Jugement/arrêt, Conseil d'État, 2021-09-17

JurisdictionBélgica
Judgment Date17 septembre 2021
ECLIECLI:BE:RVSCE:2021:ARR.251.519
CourtConseil d'État
Docket NumberA. 230071/XV-4336
Link to Original Sourcehttps://juportal.be/content/ECLI:BE:RVSCE:2021:ARR.251.519

CONSEIL D’ÉTAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF
XVe CHAMBRE
no 251.519 du 17 septembre 2021
A. 230.071/XV-4.336
En cause : XXXX, ayant élu domicile chez Me Catherine COOLS, avocat, avenue de la Toison d’Or, 68/9
1060 Bruxelles,
contre :
l’État belge, représenté par le Ministre de la Sécurité et de l’Intérieur, ayant élu domicile chez Me Bernard RENSON, avocat, avenue de l’Armée, 10
1040 Bruxelles.
------------------------------------------------------------------------------------------------------
I. Objet de la requête
Par une requête introduite par la voie électronique le 27 janvier 2020, XXXX demande, d’une part, la suspension de l’exécution de « la décision datée du 25 novembre 2019 de la partie adverse ayant pour objet le refus d’octroi de la carte d’identification pour l’exercice d’activités de gardiennage » et, d’autre part, l’annulation de cette décision.
II. Procédure
Un arrêt n° 248.259 du 11 septembre 2020 a rejeté la demande de suspension de l’exécution de la décision attaquée. Il a été notifié aux parties.
La partie requérante a demandé la poursuite de la procédure.
Les mémoires en réponse et en réplique ont été régulièrement échangés.
XV - 4336 - 1/35
M. Christian Amelynck, premier auditeur chef de section au Conseil d’État, a rédigé un rapport sur la base de l’article 12 du règlement général de procédure.
Le rapport a été notifié aux parties.
Les parties ont déposé un dernier mémoire.
Par une ordonnance du 20 juillet 2021, l’affaire a été fixée à l’audience du 14 septembre 2021.
Mme Pascale Vandernacht, président de chambre, a exposé son rapport.
Me Catherine Cools, avocat, comparaissant pour la partie requérante, et Me Florence MATTHIS, loco Me Bernard RENSON, avocat, comparaissant pour la partie adverse, ont été entendus en leurs observations.
M. Christian Amelynck, premier auditeur chef de section, a été entendu en son avis.
Il est fait application des dispositions relatives à l’emploi des langues, inscrites au titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d’État, coordonnées le 12 janvier 1973.
III. Faits
Il y a lieu de se référer aux faits tels qu’exposés dans l’arrêt n° 248.259
du 11 septembre 2020.
IV. Demande de débats succincts
IV.1. Thèses des parties
Le requérant sollicite la mise en œuvre d’une procédure en débats succincts, faisant état de « l’absence de complexité factuelle et juridique de [...]
l’affaire ». À l’appui de cette demande, il se prévaut de la situation « économique, personnelle et familiale grave » dans laquelle il se trouve du fait de l’exécution de l’acte attaqué. Il mentionne avoir connaissance de cas d’autres personnes destinataires de décisions de refus de délivrance de cartes d’identification d’agents de gardiennage justifiées de la même façon que l’acte attaqué. Il estime nécessaire
XV - 4336 - 2/35
de mettre « un terme définitif à la pratique de la partie adverse consistant à considérer qu’une condamnation pour coups et blessures involontaires suite à un accident de la route fait obstacle à l’obtention d’une carte d’identification ».
La partie adverse rappelle la teneur de l’article 30, § 2, des lois sur le Conseil d’État, coordonnées le 12 janvier 1973, ainsi que de l’article 93 du règlement général de procédure. Elle estime que l’argumentation soulevée par le requérant dans sa demande appelle plus que des simple « débats succincts » au sens de cette disposition. Elle fait notamment état de ce que le requérant sollicite que soit posée une question préjudicielle à la Cour constitutionnelle.
Le requérant ne sollicite plus les débats succincts en réplique ni dans son dernier mémoire.
La partie adverse réitère son point de vue dans son dernier mémoire.
IV.2. Appréciation
La question soulevée par le recours, qui comporte 26 pages, implique l’interprétation d’une disposition législative à propos de laquelle le requérant propose de poser une question préjudicielle à la Cour constitutionnelle. Dans ces circonstances, la solution juridique à apporter au présent litige ne peut être qualifiée de simple de sorte que les débats succincts ne peuvent se justifier à l’évidence.
Par ailleurs, la considération que l’acte attaqué affecte gravement la situation « économique, personnelle et familiale » du requérant n’est pertinente que pour apprécier l’existence d’une urgence à statuer, non pour apprécier l’opportunité de la mise en œuvre de l’article 93 du règlement général de procédure. N’est pas davantage pertinente à cet égard, la considération que d’autres personnes seraient destinataires de décisions individuelles justifiées de la même façon que l’acte attaqué.
La demande d’application de l’article 93 du règlement général de procédure ne peut être accueillie.
V. Moyen unique
V.1. Thèses des parties
XV - 4336 - 3/35
