Décision judiciaire de Conseil d'État, 26 janvier 2016

Date de Résolution26 janvier 2016
JuridictionVI
Nature Arrêt

CONSEIL D'ETAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF.

A R R E T

nº 233.613 du 26 janvier 2016

G./A.213.236/VI-20.260

En cause : BLANCHE Philippe,

ayant élu domicile chez

Me David FESLER, avocat, rue de France, n° 8, 6000 Charleroi,

contre :

la ville de Charleroi,

ayant élu domicile chez

Mes Marie LAMBERT de ROUVROIT et Evrard de LOPHEM, avocats, place Flagey, n° 7, 1050 Bruxelles.

------------------------------------------------------------------------------------------------------ LE CONSEIL D'ETAT, VIe CHAMBRE,

I. OBJET DE LA REQUETE

Par une requête introduite le 28 juillet 2014, Philippe BLANCHE demande l'annulation de "l'arrêté du 27 mai 2014 décrétant la fermeture de logements situés dans l'immeuble sis à 6060 GILLY, Chaussée de Lodelinsart 207 pour insécurité en matière d'incendie, prise par Monsieur le Bourgmestre de la ville de CHARLEROI".

II. PROCEDURE DEVANT LE CONSEIL D'ETAT

Les droits visés à l'article 70 de l'arrêté du Régent du 23 août 1948 déterminant la procédure devant la section du contentieux administratif du Conseil d'Etat ont été acquittés dans le délai prescrit.

Les mémoires en réponse et en réplique ont été régulièrement échangés.

Le dossier administratif a été déposé.

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M. l'Auditeur au Conseil d'Etat, Raphaël BORN, a rédigé un rapport.

Le rapport a été notifié aux parties. Elles ont déposé des derniers mémoires.

Une ordonnance du 9 décembre 2015, notifiée aux parties, fixe l'affaire à l'audience du 13 janvier 2016 à 10 heures.

M. le Président de chambre, Jacques JAUMOTTE, a exposé son rapport.

Me Stéphane RIXHON, loco Me David FESLER, avocat, comparaissant pour la partie requérante, et Me Marie LAMBERT de ROUVROIT, avocat, comparaissant pour la partie adverse, ont présenté leurs observations.

M. l'Auditeur, Raphaël BORN, a été entendu en son avis conforme.

Il est fait application du titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées le 12 janvier 1973.

III. EXPOSE DES FAITS

III.1. Le requérant indique, dans sa requête, être le propriétaire de l’immeuble sis chaussée de Lodelinsart, 207, à 6060 Gilly.

Il en occupe le rez-de-chaussée à titre professionnel, en sa qualité de courtier en assurances, et met les appartements situés aux étages en location à titre de résidence. Il s’est vu délivrer, à cet effet, un premier permis de location le 21 octobre 2003, un permis d’urbanisme le 16 mars 2004 pour transformer les étages en cinq logements, ainsi qu’un deuxième permis de location le 3 novembre 2008 portant, cette fois, sur un logement collectif de sept unités et dans lequel il est fait mention d’une attestation de conformité établie en date du 8 septembre 2008 par un enquêteur agréé.

III.2. Le 17 octobre 2013, le requérant transmet à la partie adverse une "déclaration de location ou de mise en location" qui, selon ses termes, équivaut à une demande de renouvellement du permis de location.

III.3. Le 5 novembre 2013, la partie adverse accuse réception de la demande du requérant et l’informe qu’elle a demandé, entre autres, la vérification du règlement communal arrêtant les dispositions en matière de prévention incendie et de salubrité des logements arrêté par le conseil communal de la ville de Charleroi le 25 janvier

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2010. Une visite des lieux est programmée à cette fin en la présence du requérant et des locataires éventuels.

III.4. Après plusieurs vaines tentatives, la visite des lieux se déroule le 3 mars 2014. A la suite de cette visite, le rapport établi en date du 5 mars 2014 par le Service Régional Incendie de la ville de Charleroi fait état de ce qui suit :

" Objet : Contrôle des mesures de sécurité incendie relatives à la loi du 30 juillet 79 et du règlement communal du 25/01/2010 étant donné que la situation concerne 5 logements mis en location.

A) Constatations :

Construction traditionnelle en maçonnerie avec planchers et escalier en bois (Rez + 2).

Le rez-de-chaussée est occupé par un bureau de courtage exploité par le propriétaire. Monsieur Philippe BLANCHE.

