Rappel de quelques principes
Auteur | Philippe Jehasse |
Pages | 45-52 |
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L'assemblée générale ne dispose que des compétences qui lui sont expressément réservées par le Code des sociétés.
Parmi celles-ci, citons notamment:
- l'approbation des comptes annuels 41;
- la modification des statuts en général;
- la nomination et la révocation des administrateurs 42, gérants 43 et commissaires 44;
- la décharge des administrateurs 45, gérants 46 et commissaires 47;
- la fixation de la rémunération des administrateurs 48, gérants 49 et commissaires 50;
- la décision de mettre la société en liquidation 51;
- la décision de modifier l'objet social 52;
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- la réduction du capital 53;
- la transformation de la société 54;
- l'affectation du résultat de l'exercice social 55.
Ces pouvoirs sont exclusifs, en ce sens que les statuts ou une décision de l'assemblée générale ne pourrait valablement les confier à l'organe de gestion.
L'organe de gestion, c'est-à-dire essentiellement le conseil d'administration (S.A. et S.C.R.L.) et le gérant (S.P.R.L.), dispose quant à lui de l'ensemble des pouvoirs qui ne sont pas expressément réservés par le Code des sociétés à l'assemblée générale 56. En d'autres termes, il dispose des pouvoirs résiduels.
Conscient de l'importance de la tâche incombant au conseil d'administration des sociétés anonymes, le législateur a autorisé l'attribution de certains pouvoirs à un «délégué à la gestion journalière» 57 ou encore au «comité de direction» 58.
Attention!
Le principe de la délégation journalière n'existe que pour les S.A. L'application de cette mesure aux S.P.R.L. ne se justifie pas car celles-ci sont gérées par un ou plusieurs gérants qui disposent en principe du pouvoir de décider seuls et de représenter la société seuls (article 257 du Code des sociétés).
En vertu de l'article 525 du Code des sociétés, la gestion journalière de la société anonyme ainsi que sa représentationPage 47 peuvent être déléguées à une personne (physique ou morale), actionnaire ou non, administrateur ou non 59.
Le rôle du délégué à la gestion journalière s'étend donc sur deux plans distincts: il gère la société au quotidien (gestion) et il représente celle-ci vis-à-vis des tiers en ce qui concerne cette gestion (représentation).
Question
Que recouvre la notion de gestion journalière de la société?
La loi et singulièrement le Code des sociétés ne définissent pas les contours de celle-ci.
Selon les termes restrictifs d'un arrêt de la Cour de cassation de 1968 60, confirmé par une décision du 20 février 2000 61, la gestion journalière englobe tous les actes qui «en raison tant de leur peu d'importance que de la nécessité d'une prompte solution ne justifient pas l'intervention du conseil d'administration lui-même» .
Il s'agit donc d'une notion devant s'apprécier in concreto en tenant compte de la nature de l'activité de la société, de la dimension de l'entreprise, du caractère normal ou non de l'opération envisagée, de l'impact financier de celle-ci, ...
Exemples
Ont été considérés comme rentrant dans le cadre de la gestion journalière d'une société:
* Le fait de contracter un prêt pour permettre à une société immobilière de faire l'acquisition d'un bâtiment;
* La prise en location de matériel informatique, de matériel roulant, ...;
* L'acceptation de traites dans la mesure où celles-ci ont pour but de financer les activités courantes;
* L'engagement de personnel d'exécution;
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* Le pouvoir d'agir en justice pour les litiges relatifs aux actes ou aux opérations qui entrent dans ses attributions 62.
Le saviez-vous?
Le Conseil d'Etat considère que la décision d'introduire un recours en annulation contre une décision administrative excède la sphère de la gestion journalière. Le recours en annulation doit donc être introduit par le conseil d'administration sous peine d'irrecevabilité 63.
La Cour constitutionnelle semble avoir adopté la même position dans un arrêt du 2 avril 1992 64.
Ont par contre été considérés comme dépassant le cadre de la gestion journalière:
- L'engagement et le licenciement d'un directeur;
- L'aveu de faillite de la société;
- La vente d'une partie substantielle des actifs sociaux;
- La conclusion d'un contrat engageant la société pour un très long terme;
- La prise de participations au sein de sociétés concurrentes;
- ...
Bien entendu, il s'agira à chaque fois d'apprécier la portée de l'acte posé au regard des spécificités de la société.
Institutionnalisé par la loi du 2 août 2002, dite loi de
corporate governance
65, le comité de direction - composé dePage 49 plusieurs personnes physiques ou morales (deux au moins), actionnaires ou non, administrateurs ou non - peut exercer les pouvoirs de gestion normalement dévolus au conseil d'administration 66, à l'exception toutefois:
- des actes expressément réservés par la loi à l'assemblée générale (voir supra);
- de la politique générale de la société (stratégie globale, décisions touchant à la structure de la société, ...);
- des actes réservés au conseil d'administration...
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