Arrêt Nº273321 de Conseil du Contentieux des Etrangers, 25/05/2022

Judgment Date25 mai 2022
Procedure TypePlein contentieux
Judgement Number273321
CourtVe CHAMBRE (Conseil du Contentieux des Etrangers)
CCE X - X Page 1
273 321 du 25 mai 2022
dans les affaires X, X / V
En cause :
1. X
2. X
ayant élu domicile :
au cabinet de Maître Hélène CROKART
Rue Piers 39
1080 BRUXELLES
contre :
le Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides
LE PRÉSIDENT F.F. DE LA Ve CHAMBRE,
Vu la requête introduite le 17 mars 2022 par X, qui déclare être de nationalité indéfinie, contre la décision
de la Commissaire adjointe aux réfugiés et aux apatrides, prise le 14 février 2022.
Vu la requête introduite le 17 mars 2022 par X, qui déclare être de nationalité indéfinie, contre la décision
de la Commissaire adjointe aux réfugiés et aux apatrides, prise le 14 février 2022.
Vu l’article 51/4 de la loi du 15 décembre 1980 sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et
l’éloignement des étrangers.
Vu les dossiers administratifs.
Vu les ordonnances du 19 avril 2022 convoquant les parties à l’audience du 13 mai 2022.
Entendu, en son rapport, J.-F. HAYEZ, juge au contentieux des étrangers.
Entendu, en leurs observations, les parties requérantes assistées par Me H. CROKART, avocat, et M.
LISMONDE, attaché, qui comparaît pour la partie défenderesse.
APRES EN AVOIR DELIBERE, REND L’ARRET SUIVANT :
1. La jonction des affaires
Les recours ont été introduits par une mère et son fils qui invoquent en substance, à l’appui de leurs
demandes de protection internationale respectives, les mêmes craintes de persécution et le même risque
réel d’atteintes graves. Ils invoquent en outre, à l’appui de leurs recours, des moyens partiellement
identiques à l’encontre des décisions attaquées. Par conséquent, dans un souci de bonne administration
de la justice, il y a lieu de joindre les affaires X et X qui sont étroitement liées sur le fond, et de statuer par
un seul et même arrêt.
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2. Les actes attaqués
Les recours sont dirigés contre deux décisions de refus du statut de réfugié et refus du statut de protection
subsidiaire, prises par la Commissaire adjointe aux réfugiés et aux apatrides, qui sont motivées comme
suit :
- Concernant A. M. A. J., ci-après dénommé « le requérant » :
« A. Faits invoqués
Vous seriez Palestinien, d’origine arabe et de religion musulmane. Vous auriez toujours vécu à Dammam
en Arabie Saoudite.
A la base de votre demande de protection internationale, vous invoquez les faits suivants.
En avril 2019, vous auriez fait la connaissance d’un patient nommé [A. R. A. A] dans le cabinet dentaire
où vous travailleriez. Vous vous seriez vus à plusieurs reprises et une amitié se serait installée entre vous.
La dernière fois que vous vous seriez rencontrés, cet ami aurait commencé à parler de la situation
économique depuis l’arrivée de Mohammed Ben Salmane. Vous vous seriez mis alors à critiquer le
gouvernement en parlant du meurtre de Khashoggi et des tueries au Yémen.
Le 4 juin 2019, une personne vous aurait apporté une convocation de la Sureté nationale sur votre lieu
de travail. Vous en auriez informé votre famille. Votre père aurait alors contacté [A. A. Z] qui aurait
beaucoup de connaissances et vous vous seriez rendu chez lui pour tout lui raconter. Il vous aurait dit de
vous rendre à votre convocation et qu’il suivrait votre histoire.
