Jugement/arrêt, Conseil d'État, 2019-02-21

JurisdictionBélgica
Judgment Date21 février 2019
ECLIECLI:BE:RVSCE:2019:ARR.243.777
Link to Original Sourcehttps://juportal.be/content/ECLI:BE:RVSCE:2019:ARR.243.777
Docket NumberA. 195735/XV-1221
CourtConseil d'État

CONSEIL D’ÉTAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF.
XVe CHAMBRE
no 243.777 du 21 février 2019
A. 195.735/XV-1221
En cause : la société anonyme EUROPEAN AIR TRANSPORT, à laquelle succède la société de droit allemand EUROPEAN AIR TRANSPORT LEIPZIG GmbH, ayant élu domicile chez Me Tamara LEIDGENS, avocat, avenue Louise 65, boîte 11, 1050 Bruxelles,
contre :
la Région de Bruxelles-Capitale, représentée par son Gouvernement, ayant élu domicile chez Me François TULKENS, avocat, boulevard de l’Empereur 3
1000 Bruxelles.
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I. Objet de la requête
Par une requête introduite le 4 mars 2010, la société anonyme EUROPEAN AIR TRANSPORT, à laquelle succède la société de droit allemand EUROPEAN AIR TRANSPORT LEIPZIG GmbH, demande l’annulation de "la décision du collège d’Environnement du 5 janvier 2010 confirmant la décision de l’Institut bruxellois pour la Gestion de l’Environnement (I.B.G.E.) [actuellement Bruxelles Environnement] du 14 septembre 2009 de lui infliger une amende administrative de 82.253 euros du chef d’infractions à l’arrêté du Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale du 27 mai 1999 relatif à la lutte contre le bruit généré par le trafic aérien prétendument commises en juin [lire : juillet] 2007".
II. Procédure
Le dossier administratif a été déposé.
Les mémoires en réponse et en réplique ont été régulièrement échangés.
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M. Denis DELVAX, auditeur au Conseil d’État, a rédigé un rapport sur la base de l’article 12 du règlement général de procédure.
Le rapport a été notifié aux parties.
Les derniers mémoires ont été régulièrement échangés.
Par une ordonnance du 11 janvier 2019, l’affaire a été fixée à l’audience publique du 19 février 2019 à 9 heures 30.
Mme Pascale VANDERNACHT, président de chambre, a fait rapport.
Me Tamara LEIDGENS, avocat, comparaissant pour la partie requérante, et Me François TULKENS, avocat, comparaissant pour la partie adverse, ont été entendus en leurs observations.
M. Denis DELVAX, premier auditeur, a été entendu en son avis conforme.
Il est fait application des dispositions relatives à l’emploi des langues, inscrites au titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d’État, coordonnées le 12 janvier 1973.
III. Faits
1. La partie requérante est une compagnie aérienne exploitant une ligne aérienne au départ et à destination de l’aéroport de Zaventem.
2. Le 17 septembre 2007, deux inspecteurs de l’I.B.G.E. (Bruxelles Environnement) dressent un procès-verbal d’infractions à charge de la partie requérante, fondé sur le constat d’immission de bruits excédant les seuils fixés par l’arrêté du 27 mai 1999 relatif à la lutte contre le bruit généré par le trafic aérien, à partir des stations de mesure situées sur le territoire de la Région de Bruxelles-
Capitale, durant le mois de juillet 2007.
Ce procès-verbal repose sur des relevés sonométriques et sur la compilation d’informations communiquées par BAC et BELGOCONTROL.
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3. Par un courrier du 24 septembre 2007, l’I.B.G.E. (Bruxelles Environnement) adresse à la partie requérante le procès-verbal précité et l’informe que celui-ci a également été transmis au procureur du Roi.
4. Le 6 juillet 2009, un directeur de l’I.B.G.E. (Bruxelles Environnement) informe la partie requérante que le procureur du Roi a notifié sa décision de ne pas entamer de poursuites pénales à raison des faits constatés dans le procès-verbal précité, qu’une amende administrative peut donc lui être infligée, qu’elle peut faire part de ses moyens de défense par écrit ou de son souhait d’être entendue, et qu’à défaut, il sera considéré qu’elle n’a aucune remarque ou argumentation à faire valoir, de sorte que la procédure sera poursuivie sur la base des informations en possession de l’I.B.G.E. (Bruxelles Environnement).
5. Le 24 juillet 2009, ce même directeur informe la partie requérante que le procureur du Roi a notifié sa décision de ne pas entamer de poursuites à raison des faits constatés dans un procès-verbal relatif à des infractions commises dans le courant du mois d’août 2007, qu’une amende administrative peut donc lui être infligée, qu’elle peut faire part de ses moyens de défense par écrit ou de son souhait d’être entendue, et qu’à défaut, il sera considéré qu’elle n’a aucune remarque ou argumentation à faire valoir, de sorte que la procédure sera poursuivie sur la base des informations en possession de l’I.B.G.E. (Bruxelles Environnement).
6. Le 29 juillet 2009, le conseil de la partie requérante sollicite la communication des données sonométriques, des données de BAC et de BELGOCONTROL relatives aux infractions visées dans les deux procès-verbaux précités, indique que les affaires doivent être jointes en vertu de l’article 41 de l’ordonnance du 25 mars 1999 relative à la recherche, la constatation, la poursuite et la répression des infractions en matière d’environnement et sollicite l’octroi d’un délai complémentaire pour le dépôt d’un mémoire en défense.
