Décision judiciaire de Conseil d'État, 27 juin 2001

Date de Résolution27 juin 2001
JuridictionVIII
Nature Arrêt

CONSEIL D'ETAT, SECTION D'ADMINISTRATION.

ARRET

no 97.056 du 27 juin 2001

A.75.546/VIII-2069

En cause : TASSIN Thierry, ayant élu domicile chez Me Thierry AFSCHRIFT, avocat, rue du Monastère 10-12 1000 Bruxelles,

contre :

l'Etat belge, représenté par le Ministre des Finances.

---------------------------------------------------------LE CONSEIL D'ETAT, VIII e CHAMBRE,

Vu la requête introduite le 2 septembre 1997 par Thierry TASSIN, qui demande l'annulation de la décision du 28 juillet 1997 "par laquelle une autorité administrative fédérale, l'Inspecteur de la troisième Inspection spéciale des Impôts de Charleroi (lui) a refusé de prendre connaissance de son dossier fiscal";

Vu les mémoires en réponse et en réplique régulièrement échangés;

Vu le rapport de M. THIBAUT, auditeur au Conseil d'Etat;

Vu l'ordonnance du 4 octobre 1999 ordonnant le dépôt au greffe du dossier et du rapport;

VIII - 2069 - 1/19

Vu la notification du rapport aux parties et le dernier mémoire du requérant;

Vu l'ordonnance du 18 janvier 2001, notifiée aux parties, fixant l'affaire à l'audience du 9 février 2001;

Entendu, en son rapport, Mme DAURMONT, conseiller d'Etat;

Entendu, en leurs observations, Me GALSON, loco Me AFSCHRIFT, avocat, comparaissant pour le requérant, et Mme ROLAND, inspecteur, comparaissant pour la partie adverse;

Entendu, en son avis conforme, M. THIBAUT, auditeur;

Vu le titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées le 12 janvier 1973;

Considérant que les faits utiles à l'examen de la cause se présentent comme suit :

  1. Le 17 avril 1997, le contrôleur en chef de l'administration de la troisième inspection spéciale des impôts de CHARLEROI adresse à la partie requérante, "en vue de la vérification de (sa) situation fiscale", une demande de renseignements relative aux revenus de 1994 à 1996 et rappelle avoir procédé à une notification d'indices de fraude le 8 avril 1997.

    Les questions portent sur l'identité des personnes morales ou physiques habilitées à recevoir les recettes de "sponsoring", sur les éventuelles conventions de répartition de ces recettes, sur ces conventions dont la production est demandée ainsi que sur les liens entre la SCRL AS et la partie requérante.

    VIII - 2069 - 2/19

    L'administration fiscale indique également "qu'ayant accès au dossier judiciaire de l'instruction en cours à (l'encontre de la partie requérante), (elle) imagine que certaines pièces concernant les années 1993 et antérieures ne sont plus en (sa) possession (et) que si (la partie requérante ne peut) pas répondre partiellement à une (des) questions relatives aux années 1993 et antérieures, (il y a lieu) de préciser que c'est en raison de la saisie judiciaire".

  2. Le 23 mai 1997, la partie requérante demande, "conformément à l'article 4 de la loi du 11 avril 1994 applicable en matière fiscale, (...), à pouvoir exercer le droit qui (lui) est reconnu de prendre connaissance et d'obtenir communication du dossier administratif que (l'inspection spéciale des impôts) a constitué ainsi que des documents et pièces relatifs aux exercices 1994 et antérieurs dont (l'inspection spéciale des impôts) fait état dans sa demande de renseignements et dont (la partie requérante) ne peut connaître la teneur puisque (l'inspection spéciale des impôts) n'indique pas ce dont il s'agit”, se plaint du caractère déraisonnable de la demande de renseignements et invoque le droit au silence.

  3. Le 29 mai 1997, l'inspection spéciale des impôts de CHARLEROI rejette la demande d'accès au dossier administratif. Cette décision est rédigée comme suit : " Monsieur,

    OBJET : votre réponse du 23/05/97 à ma demande de renseignements du 17/04/97 en ce que cette réponse concerne votre requête visant à l'application de la loi du 11/04/94 relative à la publicité de l'administration.

    J'accuse bonne réception de votre courrier du 23/05/97 par lequel vous m'expliquez notamment les raisons pour lesquelles vous estimez ne pas devoir répondre à ma demande de renseignements du 17/04/97.

    J'ai pris connaissance de ce courrier et y ai réservé ma meilleure attention. D'ores et déjà, je prends acte de votre refus de répondre aux questions posées dans ma demande de renseignements susvisée.

    VIII - 2069 - 3/19

    D'autre part, j'ai pris bonne note de votre requête visant, sur pied de l'article 4 de la loi du 11/04/94 relative à la publicité de l'administration (ci-après loi du 11/04/94), à pouvoir exercer le droit de prendre connaissance et d'obtenir communication du dossier administratif de manière à pouvoir assurer votre défense.

    J'ai toutefois le regret de vous faire savoir que je ne puis accéder à votre requête pour les motifs ci-après exposés :

    Attendu que l'article 6, § 1er de la loi du 11/04/94 dispose notamment que l'autorité administrative fédérale rejette la demande de consultation, d'explication ou de communication sous forme de copie d'un document administratif si elle a constaté que l'intérêt de la publicité ne l'emporte pas sur la protection de l'un des intérêts suivants :

    -5/ la recherche ou la poursuite de faits punissables;

    -6/ un intérêt économique ou financier fédéral;

    Attendu que l'article 6, § 2 de la loi du 11/04/94 dispose notamment que l'autorité administrative fédérale rejette la demande de consultation, d'explication ou de communication sous forme de copie d'un document administratif qui lui est adressé en application de la présente loi si la publication du document administratif porte atteinte à une obligation de secret instaurée par la loi;

    Attendu que le dossier administratif dont vous réclamez communication est constitué :

    - de pièces provenant du dossier de la procédure judiciaire poursuivie à votre encontre par le Parquet de Monsieur le Procureur du Roi à BRUXELLES sous le numéro de notice 78.97 3471/94 du chef de faux et usage de faux, fraude fiscale et corruption de fonctionnaire (dossier toujours à l'instruction);

    - de pièces ou de parties de pièces qui contiennent des données relatives à des tiers;

    Attendu qu'il n'appartient pas à l'administration, au stade actuel, de communiquer les pièces qui proviennent d'un dossier répressif et attendu que le contribuable doit lui-même demander cette communication au procureur général ou au procureur du Roi qui a reçu délégation à cet effet, je constate que l'intérêt de la publicité ne l'emporte pas sur l'intérêt de la recherche ou de la poursuite de faits punissables (article 6, § 1er, 5/ de la loi du 11/04/94).

    VIII - 2069 - 4/19

    Attendu que le secret professionnel auquel je suis tenu en vertu de l'article 337 du Code des impôts sur les revenus (CIR 92) s’oppose à la communication de documents fiscaux relatifs à des tiers, je constate que la publicité demandée porte atteinte à une obligation de secret instaurée par la loi (article 6, §2,2/ de la loi du 11/04/94).

    Attendu que d'autre part, l'examen de votre situation fiscale étant en cours, l'acceptation de votre demande porterait atteinte à la protection d'un intérêt économique ou financier fédéral;

    Attendu que de fait, la perception correcte des impôts constitue un intérêt financier fédéral;

    Attendu que la communication prématurée -c'est-à-dire avant la clôture de l'instruction de votre dossier-des informations en possession de l'administration pourrait être de nature à vous permettre de vous soustraire à l'impôt légalement dû, ce qui porterait atteinte à l'efficacité de l'administration et pourrait provoquer ainsi une diminution des recettes fiscales, je constate que l'intérêt de la publicité ne l'emporte pas sur la protection de l'efficacité de l'administration, qui participe à l'intérêt économique ou financier fédéral (article 6, § 1er,6/ de la loi du...

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