Décision judiciaire de Conseil d'État, 14 juillet 2014

Date de Résolution14 juillet 2014
JuridictionXIII
Nature Arrêt

CONSEIL D'ETAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF.

A R R E T

nº 228.080 du 14 juillet 2014

A. 211.787/XIII-6916

En cause : 1. MULQUIN Joël, 2. THIEBAUX Philippe, 3. LEGROS Marie-Anne, 4. ANTOINE Cédric, 5. CASSEL Bernard, 6. RODRIGUEZ Dayana, 7. FRIART Laurent, 8. HARGOTTA Lionel, 9. HENAUT Jean-Claude, 10. WANDERPEPEN Guy, ayant tous élu domicile chez Me Jacques SAMBON, avocat, rue des Coteaux 227 1030 Bruxelles,

contre :

la Région wallonne, représentée par son Gouvernement, ayant élu domicile chez Me Pierre MOËRYNCK, avocat, avenue de Tervueren 34/27 1040 Bruxelles.

Partie intervenante :

la Société anonyme

KDE ENERGY BELGIUM, ayant élu domicile chez Mes Monique KESTEMONT et Michel KAROLINSKI, avocats, galerie du Roi 30 1000 Bruxelles. ------------------------------------------------------------------------------------------------------

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LE PRESIDENT F.F. DE LA XIII e CHAMBRE,

Vu la requête unique introduite le 27 février 2014 par Joël MULQUIN, Philippe THIEBAUX, Marie-Anne LEGROS, Cédric ANTOINE, Bernard CASSEL, Dayana RODRIGUEZ, Laurent FRIART, Lionel HARGOTTA, Jean-Claude HENAUT et Guy WANDERPEPEN qui demandent l'annulation et la suspension de l'exécution du permis unique délivré sur recours, le 9 décembre 2013, par le Ministre de l'Environnement, de l'Aménagement du territoire et de la Mobilité, à la société anonyme (S.A.) KDE ENERGY BELGIUM pour l'implantation et l'exploitation d'un parc de 4 éoliennes et une cabine de tête dans un établissement situé entre les rues de la Goëtte et Gobert, à Sivry-Rance/Grandrieu;

Vu la requête introduite le 20 mars 2014 par laquelle la S.A. KDE ENERGY BELGIUM demande à être reçue en qualité de partie intervenante;

Vu la note d'observations et le dossier administratif de la partie adverse;

Vu le rapport de M. LEVAUX, auditeur adjoint au Conseil d'Etat, rédigé sur la base de l'article 93 du règlement général de procédure;

Vu l'ordonnance du 13 mai 2014 convoquant les parties à comparaître à l'audience publique du 4 juin 2014 à 10 heures;

Vu la notification de cette ordonnance et du rapport aux parties;

Entendu, en son rapport, M. PAQUES, conseiller d'Etat;

Entendu, en leurs observations, Me J. SAMBON, avocat, comparaissant pour les parties requérantes, Me N. DIERCKX, loco Me P. MOËRYNCK, avocat, comparaissant pour la partie adverse, et Me M. KAROLINSKI, avocat, comparaissant pour la partie intervenante;

Entendu, en son avis conforme, M. LEVAUX, auditeur adjoint;

Vu le titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées le 12 janvier 1973;

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Considérant que les faits utiles à l'examen de la demande se présentent comme suit :

  1. Le 8 janvier 2013, la S.A. KDE ENERGY BELGIUM introduit une demande de permis unique ayant pour objet l'implantation d'un parc éolien à SivryRance, composé de 4 éoliennes et d'une cabine de tête.

    Le formulaire de demande précise que "les éoliennes sont implantées entre le village de Grandrieu et la frontière franco-belge et se trouvent à une distance supérieure à 500 m des habitations".

    La demande est accompagnée d'une étude d'incidences. Cette étude décrit le projet comme suit :

    " le projet vise l'installation de 4 éoliennes identiques pour une puissance totale comprise entre 8 et 10 MW (4 x 2 à 2,5 MW). La puissance installée exacte dépendra du choix précis du modèle de machine, selon les possibilités du marché au moment de la commande. Toute l'électricité verte produite sera injectée sur le réseau".

    L'étude précise par ailleurs que :

    " pour les diverses incidences sur l'environnement, passée en revue dans cette étude, nous baserons notre évaluation sur les hypothèses de travail les plus contraignantes de sorte à envisager le cas où les incidences seraient maximales".

    Le projet se situe en zone agricole au plan de secteur du Thuin-Chimay.

