Décision judiciaire de Conseil d'État, 18 février 2016

Date de Résolution18 février 2016
JuridictionXIII
Nature Arrêt

CONSEIL D'ETAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF.

A R R E T

nº 233.864 du 18 février 2016

  1. 216.928/XIII-7432

    En cause : VANDEWYER Eric, ayant élu domicile chez Me Pascal MALLIEN, avocat, Meir 24 2000 Anvers,

    contre :

    la Région wallonne,

    représentée par son Gouvernement, ayant élu domicile chez Me Etienne ORBAN de XIVRY, avocat boulevard du Midi 29 6900 Marche-en-Famenne.

    Partie intervenante :

    la Société privée à responsabilité limitée

    SOMATO, ayant élu domicile chez Me Philippe CASTIAUX, avocat, avenue Baudouin de Constantinople 2 7000 Mons. ------------------------------------------------------------------------------------------------------ LE PRESIDENT F.F. DE LA XIIIe CHAMBRE DES REFERES,

    Vu la requête unique introduite le 11 septembre 2015 par Eric VANDEWYER en tant qu'il demande la suspension de l'exécution du permis unique délivré par le Ministre de l'Environnement, de l'Aménagement du territoire, de la Mobilité et des Transports, des Aéroports et du Bien-être animal le 7 juillet 2015 à la société privée à responsabilité limitée (S.P.R.L.) SOMATO pour la construction et l'exploitation d'une station-service et annexes, sur un bien sis à Mettet, 12c, rue de Fosses;

    Vu la requête introduite le 7 octobre 2015 par laquelle la S.P.R.L. SOMATO demande à être reçue en qualité de partie intervenante;

    XIIIr - 7432 - 1/22

    Vu la note d'observations et le dossier administratif de la partie adverse;

    Vu le rapport de M. NEURAY, premier auditeur chef de section au Conseil d'Etat, rédigé sur la base de l'article 12 de l'arrêté royal du 5 décembre 1991 déterminant la procédure en référé devant le Conseil d'Etat;

    Vu l'ordonnance du 20 novembre 2015 fixant l'affaire à l'audience du 14 décembre 2015 à 10 heures;

    Vu la notification de l'ordonnance de fixation et du rapport aux parties;

    Entendu, en son rapport, Mme GUFFENS, conseiller d'Etat;

    Entendu, en leurs observations, Me P. MALLIEN, avocat, comparaissant pour la partie requérante, Me E. ORBAN de XIVRY, avocat, comparaissant pour la partie adverse, et Me A. JAMAR, loco Me P. CASTIAUX, avocat, comparaissant pour la partie intervenante;

    Entendu, en son avis conforme, M. NEURAY, premier auditeur chef de section;

    Vu le titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées le 12 janvier 1973;

    Considérant que les faits utiles à l'examen de la demande se présentent comme suit :

    1. Le 12 juin 2013, la S.P.R.L. SOMATO introduit une demande de permis unique pour la construction et l'exploitation d'une station-service, d'un magasin et d'une cafétéria à Mettet, 12c, rue de Fosses.

      Le projet est décrit comme suit par ladite société dans sa requête en intervention :

      " [Le] projet s'implante sur une parcelle cadastrée à Mettet, division 1, section D, n° 35E sur laquelle existe déjà un bâtiment de type hangar de stockage, affecté à un petit commerce saisonnier de vente de charbon et de pellets.

      Le projet de station-service comprend un îlot de distribution de carburant, la démolition d'une demi-travée du bâtiment de type industriel existant, ainsi que 6 emplacements de stationnement qui sont prévus à la fois pour le shop [sic] de la station-service et le commerce saisonnier de pellets et charbon existant.

      Deux petits commerces sont installés sur la parcelle adjacente de gauche :

      XIIIr - 7432 - 2/22

      • un cuisiniste travaillant seul et disposant d'une petite vitrine témoin;

      • un artisan menuisier travaillant seul et ayant son habitation dans la partie extrême gauche du bâtiment de type industriel existant sur la parcelle n° D35D.

      Le projet modifie donc un bâtiment existant - une demi-travée - et s'implante également sur le solde de la parcelle.

      La parcelle concernée est située le long de la N98 qui relie les communes de Fosses-la-Ville et Mettet. Il s'agit d'une voirie de transit importante qui assure également la connexion au réseau secondaire desservant les différents quartiers bâtis.

      [...]

      Une station «OCTA +» est implantée de l'autre côté de la nationale à quelques mètres en amont".

      Suivant les rubriques de la nomenclature des installations classées, il s'agit d'un établissement de deuxième classe.

      Au plan de secteur de Namur, adopté le 14 mai 1986, le terrain est situé en zone d'habitat à caractère rural sur une profondeur de cinquante mètres et en zone agricole au-delà, les ouvrages projetés s'implantant dans la première zone.

      La commune de Mettet s'est aussi dotée d'un schéma de structure, entré en vigueur le 25 juin 2014, qui situe les lieux en zone d'habitat à forte densité.

    2. Le 12 septembre 2013, la commission consultative communale d'aménagement du territoire et de mobilité (C.C.A.T.M.) s'oppose au projet, à l'unanimité moins une voix, en retenant les arguments des riverains exposés à l'enquête publique.

