Jugement/arrêt, Cour du Travail de Liège, 2023-03-03

JurisdictionBélgica
CourtCour du Travail de Liège
Judgment Date03 mars 2023
ECLIECLI:BE:CTLIE:2023:ARR.20230303.1
Link to Original Sourcehttps://juportal.be/content/ECLI:BE:CTLIE:2023:ARR.20230303.1
Docket Number2022/AL/63

N° d’ordre Cour du travail de Liège, division Liège – 2022/AL/63 – p. 2 N° d’ordre
EN CAUSE :
L’OFFICE NATIONAL DE L'EMPLOI, en abrégé ONEm, dont les bureaux sont établis à 1000
BRUXELLES, boulevard de l'Empereur, 7, inscrit à la Banque Carrefour des Entreprises sous le numéro 0206.737.484
partie appelante au principal, intimée sur incident ayant comparu par son conseil, Maître Laurence WIGNY, avocat à 4000 LIEGE, rue de Joie, 17
CONTRE :
Madame S C, RRN
partie intimée au principal, appelante sur incident, ci-après dénommée « Madame C.» ou « le chômeur ».
ayant comparu par Madame Zoé ISTAZ-SLANGEN, juriste à la FGTB - Liège, porteuse de procuration écrite
• • •
INDICATIONS DE PROCEDURE
Vu en forme régulière les pièces du dossier de la procédure à la clôture des débats le 2
décembre 2022, et notamment :
- le jugement attaqué, rendu contradictoirement entre parties le 13 janvier 2022 par le tribunal du travail de Liège, division Liège, 8ème chambre (R.G. 17/138/A) ;
- la requête formant appel de ce jugement, remise au greffe de la cour du travail de Liège, division Liège, le 1er février 2022 et notifiée à Madame C. par pli judiciaire le 2
février 2022 invitant les parties à comparaître à l’audience publique du 16 mars 2022 ;
- le dossier de la procédure du tribunal du travail de Liège, division de Liège, reçu au greffe de la cour le 4 février 2022 ;
- l’ordonnance rendue le 21 juin 2022, sur pied de l’article 747 du Code judiciaire, fixant les plaidoiries à l’audience publique du 2 décembre 2022 ;
Cour du travail de Liège, division Liège – 2022/AL/63 – p. 3 N° d’ordre
- les conclusions de Madame C., reçues au greffe de la cour le 5 aout 2022 ;
- le dossier de pièces de Madame C. , reçu au greffe de la cour le 5 aout 2022 ;
- le dossier de pièces de l’ONEm, reçu au greffe de la cour le 13 aout 2022 ;
- les conclusions et conclusions additionnelles de l’ONEm, reçues au greffe de la cour respectivement les 13 aout 2022 et 23 novembre 2022 ;
- le dossier de pièces de l’ONEm , reçu au greffe de la cour le 23 novembre 2022 ;
- la note d’audience et la pièce de Madame C., déposées à l’audience publique du 2
décembre 2022 ;
Le conseil de la partie appelante et la représentante de la partie intimée ont plaidé lors de l’audience publique du 2 décembre 2022.
Vu l’avis écrit du ministère public rédigé en langue française par Monsieur E. V. substitut général, déposé au greffe de la cour du travail de Liège le 6 janvier 2023 et communiqué aux conseil et représentant des parties le même jour, auquel l’ONEm et Madame C. ont répliqué par des conclusions reçues au greffe respectivement les 24 janvier 2023 et 2 février 2023, Madame C. ayant également annexé des pièces à ses conclusions en réplique.
I. LES FAITS
1
Le chômeur est né le 8 aout 1966.
2
Il a été admis au bénéfice des allocations d’attente (devenues allocations d’insertion depuis le 1er janvier 2012), sur la base de ses études, le 13 mars 1989.
3
A partir du 1er janvier 2018, il a perdu le bénéfice de ces allocations d’insertion. A l’époque, il était donc âgé de 51 ans.