Le lendemain, le 5 juin 2019, à 9h, vous vous seriez rendu au siège de la Sureté générale. Vous auriez
été menotté et amené au deuxième étage pour être interrogé. Il vous aurait été demandé pour quelles
raisons vous aviez critiqué le régime. Vous auriez ensuite été amené en bas. Vous auriez été torturé
psychologiquement et physiquement. Vous auriez été frappé le second jour. Vous auriez été retenu durant
5 jours.
Le 10 juin 2019, à votre libération, vous auriez appelé [A. A. Z] pour le remercier. Il vous aurait dit que, la
prochaine fois, il pourrait peut-être vous faire sortir ou peut-être pas et il vous aurait conseillé de quitter le
pays. Vous auriez alors été demander un visa pour la Belgique. Après un jour de repos, vous seriez
retourné à votre travail. En août 2019, votre employeur aurait mis fin à votre contrat.
Le 17 juillet 2019, votre père se serait également rendu à une convocation de la Sureté nationale. Il aurait
été libéré grâce à l’intervention de [A. A. A. A. K].
Par ailleurs, vous déclarez que, lors d’une visite à Gaza en 2013, alors que vous étiez avec votre cousin
maternel, vous auriez filmé des gens qui tiraient dans le cadre d’entrainements. Le responsable aurait
demandé des renseignements sur vous et vous auriez été accusé de collaboration. Il aurait dit qu’il allait
encore vous interpeller. Par après, vous auriez reçu deux appels à votre maison et ensuite des personnes
dans une jeep noire seraient venues taper à la porte de votre maison et remettre un document. Vous
auriez alors quitté Gaza.
Le 11 septembre 2019, muni d’un visa belge, vous auriez pris un vol de Dammam vers Dubaï avant de
rejoindre la Belgique. Vous auriez déchiré votre passeport dans l’avion. Vous avez été interpellé par la
police aéroportuaire de Zaventem et, le 12 septembre 2019, vous avez sollicité une protection
internationale auprès des instances d’asile belges, de même que vos parents, Monsieur I M [A] (SP :
[XXXXX]) et Madame [N. M. M. A] (SP : [XXXXX]).
Le 23 octobre 2019, le Commissariat général a pris une décision de refus du statut de réfugié et refus de
protection subsidiaire. Le 30 octobre 2019, vous avez introduit un recours contre ladite décision. Le 18
novembre 2019, le Conseil du contentieux des étrangers a annulé la décision du Commissariat général
dans son arrêt n° 228 802 en demandant que des mesures d’instruction complémentaires soient prises
concernant la traduction des pièces et documents ; l’examen rigoureux de ces documents, en particulier
en ce qui concerne votre convocation à la Sureté nationale; la production d’information concernant la
situation des Palestiniens vivant en Arabie Saoudite, notamment sur la manière dont ils sont traités par
l’Etat saoudien ; l’examen des possibilités concrètes de retour et le cas échéant de l’incidence d’une
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éventuelle impossibilité de retour ; la production d’informations sur la législation ou la pratique
saoudiennes relatives au statut de séjour des ressortissants d’origine palestinienne et une étude de
l’incident de l’expiration du visa de retour sur ce statut.
Pour appuyer votre demande de protection internationale, vous déposez en copie votre carte d’identité,
votre carte de résidence, une convocation de l’Autorité nationale palestinienne, une résiliation de contrat
de travail, une convocation de la Sureté nationale, votre certificat d’étude, la carte de l’UNRWA de votre
famille, votre acte de naissance, des documents concernant votre procédure d’apatridie, un document
concernant votre visa et celui de votre père, un document Internet de l’UNRWA, les cartes UNRWA de
vos soeurs, trois attestations de l’ambassade jordanienne, un document DHL, des rapports, des articles
de presse, des attestations UNRWA concernant vous-même et votre père, des attestations de suivi
psychologique concernant vos parents, un document concernant votre titre de séjour en Arabie Saoudite,
des photos de votre maison à Gaza, un formulaire de signalement des dégâts de votre maison à Gaza et
une attestation scolaire UNRWA de votre père. En original, vous avez déposé votre passeport expiré, une
procuration à un avocat, une déclaration d’avocat, une décision de délai et un jugement concernant vos
problèmes à Gaza. Vous avez présenté la résiliation de votre contrat de travail et la convocation de la
Sureté nationale en originaux lors de votre audience devant le Conseil du Contentieux des étrangers mais,
malgré les démarches de votre avocate, elles n’ont pas pu être présentées au Commissariat général.
