Décision judiciaire de Conseil d'État, 31 mars 2015

Date de Résolution31 mars 2015
JuridictionVIII
Nature Arrêt

CONSEIL D'ÉTAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF.

A R R Ê T

nº 230.693 du 31 mars 2015

  1. 210.698/VIII-8999

En cause : LELOUTRE Paul, ayant élu domicile chez Me Thierry FRANKIN, avocat, avenue Brugmann 451 1180 Bruxelles,

contre :

la commune d'Ixelles, représentée par son collège des bourgmestre et échevins, ayant élu domicile chez Mes Philippe LEVERT et Pierre-Emmanuel PARIS, avocats, avenue Louise 149/22 1050 Bruxelles.

------------------------------------------------------------------------------------------------------ LE CONSEIL D'ÉTAT, VIIIe CHAMBRE,

Vu la requête unique introduite le 7 novembre 2013 par Paul LELOUTRE tendant, d'une part, à la suspension, selon la procédure d'extrême urgence, de l'exécution de "la décision du collège communal d'Ixelles qui aurait été prise le 24 octobre 2013, notifiée au requérant le 31 octobre 2013, et transmise à son conseil le 4 novembre 2013, par laquelle le Conseil communal de la Commune d'Ixelles décide de ne pas suivre l'avis de la Chambre de recours, ni sa motivation, et en conséquence décide d'infliger à son encontre «la sanction de la suspension par motif disciplinaire d'une durée d'un an à partir du 1er novembre 2013»" et, d'autre part, à l'annulation de cette décision;

Vu l'arrêt nº 225.538 du 20 novembre 2013 rejetant la demande de suspension d'extrême urgence;

Vu la demande de poursuite de la procédure introduite par la partie requérante;

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Vu les mémoires en réponse et en réplique régulièrement échangés;

Vu le rapport d'Erik BOSQUET, premier auditeur au Conseil d'État, rédigé sur la base de l'article 12 du règlement général de procédure;

Vu la notification du rapport aux parties et le dernier mémoire de la partie requérante;

Vu l'ordonnance du 10 février 2015 fixant l'affaire à l'audience publique du 27 mars 2015;

Entendu, en son rapport, Jacques VANHAEVERBEEK, président de chambre;

Entendu, en leurs observations, Me Thierry FRANKIN, avocat, comparaissant pour la partie requérante, et Me Philippe LEVERT, avocat, comparaissant pour la partie adverse;

Entendu, en son avis conforme, Erik BOSQUET, premier auditeur;

Vu le titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'État, coordonnées le 12 janvier 1973;

Considérant que les faits utiles à l'examen du recours ont été exposés dans l'arrêt n° 225.538 précité; qu'il y a lieu de s'y référer;

Considérant qu'il ressort du dossier administratif que le requérant a été admis à la retraite le 1er décembre 2013 de sorte que la décision attaquée, qui le suspend de ses fonctions de directeur de l'Institut d'enseignement technique René CARTIGNY pour une durée d'un an, à compter du 1er novembre 2013, n'a en réalité produit ses effets que pendant un mois; que le requérant conserve toutefois, après sa mise à la retraite, un intérêt à tout le moins moral, à obtenir l'annulation d'une sanction disciplinaire qui l'a frappé et qui a eu un début d'exécution;

Considérant que le requérant prend un premier moyen, "sous réserve de la consultation du dossier administratif lorsque son dépôt aura été ordonné, de la violation de l'article 33 de la Constitution, des articles 87 et 90 de la Nouvelle Loi Communale et des articles 1 à 3 de la loi du 29 juillet 1991 [relative à la motivation formelle des actes administratifs], de l'article 65, § 4, du décret du 6 juin 1994 fixant le statut des membres du personnel subsidiés de l'enseignement officiel

