Jugement/arrêt, Cour du travail de Liège, 2021-01-21
Jurisdiction | Bélgica |
Judgment Date | 21 janvier 2021 |
ECLI | ECLI:BE:CTLIE:2021:ARR.20210121.9 |
Docket Number | 2019/AL/354 |
Link to Original Source | https://juportal.be/content/ECLI:BE:CTLIE:2021:ARR.20210121.9 |
Court | Cour du travail de Liège |
Numéro du répertoire
2021 /
R.G. Trib. Trav.
17/511/A
Date du prononcé
21 janvier 2021
Numéro du rôle
2019/AL/354
En cause de :
FEDRIS, Agence Fédérale des Risques Professionnels
C/
F G
La commune d'Ouffet
Cour du travail de Liège
Division Liège
CHAMBRE 3-D
Arrêt
ACCIDENTS DE TRAVAIL, MALADIES PROFES. - fonds maladies professionnelles
Arrêt contradictoire
Définitif - renvoi devant les premiers juges -art. 1068 al 2 du Code judiciaire
* Risques professionnels - Maladie professionnelle
Secteur public - maladie hors liste - risques psychosociaux - burn-out - présomption d'exposition au risque professionnel - notion de risque professionnel dans le secteur public (non application de l'article 32, al.2, de la loi de 1970) - lien causal direct et déterminant entre la maladie et l'exercice de la profession
Loi du 03.06.1967 : articles 1 et 2
Arrêté royal du 21.1.1993 relatif à la réparation des dommages résultant des maladies professionnelles en faveur de certains membres du personnel appartenant aux administrations provinciales et locales. Art 4 et 5
Lois relatives à la réparation des dommages résultant des maladies professionnelles, coordonnées le 03.06.1970 : articles 30 et 30bis
EN CAUSE :
L'Agence Fédérale Des Risques Professionnels, en abrégé « FEDRIS » (anciennement FMP), dont les bureaux sont situés à 1210 SAINT-JOSSE-TEN-NOODE, Avenue de l'Astronomie, 1, BELGIQUE, inscrite à la Banque Carrefour des Entreprises sous le numéro 0206.734.318,
partie appelante,
ayant pour conseil Maître Vincent DELFOSSE, avocat à 4000 LIEGE, Rue Beeckman, 45
et ayant comparu par Maître Sophie POLET
CONTRE :
1. Madame F G, RRN, domiciliée à
première partie intimée, appelante sur incident
ayant pour conseil Maître Violaine DEVYVER, avocat à 4020 LIEGE, Quai Marcellis 4/011
et ayant comparu personnellement, assistée par Maître Mathilde RENTMEISTER
2. La COMMUNE D'OUFFET, inscrite à la banque carrefour des entreprises sous le numéro 0207.334.728, dont les bureaux sont établis à 4590 OUFFET, Rue du Village, 3,
seconde partie intimée, appelante sur incident
ayant pour conseils Maître Luc BIHAIN, avocat à 4000 LIEGE, boulevard Frère Orban 25
et Maître Antoine CASTADOT, avocat à 1160 BRUXELLES, Boulevard du Souverain, 280
et ayant comparu par Maître Luc BIHAIN
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INDICATIONS DE PROCEDURE
Vu en forme régulière les pièces du dossier de la procédure à la clôture des débats le 17 décembre 2020, et notamment :
- le jugement attaqué, rendu contradictoirement entre parties le 8 mai 2019 par le tribunal du travail de Liège, division Huy, 7ème Chambre (R.G. 17/511/A) ;
- la requête formant appel de ce jugement, remise au greffe de la Cour du travail de Liège, division Liège, le 18 juin 2019 et notifiée à la partie intimée par pli judiciaire le 19.6.2020 invitant les parties à comparaître à l'audience publique du 25.9.2019 ;
- le dossier de la procédure du tribunal du travail de Liège, division de Huy, reçu au greffe de la Cour le 21.6.2019 ;
- l'ordonnance rendue le 26.9.2019, sur pied de l'article 747 du Code judiciaire, fixant les plaidoiries à l'audience publique du 17.12.2020 ;
- les conclusions et conclusions de synthèse pour Madame Francine GILSON, reçues au greffe de la Cour respectivement les 25.11.2019 et 26.10.2020 ;
- les conclusions ainsi que les conclusions additionnelles et de synthèse pour la commune d'Ouffet, reçues au greffe de la Cour respectivement les 23.1.2020 et 23.7.2020 ;
- les conclusions pour Fedris, reçues au greffe de la Cour le 20.2.2020 ;
- le dossier de pièces pour la commune d'Ouffet, reçu au greffe de la Cour le 27.11.2020 ;
- le dossier de pièces pour Madame Gilson, déposé à l'audience publique du 16 décembre 2020 ;
- le dossier de pièces pour Fedris, déposé à l'audience publique du 17 décembre 2020 ;
Les conseils des parties ont plaidé lors de l'audience publique du 17 décembre 2020 et la cause a été prise en délibéré immédiatement.
I.- ANTÉCÉDENTS PERTINENTS
Remarque préliminaire
Si FEDRIS avait inventorié son volumineux dossier de pièces par pièces individualisée et non seulement par « 1. dossier administratif, 2. dossier médical et 3. Rapport établi par le Professeur Firquet », le travail de la cour aurait été plus facile.
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Madame G, épouse B, première intimée, est née en 1958.
Elle est entrée au service de la Commune d'0uffet, seconde intimée et appelante sur incident (ci-après dénommée « la Commune ») le 16.6.1977 dans le cadre d'un contrat de travail d'employée. Le personnel de la commune comptait alors 4 travailleurs.
Madame G a été nommée à titre définitif en tant qu'agente statutaire le 1.7.1983, en tant que commis-dactylo.
La Commune d'Ouffet comptait en 1995 2.472 habitants.
Madame G a ensuite été nommée en tant qu'employée d'administration, le 1.1.1996. Cette fonction impliquait principalement la gestion du guichet.
Selo Madame G, non contestée sur ce point, décrit ses tâches comme suit :
- Accueil du public;
- Gestion des documents et registre de la population ;
- Modifications d'Etat civil;
- Cartes d'identité;
- Permis de conduire;
- Passeports;
- Casier judiciaire;
- Etrangers ;
- Statistiques mensuelles;
- Courses cycliste ;
- Ordonnance de police;
- Recensement agricole ;
Par lettres du 10.5.2005 et 5.6.2005, Madame G se plaint auprès du bourgmestre sur sa surcharge de travail.
Par lettre du 29.6.2011 au Collège Communal, Madame G se plaint de sa surcharge de travail.
Alors que la cour ne trouve pas de pièce à ce sujet dans le dossier, il n'est pas contesté qu'en septembre 2011, le Service de Prévention et de Médecine du Travail (SPMT), qui a visité le 23.8.2011 les lieux du travail, a constaté que « Le problème, dans ces services, réside dans la surcharge de travail à laquelle semble être soumis les travailleurs. Une réorganisation du travail ainsi qu'un renforcement de l'équipe en place sont vivement recommandés ».
La Commune d'Ouffet comptait en 2011 2.714 habitants et le nombre de son personnel était monté à 7 personnes dont il n'est pas contesté que 3 ont été formées afin de pouvoir être affectées au guichet.
Il n'est pas contesté qu'entre 2010 et 2012, Madame G. a successivement été déchargée de trois tâches :
- les ordonnances de police ;
- les courses cyclistes ;
- le recensement agricole.
La Commune a procédé à un réaménagement de l'espace de travail impliquant moins de passage à côté du guichet et un autre poste de travail.
Le 26.1.2012, le Docteur Lapaix constate dans le chef de Madame G que « le stress professionnel déstabilisait la tension et occasionnait des pics de pression artérielle préjudiciables à sa santé ».
Le 19.3.2012, le Docteur Melen, médecin du travail, pose, en ce qui concerne Madame G, les recommandations suivantes concernant les conditions d'occupation et d'aménagement relatives au poste de travail: «Pour des raisons médicales, il est absolument indispensable de limiter le plus possible les situations génératrices de stress important ».
Le 19.10.2012, le Service de Prévention et de Médecine du Travail (SPMT) a, à nouveau, visité les lieux de travail et a constaté que : « Le problème de la surcharge de travail au bureau population a été nettement amélioré depuis la création du nouveau poste de travail dans le bureau arrière. »
Selon la pièce 2 de la Commune, en 2012, Madame G a connu 26 jours de maladie.
En 2013, Madame G a sollicité et obtenu une réduction d'1/5ème de son temps de travail pour une durée indéterminée prenant cours le 1.1.2014.
Selon la pièce 2 de la Commune, en 2013, Madame G a connu 17 jours de maladie.
Selon la pièce 2 de la Commune, en 2014, Madame G a connu 40 jours de maladie.
Le 12.1.2015, le médecin du travail, le Docteur Doffe constate dans le chef de Madame G « un burn-out lié aux conditions de travail et il est aussi indispensable d'aider la travailleuse à gérer sa santé mentale. Une aide supplémentaire me paraît nécessaire. Mon avis sur la reprise actuel (manque une partie sur la copie) du travail est nécessaire vu l'équilibre mental précaire (manque une partie sur la copie) la travailleuse. »
Le 2.9.2015, le Docteur Colantonio constate chez Madame G « une HTA à 180/100 justifiant une mise en repos. Cette HTA est attribuable à un stress professionnel important. »
Selon la pièce 2 de la Commune, en 2015, Madame G a connu 30 jours de maladie.
Le 2 juin 2016, le Docteur Marganne, médecin psychiatre, réalise une expertise médicale unilatérale. Madame G lui fait état de tensions entre elle et le secrétaire communal et entre elle est ses collègues de travail en cours des années et estime qu'il y a un acharnement à son égard. Le psychiatre constat que « A l'échelle BMS - 10, évaluant le burn out, elle revendique un score de 5, soit un score élevé »
En conclusion, il estime que :
« Madame G. présente un état anxio-dépressif majeur, apparaissant réactionnel à ses conditions délétères de travail se détériorant depuis plusieurs années, les premiers signaux d'alerte étant apparus chez elle dès 2012, après qu'elle ait moult fois tiré la sonnette d`alarme. Aucun aménagement de son environnement de travail n'a été effectué malgré ses multiples appels à l'aide.
ll est évident que son état rentre exclusivement dans le contexte professionnel qu'elle est amenée à vivre depuis de nombreuses années.
Cet état pourrait donc être qualifié de maladie professionnelle. »
Le 26.8.2016, Madame G. introduit auprès de la Commune une demande d'indemnisation pour une affection ne figurant pas sur la liste belge des maladies professionnelles. Aucune maladie précise n'est indiquée.
A une date indéterminée, FEDRIS propose de rejeter la demande au motif que « des documents médicaux joints à votre demande, il n'apparait pas que la maladie en raison de laquelle une réparation est demandée, trouve sa cause déterminante et directe dans l'exercice de la profession » Aucune maladie précise n'est indiquée.
Ces conclusions médicales ont été...
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