7. Le 20 août 2009, l’I.B.G.E. (Bruxelles Environnement) communique les pièces demandées et indique ne pas voir de problème au dépôt d’un mémoire unique pour les infractions des mois de juillet et d’août 2007 si le conseil de la partie requérante l’estime nécessaire.
8. Le 3 septembre 2009, le conseil de la partie requérante adresse à l’I.B.G.E. (Bruxelles Environnement) un mémoire exposant les arguments de sa cliente à l’égard des procès-verbaux précités.
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9. Par une décision du 14 septembre 2009 de son fonctionnaire dirigeant, l’I.B.G.E. (Bruxelles Environnement) inflige à la partie requérante une amende de 82.253 €, pour les infractions commises dans le courant du mois de juillet 2007.
10. Par une décision du même jour, une amende de 100.399 € est infligée à la partie requérante pour les infractions commises dans le courant du mois d’août 2007.
11. Le 16 novembre 2009, la partie requérante introduit un recours devant le collège d’Environnement contre la décision du fonctionnaire dirigeant de l’I.B.G.E. (Bruxelles Environnement) lui infligeant une amende pour les infractions commises dans le courant du mois de juillet 2007.
Dans ce recours, elle fait valoir qu’il convient de joindre à nouveau les dossiers relatifs aux infractions commises dans le courant des mois de juillet et août 2007, que seule une juridiction judiciaire peut lui infliger une telle amende, qu’il n’est pas satisfait aux principes d’indépendance et d’impartialité, qu’elle est privée du droit à un double degré de juridictions indépendantes et impartiales, que l’amende viole la directive 2002/30/CE du Parlement européen et du Conseil du 26
mars 2002 relative à l'établissement de règles et procédures concernant l'introduction de restrictions d'exploitation liées au bruit dans les aéroports de la Communauté, que le procès-verbal est irrégulier et donc nul, que le principe de la légalité des délits et des peines interdit de lui infliger une amende, que la présomption d’innocence interdit qu’une amende lui soit infligée, qu’elle bénéficie de causes de justification et/ou de circonstances atténuantes, que la décision attaquée viole le principe de l’unicité d’infraction et qu’en vertu de l’article 41 de l’ordonnance du 25 mars 1999, précitée, le montant total des amendes pouvant lui être infligé pour toutes les infractions qui ont fait l’objet de décisions non encore jugées par le Conseil d’État doit être limité à 125.000 €.
12. Le même jour, la partie requérante introduit un recours semblable contre la décision lui infligeant une amende pour les infractions commises dans le courant du mois d’août 2007.
13. Le 5 janvier 2010, le collège d’Environnement confirme la décision prise par le fonctionnaire dirigeant de l’I.B.G.E. (Bruxelles Environnement) à propos des infractions commises dans le courant du mois de juillet 2007.
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Cette décision, qui constitue l’acte attaqué, est motivée comme suit :
"[…]
I. Antécédents Le 17 septembre 2007, l’I.B.G.E. dresse à charge de European Air Transport, ci-après dénommée “EAT”, un procès-verbal portant la référence n° 070917/avions/dme/fbr/European Air Transport – juillet 2007. Il en résulte qu’EAT aurait commis 90 infractions à l’arrêté du 27 mai 1999 relatif à la lutte contre le bruit généré par le trafic aérien.
Ce procès-verbal et les rapports de mesure ont été portés à la connaissance d’EAT le 24 septembre 2007 en lui indiquant que ces documents étaient aussi envoyés au Procureur du Roi de Bruxelles.
Ce dernier ayant notifié sa décision de ne pas exercer de poursuites le 3
octobre 2007, l’I.B.G.E. a écrit à EAT le 6 juillet 2009 qu’il était en droit de lui infliger une amende administrative en se référant à l’article 37 de l’Ordonnance 1999.
Le 29 juillet 2009, le conseil d’EAT a notamment sollicité de l’I.B.G.E. la jonction de cette cause avec celle relative aux dépassements de la norme de bruit observés en août 2007. Par un courrier du 20 août 2009, l’I.B.G.E.
répondait à cette demande en ces termes: “Nous ne voyons pas d’inconvénient, si vous l’estimez nécessaire, à ce que vous introduisiez un seul mémoire pour votre cliente pour les mois de juillet 2007 et août 2007”.
Une amende d’un montant de 82.253 euros a été infligée par une décision du 14 septembre 2009 à EAT pour des infractions à l’article 33, 7°, b) de l’Ordonnance 1999, à savoir avoir créé “directement ou indirectement, ou laisser perdurer une gêne sonore dépassant les normes fixées par le Gouvernement”, c’est-à-dire les “valeurs limites” de l’Arrêté 1999 qui ne peuvent être dépassées par les avions lorsqu’ils survolent le territoire de la Région.
Le fonctionnaire dirigeant de l’I.B.G.E. constate, dans ladite décision, qu’en raison de l’unicité d’infractions, il n’y avait pas lieu de tenir compte de 19 dépassements constatés sur la période de référence mais que se constate, pour le mois de juillet 2007, une augmentation d’au moins 20 % du nombre des infractions commises par rapport...

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