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subventionné, de la violation du principe général de droit selon lequel les autorités administratives sont tenues de statuer dans un délai raisonnable, de l'incompétence de l'auteur de l'acte, de l'excès de pouvoir et du détournement de procédure administrative"; qu'il fait valoir que la décision attaquée est le fruit d'une procédure qui n'a d'abord pas été diligentée, puis, après un écoulement d'un long délai, où se sont multipliées les convocations "urgentes" pour tenir un conseil communal, successivement les 5, 12 et 19 novembre 2009, visant à sanctionner le requérant et qu'enfin, après l'arrêt n° 220.373 du 24 juillet 2012, la partie adverse a décidé de reprendre la procédure pour opérer une réfection de la sanction annulée en ne respectant pas un délai raisonnable; que, selon lui, cette façon d'agir n'est pas respectueuse des dispositions et des principes visés au moyen; qu'il rappelle que la procédure disciplinaire a été entamée le 26 mai 2008, donc rapidement après les faits survenus les 13 et 22 mai 2008, ce qui lui fait présumer que la partie adverse a très vite disposé des "attestations qui lui paraissaient suffisantes" pour justifier l'entame d'une telle procédure, mais que par la suite elle a fait preuve d'inertie et s'est contentée de prolonger les décisions de suspension préventive dont il faisait l'objet sans qu'aucun devoir destiné à compléter le dossier disciplinaire ne soit accompli; qu'il précise "qu'une bonne part du délai qui a couru était motivé par l'inertie de la partie adverse, et par le fait que des pourparlers transactionnels étaient tenus", alors que des négociations n'auraient pas dû avoir lieu si les éléments résultant de l'enquête disciplinaire avaient été suffisants; qu'il ajoute que le report de la première audition prévue le 19 février 2009 ne s'est pas fait à sa demande et que le seul report qu'il a demandé concernait l'audition prévue le 19 mars 2009, ce report ayant été justifié par l'état de fatigue (attesté par un certificat médical) dans lequel l'avait plongé la procédure disciplinaire; qu'il considère que vu le laps de temps qui s'est écoulé entre l'ouverture de la procédure disciplinaire et la sanction aujourd'hui attaquée, cela n'a pu que nuire à l'exercice de ses droits de la défense avec un risque de déperdition des preuves et des témoignages de moins en moins fiables; qu'il affirme que la partie adverse a fait preuve d'une inertie coupable qu'elle a tenté de couvrir notamment par la plainte pénale déposée contre lui par l'échevine de l'instruction publique, plainte qui a finalement fait l'objet d'un "classement vertical", avec en bout de course une constitution de partie civile entre les mains d'un juge d'instruction et une décision pénale concluant au caractère politique des propos tenus; que dans son mémoire en réplique, il rappelle les principes qu'il évoquait au développement du moyen, ainsi que sa critique de chaque étape de la procédure menée par la partie adverse, où il apparaît que loin d'instruire son dossier disciplinaire "toutes affaires cessantes", elle négociait pour obtenir conventionnellement sa démission et qu'il en est résulté des retards injustifiés entre la connaissance des faits érigés en griefs disciplinaires et la manière dont la procédure était diligentée; qu'il rappelle, par ailleurs, que les griefs disciplinaires sont formulés depuis le 25 mai 2008 et que la circonstance que la décision illégale

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n'a été annulée par le Conseil d'État que le 24 juillet 2012, ne lui est pas imputable; qu'il ajoute que la durée de la procédure devant le Conseil d'État, qui n'est pas davantage de son fait, constitue un élément dont il ne peut être fait abstraction pour l'appréciation du caractère raisonnable du délai; qu'il n'apporte aucun argument nouveau dans son dernier mémoire;

Considérant qu'il y a lieu de distinguer la période qui précède l'arrêt n° 220.373 du 24 juillet 2012 annulant notamment la décision du conseil communal d'Ixelles du 19 novembre 2009 infligeant au requérant la peine disciplinaire de rétrogradation en tant que directeur de l'institut d'enseignement technique René CARTIGNY, avec effet au 1er décembre 2009, de celle qui la suit; que pour la période qui le précède, le dossier administratif fait clairement apparaître que la partie adverse a décidé d'entamer des poursuites disciplinaires très rapidement après les premiers faits reprochés qui se sont déroulés les 13 et 22 mai 2008, que le directeur f.f. de l'instruction publique, Olivier KINARD, a...

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