Décision judiciaire de Conseil d'État, 13 avril 2016

Date de Résolution13 avril 2016
JuridictionVIII
Nature Arrêt

CONSEIL D'ÉTAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF.

A R R Ê T

nº 234.377 du 13 avril 2016

  1. 218.931/VIII-10.081

En cause : DAEMS Xavier, ayant élu domicile chez Me Cédric MOLITOR, avocat, rue de Suisse 24 1060 Bruxelles,

contre :

la zone de police 5339 Bruxelles-Capitale - Ixelles, représentée par son collège de police, ayant élu domicile chez Me Frédéric VAN DE GEJUCHTE, avocat, place de Jamblinne de Meux 41 1030 Bruxelles.

------------------------------------------------------------------------------------------------------ LE PRÉSIDENT F.F. DE LA VIIIe CHAMBRE DES RÉFÉRÉS,

Vu la requête introduite le 7 avril 2016 par Xavier DAEMS tendant à la suspension, selon la procédure d'extrême urgence, de l'exécution de "la décision du Collège de police de la partie adverse de lui infliger la sanction disciplinaire lourde de la démission d'office, datant du 21 mars 2016, qui lui a été notifiée par un courrier recommandé réceptionné le 30 mars 2016";

Vu l'ordonnance du 7 avril 2016 convoquant les parties à l'audience publique du 13 avril 2016;

Vu la note d'observations et le dossier administratif;

Entendu, en son rapport, Pascale VANDERNACHT, conseiller d'État;

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Entendu, en leurs observations, Mes Cédric MOLITOR et Virginie

FEYENS, avocats, comparaissant pour la partie requérante, et Me Frédéric VAN DE

GEJUCHTE, avocat, comparaissant pour la partie adverse;

Entendu, en son avis conforme, Edward LANGOHR, auditeur au Conseil d'État;

Vu le titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'État, coordonnées le 12 janvier 1973;

Considérant que les faits utiles à l'examen du recours se présentent résumés comme suit :

  1. Le requérant est ouvrier qualifié mécanicien au sein du service logistique de la zone de police 5339 Bruxelles-Capitale - Ixelles, partie adverse, depuis le 1er août 2011.

  2. Le 12 avril 2014, un procès-verbal est dressé par l'INP Bruno BERBER, faisant partie de la zone de police 5390 LAN, mettant en cause le requérant, du chef d'outrage public aux bonnes mœurs (exhibitionisme).

    Le procès-verbal en question relate ce qui suit (traduction libre du néerlandais) : " Connaissance des faits :

    Le 12.04.2014 à 16h09, nous, verbalisant, sommes chargés, avec l'inspecteur KEMPENEERS Peter, du service d'intervention. Lors de notre patrouille à LANDEN, Steenweg op Sint-Truiden, à hauteur du parking de covoiturage, nous constatons d'office qu'une camionnette bleue y est stationnée à l'arrière du parking de covoiturage précité. La camionnette a son arrière, portes ouvertes, en direction de l'autoroute et son avant en direction de la bretelle de sortie de l'autoroute.

    Il s'agit d'un parking accessible au public, situé à côté de l'E40, où il y a beaucoup de va-et-vient au moment de nos constatations.

    De dessous les portes ouvertes de la camionnette précitée, nous voyons dépasser deux jambes nues.

    Nous nous engageons sur le parking de covoiturage et parquons notre véhicule de service juste devant la camionnette précitée. Nous constatons qu'il s'agit d'une camionnette PEUGEOT BOXER immatriculée 1FGD034.

    À droite derrière le pare-brise de la PEUGEOT BOXER se trouve une carte avec le logo de la police. Nous descendons de notre véhicule de service et nous nous rendons à l'arrière du véhicule précité.

    Au moment où nous arrivons à l'arrière du véhicule, les deux portes sont soudainement fermées. Nous ouvrons l'une des portes arrière et voyons courir vers

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    l'avant du véhicule un homme postérieur nu, uniquement vêtu d'un t-shirt, qui nous crie d'attendre un peu.

    L'homme étant à moitié nu dans son véhicule, nous fermons la porte arrière et donnons l'occasion à l'intéressé de s'habiller.

    Alors que le verbalisant retourne vers le véhicule de service pour chercher son calepin, l'inspecteur KEMPENEERS Peter se rend à l'avant du véhicule côté conducteur.

    Des explications sont demandées à l'intéressé concernant sa présence sur le parking précité, ce à quoi il réplique s'y être arrêté pour se reposer un peu.

    Nous demandons à l'intéressé de s'identifier et recevons sa carte d'identité.

    L'intéressé est identifié comme étant le dénommé DAEMS Xavier.

    Nous demandons la raison pour laquelle l'intéressé a placé une carte avec le logo de la police derrière son pare-brise, sur quoi celui-ci affirme travailler à la police de BRUXELLES.

    Lorsque nous demandons à l'intéressé sa carte de service, celui-ci nous montre un badge portant le numéro matricule 447128671. Nous faisons remarquer qu'il ne s'agit pas d'une carte de service, sur quoi l'intéressé précise qu'il est employé comme assistant calog à la police de la ZP de BRUXELLES/IXELLES et ne possède donc pas une carte de service.

