Décision judiciaire de Conseil d'État, 27 mars 2014

Date de Résolution27 mars 2014
JuridictionXIII
Nature Arrêt

CONSEIL D'ETAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF.

A R R E T

nº 226.928 du 27 mars 2014

A. 209.202/XIII-6649

En cause : VAN AEFFERDEN Albert, ayant élu domicile chez Me Heinz-Georg VEIDERS, avocat, Major-Long-Strasse 38 4780 Saint-Vith,

contre :

la Région wallonne, représentée par son Gouvernement, ayant élu domicile chez Me Martin ORBAN, avocat, Kaperberg 50 4700 Eupen.

------------------------------------------------------------------------------------------------------ LE CONSEIL D'ETAT, XIIIe CHAMBRE,

Vu la requête introduite le 1er juin 2013 par Albert VAN AEFFERDEN qui demande l'annulation de l'arrêté du Ministre wallon de l'Environnement, de l'Aménagement du territoire et de la Mobilité du 2 avril 2013 délivrant à la société anonyme (S.A.) REPROCOVER un permis unique visant à implanter et exploiter une entreprise de prétraitement de déchets inertes et de déchets non dangereux (maximum 10.000 tonnes/par an au total) sur un bien situé rue de la Gare 87 à Plombières/Montzen;

Vu les mémoires en réponse et en réplique régulièrement échangés;

Vu le rapport de M. NIKIS, premier auditeur au Conseil d'Etat, établi sur la base de l'article 12 du règlement général de procédure;

Vu la notification du rapport aux parties et les derniers mémoires;

Vu l'ordonnance du 4 février 2014, notifiée aux parties, fixant l'affaire à l'audience du 20 mars 2014 à 09.30 heures;

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Entendu, en son rapport, M. HANOTIAU, président de chambre;

Entendu, en leurs observations, Me H.-G. VEIDERS, avocat, comparaissant pour la partie requérante, et Me G. WEISGERBER, loco Me M. ORBAN, avocat, comparaissant pour la partie adverse;

Entendu, en son avis conforme, M. NIKIS, premier auditeur;

Vu le titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées le 12 janvier 1973;

Considérant que les éléments de la cause se présentent comme suit :

  1. Le 4 juin 2012, la S.A. REPROCOVER introduit une demande de permis unique pour implanter et exploiter une entreprise de prétraitement de déchets inertes et de déchets non dangereux (max. 50.000 tonnes/an) dans un établissement situé à Plombières/Montzen, rue de la Gare, 87, sur le site de l'ancienne gare de Montzen. Le formulaire de demande de permis précise :

    " Le projet consiste à valoriser des déchets industriels non dangereux ainsi que des déchets inertes pour la production de mobilier urbain, d'accessoires pour les systèmes d'égouttage et de distribution d'eau, etc. Dans l'établissement objet de la demande, les déchets sont entreposés et prétraités. Les étapes suivantes de fabrication des produits sont réalisées dans l'installation REPROCOVER de Henri-Chapelle. Parmi les déchets utilisés, on utilisera principalement des matières non thermoplastes et des fibres de verre".

    Quant au permis d'urbanisme, il est requis en raison d'un changement d'affectation des bâtiments existants (infrastructure ferroviaire).

  2. Le 26 juin 2012, les fonctionnaires technique et délégué signalent au demandeur de permis que son dossier est incomplet.

    Le 27 août 2012, le dossier est déclaré complet et recevable.

  3. Une enquête publique est organisée du 12 au 26 septembre 2012, prolongée jusqu'au 8 octobre 2012 pour les motifs suivants repris dans la délibération du collège communal de Plombières du 26 septembre 2012 :

    " Considérant que l'enquête publique, d'une durée de 15 jours, doit être annoncée, dans les cinq jours de la réception de l'accusé complet et recevable, par un avis affiché au plus tard cinq jours avant le début de l'enquête publique et pendant toute la durée de celle-ci;

    Vu l'avis de l'enquête publique organisée du 12/09/2012 au 26/09/2012;

    XIII - 6649 - 2/27

    Vu la lettre du 25/09/2012 par laquelle trois réclamants signalent que l'affichage sur place a seulement été effectué le 13/09/2012;

    Considérant que l'affichage sur place a effectivement été réalisé le 13/09/2012 suite à un problème technique; que les délais d'affichage n'ont dès lors pas été respectés;

    Considérant qu'il y a dès lors lieu de prolonger la durée de l'enquête publique afin de respecter les délais impartis en matière d'affichage".

  4. Les avis suivants sont donnés : le service régional d'incendie, le 10 septembre 2012; la cellule bruit de la direction de la prévention des pollutions de la direction générale opérationnelle de l'agriculture, des ressources naturelles et de l'environnement (DGO3), avis défavorable le 20 septembre 2012, puis avis favorable le 9 octobre 2012 à la suite des compléments d'informations fournis par l'exploitant en cours d'instruction de la demande; l'agence wallonne de l'air et du climat, avis favorable conditionnel le 25 septembre 2012; la commission consultative communale d'aménagement du territoire et de mobilité (C.C.A.T.M.), avis favorable conditionnel le 2 octobre 2012; le département du sol et des déchets de la direction de la protection des sols, avis favorable conditionnel le 24 octobre 2012; l'office wallon des déchets, avis favorable les 11 octobre et 14 décembre 2012.