Le requérant prend un moyen unique de la violation de l’article 61, 1°, de la loi du 2 octobre 2017 réglementant la sécurité privée et particulière, du principe de la motivation matérielle des décisions administratives, de la loi du 29 juillet 1991 relative à la motivation formelle des actes administratifs, du principe de bonne administration et du principe audi alteram partem.
À titre principal, il soutient que l’autorité a mal appliqué l’article 61, 1°, de la loi du 2 octobre 2017, précitée. Il rappelle que cette disposition prévoit que les personnes qui exercent une fonction d’exécution au sein d’une entreprise de gardiennage, d’un service interne de gardiennage, d’un service de sécurité ou d’un organisme de formation, doivent satisfaire à la condition de « ne pas avoir été condamnées, même avec sursis, à une quelconque peine correctionnelle ou criminelle, telle que visée à l’article 7 du Code pénal, ou à une peine similaire à l’étranger, à l’exception des condamnations pour infraction à la réglementation relative à la police de la circulation routière ». Il relève que la décision attaquée est motivée par la considération qu’il a été condamné pour des faits de coups et blessures involontaires qui sont la conséquence d’un accident de la circulation, qui s’inscrivent dans un contexte de police de la circulation routière, par le fait qu’en violation de l’article 8.3. de la loi relative à la police de la circulation routière, coordonnée le 16 mars 1968, (lire probablement 27ter de cette loi) il n’a pas été maître de son véhicule. Il en déduit qu’il devait bien bénéficier de l’exception prévue à l’article 61, 1°, précité.
À titre subsidiaire, il est d’avis que s’il fallait admettre que la partie adverse a correctement appliqué cette disposition, alors il s’imposerait de considérer qu’elle va « à l’encontre de plusieurs dispositions et principes constitutionnels et internationaux ». Il estime que l’article 61, 1°, précité, contrevient aux « principes d’égalité et [de] non-discrimination ». Selon lui, il convient, tout d’abord, de s’interroger sur une éventuelle violation des principes d’égalité et de non-
discrimination, le cas échéant lus en combinaison avec le principe de proportionnalité et l’article 23 de la Constitution garantissant le droit au travail et au libre choix d’une activité professionnelle. Il rappelle que l’objectif de la disposition est d’éviter que des personnes ne se comportant pas correctement en société, puissent occuper une fonction représentant, dans une certaine mesure, une position de force pour laquelle il faut faire preuve de « gestion et de contrôle des dangers ».
Or, il souligne que s’il faut interpréter l’article 61, 1°, de la loi du 2 octobre 2017, précitée, comme l’a fait la partie adverse, il serait tout à fait possible pour des personnes ayant été condamnées pour les infractions suivantes (à titre exemplatif) à la loi relative à la police de la circulation routière, de néanmoins obtenir une carte d’identification :
XV - 4336 - 4/35
- pour excès de vitesse de plus de 40 km/h ou 30 km/h en agglomération, dans une zone 30, aux abords d’une école, dans une zone résidentielle ou de rencontre (art. 29, § 3, alinéa, 3, de la loi du 16 mars 1968 relative à la police de la circulation routière);
- pour avoir conduit un véhicule à moteur sans être porteur du permis de conduire (art. 30);
- pour avoir effectué de fausses déclarations en vue d’obtenir un permis de conduire (art. 30);
- pour délit de fuite (art. 33);
- pour conduite en état d’imprégnation alcoolique et ivresse (art. 34-37/1);
- pour conduite sous l’influence de substances qui impactent la capacité de conduite (art. 37bis).
Il considère que ces différentes infractions témoignent d’un manque manifeste d’une capacité de gestion du danger et, surtout, d’une conscience de la violation des règles pénales ou, à tout le moins, d’une négligence grave. De plus, il relève qu’elles sont punies de peines correctionnelles.
Il n’est pas compréhensible, de son point de vue, que le législateur a estimé que « de telles condamnations ne présentent généralement pas de risque pour la société dans le cadre de l’exercice d’activités dans le secteur de la sécurité privée » mais, par contre, qu’une condamnation pour coups et blessures involontaires intervenue à la suite d’un simple accident de la circulation, constituerait bel et bien un tel risque. Il ajoute que la situation est encore plus inique au vu de l’article 33, § 2, de la loi du 16 mars 1968, précitée, qui punit le coupable « d’un délit de fuite lors d’un accident qui a entraîné pour autrui des coups ou des blessures » à un emprisonnement de quinze jours à trois ans et d’une amende de 400
à 5.000 euros ou d’une de ces peines seulement et d’une déchéance du droit de conduire un véhicule à moteur d’une durée de trois mois au moins et cinq ans au plus ou à titre définitif. Pour rappel, il indique que les coups et blessures involontaires à la suite d’un accident de la circulation sont punis, sur la base de l’article 420, alinéa 2, du Code pénal, d’un emprisonnement de huit jours à un an et d’une amende de 50 à 1.000 euros (ou d’une de ces peines seulement). En d’autres termes, il constate que le législateur estime que le comportement visé...

