Jugement/arrêt, Cour du Travail de Liège, 2020-08-04

JurisdictionBélgica
Judgment Date04 août 2020
ECLIECLI:BE:CTLIE:2020:ARR.20200804.1
CourtCour du Travail de Liège
Docket Number2019/AL/532
Link to Original Sourcehttps://juportal.be/content/ECLI:BE:CTLIE:2020:ARR.20200804.1

Numéro du répertoire

2020 /

R.G. Trib. Trav.

14/426533/A

Date du prononcé

04 août 2020

Numéro du rôle

2019/AL/532

En cause de :

OFFICE NATIONAL DE L'EMPLOI

C/

F.

Cour du travail de Liège

Division Liège

Chambre 2-C siégeant en vacation

Arrêt

SECURITE SOCIALE DES TRAVAILLEURS SALARIES - chômage

Arrêt contradictoire

Définitif

+ Sécurité sociale - chômage - allocations d'insertion - octroi limité dans le temps- conformité au principe de standstill

Constitution, art. 23 et 159

AR 25.11.1991, art. 63

EN CAUSE :

L'OFFICE NATIONAL DE L'EMPLOI (ONEM), BCE 0206.737.484, dont les bureaux sont établis 1000 BRUXELLES, Boulevard de l'Empereur, 7,

Partie appelante, représentée par Maître Eric THERER, avocat, qui se substitue à Maître Céline HALLUT, avocat à 4031 ANGLEUR, rue Vaudrée, 186

CONTRE :

Madame , RRN , domiciliée à ,

Partie intimée, représentée par Maître Elodie TESSAROLO, avocat, qui se substitue à Maître Pierre LYDAKIS, avocat à 4000 LIEGE, Place Saint-Paul, 7B

• •

INDICATIONS DE PROCEDURE

Vu en forme régulière les pièces du dossier de la procédure à la clôture des débats le 03 juin 2020, et notamment :

- le jugement attaqué, rendu contradictoirement entre parties le 16 septembre 2019 par le tribunal du travail de Liège, division Liège, 3e chambre (R.G. 14/426533/A) ;

- la requête formant appel de ce jugement, reçue au greffe de la cour du travail de Liège, division Liège, le 14 octobre 2019 et notifiée à la partie intimée par pli judiciaire le 15 octobre 2019 invitant les parties à comparaître à l'audience publique du 20 novembre 2019 ;

- l'ordonnance du 21 novembre 2019 basée sur l'article 747 du Code judiciaire fixant les plaidoiries à l'audience publique du 03 juin 2020 ;

- les conclusions de la partie intimée, remises au greffe de la cour le 05 février 2020 ;

- les conclusions de synthèse d'appel de la partie intimée, remises au greffe de la cour le 03 avril 2020 ;

- les conclusions d'appel de la partie appelante, remises au greffe de la cour le 29 avril 2020 ;

Entendu les conseils des parties en leurs explications à l'audience publique du 03 juin 2020.

Les parties ont marqué leur accord sur la remise et/ou l'envoi des conclusions et/ou pièces hors des délais prévus par l'ordonnance de mise en état et de fixation prise sur base de l'article 747 du Code judiciaire.

Vu l'avis écrit du ministère public rédigé en langue française par Monsieur Matthieu SIMON, substitut de l'auditeur du travail de Liège, délégué à l'auditorat général près la cour du travail de Liège par l'ordonnance rendue par le Procureur général en date du 8 octobre 2019, déposé au greffe de la cour du travail de Liège le 18 juin 2020.

Vu les répliques de la partie intimée, remises au greffe de la cour le 29 juin 2020.

Vu la requête en réouverture des débats et le dossier de pièces y annexé déposés au greffe le 10.07.2020 par la partie intimée et sa notification conformément à l'article 773 du CJ à la partie appelante;

Vu l'absence d'observations reçues de la partie appelante ;

Vu les articles 771, 772 et 773 du Code judiciaire ;

La demande porte sur le dépôt d'un dossier de pièces contenant les preuves de recherche d'emploi durant la période transitoire s'étendant du 01.01.2012 au 31.12.2014 ;

La cour constate que la demande ne porte ni sur une pièce ni sur un fait nouveau et capital qui auraient été découverts par la partie appelante durant le délibéré mais consiste à compléter et à appuyer les répliques à l'avis du Ministère public déjà formulées par la partie appelante ;

Il ne se justifie donc pas d'ordonner une réouverture des débats : la demande est recevable mais non fondée, le dossier de pièces visé par la demande et déjà déposé est donc écarté des débats.

I. LA DEMANDE ORIGINAIRE - LE JUGEMENT DONT APPEL - LES DEMANDES EN APPEL

I.1. La demande originaire

La demande originaire a été introduite par requête du 23.09.2014 et est dirigée contre une décision de l'ONEM du 25.06.2014 par laquelle le directeur du bureau de chômage a annoncé à Madame F. la date provisoire de fin de droit aux allocations d'insertion : son droit prend fin le 01.01.2015.

I.2. Les antécédents de procédure et le jugement dont appel

Par jugement du 15.10.2018, le tribunal a dit le recours recevable et a ordonné une réouverture des débats invitant les parties à traiter du fond et à conclure sur le principe de standstill.

Par jugement du 16.09.2019, le tribunal a déclaré le recours recevable et fondé sur le principe du standstill. Madame F. a été rétablie dans ses droits sur base de la version de l'article 63 de l'arrêté royal du 25.11.1991 portant règlement du chômage telle qu'en vigueur avant sa modification par l'arrêté royal du 28.12.2011 dont l'article 9.2° est écarté en application de l'article 159 de la Constitution.

