Décision judiciaire de Conseil d'État, 15 octobre 2015

Date de Résolution15 octobre 2015
JuridictionXIII
Nature Arrêt

CONSEIL D'ETAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF.

A R R E T

nº 232.581 du 15 octobre 2015

A. 210.364/XIII-6770

En cause : BAUDINET Pierre, ayant élu domicile chez Me Jean-Marc RIGAUX, avocat, boulevard d'Avroy 270 4000 Liège,

contre :

la Région wallonne,

représentée par son Gouvernement, ayant élu domicile chez Me Martin ORBAN, avocat, Kaperberg 50 4700 Eupen. ------------------------------------------------------------------------------------------------------ LE PRESIDENT F.F. DE LA XIIIe CHAMBRE,

Vu la requête introduite le 3 octobre 2013 par Pierre BAUDINET qui demande l'annulation de la décision de refus de permis d'urbanisme prise par le Ministre de l'Environnement, de l'Aménagement du territoire et de la Mobilité, le 5 septembre 2013, pour la régularisation de la création de trois logements dans un immeuble sis à […] Liège, rue Strailhe, 3, cadastré section D, n° 589r;

Vu les mémoires en réponse et en réplique régulièrement échangés;

Vu le rapport de M. LEVAUX, auditeur adjoint au Conseil d'Etat, établi sur la base de l'article 12 du règlement général de procédure;

Vu la notification du rapport aux parties et les derniers mémoires;

Vu l'ordonnance du 14 juillet 2015, notifiée aux parties, les informant que l'affaire sera traitée par une chambre composée d'un conseiller unique et fixant celle-ci à l'audience du 23 septembre 2015 à 10 heures;

XIII - 6770 - 1/15

Entendu, en son rapport, M. PAQUES, conseiller d'Etat;

Entendu, en leurs observations, Me J.-M. RIGAUX, avocat, comparaissant pour la partie requérante, et Me G. WEISGERBER, loco Me M. ORBAN, avocat, comparaissant pour la partie adverse;

Entendu, en son avis conforme, M. LEVAUX, auditeur;

Vu le titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées le 12 janvier 1973;

Considérant que les faits utiles à l'examen de la demande se présentent comme suit :

  1. Le requérant expose être propriétaire, depuis octobre 2004, d'un immeuble sis à Liège, rue Strailhe, 3. Il indique que cet immeuble était constitué, à cette époque, de trois logements séparés.

    L'immeuble se situe en zone d'habitat et dans un périmètre d'intérêt culturel, historique et esthétique au plan de secteur de Liège.

    Le requérant ajoute qu'il a poursuivi, sans permis d'urbanisme, les rénovations de l'immeuble entamées par l'ancien propriétaire.

  2. En 2011, le requérant introduit une demande de permis de location pour les trois appartements du bâtiment litigieux.

    Le 12 octobre 2012, le collège communal de Liège refuse les permis de location, pour les motifs suivants :

    " - non-respect des critères minimaux liés aux installations électrique et de gaz;

    - le propriétaire n'est pas en mesure de présenter les attestations de conformité en vertu des réglementations en vigueur;

    - il a été créé dans l'immeuble concerné plusieurs nouveaux logements sans l'obtention préalable du permis d'urbanisme requis par l'article 84 du CWATUP[E]".

  3. Le 13 décembre 2012, le requérant introduit une demande de permis d'urbanisme ayant l'objet suivant : "pas de travaux, mais régularisation d'une situation existante".

    XIII - 6770 - 2/15

    4. Le 22 mars 2013, le collège communal de la ville de Liège refuse le permis d'urbanisme demandé. Cette décision est essentiellement motivée comme suit :

    " Considérant que la demande concerne la régularisation de trois logements dans un immeuble précédemment à vocation unifamiliale;

    Considérant que les travaux ont été réalisés sans autorisation préalable de notre assemblée;

    Considérant qu'après vérification auprès du service de la population, il apparaît que cette division a été réalisée vers l'année 2007;

    Considérant qu'aucun procès-verbal n'a été dressé;

    Considérant que l'immeuble se compose d'un rez-de-chaussée, de deux niveaux supérieurs ainsi que d'un espace sous comble; qu'il y a une emprise au sol de 46 m² au rez-de-chaussée, de plus ou moins 42 m² au 1er étage et de 39 m² au 2ème étage;

