Décision judiciaire de Conseil d'État, 17 mars 2008

Date de Résolution17 mars 2008
JuridictionV
Nature Arrêt

CONSEIL D'ÉTAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF.

A R R Ê T

no 181.175 du 17 mars 2008 A. 179.660/V-1726

En cause : la RADIO-TÉLÉVISION BELGE DE LA

COMMUNAUTÉ FRANÇAISE (RTBF), ayant élu domicile chez Me F. TULKENS, avocat, chaussée de la Hulpe 177/6, 1170 Bruxelles,

A. 179.661/V-1727

En cause : la Communauté française, représentée par son Gouvernement, ayant élu domicile chez Me F. TULKENS, avocat, chaussée de la Hulpe 177/6, 1170 Bruxelles,

contre (dans les deux affaires) :

la Communauté flamande, représentée par le Gouvernement flamand, ayant élu domicile chez Me B. STAELENS, avocat, Stockhouderkasteel, Gerard Davidstraat 46/1, 8000 Bruges.

parties intervenantes (dans les deux affaires) :

  1. NV 4FM GROEP, 2. NV VLAAMSE MEDIA MAATSCHAPPIJ, ayant toutes deux élu domicile chez Me T. DE CORDIER, avocat, avenue de Tervueren 268 A 1150 Bruxelles.

    LE CONSEIL D'ÉTAT, V e CHAMBRE,

    Vu la requête introduite le 22 décembre 2006 par laquelle la

    V-1726-1/21

    Radio-Télévision belge de la Communauté française (RTBF) demande la suspension de l'exécution de l'arrêté du gouvernement flamand du 1er septembre 2006 fixant le nombre de radiodiffuseurs privés communautaires, régionaux et locaux qui peuvent être agréés et déterminant les plans de fréquences et les paquets de fréquences et les fréquences mis à la disposition des radiodiffuseurs privés communautaires, régionaux et locaux (affaire A. 179.660/V-1726);

    Vu la requête que la Communauté française a introduite le même jour pour demander la suspension de l'exécution du même arrêté (affaire A. 179.661/V-1727);

    Vu les requêtes introduites simultanément par lesquelles les mêmes parties requérantes demandent l'annulation du même arrêté;

    Vu les notes de la partie défenderesse;

    Vu les rapports de M. W. WEYMEERSCH, auditeur;

    Vu la notification des rapports aux parties;

    Vu les ordonnances du 27 septembre 2007, fixant les affaires à l'audience du 18 octobre 2007;

    Entendu M. P. LEMMENS, président de chambre, en son rapport;

    Entendu, en leurs observations, Me F. TULKENS, avocat, qui comparaît pour les parties requérantes, Me B. STAELENS, avocat, qui comparaît pour la partie défenderesse, Me T. DECORDIER, qui comparaît pour les parties intervenantes, et Me Chr. LESAFFER, avocat, loco Me F. VAN ELSEN, avocat, qui comparaît également pour les parties intervenantes;

    Entendu, M. W. WEYMEERSCH, auditeur, en son avis;

    V-1726-2/21

    Vu les articles 17 et 18 et le titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'État, coordonnées le 12 janvier 1973,

    CONSIDÈRE CE QUI SUIT :

    Les faits

  2. L'article 32 des décrets relatifs à la radiodiffusion et à la télévision, coordonnés le 4 mars 2005, dispose que le Gouvernement flamand établit les plans de fréquences, les approuve et fixe le nombre des radiodiffuseurs communautaires, régionaux et locaux pouvant être agréés. Le Gouvernement flamand octroie ensuite les agréments sur la base des plans de fréquences et du nombre de radiodiffuseurs privés à agréer.

    Le 1er septembre 2006, le gouvernement flamand a adopté, en application de cette disposition décrétale, un arrêté "fixant le nombre de radiodiffuseurs privés communautaires, régionaux et locaux qui peuvent être agréés et déterminant les plans de fréquences et les paquets de fréquences et les fréquences mis à la disposition des radiodiffuseurs privés communautaires, régionaux et locaux".

    L'article 1er de cet arrêté détermine le nombre de radiodiffuseurs communautaires, de radiodiffuseurs régionaux par province et de radiodiffuseurs locaux que le Gouvernement flamand peut agréer. L'article 2 prévoit que pour les radiodiffuseurs privés communautaires, régionaux et locaux, le plan de fréquences est fixé conformément à la liste de fréquences, avec mention de la localité concernée, figurant à l'annexe I de l'arrêté. L'article 3 dispose qu'il est attribué à chacun des (deux) radiodiffuseurs communautaires un des paquets de fréquences mentionnés à l'annexe II. L'article 4 énonce qu'il est attribué à chacun des (deux) radiodiffuseurs régionaux, par province, les fréquences (lire : les paquets de fréquences) mentionnées à l'annexe III. L'article 5 prévoit qu'il est attribué à chacun des radiodiffuseurs locaux une des fréquences mentionnées à l'annexe IV.

