Arrêt nº 109853 de Conseil du Contentieux des Etrangers, 16 septembre 2013
| Conférencier | J.-C. Werenne |
| Date de Résolution | 16 septembre 2013 |
| Source | Conseil du Contentieux des Etrangers |
| Pays | Sénégal |
n° 109 853 du 16 septembre 201 dans l'affaire X / I
En cause : X
ayant élu domicile : X
contre :
le Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides
LE PRÉSIDENT F.F. DE LA I e CHAMBRE,
Vu la requête introduite le 12 mars 2013 par X, qui déclare être de nationalité sénégalaise, contre l décision du Commissaire adjoint aux réfugiés et aux apatrides, prise le 19 février 2013.
Vu l'article 51/4 de la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement e l'éloignement des étrangers.
Vu le dossier administratif.
Vu l'ordonnance du 10 juin 2013 convoquant les parties à l'audience du 8 juillet 2013.
Entendu, en son rapport, J.-C. WERENNE, juge au contentieux des étrangers.
Entendu, en leurs observations, la partie requérante assistée par Me J. CIKURU MWANAMAYI loco Me
F. A. NIANG, avocat, et A. E. BAFOLO, attaché, qui comparaît pour la partie défenderesse.
APRES EN AVOIR DELIBERE, REND L'ARRET SUIVANT :
1. L'acte attaqué
Le recours est dirigé contre une décision de refus du statut de réfugié et de refus du statut de protectio subsidiaire, prise par le Commissaire adjoint aux réfugiés et aux apatrides, qui est motivée comme suit : « A. Faits invoqués
Selon vos dernières déclarations, vous êtes de nationalité sénégalaise, d'appartenance ethnique peul et de religion musulmane. Vous êtes arrivé en Belgique le 26 octobre 2012 et vous avez introduit votr demande d'asile le lendemain. Vous êtes né le 10 décembre 1981 à Rufisque et travailliez dans une quincaillerie. Vous invoquez les faits suivants à l'appui de votre demande. En 2008, vous rencontrez [A.A.D.]. Vous entamez une relation amoureuse avec lui. Un jour, alors qu'[A.]
vous reconduit chez vous en voiture, des gens de votre quartier le reconnaissent et font savoir à votre CCE X - Page 1 père que vous fréquentez un homosexuel. Votre père vous dit de faire attention. En effet, depuis votr enfance, il vous soupçonne d'être homosexuel. Vous continuez à fréquenter [A.]. En 2010, vous êtes vu à nouveau en compagnie d'[A.]. Votre père en est informé. Il vous interdit d fréquenter [A.]. Votre père et ses frères vous battent. Vous avez peur d'être à nouveau vus ensemble.
Vous décidez de quitter Rufisque pour aller vous installer à Thiès chez [A.]. Le 20 septembre 2012, alors que vous rentrez chez vous avec [A.] le soir, quatre hommes se mettent à
insulter [A.]. Ils ont des soupçons concernant son orientation sexuelle. Une de ces personnes vou reconnait. Il s'agit de [M.N.D.]. Il sait que vous avez fui votre maison à Rufisque et nourrit dès lors de doutes sur votre propre orientation sexuelle. Une bagarre éclate. [A.] et vous prenez la fuite chacun d votre côté et êtes poursuivis par vos agresseurs. Vous trouvez un policier sur votre chemin et lu expliquez que les personnes qui vous suivent veulent vous agresser. Vous niez les accusation relatives à votre homosexualité. Vous et vos deux agresseurs êtes emmenés à la police centrale d Thiès. Au commissariat, vous êtes interrogé et expliquez qu'[A.] et vous avez été agressés par 4 personnes qu en voulaient à votre argent. Le policier entend la version des deux autres. Il vous demande ensuite si
[A.] est un homosexuel mais vous niez ces accusations. Les policiers vous font savoir qu'ils ont pri votre déposition, qu'ils vont confronter les versions et que vous serez convoqué pour revenir a commissariat. Vous êtes libéré le lendemain matin. Vous quittez le commissariat et rentrez chez [A.]. Vous lui expliquez ce qu'il s'est passé. Vous lui dite que vous avez peur de rester à Thiès et que vous ne pouvez pas rentrer à Rufisque chez vos parents.
Le 23 septembre 2012, vous décidez d'aller chez votre cousine, [A.S.], à Barguy, une des communes d Rufisque. Vous expliquez votre situation à [A.]. Celle-ci vous propose de vous mettre en contact avec un passeu qui peut vous conduire en France ou en Belgique pour demander l'asile. C'est ainsi que le 25 octobre 2012, vous quittez le Sénégal. B. Motivation
Après avoir analysé votre dossier, le CGRA n'est pas convaincu que vous avez quitté votre pays e raison d'une crainte fondée de persécution au sens défini par la Convention de Genève du 28 juille 1951 ou en raison d'un risque réel d'encourir des atteintes graves tel que prescrit par l'article 48/4 de l Loi du 15 décembre 1980 relatif à la protection subsidiaire. Premièrement, vous n'avez pas convaincu le CGRA du caractère fondé de votre crainte à l'égard de autorités sénégalaises. Ainsi, vous expliquez qu'après avoir entendu votre déposition et celle de vos deux agresseurs, le policiers vous ont fait savoir qu'il était interdit de fréquenter un homosexuel, vous reprochant don d'avoir fréquenté [A.] (audition, p. 8). Il ne semble dès lors pas que vous ayez été vous-même accusé
d'être homosexuel. De plus, selon vos déclarations, vos deux agresseurs n'ont que des soupçons mai n'ont pas de preuve de l'orientation sexuelle d'[A.] (audition, p.8). Or, notons que la loi punit les individu ayant commis un acte impudique ou contre nature avec un individu de son sexe (article 319 du cod pénal sénégalais). Or, vous n'avez pas été surpris en pareille posture. Notons à ce sujet que vou déclarez vous-même que s'il n'y a pas de preuve contre vous, vous pouvez vivre votre homosexualité
au Sénégal en cachette (audition, p.14). Enfin, il convient de relever que la police vous a relâché e disant qu'elle allait confronter les versions (audition, p.8). Rien n'indique donc que la police vou soupçonne d'être homosexuel ou que vous risquiez d'être poursuivi pour cette raison. Ensuite, vous déclarez que les policiers ont envoyé une convocation à votre domicile à Rufisqu (audition, p.10). Toutefois, le CGRA constate que les policiers avaient prévenu qu'ils allaient vou envoyer une convocation après avoir confronté les deux versions (audition, p.8). Cela ne prouv aucunement leur intention de vous arrêter ou de vous poursuivre en raison de votre orientation sexuelle.