    Nous demandons à l'intéressé de nous accompagner à l'arrière de son véhicule et lui demandons la provenance d'une substance humide, en partie sur son pare-chocs, en partie sur le sol, à hauteur de l'arrière de son véhicule. Nous montrons également à l'intéressé des excréments, sur le sol, juste derrière son véhicule.

    L'intéressé affirme que les excréments ne sont pas de lui et que la substance humide n'est que de l'eau.

    Nous confrontons l'intéressé avec les objets, à l'arrière dans son véhicule, respectivement un tube transparent de lubrifiant, portant l'inscription RUTSCHER SexMAX for more fun, et un vibromasseur noir en forme de cône (Voir Dossier photos : image du lubrifiant et du godemiché anal comme trouvé dans le véhicule).

    L'intéressé dit être venu sur le parking précité pour "son petit plaisir". D'après l'intéressé il n'y a pas le moindre problème. Il admet qu'il était en train d'y commettre des actes sexuels, mais a minimisé les faits et dit à plusieurs reprises qu'il ne faut pas exagérer.

    Traces :

    - Dans le véhicule PEUGEOT BOXER immatriculé 1FGD034, nous trouvons un tube de lubrifiant et un godemiché anal.

    - Sur le pare-chocs et en partie sur le sol, nous trouvons une substance humide. - Il y a des excréments sur le sol. - L'intéressé est nu, postérieur nu, à l'extérieur derrière son véhicule et se réfugie dans son véhicule lorsqu'il remarque nos services.

    Modus operandi :

    Aux lieu et moment précités, l'intéressé est en train de commettre des actes sexuels et outrage dès lors publiquement les moeurs. Au moment de nos constatations, l'intéressé est à moitié nu derrière son véhicule sur un parking accessible au public où au moment des faits il y a beaucoup de va-et-vient.

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    Description des lieux :

    Les faits se déroulent sur un parking de covoiturage accessible au public à LANDEN, Steenweg op Sint-Truiden, à hauteur de la bretelle de sortie de l'E40 LIEGE direction BRUXELLES. Au moment des faits il y beaucoup de va-et-vient sur le parking de covoiturage et sur les bretelles d'accès et de sortie de l'autoroute E40".

  3. Ayant appris l'existence de ce dossier judiciaire à charge du requérant, le 24 juin 2014, le chef de corps de la partie adverse désigne un enquêteur préalable à une éventuelle procédure disciplinaire, le 27 juin 2014.

    Le requérant est suspendu provisoirement de ses fonctions, suspension préventive qui va être prolongée à plusieurs reprises. Il était toujours sous le coup d'une mesure de suspension au moment de l'adoption de l'acte attaqué.

  4. Lors de l'enquête préalable, le requérant est entendu, le 29 août 2014.

    Interrogé sur les faits, il expose ce qui suit :

    " (…)

    J'ai été intercepté dans ma camionnette et on me reproche certains faits que je ne comprends pas. Mon véhicule est un lieu privé.

    La police a ouvert les portes de mon véhicule sans se prononcer [sic] quand j'étais occupé de me laver. Un des agents intervenants a constaté que je n'étais pas visible dans mon véhicule.

    Il m'a demandé ma carte d'identité.

    L'autre agent a constaté la carte de parking devant mon pare-brise. Ils m'ont alors demandé ce que je fais à la police. J'ai répondu que je suis Calog à la police de Bruxelles.

    Ils m'ont rendu ma carte d'identité et je pouvais partir. (…)".

  5. Le 12 septembre 2014, le chef de corps de la partie adverse, en sa qualité d'autorité disciplinaire ordinaire, décide de constituer un dossier administratif au vu du procès-verbal dressé du chef d'outrage public aux bonnes mœurs, le 12 avril 2014, et de faire application de l'article 56, alinéa 2 de la loi du 13 mai 1999 portant le statut disciplinaire des membres du personnel des services de police, en vertu duquel le délai de six mois dans lequel le rapport introductif de la procédure disciplinaire doit être notifié à l'intéressé prend cours le jour où l'autorité disciplinaire est informée par l'autorité judiciaire qu'une décision judiciaire définitive a été prononcée, que le dossier est classé sans suite ou que l'action publique est éteinte.

    La décision du chef de corps est motivée par la circonstance que l'audition administrative du 29 août 2014 du requérant "n'est pas de nature à permettre de se faire une opinion quant à (son) éventuelle responsabilité".

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    6. Par un courrier du 28 août 2015, le parquet de Louvain informe la partie adverse de ce qu'il a décidé de classer le dossier sans suite.

    Une copie du dossier répressif est, dans le même temps, transmis à la partie adverse.

  6. Outre le procès-verbal du 12 avril 2014, le dossier répressif contient un procès-verbal d'audition du requérant datant du 29 juillet 2014.

    Lors de cette première audition, le requérant a déclaré ce qui suit : " Vous me donnez connaissance des faits qui vous occupent et vous me demandez de me narrer ce qui est arrivé en date du 12/04/2014 à LANDEN ? Le jour des faits, je revenais de LIEGE où j'avais été travailler sur une moto dans un hangar chez un ami qui est en fait mon pilote. En revenant, je me suis arrêté sur le parking à LANDEN avec mon véhicule PEUGEOT Boxer plaque 1FGD034, après avoir été cherché une boisson à la station essence. Il s'agit d'un véhicule assez long, soit 7 mètres ne me permettant pas de me garer sur les emplacements de stationnement normaux. Je me suis donc garé à un endroit...

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