Quelques notions sur le droit des successions (civil)
Auteur | Emmanuel De Wilde D’Estmael; Pierre Henfling; François Minon |
Occupation de l'auteur | Avocats |
Pages | 243-279 |
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Il n'est pas possible de décrire en quelques lignes tout le mécanisme de la dévolution des biens d'un défunt, quand il est soumis à la loi belge.
Nous nous contenterons d'en exposer les grands principes.
- La dévolution légale se fait d'abord par «ordre» : les personnes du premier ordre excluent celles du deuxième ordre et ainsi de suite. Il y a quatre ordres.
- Au sein des ordres, la dévolution se fait par degré, ce qui signifie que les plus proches du défunt dans un ordre excluent les plus éloignés.
- Dès qu'il n'est plus question de descendants, mais d'ascendants ou de collatéraux, il y a lieu d'opérer une scission entre la ligne maternelle et la ligne paternelle du défunt. Il s'agit de la «fente».
- Le conjoint survivant est un héritier atypique, qui ne s'inscrit pas dans le schéma décrit ci-dessus. En effet, il hérite, peu importe avec qui il concourt (descendants, ascendants, collatéraux). Nous analyserons les droits du conjoint survivant au chapitre IV.
Dans le premier ordre, il y a les descendants du défunt, peu importe qu'ils soient nés dans ou hors mariage ou adoptés pléniers (nous n'aborderons pas le cas des adoptés simples, dont la situation est particulière). Page 244
Dans ce premier ordre, héritent d'abord les enfants (premier degré) et ensuite les petits-enfants (deuxième degré) et ainsi de suite.
Dans le deuxième ordre, se trouvent les frères et soeurs ainsi que les père et mère en présence des frères et soeurs.
Sans entrer dans les cas particuliers, on précisera seulement que chaque parent a droit à ¼ de la succession et les frères et soeurs le reste (s'il n'y a qu'un seul père ou mère, les frères et soeurs du défunt se partageront ¾ de la succession; s'il n'y a ni père ni mère, les frères et soeurs auront la totalité de la succession). Si les frères et soeurs sont de parents différents, il pourrait y avoir des différences de répartition entre eux (un frère qui a le même père et la même mère que le défunt aura plus de droit que le frère qui n'a qu'un père commun avec le défunt).
Dans le troisième ordre, il y a les ascendants, le cas échéant en concours avec des collatéraux.
- S'il y a des ascendants dans les deux lignes (paternelle et maternelle), le plus proche ascendant dans chaque ligne hérite de la moitié de la succession.
- S'il y a des ascendants dans une seule ligne, le plus proche héritera de la moitié de la succession. Dans l'autre ligne, c'est le collatéral le plus proche qui héritera de la seconde moitié.
- S'il y a dans une ligne, un père ou une mère et dans l'autre ligne un collatéral, le père ou mère aura droit, outre la moitié de la succession comme dit ci-avant, à un tiers en usufruit de la part du collatéral de l'autre ligne.
Dans le quatrième ordre, il y a les collatéraux jusqu'au quatrième degré : dans chaque ligne (maternelle et paternelle), le collatéral le plus proche en degré hérite de la moitié de la succession. S'il n'y a aucun collatéral dans une ligne, c'est le collatéral le plus proche de l'autre ligne qui hérite de tout.
Exemple
Il reste du côté maternel du défunt une tante et son fils (un cousin) et du côté paternel deux cousins (fils d'un oncle Page 245 prédécédé). La tante reçoit une moitié de la succession (elle est plus proche en degré que son fils) et les deux cousins de la ligne paternelle reçoivent chacun ¼ de la succession.
S'il n'y a aucun héritier au quatrième degré (ou plus, en cas de représentation : voy. ci-après), c'est l'Etat qui héritera du défunt.
Lorsqu'un héritier légal est prédécédé, afin d'éviter que ce prédécès ne profite aux autres héritiers légaux du même degré, la loi prévoit que les descendants du prédécédé prendront la place de ce dernier dans la succession du défunt. Ceci vaut en cas de prédécès d'un descendant, d'un frère ou d'un neveu, d'un oncle ou d'un cousin du défunt.
