Vonnis/arrest, grondwettelijk hof (arbitragehof), 2024-01-18

JurisdictionBélgica
Judgment Date18 janvier 2024
ECLIECLI:BE:GHCC:2024:ARR.011
Link to Original Sourcehttps://juportal.be/content/ECLI:BE:GHCC:2024:ARR.011
Docket Number11/2024
Courtgrondwettelijk hof (arbitragehof)

Cour constitutionnelle
Arrêt n° 11/2024
du 18 janvier 2024
Numéro du rôle : 7979
En cause : la question préjudicielle concernant l’article 68/1, § 2, alinéa 2, de la loi relative à l'exercice des professions des soins de santé, coordonnée le 10 mai 2015, posée par le Conseil d’État.
La Cour constitutionnelle,
composée des présidents P. Nihoul et L. Lavrysen, et des juges T. Giet, J. Moerman, M. Pâques, Y. Kherbache et D. Pieters, assistée du greffier N. Dupont, présidée par le président P. Nihoul,
après en avoir délibéré, rend l’arrêt suivant :
I. Objet de la question préjudicielle et procédure
Par arrêt n° 256.226 du 6 avril 2023, dont l’expédition est parvenue au greffe de la Cour le 20 avril 2023, le Conseil d’État a posé la question préjudicielle suivante :
« L’article 68/1, § 2, alinéa 2, de la loi relative à l’exercice des professions des soins de santé viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution, combinés aux principes de sécurité juridique et de confiance légitime, en ce que le régime transitoire qu’il prévoit pour les personnes pouvant justifier d’une expérience professionnelle de minimum trois ans dans le domaine de la psychologie clinique est réservé à celles qui sont porteuses d’un diplôme d’enseignement universitaire dans le domaine de la psychologie, à l’exclusion des autres personnes autorisées à porter le titre de psychologue en application de l’article 14 de la loi du 8 novembre 1993 protégeant le titre de psychologue ? ».
Des mémoires ont été introduits par :
- Anouk Dohmen, assistée et représentée par Me V. Letellier, avocat au barreau de Bruxelles;
- le Conseil des ministres, assisté et représenté par Me E. Jacubowitz et Me C. Caillet, avocats au barreau de Bruxelles.
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Anouk Dohmen a également introduit un mémoire en réponse.
Par ordonnance du 8 novembre 2023, la Cour, après avoir entendu les juges-rapporteurs M. Pâques et Y. Kherbache, a décidé que l’affaire était en état, qu’aucune audience ne serait tenue, à moins qu’une partie n’ait demandé, dans le délai de sept jours suivant la réception de la notification de cette ordonnance, à être entendue, et qu’en l’absence d’une telle demande, les débats seraient clos à l’expiration de ce délai et l’affaire serait mise en délibéré.
Aucune demande d’audience n’ayant été introduite, l’affaire a été mise en délibéré.
Les dispositions de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle relatives à la procédure et à l’emploi des langues ont été appliquées.
II. Les faits et la procédure antérieure
Anouk Dohmen est titulaire d’un diplôme de l’enseignement supérieur de plein exercice de type court d’assistante en psychologie, spécialité clinique, à l’Institut libre Marie Haps, obtenu en 1984. Elle travaille en tant que psychologue clinicienne depuis le 1er septembre 1985 et au sein d’un cabinet privé de consultation psychologique depuis le 1er avril 2007.
La loi du 8 novembre 1993 « protégeant le titre de psychologue » (ci-après : la loi du 8 novembre 1993)
réserve en principe l’usage du titre de psychologue aux titulaires d’un diplôme universitaire en psychologie.
Anouk Dohmen a cependant été autorisée, sur la base d’une disposition transitoire de cette loi, à porter le titre de psychologue avec tous les droits qui y sont attachés. Elle est inscrite sur la liste tenue par la commission des psychologues depuis le 1er janvier 1996.
Les articles 68/1 à 68/4 de la loi relative à l’exercice des professions des soins de santé, coordonnée le 10 mai 2015 (ci-après : la loi coordonnée du 10 mai 2015), établissent les règles relatives à l’exercice de la psychologie clinique et de l’orthopédagogie clinique, dont les principales conditions d’agrément. Les praticiens d’une profession de soins de santé, dont les psychologues cliniciens et les orthopédagogues cliniciens, ne peuvent exercer leur art qu’après avoir obtenu le visa requis sur la base de leur diplôme, conformément à l’article 25 de la loi coordonnée du 10 mai 2015, et puis, à la suite de l’abrogation de cette disposition, conformément à l’article 11 de la loi du 22 avril 2019 « relative à la qualité de la pratique des soins de santé ».
Le 13 novembre 2019, Anouk Dohmen introduit une demande d’obtention du visa requis pour l’exercice de la psychologie clinique. Le 28 avril 2022, le ministre des Affaires sociales et de la Santé publique décide de refuser de lui délivrer le visa, notamment au motif que son diplôme n’est pas un diplôme d’enseignement universitaire dans le domaine de la psychologie. Anouk Dohmen demande l’annulation de cette décision devant le Conseil d’État.
Dans ce contexte, le Conseil d’État pose la question préjudicielle reproduite plus haut.
III. En droit
-A-
A.1. La partie requérante devant le Conseil d’État relève que l’article 14 de la loi du 8 novembre 1993 a permis aux titulaires d’un diplôme de psychologie de l’enseignement supérieur non universitaire qui avaient une
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expérience professionnelle minimale de porter le titre de psychologue, moyennant une décision en ce sens de l’autorité compétente. Le législateur a estimé que ces personnes présentaient le même degré de qualité que celui qui est attendu d’un titulaire d’un diplôme universitaire en psychologie.
La partie requérante devant le Conseil d’État considère que la loi coordonnée du 10 mai 2015 poursuit le même objectif de qualité que la loi du 8 novembre 1993 en ce qu’elle prévoit que le praticien doit être titulaire d’un diplôme universitaire en psychologie clinique. La disposition en cause est inconstitutionnelle en ce qu’elle ne permet pas aux personnes ayant bénéficié du régime transitoire prévu par la loi du 8 novembre 1993 de continuer à exercer en tant que psychologue clinicien. Il n’est pas raisonnablement justifié que ces personnes soient définitivement exclues de la pratique de la psychologie clinique, alors même qu’elles peuvent continuer à porter le titre qui est traditionnellement attaché à l’exercice de cette pratique et qu’elles justifient d’au moins 25 années d’expérience au 1er septembre 2016.
La partie requérante devant le Conseil d’État allègue que l’impossibilité pour elle de continuer à exercer sa profession après y avoir été autorisée, en 1994, par une commission chargée de vérifier que, compte tenu de sa formation et de son expérience, elle présentait des garanties comparables à celles qui résultent de l’obtention d’un diplôme universitaire porte par ailleurs atteinte à ses attentes légitimes.
A.2. Le Conseil des ministres soutient que, par la disposition en cause, le législateur entend réglementer un secteur de la santé qui n’était pas réglementé auparavant afin de lutter contre certaines dérives, d’offrir un cadre garantissant les...

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