La prévention

AuteurOlivier Vincent
Occupation de l'auteurCoach pour PME et indépendants
Pages69-112

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L'impact de la gestion des débiteurs sur l'évolution de la société connu, il reste à mettre en ceuvre tous les moyens possibles pour se protéger contre une éventuelle défaillance.

Il convient donc d'inculquer au personnel, à tous les niveaux, un esprit orienté client (sous-entendu : concernant les aspects tant commerciaux que financiers).

Cette mentalité doit apparaître dans toute l'entreprise, conduisant à faire de la prévention des risques un objectif cohérent avec la stratégie globale. Précisons également que cet objectif doit émaner ou, du moins, être soutenu par la direction.

Afin de mieux analyser ces risques, nous les aborderons à travers deux thèmes principaux :

  1. l'organisation au sein de l'entreprise;

  2. le client lui-même.

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A L’organisation au sein de l’entreprise
1. La politique crédit : clé de voûte de la prévention

Il s'agit26 ici de regrouper tous les éléments nécessaires au bon fonctionnement de l'entreprise au niveau de la gestion financière des clients. On peut la rencontrer tant dans les petites entreprises, en version très simplifiée, que dans les multinationales en format beaucoup plus fouillé. De plus, elle doit reprendre de manière claire et non ambiguë les conditions générales de l'entreprise et leur champ d'action (cf. chapitre 5). Précisons également qu'elles doivent être au cceur des négociations commerciales et que les clauses pénales, d'intérêts ou de réserve de propriété sont le garant de vos intérêts.

Exemple

Au sein des groupes internationaux, il n'est pas rare de trouver des manuels crédits comprenant plusieurs dizaines de pages. On y trouvera non seulement la description des fonctions des personnes s'occupant du suivi des débiteurs, mais également les paramètres d'acceptation de nouvelles relations client, les critères de relance des débiteurs et les modus operandi adéquats. De plus, afin de simplifier la consolidation des comptes27, les conditions de provisionnement de créances douteuses seront également définies. Enfin, le format des rapports mensuels y sera également détaillé, afin d'éviter toute source d'erreur lors de la transmission des données à la maison mère. Dans certains cas, on trouvera même le délai dans lequel chaque donnée doit parvenir à la maison mère.

En revanche, il n'est pas rare de découvrir des sociétés, parfois importantes, ne disposant ni d'un manuel crédit, ni même d'une organisation efficace concernant le suivi de ses clients.

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Cas vécu

Un groupe actif dans l'aéronautique, réalisant 370 millions d'euros de chiffre d'affaires, était composé de 6 filiales, dont 3 à l'étranger. Chacune d'entre elles gérait en local ses clients et calculait les provisions pour créances douteuses28 sur base de ses propres critères, sans concertation avec la direction financière du groupe. Il va sans dire que les provisions, une fois transmises à la société mère, montraient des divergences par rapport à la réalité. De plus, pour certaines filiales, 80 % des documents d'ouverture de relations commerciales étaient incomplets ou erronés. Enfin, les filiales traitant souvent avec des clients communs, leurs intermédiaires étaient, pour chacune, différents.

Pour être la plus efficace possible, une politique crédit (voire son support papier) doit comprendre six points essentiels :

  1. La description des tâches du personnel du service avec le pouvoir de décision de chaque membre.

    Qui s'occupe des analyses financières ? Qui définit les limites de crédit ? Jusqu'à quel montant ? Qui s'occupe des relances ? Quel est le pouvoir de décision en matière de plan d'apurement ?

  2. Les critères d'enquête de crédit.

    Qui sont les clients ? Dans quel secteur évoluent-ils ? Ont-ils des antécédents, positifs ou négatifs, avec notre société ?

  3. Les critères d'acceptation des clients et des commandes, ainsi que les ratios utilisés.

    Selon le résultat de l'enquête crédit, quelles conditions de paiement le client va-t-il recevoir ? Quelle limite de crédit peut-on lui octroyer ?

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  4. La façon de gérer les dossiers des clients (documents d'ouverture de relations, spécificités du client...).

    Quels sont les documents devant se trouver dans le dossier (bilan, document d'ouverture) ? Qui doit les valider (direction générale, financière...) ?

  5. Les modes de recouvrement.

    En cas de non-paiement, quels sont les moyens à privilégier ? Avons-nous des procédures standard ? Quel est le délai entre chaque étape de la relance ? Quelle procédure engager et avec qui, en cas de litige ?

  6. La liste et l'explication des différentes formules et rapports utilisés par le service crédit.

    Balance âgée, document de reporting...

    Afin de pouvoir la rédiger de manière optimale, le responsable crédit (directeur financier ou credit manager) doit prendre en considération les éléments suivants :

  7. Quels sont les objectifs principaux de l'entreprise ?

  8. Quelle est la politique des différents services ? Souvenons-nous que le département crédit recouvrement est le seul service au courant du moindre dysfonctionnement dans l'entreprise.