  2. Il est accusé réception de la demande le 28 janvier 2013.

  3. Une enquête publique est organisée : - du 8 février au 11 mars 2013 par la commune de Froidchapelle; - du 6 février au 7 mars 2013 par la commune d'Erquelinnes; - du 8 février au 11 mars 2013 par la ville de Beaumont; - du 8 février au 11 mars 2013 par la commune de Sivry-Rance; - du 8 février au 11 mars 2013 par la ville de Walcourt.

  4. Le collège communal d'Erquelinnes émet un avis défavorable sur la demande le 8 mars 2013.

    Le collège communal de Beaumont émet un avis défavorable sur la demande le 12 mars 2013.

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    Le collège communal de Sivry-Rance émet un avis favorable sur le projet le 20 mars 2013.

    Le collège communal de Walcourt émet un avis défavorable sur la demande le 21 mars 2013.

  5. Le 4 février 2013, la direction du développement rural - département de la ruralité et des cours d'eau - du service public de Wallonie (S.P.W.) émet un avis favorable sur le projet, considérant que "la demande n'est pas susceptible de mettre en péril la zone agricole à cet endroit".

    Le 14 février 2013, la cellule bruit du S.P.W. émet un avis favorable sous condition. Elle indique que "les simulations acoustiques réalisées pour chaque modèle d'éolienne permettent de constater que les normes de bruit sont globalement respectées à l'exception d'un léger dépassement de 0,2 dB(A) pour le modèle Enercon E82 2,3MW et à une vitesse du vent de 7 m/s".

    Le 25 février 2013, le conseil wallon de l'environnement pour le développement durable (CWEDD) juge l'étude d'incidences de bonne qualité et émet un avis favorable conditionnel sur l'opportunité environnementale du projet.

    Le 18 février 2013, la commission consultative communale d'aménagement du territoire et de la mobilité (C.C.A.T.M.) de Sivry-Rance émet un avis défavorable.

    Le 28 mars 2013, la commission royale des monuments, sites et fouilles (C.R.M.S.F.) émet un avis défavorable sur le projet, dès lors qu'"il lui paraît primordial de conserver le caractère paysager structuré en bocage à cet endroit".

    Le 30 mars 2013, le département de la nature et des forêts (D.N.F.) émet un avis défavorable sur le projet "vu l'absence de propositions concrètes et exécutables pour la mise en place des mesures de compensation vis-à-vis de l'avifaune".

    Le 5 avril 2013, la cellule prévention des pollutions et protection des paysages de la préfecture du département du Nord (France) émet un avis défavorable basé sur les avis du parc naturel de l'Avesnois et du service territorial de l'architecture et du patrimoine du Nord où on lit ce qui suit :

    " [...] considérant l'envergure du projet et les effets écologiques et paysagers cumulés avec les parcs éoliens voisins. En effet, la construction de structures hors

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    échelle, fortement impactantes, risqueraient de créer un «fond de décor» peu qualitatif et une banalisation définitive du paysage.

    Par ailleurs, l'étude diagnostic paysagère et écologique s'avère très insuffisante pour évaluer pleinement les incidences de ce projet sur le patrimoine naturel";

  6. Le 14 juin 2013, les fonctionnaires technique et délégué prorogent de 30 jours le délai de notification de leur décision.

  7. Le 8 juillet 2013, le fonctionnaire délégué émet un avis défavorable sur la demande et refuse la dérogation; qu'il expose ce qui suit :

    " Considérant au regard de l'étude réalisée au niveau régional par la Faculté universitaire de Gembloux sous la direction du Professeur C. FELTZ et visant notamment à établir, sur la base d'une analyse de contraintes humaines, paysagères et environnementales, une cartographie des zones prioritaires pour l'implantation d'éoliennes, que l'implantation proposée dans le cadre de la présente demande se révèle peu pertinente dès lors que les 4 éoliennes projetées se situent dans une zone dite d'exclusion en raison de la présence d'un périmètre représentatif de la diversité des paysages ruraux wallons qu'il importe de protéger de l'implantation de parcs éoliens; que de ce point de vue, confirmé par ailleurs par les avis de la Commission Royale des Monuments, Sites et Fouilles et de la Cellule prévention des pollutions et protection des paysages de la République française; que le projet ne s'inscrit pas dans le respect du cadre de références, lequel a ici pour but justement de protéger l'intégrité du paysage bocager remarquable mieux décrit par ailleurs;

    Considérant, au vu de ce qui précède que, compte tenu des circonstances architecturales et urbanistiques locales, le projet compromet la destination générale de la zone et son caractère architectural".

  8. Par une décision du 12 juillet 2013, les fonctionnaires technique et délégué refusent le permis...

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