4
Le chômeur a introduit la présente procédure par requête du 11 janvier 2017.
II. LE JUGEMENT DONT APPEL
5
Par jugement du 13 janvier 2022, le tribunal du travail de Liège (division Liège) a déclaré le recours recevable et fondé sur le principe du standstill.
Cour du travail de Liège, division Liège – 2022/AL/63 – p. 4 N° d’ordre
Il a condamné l’ONEm aux dépens de l’instance conformément à l’article 1017, al. 2, du Code judiciaire.
III. LES APPELS
6
L’ONEm a interjeté appel de ce jugement par requête du 1er février 2022.
Aux termes de ses dernières conclusions, il demande à la cour de confirmer l’exclusion du bénéfice des allocations d’insertion.
A titre subsidiaire, dans l’hypothèse où la cour retiendrait une violation de l’obligation de standstill, l’ONEm demande à la cour de retenir que le chômeur est rétabli dans son droit aux allocations sous réserve du fait qu’il remplisse les autres conditions d’octroi des allocations durant la période litigieuse.
7
Le chômeur demande la confirmation du jugement dont appel à l’exception du moyen déduit de la violation par l’arrêté royal du 28 décembre 2011 des articles 3, §1er et 84, §1er, 2°, des lois coordonnées sur le Conseil d’Etat du 12 janvier 1973.
Sur ce point, le chômeur forme donc appel incident.
IV. L’AVIS DU MINISTERE PUBLIC
8
Dans son avis écrit déposé au greffe, le ministère public conclut à ce qu’il y a lieu de réformer le jugement a quo.
V. LA RECEVABILITÉ DES APPELS
9
Le jugement a quo a été prononcé le 13 janvier 2022 et notifié par pli judiciaire remis à la poste le 18 janvier 2022.
L’appel a été introduit par requête déposée au greffe de la cour le 1er février 2022, soit dans le délai d’un mois prévu par l’article 1051 du Code judiciaire.
Les autres conditions de recevabilité de l’appel, spécialement celles énoncées à l’article 1057
Cour du travail de Liège, division Liège – 2022/AL/63 – p. 5 N° d’ordre
du même code, sont également remplies.
L’appel principal est recevable.
Il en va de même de l’appel incident introduit par les premières conclusions d’appel du chômeur, conformément au prescrit de l’article 1054 du Code judiciaire.
VI. LE FONDEMENT DE L’APPEL
6.1 L’urgence
L’arrêté royal du 28 décembre 2011 n’est entaché d’aucune illégalité formelle.
10
Le chômeur a formé appel incident du jugement dont appel et demande l’écartement de l’arrêté royal du 28 décembre 2011 modifiant les articles 27, 36, 36ter, 36quater, 36sexies, 40, 59quinquies, 59sexies, 63, 79, 92, 93, 94, 97, 124 et 131septies de l'arrêté royal du 25
novembre 1991 portant réglementation du chômage, qui a introduit la nouvelle version de l’article 63, §2, de l’arrêté royal du 25 novembre 1991 au motif qu’il violerait les articles 3, §1er et 84, §1er, 2°, des lois coordonnées sur le Conseil d’Etat du 12 janvier 1973.
Il estime que c’est à tort que le gouvernement a invoqué l’urgence et demandé l’avis du Conseil d’Etat en 5 jours lorsqu’il a soumis l’avant-projet d’arrêté royal.
6.1.2. Les principes
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L’article 3, §1er, des lois coordonnées sur le Conseil d’Etat du 12 janvier 1973 impose en règle au pouvoir exécutif de soumettre tout projet d’arrêté réglementaire à l’avis motivé de la section législation du Conseil d’Etat.