L'Onem a été condamné aux dépens.

I.3. Les demandes et les moyens des parties en appel

I.3.1° - La partie appelante, l'Onem

Sur base de sa requête d'appel et du dispositif de ses conclusions prises en appel, l'Onem demande à la cour de dire son appel recevable et fondé, de réformer le jugement dont appel étant celui du 16.09.2019 et de rétablir la décision de l'Onem mettant fin au droit de Madame F. aux allocations d'insertion à partir du 01.01.2015. Il est demandé de statuer comme de droit quant aux dépens.

I.3.2° - La partie intimée, Madame F.

Sur base du dispositif de ses conclusions prises en appel, Madame F. demande à la cour de dire l'appel recevable mais non fondé et de confirmer le jugement dont appel.

Les dépens sont liquidés à charge de l'Onem à la somme de 174,94 euro .

II. LES FAITS

Madame F. est née le 17.01.1960. Elle a été admise au chômage sur la base des études le 01.08.1988. Elle a un diplôme d'éducatrice spécialisée, obtenu en 2000. Son droit aux allocations d'insertion a pris fin le 31.12.2014, elle est alors âgée de 54 ans. Elle était indemnisée au taux isolé.

Elle fait l'objet d'une activation du comportement de recherche d'emploi depuis à tout le moins 2007 (période d'évaluation débutant au 02.12.2007).

Toutes les évaluations produites par l'Onem sont positives.

Elle a introduit une demande d'octroi du revenu d'intégration sociale, suite à son exclusion du bénéficie des allocations d'insertion au 01.01.2015, qui lui a été refusée par une décision du CPAS de Liège du 17.02.2015 sur base de la motivation suivante : « Suite à l'héritage que vous avez perçu en 2013 au décès de votre maman. Vos ressources sont supérieures au taux du revenu d'intégration sociale auquel vous pourriez prétendre et ce conformément à l'article 27 de l'arrêté royal du 11.07.2002 et de la loi du 26.05.2002 ».

III. L'AVIS DU MINISTERE PUBLIC ET LES REPLIQUES

III.1. L'avis du Ministère public

Le Ministère public conclut à la réformation du jugement au terme d'un avis écrit de 8 pages auquel la cour renvoie pour les développements détaillés qu'il contient.

En résumé,

1°/ sur l'urgence invoquée devant la section de législation du Conseil d'Etat, il est relevé qu'il ressort de l'avis n° 50.751/1 du 21.12.2011 que l'urgence invoquée n'a nullement été critiquée par le Conseil d'Etat (voir page 6 de l'avis). Nonobstant ce constat, il n'existe pas de circonstances particulières ou exceptionnelles permettant de remettre en cause la pertinence de l'urgence visée dans le préambule du projet d'arrêté royal.

2°/ sur le principe du standstill, après avoir détaillé sa portée sur le plan juridique (notamment en ne retenant pas la nécessité d'analyser la situation singulière de l'assuré social qui soulève un moyen fondé sur le standstill), le Ministère public conclut à l'existence d'un recul significatif qu'il estime justifié par un motif d'intérêt général étant un motif budgétaire proportionné (après avoir écarté la proportionnalité du motif lié à la relance de l'emploi, en particulier des jeunes).

« Ce recul significatif est justifié, proportionné dès lors qu'il apparait adéquatement ciblé en ce qu'il vise les personnes bénéficiant d'allocations sans avoir suffisamment cotisé, ce qui constitue une dérogation importante (et donc de stricte interprétation) au principe de l'assurance sur lequel repose le chômage (cette différence majeure explique d'ailleurs le fait qu'il n'y ait pas de discrimination entre les bénéficiaires d'allocations d'insertion, lesquelles sont limitées dans le temps, et les bénéficiaires d'allocations de chômage, lesquelles ne sont pas limitées dans le temps, les deux situations n'étant pas comparables).

De plus, la durée de 36 mois n'est pas absolue puisque l'article 9 prévoit des exceptions, notamment en ne tenant pas compte (dans certains cas) de la période écoulée avant l'âge de 30 ans (§ 2, alinéa 2, 2)°, en prolongeant la durée en cas de formation professionnelle (§ 2, alinéa 3, 1°), etc.

L'on se souviendra en outre que depuis le 1er janvier 2012, les allocations d'attente sont devenues les ″allocations d'insertion″ et le stage d'attente est dénommé ″stage d'insertion professionnelle″ : l'idée sous-jacente était déjà d'indiquer que « ces allocations doivent en principe avoir un caractère temporaire et que la priorité doit être l'insertion la plus rapide possible des jeunes sur le marché du travail » (J.-F. Funck, « [Chômage] Les conditions d'admissibilité » in Guide social permanent. Tome 4 - Droit de la sécurité sociale: commentaire, Partie I, Livre IV, Titre II, Chap. II, n° 50).

Par ailleurs, la dignité humaine demeure assurée par les CPAS, auxquels le chômeur en fin de droit peut le cas échéant faire appel ».

III.2. Les répliques

L'Onem n'a pas répliqué à l'avis du Ministère public.

Madame F. a répliqué en soulignant que :

1°/ la jurisprudence (référence est faite à un arrêt de la cour du travail de Liège du 10.02.2016) retient une appréciation concrète de la situation de l'assuré social pour statuer sur l'application du principe de standstill.

La situation personnelle de Madame F. doit donc être prise en compte.

2°/ si l'on considère que la...

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