Décision judiciaire de Conseil d'État, 15 janvier 2016

Date de Résolution15 janvier 2016
JuridictionXV
Nature Arrêt

CONSEIL D’ÉTAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF

A R R Ê T

nº 233.490 du 15 janvier 2016

218.030/XV-2976

En cause : la s.p.r.l. MDJ, ayant élu domicile chez Mes A. HUBAUX et M. KAISER, avocats, boulevard Louis Schmidt 56 1040 Bruxelles,

contre :

  1. le bourgmestre de la ville de Mouscron, 2. la ville de Mouscron, ayant élu domicile chez Me B. VERZELE, avocat, drève Gustave Fache 3/4 7700 Mouscron.

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LE PRÉSIDENT F.F. DE LA XV e CHAMBRE SIÉGEANT EN RÉFÉRÉ,

Vu la demande introduite le 7 janvier 2016 par la s.p.r.l. MDJ, qui tend à la suspension, selon la procédure d’extrême urgence, de l’exécution de «l’arrêté de police du bourgmestre de Mouscron du 30 décembre 2015 donnant ordre à la requérante de fermer l’établissement "le Modjo" entre 00h00 et 08h00 durant une période de six semaines à dater de sa notification»;

Vu l’ordonnance du 7 janvier 2016 notifiée aux parties, convoquant celles-ci à comparaître à l’audience publique du 11 janvier 2016 à 14 heures 30;

Entendu, en son rapport, M. I. KOVALOVSZKY, conseiller d’État, président de chambre f.f.;

Entendu, en leurs observations, Me E. GOURDIN, loco Mes A. HUBAUX et M. KAISER, avocat, comparaissant pour la partie requérante, et Me B. VERZELE, avocat, comparaissant pour la partie adverse;

Entendu, en son avis conforme, M. M. JOASSART, premier auditeur au Conseil d’État;

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Vu le titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d’État, coordonnées le 12 janvier 1973;

Considérant que la requérante expose comme suit les faits de la cause:

1. L’établissement "le Modjo" est une discothèque située en périphérie immédiate de la Ville de Mouscron à côté d’un McDonald’s, non loin du Parc d’affaires Futuris et du centre commercial les Dauphins et plus précisément sise à 7700 Mouscron, boulevard Industriel, 50. Il est ouvert les vendredis, samedis et dimanches de 23 heures à 7 heures du matin environ. 2. La société requérante a été constituée en juin 2013 en vue de reprendre son exploitation de la discothèque "le Modjo". Elle a été fondée par Monsieur Anthony LANSSENS et Monsieur Alexandre CATOIRE.

Pour des raisons pratiques évidentes, la requérante a laissé la direction de l’établissement à son ancien exploitant. Monsieur Maximilien KOCISZEWSKI, pendant une année, expirant en juin 2014. C’est aussi en juin 2014 que Monsieur Alexandre CATOIRE, gérant, a effectivement repris la direction de son établissement. Il a notamment obtenu une autorisation d’exploitation en date du 13 octobre 2014. Il a aussi obtenu une attestation des pompiers favorable à l’exploitation du "Modjo" le 9 octobre 2014 3. La police locale a été appelée à plusieurs reprises pour des incidents survenus dans ou aux alentours (parfois assez loin) du "Modjo" depuis sa reprise par la requérante.

Les 5 et 16 février 2015, le gérant de la requérante a interpellé à deux reprises le Bourgmestre de Mouscron au sujet de trafic de drogue sur le parking du McDonald’s voisin du "Modjo"... en demandant une entrevue avec lui et le commissaire de police afin d’envisager les mesures à prendre. Il n’a jamais obtenu de réponse à ces interpellations.

L’on constate à la lecture du relevé des appels et des constats de police que ceux causés par l’exploitation du "Modjo" disparaissent avec le temps. Ils concernaient la musique provenant de l’établissement et d’autres incidents en son sein. Les constats liés à la sonorité excessive de la musique de l’établissement sont les répertoriées [sic] 15/2013, 1/2014, 11/2014 dans le dernier relevé. Les constats pour des faits s’étant déroulés au sein du "Modjo" sont les suivants: 3/2014, 6/2014, 7/2014, 12/2014, 14/2014, 18/2014, 22/2014 et 23/2014. Il apparaît donc clairement que depuis la reprise [...] il n’y a plus eu de constats de police causés par l’exploitation du "Modjo". Cette amélioration coïncide avec la reprise de la direction de l’établissement par Monsieur CATOIRE. 4. Un rapport administratif a été établi par les services de police le 18 juin 2015 à destination du Bourgmestre de Mouscron.

Celui-ci a convoqué le gérant de la requérante à une audition qui s’est tenue le 24 août 2015. Au cours de cette audition, il lui a notamment été reproché des interventions de police relatives (sic) à l’établissement "le Modjo". Au cours de cette audition, le gérant de la requérante s’est notamment engagé à entreprendre des travaux d’amélioration de l’acoustique afin de réduire la déperdition des basses vers l’extérieur.

Contrairement à ce qu’indique le procès-verbal de cette audition du 24 août 2015, notifié en date du 1er octobre 2015, aucun avertissement formel n’a été donné au gérant de la requérante ou à son conseil lors de cette audition. 5. Pour réduire les troubles évoqués par la partie adverse, la requérante a engagé, dès début septembre 2015, pas moins de sept personnes dont un videur, agréé par le SPF Intérieur pour effectuer des activités de gardiennage. Cela permet de disposer de huit personnes pour assurer le maintien de l’ordre au sein du "Modjo" mais aussi de trier la clientèle (notamment le public transfrontalier jugé moins respectueux). Manifestement, l’effet escompté a été atteint puisque, comme indiqué ci-avant, les services de police ne sont plus

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intervenus pour des faits s’étant déroulés au sein du "Modjo" depuis novembre 2014. 6. Le 10 novembre 2015, un rapport complémentaire a été communiqué par le commissaire d’arrondissement au bourgmestre de Mouscron au sujet du "Modjo".

L’on observe que ce rapport fait référence à des faits s’étant produits en dehors de ce dernier notamment sur le parking du McDonald’s, du centre d’affaire Futuris ou des Dauphins et à d’autres endroits de la voirie. 7. Le gérant de la requérante a été convoqué à une audition avec le bourgmestre le 14 décembre 2015. Il a demandé le report de cette audition qui a finalement été fixée le 21 décembre 2015.

Un nouveau rapport complémentaire du 16 décembre 2015 a été notifié au [gérant de la] requérante en date du 18 décembre 2015, soit le vendredi précédant l’audition du 21 décembre 2015.

Ni [dans] la convocation à l’audition ni au cours de celle-ci, il n’a été indiqué au gérant de la requérante qu’une mesure de fermeture était envisagée.

À la suite de cette audition, dont aucun procès-verbal n’a été dressé, une décision a été prise.

Il s’agit de l’acte attaqué. 8. La requérante a anticipé une éventuelle décision hostile de la partie adverse en délocalisant à grands frais la soirée de la Saint-Sylvestre vers une autre discothèque afin de ne pas subir de perte sèche sur la soirée la plus lucrative de l’année.

Le 31 décembre 2016 à 16 heures, le gérant de la requérante a eu la surprise de constater qu’un avis de fermeture avait été placardé sur la porte du "Modjo"... L’instrumentum de la décision de fermeture n’a été réceptionné par la requérante que le 4 janvier 2016.

En raison de l’acte attaqué, la requérante n’a pas pu...

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