Arrêt Nº275954 de Conseil du Contentieux des Etrangers, 11/08/2022

Judgment Date11 août 2022
Procedure TypePlein contentieux
Judgement Number275954
CourtXe CHAMBRE (Conseil du Contentieux des Etrangers)
CCE X - Page 1
275 954
du
11
août
2022
dans l’affaire X / X
En cause
:
ayant élu domicile
:
au cabinet de Maître F
.
BECKERS
Rue Berckmans 83
1060 BRUXELLES
contre :
le Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides
LE PRÉSIDENT F.F. DE LA Xe CHAMBRE,
Vu la requête introduite le 28 septembre 2021 par X, qui déclare être de nationalité congolaise (R.D.C.),
contre la décision de l’adjointe du Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides, prise le
30 août 2021.
Vu l’article 51/4 de la loi du 15 décembre 1980 sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et
l’éloignement des étrangers (ci-après dénommée la « loi du 15 décembre 1980 »).
Vu le dossier administratif.
Vu l’ordonnance du 31 mars 2022 convoquant les parties à l’audience du 26 avril 2022.
Entendu, en son rapport, G. de GUCHTENEERE, président de chambre f.f.
Entendu, en leurs observations, la partie requérante assistée par Me F. BECKERS, avocat, et M. M.
LISMONDE, attaché, qui comparaît pour la partie défenderesse.
APRES EN AVOIR DELIBERE, REND L’ARRET SUIVANT :
1. L’acte attaqué
Le recours est dirigé contre une décision de « refus du statut de réfugié et refus du statut de protection
subsidiaire », prise par l’adjointe du Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides, qui est motivée
comme suit :
«A. Faits invoqués
Selon vos déclarations, vous êtes de nationalité congolaise (RDC - République Démocratique du
Congo), d’origine sakata et originaire de Kinshasa vous avez vécu jusqu’à votre départ.
Vous êtes marié avec [M.N.S.] (SP : […], CG : […]) et vous avez deux enfants. Votre épouse a
demandé une protection internationale en même temps que vous et se trouve en Belgique également,
tout comme vos enfants.
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A l’appui de votre demande de protection internationale, vous invoquez les éléments suivants : En 2004-
2005, vous êtes diplômé de l’université de Kinshasa. Après votre licence en droit privé et judiciaire, vous
devenez avocat au barreau de Kinshasa à Matete et vous travaillez pour le cabinet du Bâtonnier
national [M.N.L.]. Vous avez en outre effectué différentes missions de consultance, notamment auprès
d’ «Avocats sans frontière » (ASF) Belgique, dans une organisation non-gouvernementale (ONG) qui se
nomme « le bureau international catholique pour l’enfance » (BICE) et qui dépend de l’ONU et de
l’UNICEF. Vous avez en outre travaillé pour la Banque Advans Congo.
Si vous admirez la politique et que votre « tendance » va plus vers l’opposition et notamment vers le
parti de l'Union pour la nation congolaise (UNC), vous n’êtes cependant membre d’aucun parti politique
affirmant par contre être davantage militant pour la société civile. Vous affirmez d’ailleurs être membre
de Mouva Prodecom vous exercez la fonction de conseiller juridique ainsi que de Congo-Totanga.
Ces associations auraient des ramifications avec d’autres mouvements tels que Filimbi, Lucha ou
l’Association congolaise pour l’accès à la justice (ACAJ).
Depuis 2010, le cabinet d’avocats dans lequel vous travaillez, le cabinet [M.N.L.], est en charge de la
défense des intérêts de l’Archidiocèse de Kinshasa.
Le 31 décembre 2017, alors que vous êtes en Belgique avec votre famille pour des vacances, le Comité
Laïc de Coordination (CLC) organise une première marche. Vous êtes rentrés au Congo le 9 janvier
2018 et le 21 janvier, vous participez à leur seconde marche, laquelle est dispersée de manière brutale.
Pour la troisième marche du 25 février 2018, votre patron, Maître [M.N.L.], vous demande de vous
rendre à l’hôtel de ville de Kinshasa afin de participer au dépôt de l’itinéraire de la marche auprès du
gouverneur, car l’Archidiocèse de Kinshasa est un client du bureau d’avocats vous travaillez. Vous
vous y rendez donc le 24 février 2018, à la veille de la marche organisée, vous retrouvez sur le
parvis de l’hôtel de ville des avocats d’autres organisations de la société civile ou de partis d’opposition.
Le gouverneur refuse de recevoir les avocats présents sur place, car ce dernier voulait que ce soit les
trois responsables du CLC invités qui se présentent en personne. Or, puisque ces trois personnes
étaient recherchées, elles n’osaient pas se manifester publiquement pour présenter l’itinéraire au
gouverneur.
Le lendemain matin, vous participez à la marche qui avait pourtant été interdite par les autorités. Le
cortège est dispersé par la police qui tire en l’air. Un agent en civil vous interpelle par votre prénom et
vous intime de vous arrêter dans votre fuite en vous menaçant de son arme. Vous êtes intercepté par
un autre agent en tenue civile également et vous êtes emmené, dans un véhicule.
Après un premier arrêt dans la commune de La Gombe, probablement dans un bureau de l’Agence
Nationale de Renseignements (ANR), vous êtes ensuite emmené dans un lieu inconnu, hors de la ville
de Kinshasa vous êtes détenu et torturé pendant environ dix jours.
Vous êtes interrogé à plusieurs reprises et vous êtes accusé de défendre les intérêts des catholiques et
des laïcs, de détenir les procès-verbaux des réunions du CLC et de tenir secret les endroits les
membres du CLC se cachent. Pendant votre détention, les autorités passent à deux reprises à votre
domicile. Si vous ignorez ce qu’il s’est concrètement passé durant ces visites à votre domicile, vous
savez qu’elles ont insécurisé votre famille qui a décidé de déménager. Pendant votre détention, vous
recevez la visite d’un inconnu qui vous interroge et vous aide à quitter les lieux. Votre évasion est
organisée lors d’un transfert de détenus durant lequel un militaire vous dit de prendre la fuite.
Vous vous retrouvez dans la brousse. Après dix minutes de marche, vous rencontrez un prêtre qui vous
appelle par votre fonction, « Maitre [M.] », et vous emmène dans un couvent vous restez caché
jusqu’à votre départ du pays.
Le 25 mars, vêtu d’un habit de prêtre et accompagné de deux prêtres en soutane, vous vous rendez à
l’aéroport de Ndjili vous retrouvez votre épouse et vos enfants. Vous y retrouvez l’homme que vous
aviez rencontré en détention. Celui-ci vous permet d’éviter les contrôles et vous confie à un autre
homme, au pied de l’avion, pour le voyage. C’est cet homme qui est en possession des passeports de
votre famille.

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