B. Motivation
Après une analyse approfondie de l'ensemble des éléments de votre dossier administratif, relevons tout
d'abord que vous n'avez fait connaître aucun élément dont il pourrait ressortir des besoins procéduraux
spéciaux et que le Commissariat général n'a de son côté constaté aucun besoin procédural spécial dans
votre chef.
Par conséquent, aucune mesure de soutien spécifique n'a été prise à votre égard, étant donné qu'il peut
être raisonnablement considéré que vos droits sont respectés dans le cadre de votre procédure d'asile et
que, dans les circonstances présentes, vous pouvez remplir les obligations qui vous incombent.
Après examen de l’ensemble des faits que vous avez invoqués à la base de votre demande de protection
internationale et de l’ensemble des éléments qui se trouvent dans votre dossier administratif, il y a lieu de
constater que ni le statut de réfugié ni celui de protection subsidiaire ne peuvent vous être octroyés, et ce
pour les raisons suivantes.
Le Commissariat général souligne que le simple enregistrement auprès de l'UNRWA ne peut suffire pour
conclure qu’un demandeur relève de l'article 1D de la Convention de Genève. En effet, il ressort de la
jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) relative à l'application de l'article 12,
paragraphe 1, point a), de la directive Qualification, lu conjointement avec l'article 1D de la Convention de
Genève, qu'il est nécessaire que le demandeur enregistré auprès de l'UNRWA ait effectivement bénéficié
de l'assistance de l'UNRWA.
En effet, la Cour de Justice a rappelé dans l'arrêt Bolbol que l'article 1D n'exclut que les personnes qui «
ont effectivement eu recours à la protection ou l’assistance » de l'UNRWA. Selon la Cour, il résulte du
libellé clair de l’article 1D que seules les personnes qui ont effectivement bénéficié de l'assistance fournie
par l'UNRWA relèvent de la clause d'exclusion du statut de réfugié. En outre, la Cour souligne que le motif
d'exclusion de l'article 1D de la Convention de Genève doit faire l’objet d’une interprétation stricte et ne
peut donc pas couvrir également les personnes qui sont ou ont seulement été éligibles à bénéficier
d’une protection ou d’une assistance de cet office. (CJUE 17 juin 2010, C-31/09, Nawras Bolbol v
Bevándorlási és Állampolgársági Hivatal, §§ 49, 51 et 53).
De plus, dans l'affaire El Kott, la Cour a précisé que le motif d’exclusion du statut de réfugié prévu à
l'article 12, paragraphe 1, point a), de la directive Qualification ne s'applique pas seulement à ceux qui
bénéficient « effectivement » de l'assistance fournie par l'UNRWA alors qu'ils se trouvent dans la zone
d’opération de l'UNRWA, mais également à ceux qui, en dehors de cette zone, ont effectivement
bénéficié de cette assistance peu de temps avant de présenter une demande d'asile dans un État membre
(CJUE 19 décembre 2012, C-364/11, El Kott c. Bevándorlási és Állampolgársági Hivatal §§ 49 et 52). La
Cour poursuit « c’est avant tout l ’assistance effective fournie par l’UNRWA et non l’existence de celui -ci
qui doit cesser pour que la cause d’exclusion du statut de réfugié ne trouve plus à s’appliquer » (Ibid. §
57), de sorte que la cessation de l'assistance au sens de l'article 12, paragraphe 1, sous a), deuxième
phrase, de la directive 2004/83 « vise également la situation d’une personne qui, après avoir

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