Exemple
Jean meurt en laissant deux enfants et deux petits-enfants, enfants d'un troisième enfant prédécédé. Les deux petits-enfants viendront par représentation dans la succession de leur grand- père Jean. Ils auront ensemble 1/3 de la succession, soit 1/6 chacun.
Le Code civil prévoit deux situations dans lesquelles certains biens, quoique faisant partie du patrimoine du défunt, sont soumis à une succession «parallèle» à la dévolution légale. Cette succession parallèle est appelée «succession anomale» ou «droit de retour légal».
Il s'agit de biens qui ont été obtenus à titre gratuit par le défunt et qui, à son décès, doivent faire «retour» au gratifiant ou, le cas échéant, à ses descendants.
Il s'agit donc d'une succession particulière, avec ses règles propres.
Ces deux situations sont celles-ci :
- Font retour à l'ascendant donateur les biens donnés par ce dernier au descendant du défunt décédé sans postérité, du Page 246 moins si ces biens se retrouvent en nature dans la succession du défunt; si les biens ont été vendus, le retour ne pourra se réaliser que sur le prix perçu qui ne se serait pas encore mélangé avec la masse des biens de la succession.
- Font retour les biens donnés par les ascendants de la famille d'origine d'un enfant adopté simple ou donnés par ses adoptants ou recueillis dans leur succession respective et qui se retrouvent en nature dans la succession de l'enfant adopté; ce retour se fait au profit des donateurs ou en cas de décès de leur part, au profit de leurs héritiers en ligne descendante; si les biens ont été vendus, le retour ne pourra se réaliser que sur le prix perçu qui ne se serait pas encore mélangé avec la masse des biens de la succession.
Lorsqu'un successible est appelé à recevoir une part de la succession, il a le choix entre trois options :
- soit il renonce à son droit d'héritier (ou de légataire universel ou de légataire à titre universel); dans ce cas, il n'a aucun droit sur les biens de la succession mais n'est tenu par aucune dette et ne paiera aucun droit de succession;
- soit il accepte purement et simplement la succession; dans ce cas, il a droit à sa part dans l'actif mais est tenu également, proportionnellement à sa quotité, au passif et ce, même si le passif est supérieur à l'actif;
- soit il accepte sous bénéfice d'inventaire; dans ce cas, il a droit à sa part dans l'actif mais n'est tenu au passif, proportionnellement à sa quotité, qu'au maximum à hauteur de l'actif perçu; il est donc assuré de ne pas devoir payer plus de passif que d'actif perçu; l'acceptation sous bénéfice d'inventaire n'empêche cependant pas le paiement des droits de succession. L'acceptation sous bénéfice entraîne diverses procédures fort lourdes et onéreuses, ce qui peut, dans certaines situations, freiner le recours à cette option.
On notera que, sauf exceptions, le choix d'une option est définitif. Ainsi, si l'on a accepté sous bénéfice d'inventaire et que l'on constate après l'inventaire que les dettes dépassent largement l'actif, il n'est Page 247 plus possible à ce moment d'encore renoncer à la succession (au contraire, si l'on constate que l'actif est bien suffisant, il est possible de renoncer au bénéfice d'inventaire et de ne conserver que l'acceptation pure et simple).
La dévolution légale vue ci-dessus n'est applicable que si le futur défunt ne l'a pas modifiée totalement ou partiellement par des dispositions particulières.
Ces dernières sont au nombre de trois : le legs, l'institution contractuelle et la donation.
Le futur défunt peut modifier la dévolution légale par un testament, en répartissant ses biens d'une autre manière que celle prévue par la loi. Il peut également par le biais d'un testament, préciser l'affectation de tel ou tel bien (sans même, le cas échéant, modifier la répartition entre les héritiers), prévoir des dispositions plus personnelles (funérailles,...) ou préciser ou...
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