Pour continuer la lecture

Commencez Gratuitement

Débloquez l'accès complet avec un essai gratuit de 7 jours

Transformez votre recherche juridique avec vLex

  • Accès complet à la plus grande collection de jurisprudence de common law sur une seule plateforme

  • Générez des résumés de cas avec l’IA qui mettent en évidence les enjeux juridiques clés

  • Fonctionnalités de recherche avancées avec des options de filtrage et de tri précises

  • Contenu juridique complet avec des documents provenant de plus de 100 juridictions

  • Fiable pour 2 millions de professionnels, y compris les plus grands cabinets du monde

  • Accédez à la recherche assistée par l’IA avec Vincent AI : requêtes en langage naturel avec citations vérifiées

vLex

Débloquez l'accès complet avec un essai gratuit de 7 jours

Transformez votre recherche juridique avec vLex

  • Accès complet à la plus grande collection de jurisprudence de common law sur une seule plateforme

  • Générez des résumés de cas avec l’IA qui mettent en évidence les enjeux juridiques clés

  • Fonctionnalités de recherche avancées avec des options de filtrage et de tri précises

  • Contenu juridique complet avec des documents provenant de plus de 100 juridictions

  • Fiable pour 2 millions de professionnels, y compris les plus grands cabinets du monde

  • Accédez à la recherche assistée par l’IA avec Vincent AI : requêtes en langage naturel avec citations vérifiées

vLex

Débloquez l'accès complet avec un essai gratuit de 7 jours

Transformez votre recherche juridique avec vLex

  • Accès complet à la plus grande collection de jurisprudence de common law sur une seule plateforme

  • Générez des résumés de cas avec l’IA qui mettent en évidence les enjeux juridiques clés

  • Fonctionnalités de recherche avancées avec des options de filtrage et de tri précises

  • Contenu juridique complet avec des documents provenant de plus de 100 juridictions

  • Fiable pour 2 millions de professionnels, y compris les plus grands cabinets du monde

  • Accédez à la recherche assistée par l’IA avec Vincent AI : requêtes en langage naturel avec citations vérifiées

vLex

Débloquez l'accès complet avec un essai gratuit de 7 jours

Transformez votre recherche juridique avec vLex

  • Accès complet à la plus grande collection de jurisprudence de common law sur une seule plateforme

  • Générez des résumés de cas avec l’IA qui mettent en évidence les enjeux juridiques clés

  • Fonctionnalités de recherche avancées avec des options de filtrage et de tri précises

  • Contenu juridique complet avec des documents provenant de plus de 100 juridictions

  • Fiable pour 2 millions de professionnels, y compris les plus grands cabinets du monde

  • Accédez à la recherche assistée par l’IA avec Vincent AI : requêtes en langage naturel avec citations vérifiées

vLex

Débloquez l'accès complet avec un essai gratuit de 7 jours

Transformez votre recherche juridique avec vLex

  • Accès complet à la plus grande collection de jurisprudence de common law sur une seule plateforme

  • Générez des résumés de cas avec l’IA qui mettent en évidence les enjeux juridiques clés

  • Fonctionnalités de recherche avancées avec des options de filtrage et de tri précises

  • Contenu juridique complet avec des documents provenant de plus de 100 juridictions

  • Fiable pour 2 millions de professionnels, y compris les plus grands cabinets du monde

  • Accédez à la recherche assistée par l’IA avec Vincent AI : requêtes en langage naturel avec citations vérifiées

vLex

Débloquez l'accès complet avec un essai gratuit de 7 jours

Transformez votre recherche juridique avec vLex

  • Accès complet à la plus grande collection de jurisprudence de common law sur une seule plateforme

  • Générez des résumés de cas avec l’IA qui mettent en évidence les enjeux juridiques clés

  • Fonctionnalités de recherche avancées avec des options de filtrage et de tri précises

  • Contenu juridique complet avec des documents provenant de plus de 100 juridictions

  • Fiable pour 2 millions de professionnels, y compris les plus grands cabinets du monde

  • Accédez à la recherche assistée par l’IA avec Vincent AI : requêtes en langage naturel avec citations vérifiées

vLex

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT