année académique 2015-2016. L'université de Liège s'est, quant à elle, vu attribuer cent vingt six attestations.

  3. Les parties requérantes sont inscrites en bachelier en sciences médicales à l'Université de Liège pour l'année académique 2015-2016.

    À l'issue du concours dont le résultat est affiché le vendredi 8 juillet 2016, les parties requérantes sont classées comme suit :

    - Mehdi SACI, 60 crédits, 160ème

    - Linda DI BARTOLOMEO, 48 crédits, 159ème

    - Camille LEDON, 25 crédits, 171ème

    - Odile FABRE : 61 crédits, 134ème au concours - Milana DZEITOVA : 61 crédits, 147ème au concours - Sarah Habri, 47 crédits, 162ème au concours - Jason VERBRUGGEN, 43 crédits, 192ème au concours

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    Il en résulte que si cinq des parties requérantes ont obtenu les crédits nécessaires pour passer en deuxième année de bachelier, elles ne sont toutefois pas classées en ordre utile à l'issue du concours et ne peuvent en conséquence s'inscrire à cette deuxième année d'études;

    Considérant que les deux recours introduits poursuivent la suspension de l’exécution du même acte et développent la même argumentation; que, dans l’intérêt d’une bonne justice, il y a lieu de joindre les deux affaires;

    Considérant que les parties requérantes désignent à tort le "Jury des études des 60 premiers crédits du 1er cycle en sciences médicales et en sciences dentaires de l'Université de Liège" comme partie adverse, celui-ci n'ayant pas une personnalité distincte de l'Université de Liège, désignée aussi comme partie adverse; que ledit Jury doit donc être mis hors de cause;

    Considérant que la première partie adverse soulève une exception d'irrecevabilité tenant au non-épuisement des voies de recours internes; qu'elle soutient qu'en application des articles 73 et suivants du règlement des études et des examens 2015-2016 applicable à l'Université de Liège, les étudiants peuvent introduire un recours chaque fois qu'ils s'estiment lésés quant au bon déroulement des examens et au respect des dispositions légales et réglementaires en la matière, ce que les parties requérantes n'ont pas fait;

    Considérant que l'article 73 dudit règlement des études et des examens dispose que "lorsqu'un étudiant considère qu'une irrégularité légale ou réglementaire a perturbé le bon déroulement de l'année académique, des examens ou des délibérations et qu'il s'estime lésé, il peut introduire un recours en respectant les délais et modalités reprises aux articles 74 et suivants";

    Considérant qu'il résulte de la lecture de cette disposition qu'elle ne vise nullement le concours visant à l'obtention de l'attestation pour la poursuite du cursus en médecine; que la législation relative aux études de médecine est une règlementation spécifique qui déroge au droit commun du droit des étudiants; qu'au demeurant, la première partie adverse est malvenue de reprocher le non-épuisement des voies de recours interne alors que, par ailleurs, il ressort des "recommandations relatives au concours de bachelier en médecine et sciences dentaires" qu'"aucun correctif [du concours] ne sera affiché" et qu'"aucune consultation des copies du concours ne sera permise", rendant dès lors impossible un recours effectif; que l'exception d'irrecevabilité ne peut être accueillie;

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    Considérant que l'Université de Liège, première partie adverse, soutient que les parties requérantes ne justifient d'aucun intérêt à la demande de suspension; que, selon elle, le recours des parties requérantes revient à demander l'écartement du décret du 9 juillet 2015 modifiant le décret "paysage" sur la base de l'article 159 de la Constitution; qu'elle rappelle que ledit décret prévoit, d'une part, que ne peuvent poursuivre leurs études au-delà des 60 premiers crédits que les étudiants qui ont obtenu une attestation d'accès et, d'autre part, que n'obtiennent cette attestation que les étudiants classés en ordre utile au concours par rapport au nombre d'attestations disponibles; qu'elle affirme que l'arrêté du Gouvernement de la Communauté française du 17 juillet 2015 ne fait que fixer le nombre d'attestations disponibles et que son écartement, d'ailleurs non sollicité, aurait pour conséquence de rendre impossible toute délivrance d'attestation;

    Qu'elle soulève par ailleurs la question de la balance des intérêts; qu'en effet, selon elle, en cas de suspension de l'acte attaqué et, donc, d'impossibilité de délivrer une attestation d'accès, aucun étudiant n'aurait accès à la deuxième année en bachelier de médecine et de sciences dentaires; qu'elle soutient que "de telles conséquences seraient inadmissibles au regard de l'intérêt public car, d'une part, l'Université de Liège n'aurait aucun étudiant de deuxième année et donc aucun subside y correspondant et, d'autre part, cela impliquerait une absence d'étudiants diplômés en 2021";

    Qu'elle s'interroge dès lors sur...

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