    Considérant que l'immeuble contient un petit logement d'une chambre au rez-dechaussée, un second petit logement d'une chambre au premier étage et un troisième petit logement au 2ème;

    Considérant que le projet proposé n'est pas conforme à l'article 3 du règlement communal sur les bâtisses qui stipule que : «La construction d'une maison d'habitation ne peut être entreprise que sur une parcelle satisfaisant à trois conditions : 1° se trouver à front d'une voirie publique aménagée; 2° avoir à cette voie une façade d'au moins 5 mètres de développement; 3° avoir une profondeur minimale de 12 mètres. Si la maison est construite en recul, la parcelle exclusivement affectée à la bâtisse doit avoir, sur toute la profondeur entre la voie publique et le fond de la construction, une largeur de 5 mètres au moins. L'article mentionne de plus que si les constructions existantes ne satisfont pas à ces conditions, les constructions ne pourront être ni exhaussées, ni transformées, si l'exécution des travaux doit entraîner une augmentation de la capacité - du nombre - de logement»;

    Considérant que les numéros 1 et 3 de la rue Strailhe sont des parcelles en intérieur d'îlot; que leur accès se fait via une servitude de passage sur la parcelle de l'habitation n° 5;

    Considérant que le chemin d'accès menant à l'immeuble concerné est d'une largeur de ± 2m50, donc inférieure aux 5 m requis par l'article 3 du R.C.B.; que dès lors, au vu de cette non-conformité, le bien ne peut être transformé afin d'augmenter sa capacité de logement sans dérogation;

    Considérant qu'hormis ce point, le projet propose une maximalisation du nombre de logements qui n'est pas admissible vu la configuration de l'immeuble;

    Considérant que le projet ne constitue pas un bon aménagement des lieux et ne répond pas aux attentes de notre politique en matière de logement;

    Considérant que le projet proposé ne constitue pas en un bon aménagement des lieux;

    XIII - 6770 - 3/15

    Conclusion

    Considérant :

    - l'ensemble des travaux réalisés sans autorisation préalable; - que le nombre de logements proposé n'est pas admissible au vu de la configuration de l'immeuble; - que le projet n'est pas conforme au règlement communal sur les bâtisses; - que les logements proposés ne répondent pas aux critères de bonne habitabilité que tout nouveau logement doit proposer; - que le projet proposé ne constitue pas en un bon aménagement des lieux; - qu'au vu de la surface des divers niveaux de l'immeuble concerné, de l'implantation de la parcelle, mais aussi et surtout de la typologie de l'immeuble en lui-même, il apparaît que celui-ci doit retrouver son caractère d'immeuble unifamilial.

    Considérant que les travaux ne sont pas admissibles pour l'endroit considéré".

  4. Par courrier du 6 mai 2013, le requérant introduit un recours administratif à l'encontre de ce refus.

    Le requérant y fait essentiellement valoir ce qui suit :

    - aucun élément n'indique en quoi la configuration de l'immeuble empêche la réalisation de quatre logements;

    - il ignore si ces logements "étaient préalables à 1994" et affirme que si oui, aucun permis n'était nécessaire et sinon un permis a nécessairement dû être accordé;

    - l'immeuble "n'a soit jamais, soit depuis très longtemps, été affecté à une maison unifamiliale". Au contraire, il aurait toujours été configuré comme devant abriter plusieurs logements;

    - quel que soit le nombre de logements, à partir du moment où l'immeuble a été construit comme tel et ne comporte aucun changement sur le plan de la stabilité des structures ou de la modification des volumes construits, il n'y aurait pas de dérogation à l'article 3 du règlement communal sur les bâtisses. En effet, l'immeuble existerait depuis les années 30 et aurait nécessairement été habité depuis lors;

    - le bien répondrait aux critères de bonne habitabilité et en outre, en motivant sa décision par rapport à ce critère, le collège communal empièterait sur sa compétence relative au permis de location;

    - l'affirmation selon laquelle le projet ne constitue pas un bon aménagement des lieux ne donnerait lieu à aucune explication quant aux attentes de la ville de Liège. Le requérant souligne...

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