Il n'existe aucun compartimentage horizontal avec les différents niveaux, ce qui propagera rapidement un incendie à tout le bâtiment lors d'un sinistre éventuel. Les logements ne disposent pas de porte Rf et la plupart sont vitrées ! L'éclairage de sécurité et les pictogrammes sont inexistants, ce qui compromettra fortement une évacuation des occupants via la cage d'escalier.

Il n'y a aucun moyen de lutte contre l'incendie, pas d'extincteur ni de Ria, La chaufferie fuel située à la cave n'est pas compartimentée, ce qui accentuera le risque d'incendie de ce local avec comme conséquence une propagation de l'incendie aux différents niveaux non compartimentés.

Les logements situés en façade arrière ne disposent d'aucun moyen d'évacuation secondaire (échelle de secours ou escalier extérieur).

Sur conseil de son architecte, le propriétaire a placé des détecteurs optiques de fumée dans les communs, ce qui est contraire à l'AGW DE 2004. Celui-ci nous a certifié qu'il allait remédier rapidement à cette situation.

B) Avis du Service Régional d'Incendie :

  1. Chaque étage formera un compartiment Rf 1 heure. Une attention particulière sera apportée au passable de câbles et tuyauteries. 2. La cage d'escalier sera compartimentée Rf lh avec porte Rf l/2h à fermeture automatique, elle débouchera directement vers l'extérieur, La partie supérieure de la cage d'escalier doit être équipée d'une coupole de désenfumage asservie à une commande mécanique et/ou électrique.

Cette commande doit être installée à proximité de l'entrée principale et réservée plus spécialement aux sapeurs-pompiers (ouverture 1 m² min.). 3. L'accès à chaque logement doit se faire par une porte Rf l/2 heure (résistante au feu). 4. Chaque appartement disposera de détecteurs autonomes de fumée conformément à L'A.G.W. du 21/10/2004, relatif à la présence de détecteurs d'incendie dans les logements. 5. Un éclairage de sécurité par blocs autonomes sera installé de façon à baliser les dégagements, sorties et issues de secours.

Des pictogrammes conformes à l'A,R. du 17 juin 97 sur la signalisation ou bien ISO 3864 seront judicieusement répartis pour indiquer les sorties et issues de secours. 6. Un extincteur de 6 kg par niveau sera accroché au mur, à un endroit visible (ou signalé) et facile d'accès.

Il sera contrôlé annuellement par le fournisseur ou un technicien compétent.

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7. Les 2 logements situés en façade arrière doivent disposer d'une seconde possibilité d'évacuation (échelle ou autre). 8. La chaufferie fuel doit former un compartiment Rf 1 heure avec porte d'accès Rf 1 heure. Celle-ci sera sollicitée à la fermeture.

Un bac de rétention sera installé sous l'ensemble, vanne, filtre et brûleur. 9. Les installations électriques seront conformes au R.G.I.E. et contrôlées par un organisme agrée par le S.P.F. Economie (www.minecofgov.be). Les remarques éventuelles seront corrigées. 10. Des consignes en cas d'incendie seront rédigées, portées à la connaissance du personnel et affichées dans les locaux.

C) Conclusion

Au vu et au su des constatations incriminées vide supra, il appert que la situation des occupants n'est pas satisfaisante et qu'elle est gravement compromise pour les 2 logements situés en façade arrière, étant donné que ceux-ci ne disposent d'aucun moyen d'évacuation extérieur.

Il est d'autant plus interpellant que Madame DOBBELAERE du Service Logement est intervenue à titre personnel par deux fois pour nous signaler que ce bâtiment était "en ordre". En effet, Monsieur BLANCHE dispose de 2 permis de location et d'un permis d'urbanisme délivré par la ville de Charleroi, documents n'attestant en rien la sécurité incendie de ce bâtiment.".

III.5. Le 10 mars 2014, la Division du Logement de la ville de CHARLEROI adresse le courrier recommandé suivant au requérant :

" Monsieur,

Suite au rapport du Service Régional d’Incendie du 05/03/2014, dont copie en annexe, signalant que la sécurité des occupants de l'immeuble est gravement compromise, je vous informe que Monsieur le Bourgmestre envisage de prendre un arrêté de fermeture pour insécurité en matière d’incendie pour les logements situés à l'arrière de l’immeuble susvisé.

Vous êtes convoqué afin d'être entendu lors d'une audition fixée au 24/03/2014 à 14h30 sur les lieux litigieux.

Je vous prie de croire, Monsieur, à ma considération la meilleure".

III.6. Le requérant est entendu sur les lieux le 24 mars 2014. Un rapport est rédigé comme suit à la suite de cette audition:

"...

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