Décision judiciaire de Conseil d'État, 18 février 2005

Date de Résolution18 février 2005
JuridictionVI
Nature Arrêt

CONSEIL D'ETAT, SECTION D'ADMINISTRATION.

A R R E T

no 140.848 du 18 février 2005 A.77.274/VI-14.413

En cause : GLORIEUX Sophie reprenant l’instance introduite par LACROIX Gilberte,

ayant élu domicile chez

Me Dominique DELANGRE, avocat, rue de la Halle, no 10, 7860 Lessines,

contre :

L'ETAT BELGE, représenté par le Ministre des Affaires sociales et de la Santé publique,

ayant élu domicile chez

Me Marc UYTTENDAELE, avocat, rue de la Source, no 68, 1060 Bruxelles.

Partie intervenante :

CARDOEN Geneviève,

ayant élu domicile chez

Me Yves BRULARD, avocat, rue de la Station, nº 52, 7060 Soignies.

-------------------------------------------------------------------------------------------------------LE CONSEIL D'ETAT, VIe CHAMBRE,

Vu la requête introduite par lettre recommandée à la poste le 27 janvier 1998 par laquelle Gilberte LACROIX demande l’annulation d’"une décision prise le 30 septembre 1997 par laquelle le Ministre de la Santé publique et des Pensions a octroyé au pharmacien Geneviève CARDOEN l’autorisation de créer une officine pharmaceutique ouverte au public à 7534 Tournai-section MAULDE, Grand’ Mazures, 21";

Vu la requête introduite le 14 mai 1998 par laquelle Geneviève CARDOEN demande à être reçue en qualité de partie intervenante;

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Vu l'ordonnance du 27 mai 1998 accueillant cette intervention;

Vu les mémoires en réponse et en réplique régulièrement échangés;

Vu le rapport de Mme CARLIER, Auditeur au Conseil d'Etat;

Vu l'ordonnance du 26 avril 2004 ordonnant le dépôt au greffe du dossier et du rapport;

Vu la notification du rapport aux parties;

Vu l'ordonnance du 19 novembre 2004, notifiée aux parties, fixant l'affaire à l'audience du 8 décembre 2004;

Entendu, en son rapport, M. LEWALLE, Conseiller d'Etat;

Entendu, en leurs observations, Me Dominique DELANGRE, avocat, comparaissant pour la requérante, Me Vanessa RIGODANZO, loco Me Marc UYTTENDAELE, avocat, comparaissant pour la partie adverse et Me François TULKENS, loco Me Yves BRULARD, comparaissant pour la partie intervenante;

Entendu, en son avis conforme, Mme CARLIER, Auditeur;

Vu le titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées le 12 janvier 1973;

Considérant que les faits utiles à l’examen de la requête sont les suivants :

  1. La requérante est titulaire d'une officine pharmaceutique ouverte au public sise 7534 Tournai-section Barry, chausée de Mons, 21.

  2. Le 3 mars 1990, Geneviève CARDOEN, pharmacienne, a introduit auprès du Ministre de la Santé publique une demande d'autorisation d'ouverture d'une officine pharmaceutique à 7535, Maulde, rue Grand’Mazures, 21.

  3. Cette demande a été notifiée aux organisations professionnelles représentatives ainsi qu'aux pharmaciens concernés.

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    4. Le 16 avril 1991, l'Inspecteur Général de la Pharmacie a remis son rapport concernant cette demande d'autorisation.

  4. En sa séance du 21 juin 1991, la Commission d'implantation a donné un avis défavorable à la demande d'ouverture.

  5. Cet avis a été notifié à Geneviève CARDOEN par lettre recommandée avec accusé de réception le 5 août 1991.

  6. Le 12 août 1991, celle-ci a interjeté appel contre l'avis défavorable de la Commission d'implantation.

  7. Le 6 mars 1992, l'Inspecteur de la Pharmacie DEROUBAIX a rédigé un rapport complémentaire relatif à la demande d'autorisation d'ouverture dans lequel il maintenait son avis défavorable.

  8. Lors de sa séance du 21 juin 1993, la Commission d'appel a émis un avis favorable à la demande d'ouverture motivé ainsi qu'il suit :

    " Attendu que la Commission d'Implantation a constaté que sur le plan démographique l'ouverture d'une pharmacie supplémentaire n'est en principe pas possible; que les deux conditions pour l'application des dispositions d'exception prévues par l'art. 1 § 3 littera C de ce même arrêté ne sont pas remplies; qu'il y a lieu de rappeler qu'on a déjà tenu compte d'un apport de ± 750 habitants de la section Maulde pour justifier l'ouverture d'une pharmacie à Barry (exploitée par Mme LACROIX) de sorte qu'une même pharmacie ne peut servir une deuxième fois pour justifier l'installation d'une autre pharmacie; que la requérante n'établit pas qu'elle pourra desservir une population qui atteindrait 1.500 habitants et que la distribution des médicaments est déjà assurée de manière régulière dans toute la région concernée;

    Attendu que la requérante fonde son appel sur le fait que l'officine projetée satisfait aux besoins de noyaux d'habitation isolés( A.R. du 25.9.1974 avec modifications -art. 1er, 3º);

    Attendu qu'il est prouvé par l'expertise du géomètre-expert André Moyart que la pharmacie Lacroix située à Barry se trouve à 5 km 400 de l'emplacement projeté; que les autres pharmacies de la contrée se trouvent à des distances supérieures;