    V-1726-3/21

    L'article 6 de l'arrêté précité abroge deux arrêtés : l'arrêté du Gouvernement flamand du 8 juin 2001 fixant le nombre de radiodiffuseurs communautaires qui peuvent être agréés et déterminant les plans de fréquences et les paquets de fréquences et les fréquences mis à la disposition des radiodiffuseurs communautaires, et l'arrêté du Gouvernement flamand du 18 juillet 2003 fixant le nombre de radiodiffuseurs privés communautaires, régionaux et locaux qui peuvent être agréés et déterminant les plans de fréquences et les paquets de fréquences et les fréquences mis à la disposition des radiodiffuseurs privés communautaires, régionaux et locaux. L'exécution du premier arrêté a été partiellement suspendue par arrêt n/ 105.634 du Conseil d'État, du 18 avril 2002, et l'arrêté lui-même a ensuite été abrogé par le deuxième arrêté. L'exécution du deuxième arrêté a été suspendue par arrêt n/ 153.065 du Conseil d'État, du 21 décembre 2005.

    Selon l'article 7 de l'arrêté du 1er septembre 2006, cet arrêté produit ses effets le 25 juillet 2003. Cet arrêté rétroagit donc jusqu'à l'entrée en vigueur de l'arrêté suspendu du 18 juillet 2003.

    L'arrêté du 1er septembre 2006 fait l'objet de la demande à l'examen.

  3. Il y a lieu de lire l'arrêté attaqué dans son contexte.

    2.1. Cet arrêté comporte, comme l'arrêté précité du gouvernement flamand du 18 juillet 2003, un certain nombre de modifications de fréquences existantes. À l'époque de la préparation de ce dernier arrêté, il fallait, lors de l'adoption de telles modifications, tenir compte de l'obligation imposée par l'article 2 de l'arrêté royal du 10 janvier 1992 réglementant la radiodiffusion sonore en modulation de fréquence dans la bande 87,5 MHz - 108 MHz. Selon cette disposition, une Communauté qui se proposait d'élaborer un plan de fréquences ou d'apporter une modification à son plan de fréquences devait introduire une demande de coordination auprès de l'Institut belge des services postaux et des télécommunications, qui procédait alors à la coordination avec les autres

    V-1726-4/21

    Communautés et éventuellement avec la Régie des Voies aériennes et les administrations étrangères.

    En application de cette disposition, la Communauté flamande a introduit en 2000, 2001 et 2002 auprès de l'Institut belge des demandes de coordination pour une série de modifications. Des objections ont alors été soulevées, notamment par la Communauté française, à l'encontre de diverses modifications. À un certain moment, la partie défenderesse a été d'avis que la procédure de coordination était arrivée à son terme, et le gouvernement flamand a adopté alors l'arrêté du 18 juillet 2003. L'exécution de cet arrêté, comme il a été indiqué cidessus, a toutefois été suspendue par l'arrêt du Conseil d'État n/ 153.065 du 21 décembre 2005. Dans cet arrêt, le Conseil considère que la procédure de coordination imposée par l'article 2 de l'arrêté royal du 10 janvier 1992 n'avait pas été menée à bien et n'avait pas été complètement terminée. La procédure de coordination est regardée comme une formalité substantielle d'ordre public. Le moyen invoquant la violation de l'article 2 de l'arrêté royal du 10 janvier 1992 est jugé sérieux. Le recours en annulation est toujours pendant (affaires A. 141.929/V-1675, A. 141.932/V-1676 et A. 141.931/V-1677).

    2.2. Peu avant l'adoption de l'arrêté du 18 juillet 2003, la Cour d'arbitrage a eu l'occasion de clarifier les règles en matière de compétences pour fixer les fréquences des radiodiffuseurs.

    À la suite d'un recours contre un décret de la Communauté française, la Cour juge, dans son arrêt n/ 92/2003 du 24 juin 2003, que les communautés sont compétentes pour régler les aspects techniques des émissions de radio et de télévision en tant qu'ils sont un accessoire de la matière de la radiodiffusion et de la télévision. Cette compétence emporte celle d'attribuer les fréquences, dans le respect des normes techniques qui sont du ressort de l'autorité fédérale (considérant B.7.2.). En outre, l'exercice de la compétence communautaire en matière de radiodiffusion et de télévision doit être réglé de façon telle qu'il ne porte atteinte ni à la compétence fédérale en matière de police générale des ondes

    V-1726-5/21

    radioélectriques, ni à la compétence des autres communautés. Les communautés doivent notamment veiller à ne pas rendre impossible ou exagérément difficile l'exercice des compétences des autres autorités précitées (considérant B.9.2.). La Cour observe encore que vu la nécessité de pourvoir à une coordination entre l'État fédéral et les communautés en matière d'attribution des fréquences en cause, il appartient aux autorités concernées d'apprécier l'opportunité de régler cette coordination par un accord de coopération (considérant B.10).

    2.3. Dans le cadre du présent litige, il y a également lieu de faire référence à la loi du 13 juin 2005 relative aux communications électroniques.

    Les articles 12 à 17 contiennent des "principes applicables à toutes les fréquences radioélectriques". Ces dispositions s'énoncent comme suit :

    Art. 12. Les articles 18 à 24 ne sont pas applicables aux fréquences radioélectriques propres à la radiodiffusion y compris la télévision.

    Art. 13. L'Institut (c'est-à-dire l'Institut belge des services postaux et des télécommunications) est chargé : 1/ de la gestion du spectre des radiofréquences; 2/ de l'examen des demandes d'utilisation du spectre des radiofréquences à l'exception des demandes destinées à la radiodiffusion sonore et télévisuelle; 3/ de la coordination des radiofréquences tant au niveau national qu'au niveau international; 4/ du contrôle de l'utilisation des radiofréquences.

    Pour l'assignation et la coordination des radiofréquences, l'Institut...

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