  9. Quelle est la nature des différents clients et leur stabilité ?

    Comme nous l'avons vu dans le chapitre consacré à la stratégie, nous pouvons être confrontés à trois stratégies différentes :

  10. l'augmentation du volume des ventes;

  11. l'augmentation du profit;

  12. la mise en avant du prestige du produit ou du service.

    Et chacune d'elles s'accompagne d'une approche client différente.

    - Augmentation des ventes (surnommée parfois « politique de la part de marché »)

    La politique de crédit devra préciser le genre de client qu'on est prêt à accepter, ainsi que les termes qu'on est disposé à octroyer par produits, par région ou même par pays.

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    Prenons l'exemple d'une société souhaitant s'implanter à l'étranger. Elle se trouvera alors dans une situation double, confrontée aux conditions de paiement en vigueur aussi bien en Belgique qu'au sein du pays concerné.

    De même, imaginons une autre société commercialisant un nouveau produit. Elle aura le réflexe de se montrer libérale au niveau des conditions avec le client souhaitant l'acquérir, celui-là plutôt que les anciens déjà commercialisés.

    Une politique plus libérale signifie :

    - des critères d'acceptation plus flexibles;

    - des limites de crédit plus élevées;

    - des conditions de crédit plus intéressantes (délais de règlement allongés);

    - des latitudes de crédit accrues pour le personnel (chaque membre a le droit de traiter une commande pour un montant maximum de x euros);

    - de la souplesse à l'égard du client éprouvant des difficultés à respecter certaines conditions.

    C'est notamment dans ce genre de politique que l'on trouve l'assurance-crédit29.

    Cas réel

    Une importante société japonaise, active dans l'importation d'électronique grand public, a comme objectif principal le développement de sa part de marché, tout en limitant les risques au niveau financier. Pour ce faire, elle a souscrit une assurance-crédit.

    Lorsqu'un nouveau contrat est présenté au credit control, une limite de crédit30 est demandée à l'assurance. Cette dernière accepte ou refuse de couvrir le risque à concurrence du montant en question.

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    Cela signifie également que ce client ne peut théoriquement jamais avoir de montant ouvert (et non pas échu) supérieur à cette limite, faute de quoi, le surplus n'est plus couvert. En cas du refus de couverture, soit il est quand même décidé d'octroyer un crédit (après consultation de Graydon), soit le client est livré contre remboursement, soit il lui est proposé une domiciliation. Dans les deux derniers cas, en cas de retour pour manque de provision, les livraisons sont automatiquement bloquées.

    Dans le cas où le crédit a été octroyé, deux rappels sont envoyés à 8 jours d'intervalle, le second étant synonyme de suspension des livraisons. Enfin, 8 jours plus tard, la mise en demeure est envoyée.

    C'est à ce moment-là qu'intervient l'assurance-crédit. Si le client ne s'est pas exécuté, un dossier complet lui est introduit en sinistre. Ce dossier reprend la copie de la ou des facture(s) concernée(s), si possible celle des bons de livraisons, ainsi que la copie des différents courriers qui ont été transmis au débiteur. Dès lors, le dossier est géré entièrement par l'assurance, laquelle indemnise selon les modalités souscrites.

    En revanche, si le client n'est pas couvert par l'assurance (une minorité dans ce cas-ci), le dossier est transmis à un avocat, lequel procèdera alors au recouvrement par la voie légale.

    - Augmenter ses profits

    Il s'agit de la politique la plus fréquente car la plus logique. Elle concerne aussi bien des sociétés en pleine croissance que des sociétés en difficultés et souhaitant se redresser financièrement (notamment grâce à des réductions de coûts). Dans les secteurs à forte concurrence, elle est régulièrement cumulée avec la politique précédente. Tout l'art émanera du credit manager, résolu à trouver le juste équilibre entre les deux.

    Dans ce cas-ci :

    - les enquêtes de crédit sont plus poussées et les critères d'acceptation affinés;

    - les délais de paiements octroyés sont raccourcis;

    - le processus de recouvrement est renforcé;

    - la décision d'octroi ne dépend plus que d'une seule personne.

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    Cas réel

    Étant donné sa spécificité, comment la vente par correspondance fonctionne-t-elle pour le choix de ses clients ?

    Tout part du fichier clients.

    La première étape consiste à faire un tri, selon la méthode R.F.M. 31. Partant de là, un scoring est établi sur base de plusieurs critères, à savoir :

    - les paramètres financiers (historique du client avec son fournisseur);

    - contrôle auprès de la sopres32;

    - vérification auprès de la centrale des crédits, appelée aussi...

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