Notons également que vous ignorez les raisons pour lesquelles vous êtes convoqué (audition, p.10).
Une fois encore, rien ne permet de croire que vous risquiez d'être arrêté ou poursuivi en raison de votr orientation sexuelle au Sénégal. CCE X - Page 2 Enfin, alors que c'est [A.] qui est soupçonné d'être homosexuel par vos agresseurs (audition, p.8), qu c'est lui qui a été dénoncé à la police (audition, p.8) et que vous avez fourni l'adresse d'[A.] aux force de l'ordre (audition, p.10), celui-ci n'a eu aucun problème avec la police (audition, p.13). En effet, vou déclarez qu'il n'a jamais rencontré de problème en raison de son orientation sexuelle et qu'il vit toujour à Thiès aujourd'hui (audition, p.13). Ce constat finit de discréditer le caractère fondé de votre crainte visà-vis de vos autorités. Il est en effet tout à fait improbable que vous soyiez poursuivi en raison d l'incident du 20 septembre 2012 alors que votre partenaire, soupçonné d'homosexualité, continue à
vivre à son domicile connu des autorités. Deuxièmement, le CGRA n'est pas d'avantage convaincu de l'existence d'une crainte à l'égard de votr père. Ainsi, vous déclarez qu'en cas de retour, votre père risque de vous tuer ou de vous déshériter (audition,
p.10). Tout d'abord, le CGRA ne peut considérer le fait que votre père vous déshérite comme un crainte de persécution. Ensuite, concernant le risque qu'il vous tue, vous expliquez que cela se produir « s'il me voit un jour » (audition, p.10). Toutefois, rien n'indique que votre père soit à votre recherche.
Vous ne mentionnez en effet aucun problème rencontré avec votre père depuis votre départ de l maison en 2010 et n'exposez nullement avoir été déshérité à ce jour, ce qui relativise sérieusement l réalité des menaces que votre père ferait peser sur vous. Le CGRA constate donc que vous n'avez pas rencontré de problèmes avec votre père entre 2010, dat à laquelle vous avez quitté la maison familiale, et votre départ du pays en octobre 2012 (audition, p.11). Or, vous avez passé la majeure partie de ce temps à Thiès, au Sénégal, et un mois chez votre cousin à Rufisque, dans la même commune que celle où vit votre père. Dès lors, le fait que votre père risqu de vous tuer en cas de retour au Sénégal n'apparait nullement fondé. Troisièmement, le CGRA relève le caractère incohérent de vos propos relatifs à la situation de homosexuels au Sénégal. En effet, vous affirmez ne plus pouvoir vivre au Sénégal en raison de votr orientation sexuelle. Or, votre partenaire [A.], bien que dans une situation plus délicate que la vôtre,
peut continuer à y vivre sans rencontrer de problèmes particuliers. Cela fait peser une lourd hypothèque sur le caractère fondé de votre crainte. En effet, notons qu'[A.], contrairement à vous, a été dénoncé à la police (audition, p.8) et que vous ave communiqué son adresse aux forces de l'ordre (audition, p.10). De plus, [A.] est soupçonné tant à
Rufisque qu'à Thiès d'être homosexuel (audition, p.7 et p.8). Des personnes, que ni lui ni vous n connaissez, le soupçonnent d'être homosexuel (audition p.7 et p.8 et p.11). Toutefois, à l'heure actuelle,
[A.] vit toujours dans sa maison à Thiès (audition, p.9). Vous déclarez qu'étant donné la situatio risquée de Thiès, il pense se rendre à Tamacouda (audition, p.9), une autre ville sénégalaise. Vou dites également qu'il veut sortir du pays mais restez très vague à ce sujet (audition, p.9). Rien n'indiqu donc qu'[A.] ait l'intention de quitter son pays. Dès lors, [A.] se trouve toujours à son domicile et i semblerait qu'il poursuive normalement ses activités (audition, p.14). Ce constat relativise sérieusemen la crainte que vous alléguez en raison de soupçons pesant sur votre orientation sexuelle. Ensuite, relevons qu'[A.] n'a jamais eu de problème en raison de son homosexualité (audition, p.13).
Vous déclarez également que s'il n'y a pas de preuve, il est possible de vivre son homosexualité d manière cachée au Sénégal (audition, p. 14). Questionné sur les raisons pour...
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