    Attendu qu'il n'est pas contesté que le hameau Maulde peut être considéré comme un noyau d'habitation isolé; que la requérante et son mari sont propriétaires d'un fond rue du Grand Masure 21;

    Attendu que pour l'application des dispositions d'exception prévue par l'art. 1 § 3 littera C, la requérante doit prouver que la pharmacie projetée couvre les besoins de 1.500 habitants;

    Attendu que cet emplacement, bien que situé dans un hameau, est assez important pour justifier une nouvelle implantation; qu'en effet deux médecins se sont installés

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    recommandant vivement l'ouverture d'une nouvelle officine; qu'il y a deux vétérinaires, que ce hameau, en pleine expansion, compte en outre une école primaire accueillant 86 enfants et emploie sept enseignants; qu'il y a deux homes; qu'un centre culturel s'est ouvert rue de l'Eglise et comprend également plusieurs entreprises, des agences financières, un magasin d'alimentation ainsi qu'un terrain de football; que la police de Tournai certifie que la rue du Grand Mazures à Maulde est un axe routier reliant plusieurs villages populeux dont Montreuil, Thimougies, Herquegies et Thieulain; que cette artère est fréquentée par environ 300 véhicules par jour;

    Attendu que la situation démographique de Maulde et des villages environnants, ainsi qu'elle est présentée par la requérante couvre les besoins de plus de 1.500 habitants;

    Qu'au regard des plans et cartes joints aux conclusions de la requérante, il appert que le hameau Maulde est situé au centre de plusieurs villages soit Thimougies, Montroeul, Herquegies, Thieulain, Gallaix et Béclers; qu'on peut admettre qu'une partie de la population de ces villages s'approvisionnera à la pharmacie projetée, celle-ci étant la plus proche;

    Attendu qu'il est raisonnable d'admettre qu'au moins 430 habitants de Maulde s'approvisionneront à Maulde même sur les 737 habitants que compte ce hameau; qu'il en sera de même pour Béclers : 453 habitants sur 737; 211 de Thimougies; 50 de Quartes sur 193 h; 223 h. de Herquegies; 34 h. de Gallaix sur 174 h; 50 h. de Hacquignies sur 422 h. et 162 h. de Thieulain sur 634 habitants, ce qui fait que le chiffre de 1.500 habitants est dépassé;

    Attendu que la distribution des médicaments sera mieux assurée dans la région et qu'une garde de nuit en semaine sera possible, ce que les médecins de la région souhaitent (voir lettre du Docteur P. Hernandez);

    Par ces motifs,

    Vu les dispositions de la loi du 17 décembre 1973 et l'A.R. du 25 septembre 1974, modifié par les A.R. des 19 avril 1977, 16 avril 1981, 23 décembre 1983 et 17 février 1988;

    La Commission d'Appel,

    Reçoit l'appel,

    Le déclare fondé, Réformant l'avis attaqué,

    émet l'avis que l'autorisation sollicitée par CARDOEN Geneviève de créer une officine pharmaceutique à Tournai - Section de Maulde -Grand’ Mazures 21 lui soit accordée;

    Avis ainsi émis à Bruxelles en séance du 21 juin 1993.".

  9. Le Ministre de la Santé publique et des Pensions, en se ralliant à la motivation qui a déterminé l'avis favorable de la Commission d’appel a décidé le 8 novembre 1993 d’octroyer l'autorisation demandée.

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    11. A la suite d'un recours introduit par Gilberte LACROIX contre cette décision, le Conseil d'Etat a annulé celle-ci par son arrêt no 65.725 du 28 mars 1997 au motif que "la partie adverse a compté en nombre décisif, lors de mises en oeuvre successives de l'article 1er, § 3, les habitants d'un même noyau d'habitations isolé et, par conséquent, a violé l'article 1er, § 1er, notamment 2o , de l'arrêté royal du 25 septembre 1974".

  10. Le 27 mai 1997, le Ministre de la Santé publique a adressé à la Commission d'appel le courrier suivant :

    " Par son arrêt no 65.725 du 28 mars 1997, le Conseil d'Etat a annulé l'autorisation donnée le 8 novembre 1993 concernant l'ouverture d'une officine pharmaceutique à Maulde.

    De ce fait, l'intéressée maintient ouverte une pharmacie sans autorisation.

    Voulez-vous avoir l'obligeance de mettre ce dossier à la prochaine réunion de la Commission d'appel du 24 juin 1997 afin de réexaminer la situation de l'officine dont question, sur base des données actualisées?".

  11. En sa séance du 29 juillet 1997, la Commission d'appel a émis l'avis que l'autorisation sollicitée par Geneviève CARDOEN d'implanter une pharmacie lui soit accordée pour les motifs suivants :

    " Vu l'arrêt nº 65.725 rendu le 28 mars 1997 par le Conseil d'Etat annulant l'autorisation donnée le 8 novembre 1993 à Madame Geneviève CARDOEN, d'ouvrir une officine pharmaceutique à MAULDE;

    Vu la requête de Monsieur le Ministre de la Santé publique du 27 mai 1997, demandant le réexamen de la situation de l'officine projetée sur base de données actualisées;

    Entendu, en sa séance du 24 juin 1997, Mademoiselle J. MEUNIER, Inspecteur de la Pharmacie ainsi que Madame Geneviève CARDOEN, Pharmacien à Maulde...

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