    3. Le 17 octobre suivant, le rapport de synthèse des fonctionnaires technique et délégué, globalement favorable, est transmis au collège communal qui délivre le permis le 31 octobre 2013.

    4. Un recours en réformation est formé par le requérant ainsi que par l'exploitant d'une station-service située de l'autre côté de la route.

      Le 4 mars 2014, le Ministre de l'Environnement, de l'Aménagement du territoire et de la Mobilité fait droit aux recours et refuse l'autorisation sollicitée. Le Ministre prend surtout en compte les insuffisances du stationnement et de l'aire de manœuvre des véhicules, "l'exiguïté de la parcelle ne [permettant] pas d'établir avec certitude que cela n'aura pas d'impact au niveau sécurité et circulation sur la rue de Fosses".

      XIIIr - 7432 - 3/22

      Les motifs du refus contiennent aussi les précisions suivantes :

      " [...] la capacité limitée à deux emplacements pour la desserte des pompes risque d'engendrer des files à certaines heures de la journée ou certains jours de la semaine vu les prix attractifs projetés (pompes low-cost); que ces files ne pourront être totalement contenues dans le périmètre de la station vu la disposition des lieux; que la problématique sera encore accrue lors des livraisons au shop et lors du remplissage des réservoirs (camions-citernes, camionnettes); que des problèmes de mobilité sont à craindre;

      [...] le menuisier-cuisiniste qui occupe l'autre partie du hall industriel ne disposera plus que de 2 emplacements de parcage; que l'accès des véhicules de sa clientèle et de ses fournisseurs (camions) devra se faire par la station-service".

      Cette décision ne fait pas l'objet de recours.

    5. Le 7 octobre 2014, l'intervenante introduit une nouvelle demande de permis après avoir revu son projet.

      Le rapport joint à la demande expose ce qui suit :

      " Le demandeur souhaite transformer le bâtiment existant, qui comprendrait :

      - un shop de plus ou moins 80 m² au rez-de-chaussée; - une zone drive-in avec sa réserve de plus ou moins 124 m²; - une cafétéria à l'étage de plus ou moins 43 m²; - un espace de bureaux de plus ou moins 64 m²; - un sous-sol de 57 m² qui servirait de réserve pour le shop.

      La nouvelle station-service comprendrait :

      - trois îlots de distributeurs; - trois réservoirs enterrés compartimentés; - une piste en béton étanche avec des débourbeurs-séparateurs; - des pistes de circulation en hydrocarboné; - un auvent métallique avec une toiture à deux versants; - aménagement de 11 emplacements de parking afin de ne pas créer de stationnement anarchique sur le domaine public".

    6. Le nouveau projet est soumis à enquête publique du 12 au 26 janvier 2015. Il donne lieu à six réclamations qui insistent, pour l'essentiel, sur l'exiguïté de la parcelle créant un risque d'encombrement, voire d'accident sur la nationale.

    7. Après prorogation du délai, le rapport de synthèse est transmis à la commune le 2 mars 2015. Si le fonctionnaire technique ne s'oppose pas au projet, l'avis du fonctionnaire délégué est défavorable pour les motifs suivants :

      - " l'ensemble des remarques faites lors de l'enquête publique est fondé";

      XIIIr - 7432 - 4/22

      - " les multiples fonctions projetées sur la parcelle investie par le projet engendrent une problématique en termes de parking, de mobilité sur la parcelle et sur le domaine public";

      - " la parcelle semble être trop petite pour un tel projet";

      - " aucune zone tampon entre la parcelle voisine comprenant une habitation unifamiliale et le projet";

      - " aucune extension ne peut être envisagée pour l'établissement, l'implantation de places de parking sur la parcelle voisine en témoigne".

    8. Le 9 mars 2015, le collège communal de Mettet délivre le permis sollicité.

    9. Les 30 et 31 mars 2015, cette décision fait l'objet de quatre recours administratifs en réformation, entre autres, de la part du fonctionnaire délégué et du requérant.

    10. Le 13 mai suivant, la direction de la protection des sols de la direction générale opérationnelle de l'agriculture, des ressources naturelles et de l'environnement (DGO3) donne un avis réservé en raison du risque de pollution en cas d'accident ou d'inondation.

    11. Le rapport de synthèse, daté du 22 juin 2015, est défavorable.

    12. Le 7 juillet 2015, le Ministre de l'Environnement, de l'Aménagement du territoire, de la Mobilité et des Transports, des Aéroports et du Bien-être animal délivre le permis unique sollicité. Ses motifs prépondérants sont les suivants :

      " Considérant que la parcelle considérée est sise en zone d'habitat à caractère rural, sur 50 mètres de profondeur au départ de la voirie et en zone agricole pour le solde au plan de secteur de Namur [...]; que le projet s'implante en zone d'habitat à caractère rural;

      Considérant que le bien est situé en zone d'habitat à forte densité au schéma de structure communal (S.S.C.) adopté le 19 décembre 2013 et entré en vigueur en date du 25 juin 2014;

      Considérant que le bien est situé le long d'une voirie régionale (RN98);

      Considérant que la parcelle considérée n'est pas comprise en zone d'aléa d'inondation identifiée par la cartographie d'aléa d'inondation adoptée par arrêté du Gouvernement wallon en date du 19 décembre 2013; [...]

      Considérant que sur le plan urbanistique, la demande vise la...

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