Décision judiciaire de Conseil d'État, 2 mai 2016

Date de Résolution 2 mai 2016
JuridictionVIII
Nature Arrêt

CONSEIL D'ÉTAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF.

A R R Ê T

nº 234.614 du 2 mai 2016

  1. 215.612/VIII-9674

En cause : MAHI Yacob, ayant élu domicile chez Me Laure DEMEZ, avocat, avenue Winston Churchill 253/40 1180 Bruxelles,

contre :

la Communauté française, représentée par son Gouvernement, ayant élu domicile chez Me Marc UYTTENDAELE, avocat, rue de la Source 68 1060 Bruxelles.

------------------------------------------------------------------------------------------------------ LE CONSEIL D'ÉTAT, VIIIe CHAMBRE,

Vu la requête introduite le 28 mai 2015 par Yacob MAHI qui demande l'annulation de "l'arrêté du Ministre des Sports du 8 avril 2015 décidant la suspension préventive de ses fonctions conformément à l'article 157bis, § 2, de l'Arrêté royal du 22 mars 1969 fixant le statut des membres du personnel directeur et enseignant, du personnel auxiliaire d'éducation, du personnel paramédical des établissements d'enseignement gardien, primaire, spécialisé, moyen, technique, de promotion sociale et artistique de l'État, des internats dépendant de ces établissements et des membres du personnel du service d'inspection chargé de la surveillance de ces établissements";

Vu l'arrêt nº 230.971 du 24 avril 2015 ordonnant, selon la procédure d'extrême urgence, la suspension de l'exécution de l'acte attaqué;

Vu le mémoire ampliatif;

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Vu le rapport de Gabrielle JOTTRAND, premier auditeur au Conseil d'État, rédigé sur la base de l'article 12 du règlement général de procédure;

Vu la notification du rapport aux parties et les dernier mémoires;

Vu l'ordonnance du 25 mars 2016 fixant l'affaire à l'audience publique du 29 avril 2016;

Entendu, en son rapport, Frédéric GOSSELIN, conseiller d'État;

Entendu, en leurs observations, Me Laure DEMEZ, avocat, comparaissant pour la partie requérante, et Me Marc UYTTENDAELE, avocat, comparaissant pour la partie adverse;

Entendu, en son avis conforme, Gabrielle JOTTRAND, premier auditeur;

Vu le titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'État, coordonnées le 12 janvier 1973;

Considérant que les faits utiles à l'examen du recours ont été rappelés dans l'arrêt n° 230.971, précité; qu'il y a lieu de s'y référer;

Considérant que le premier moyen est pris de la violation de l'article 37bis de l'arrêté royal du 25 octobre 1971 fixant le statut des maîtres de religion, des professeurs de religion et des inspecteurs de religion des religions catholique, protestante, israélite, orthodoxe et islamique des établissements d'enseignement de la Communauté française, de l'article 157bis, §§ 1er à 3, de l'arrêté royal du 22 mars 1969 fixant le statut des membres du personnel directeur et enseignant, du personnel auxiliaire d'éducation, du personnel paramédical des établissements d'enseignement gardien, primaire, spécialisé, moyen, technique, de promotion sociale et artistique de l'État, des internats dépendant de ces établissements et des membres du personnel du service d'inspection chargé de la surveillance de ces établissements, des articles 2 et 3 de la loi du 29 juillet 1991 relative à la motivation formelle des actes administratifs, des principes généraux de bonne administration et d'équitable procédure, en ce compris le principe général du droit audi alteram partem, le principe du contradictoire et de préparation avec soin des décisions administratives, le principe général de motivation, le principe du délai raisonnable, de l'erreur manifeste d'appréciation et de l'excès de pouvoir; que le requérant indique que la procédure de suspension préventive ne peut intervenir que dans l'intérêt de l'enseignement et doit être justifiée par des circonstances de fait pertinentes et

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probantes de nature à nuire à l'intérêt du service ou à sa réputation; qu'il considère que les principes de bonne administration et d'équitable procédure, en ce compris l'adage audi alteram partem, requièrent que la convocation à l'audition préalable mentionne de manière suffisamment précise et concrète la description des faits reprochés au requérant, afin de lui permettre de préparer sa défense en connaissance de cause; qu'il rappelle tout d'abord que la suspension préventive n'est pas une sanction disciplinaire, mais une "mesure d'ordre qui doit avant tout permettre à l'administration d'éloigner provisoirement et temporairement du service un agent dont les agissements ou le comportement sont de nature à nuire à l'intérêt du service ou à sa réputation. (...). Elle a un caractère conservatoire et provisoire, dans le sens où une mesure définitive ayant pour objet de fixer la situation de l'agent doit être prise ultérieurement"; que deux conditions cumulatives doivent, selon lui, être remplies afin de justifier l'utilisation de cette mesure : "d'une part, l'existence d'une procédure disciplinaire, d'une information judiciaire ou de poursuites pénales et, d'autre part, l'incompatibilité de la présence de l'agent avec l'intérêt du service"; qu'il relève qu'il ressort de la chronologie des faits et des éléments du dossier que les actes de violence qui lui sont reprochés n'étaient manifestement pas de nature à fonder l'entame d'une procédure disciplinaire dans la mesure où ils n'étaient pas susceptibles d'être individualisés de manière précise et où les circonstances de temps et de lieu dans lesquelles ils se seraient manifestés et auraient été constatés ne pouvaient pas être précisées; qu'il estime ensuite que l'entame de la procédure pénale par le dépôt d'une plainte avec constitution de partie civile s'imposait pour fonder une éventuelle mesure de suspension préventive mais s'étonne d'une telle démarche alors que les faits de violence auxquels il est fait référence, bien que non situés dans le temps, ne paraissent pas récents et n'ont jamais été de nature à empêcher jusqu'à présent son maintien en fonction, sa présence n'ayant jamais été considérée comme contraire à l'intérêt de l'enseignement; qu'il prétend que le dossier a été constitué de toute pièce et que les témoignages - lesquels demeurent toutefois particulièrement indigents - ont été sollicités pour les besoins de la présente procédure, et ce alors même qu'il n'y a aucun élément nouveau qui a été spontanément rapporté pour fonder l'entame d'une procédure de suspension préventive; qu'il produit plusieurs témoignages d'élèves et de professeurs qui attestent tous, selon lui, de son honorabilité et de sa bonne moralité; qu'il fait encore valoir qu'il s'est vu infliger une mesure de suspension préventive sans pouvoir exposer ses observations quant à des griefs individualisés de manière précise; qu'il note que par rapport à ces griefs, la préfète n'a pas été le témoin direct des incidents et qu'elle se borne à reprendre des propos tenus par certains élèves, non autrement désignés, et par une ancienne secrétaire; qu'il qualifie ces griefs de simples rumeurs qui ne reposent sur aucun fait avéré; que s'agissant des propos rapportés par l'ancienne secrétaire, lors de son audition, il fournit une attestation de cette personne qui est élogieuse à son égard et, en renvoyant le procès-verbal de son audition, il a produit un courriel de cette même

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ancienne secrétaire qui affirme n'avoir jamais dit que le requérant aurait "frappé" les élèves, mais qu'il était peut-être "le seul à pouvoir les houspiller et les toucher (sans arrière-pensée)"; qu'il souligne que l'acte attaqué en déduit que "la préfète a mal compris la portée des propos qui lui avaient été rapportés par la secrétaire"; que quant aux insultes, il les conteste formellement et note qu'elles sont étrangères aux motifs pouvant fonder la suspension...

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