L’article 84, §1er, 2°, de cette même loi, dans sa version applicable en décembre 2011, prévoit que le délai imparti au Conseil d’Etat est généralement de 30 jours. Ce délai peut être réduit à 5 jours lorsque l’urgence est invoquée, la motivation de l’urgence devant être reproduite dans le préambule d’un projet d’arrêté réglementaire. Dans ce cas, le Conseil d’Etat limite son avis à l’examen de 3 points : la compétence de l’auteur de l’acte, le fondement juridique et l’accomplissement des formalités prescrites.
12
La section législation du Conseil d’Etat contrôle l’urgence invoquée pour demander un avis en 5 jours. La demande d’avis est déclarée non recevable si le Conseil d’Etat estime que Cour du travail de Liège, division Liège – 2022/AL/63 – p. 6 N° d’ordre
l’urgence n’est pas établie, soit parce qu’elle n’est pas invoquée, soit parce qu’elle n’est pas exacte ou pertinente.1
Par ailleurs, sur la base de l’article 159 de la Constitution, les juridictions judiciaires doivent écarter l’arrêté réglementaire qui a été adopté par un pouvoir exécutif qui se serait dispensé de solliciter l’avis du Conseil d’Etat ou qui aurait détourné son pouvoir en méconnaissant la notion légale d’urgence.2 Dans le cadre de ce contrôle, les juridictions doivent vérifier que :
- la motivation de l’urgence figure dans le préambule de l’arrêté royal ;
- le motif invoqué est réel, ce qui implique que les motifs d’urgence ne peuvent pas être démentis par les faits, notamment par le manque de diligence de l’autorité elle-
même ;
- la pertinence du motif invoqué.
L’appréciation des juridictions judiciaires sur cette question est indépendante de celle de la section législation elle-même.
6.1.3 L’application en l’espèce
13
En l’espèce, le préambule de l’arrêté royal du 28 décembre 2011 est rédigé en ces termes :
« Vu l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs, notamment l'article 7, §1er, alinéa 3, i, remplacé par la loi du 14 février 1961 ;
Vu l'arrêté royal du 25 novembre 1991 portant la réglementation du chômage ;
Vu l'avis du comité de gestion de l'Office national de l'Emploi, donné le 15 décembre 2011 ;
Vu l'avis de l'Inspecteur des Finances, donné le 13 décembre 2011 ;
Vu l'accord du Ministre au Budget du 16 décembre 2011 ;
Vu la demande de l'urgence, motivée par la circonstance que dans le cadre de son Programme national de réforme la Belgique s'est engagée à atteindre en 2020 un taux d'emploi de 73,2 % ; que par conséquent un programme de relance de l'emploi, en particulier pour les jeunes, doit être initié; que dans l'accord du gouvernement il est notamment décidé, afin de favoriser une insertion plus rapide sur le marché de l'emploi et d'accompagner mieux les jeunes, de transformer le stage d'attente en stage d'insertion professionnelle et les allocations d'attente en allocations d'insertion ; qu'aussi dans le cadre des efforts budgétaires qui doivent être livrés par la Belgique, ces mesures structurelles contribuent à la réalisation de l'objectif budgétaire prévu; que pour ces raisons le nouveau système doit être exécuté au plus vite possible et ceci déjà à partir du 1er janvier 2012 ;
Vu l'avis 50.751/1 du Conseil d'Etat, donné le 21 décembre 2011, en application de l'article 84, §1er, alinéa 1er, 2°, des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées le 12 janvier 1973 ».
14
1
M. VAN DAMME et B. DE SUTTER, Raad van Staat, Afdeling wetgeving, La Charte, 2013, pp. 199 – 200.
2
Cass., 9 septembre 2002, juportal.be, R.G. n° S.000.125.F ; Cass., 25 novembre 2002, juportal.be, R.G. n°
S.02.001.6.F ; Cass., 21 janvier 2008, R.G. n°S.07.0025.F/1, juportal.be.
Cour du travail de Liège, division Liège – 2022/AL/63 – p. 7 N° d’ordre
Il convient de...

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