  5. Les fonctionnaires technique et délégué décident, le 20 novembre 2012, de proroger de 30 jours le délai de notification de leur décision.

    Le 18 décembre 2012, les fonctionnaires technique et délégué délivrent, à la S.A. REPROCOVER, le permis unique sous certaines conditions. Cette décision est affichée du 28 décembre 2012 au 16 janvier 2013.

  6. Plusieurs recours administratifs sont introduits contre cette décision, les 14, 15 et 16 janvier 2013. Le dernier recours est réceptionné le 18 janvier 2013.

    Le 4 mars 2013, la direction générale de l'aménagement du territoire, du logement, du patrimoine et de l'énergie (DGO4) donne un avis favorable.

    Le 7 mars 2013, l'agence wallonne de l'air et du climat donne un avis favorable.

    Le rapport de synthèse des fonctionnaires technique et délégué est transmis le 11 mars 2013.

  7. Le 2 avril 2013, le Ministre wallon de l'Environnement, de l'Aménagement du territoire et de la Mobilité déclare recevable certains recours,

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    modifie la décision des fonctionnaires technique et délégué du 18 décembre 2012 et délivre le permis unique à la S.A. REPROCOVER sous certaines conditions. Il s'agit de l'acte attaqué, qui est notifié à la partie requérante le 2 avril 2013.

    L'acte attaqué limite à 10.000 tonnes par an la quantité de déchets inertes et non dangereux. En outre, l'acte attaqué impose un itinéraire pour les camions qui desservent le site et qui en partent :

    " Considérant toutefois que, même si l'ensemble du charroi lié à l'exploitation n'est en rien problématique, la traversée du centre de Montzen, vu sa configuration, l'étroitesse de certaines rues et la présence sur l'itinéraire de trois ponts également étroits, doit être évitée; que dès lors, l'itinéraire «alternatif» empruntant l'avenue de l'Europe, la rue de Langhaag, Bambusch pour rejoindre la N3 - rue de Liège doit être le seul autorisé; qu'il doit dès lors être imposé dans le permis;

    Considérant que cette imposition est, dans la pratique, tout à fait réaliste dans son application dans la mesure où le nombre d'intervenants dans le charroi lié à l'activité de REPROCOVER sur le site de Montzen est très réduit; qu'en effet, il s'agit, soit du fabricant de pièces en bakélite sus-évoqué, soit d'une société de regroupement et de tri de déchets tel que la société VAN GANSEWINKEL par exemple; que dès lors, il est tout à fait possible que ces «intervenants» en nombre très réduit soient informés de l'obligation d'emprunter l'itinéraire en question;

    [...]

    L'exploitant prend toutes les dispositions (consignes aux fournisseurs, impositions à son personnel chargé du transport, ...) pour que le charroi des matières entrantes et sortantes emprunte exclusivement l'itinéraire suivant Bambusch (N613), rue Langhaag (N613) et avenue de l'Europe, de manière à exclure le passage de ces camions dans le village de Montzen. La traversée du village de Montzen par tout transport de matières (entrantes ou sortantes) relatives à l'activité visée par le présent permis est strictement interdite, sauf en cas d'impossibilité absolue (accident de grande ampleur, travaux, ...) résultant d'une déviation temporaire mise en place par une autorité compétente en la matière (SPW, autorité communale, police ...)";

    Considérant que la partie adverse soulève une exception d'irrecevabilité du recours pour tardiveté;

    Considérant que l'acte attaqué a été notifié à la partie requérante le 2 avril 2013 et présumé reçu par elle le 3 avril 2013; que le délai de recours, de soixante jours, expirait le dimanche 2 juin 2013 et était prorogé au premier jour ouvrable suivant; qu'introduit le samedi 1er juin 2013, le recours est recevable; que l'exception ne peut être accueillie;

    Considérant que la partie requérante prend un premier moyen de la violation des formes substantielles et prescrites à peine de nullité et de l'absence d'étude d'incidences sur l'environnement (violation de l'article D.68 du Code de l'environnement et du "contenu minimum des annexes VI et VII de ce même Code de l'environnement"); qu'elle écrit ce qui suit :

    XIII - 6649 - 4/27

    " La demande initiale introduite par la S.A. REPROCOVER en date du 4 juin 2012 visait la délivrance d'un permis unique «pour implanter et exploiter une entreprise de prétraitement de déchets inertes et de déchets non dangereux».

    Les investigations administratives ont cependant déterminé dans le cadre de la procédure de recours devant le Ministre compétent qu'en réalité le projet concernait non pas le prétraitement de déchets, mais en réalité déjà des mesures effectives de traitement de déchets (broyage et granulation).

    Ces investigations ont également déterminé que même si en principe les déchets à traiter sont inertes et devraient être non dangereux, ils sont en réalité et en tout cas deviennent toxiques par les traitements de broyage et de granulation.

    Au termes des investigations de l'AWAC le dégagement de gaz toxiques fait passer les produits stockés suite à une manipulation technique de la...

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