Arrêt Nº 139/2015. Cour constitutionnelle (Cour d'Arbitrage), 2015-10-15

Date15 octobre 2015
Docket NumberF-20151015-6
CourtCour constitutionnelle (Cour d'Arbitrage)
LOIS, DECRETS, ORDONNANCES ET REGLEMENTS
WETTEN, DECRETEN, ORDONNANTIES EN VERORDENINGEN
COUR CONSTITUTIONNELLE
[2015/204976]
Extrait de larrêt n°139/2015 du 15 octobre 2015
Numéros du rôle : 5913, 5922 et 5924
En cause : les recours en annulation totale ou partielle de la loi du 1
er
décembre 2013 portant réforme des
arrondissements judiciaires et modiant le Code judiciaire en vue de renforcer la mobilitédes membres de lordre
judiciaire, introduits par AndréMonhonval, par Fabian Lefebvre et par lASBL «Union professionnelle de la
magistrature »et autres.
La Cour constitutionnelle,
composée des présidents J. Spreutels et A. Alen, et des juges E. De Groot,L. Lavrysen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman,
E. Derycke, T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul, F.Daoût, T. Giet et R. Leysen, assistée du greffier F. Meersschaut, présidée
par le président J. Spreutels,
après en avoir délibéré, rend larrêt suivant :
I. Objet des recours et procédure
a. Par requête adresséeàla Cour par lettre recommandéeàla poste le 2 juin 2014 et parvenue au greffe le
3 juin 2014, AndréMonhonval, assistéet représentépar Me G. Generet, avocat au barreau de Bruxelles, a introduit un
recours en annulation des articles 26 et 147 de la loi du 1
er
décembre 2013 portant réforme des arrondissements
judiciaires et modiant le Code judiciaire en vue de renforcer la mobilitédes membres de lordrejudiciaire (publiée au
Moniteur belge du 10 décembre 2013, deuxième édition).
b. Par requête adresséeàla Cour par lettre recommandéeàla poste le 10 juin 2014 et parvenue au greffe le
11 juin 2014, Fabian Lefebvre, assistéet représentépar Me F. Gavroy et Me F. Jongen, avocats au barreau dArlon,
a introduit un recours en annulation des articles 26 et 147, alinéa 2, de la même loi.
c. Par requête adresséeàla Cour par lettre recommandéeàla poste le 10 juin 2014 et parvenue au greffe le
11 juin 2014, un recours en annulation totale ou partielle (les articles 3, 4, 6, 16, 26, 28, 30, 32, 37, 40, 41, 63, 107, 108, 136,
alinéa 2, 147, 149, 150 et 152) de la même loi a étéintroduit par lASBL «Union professionnelle de la magistrature »,
Jacques Baron, Simon Claisse, Axel Delannay, Thomas Dessoy, Valérie Hansenne, Jules Malaise, Hugues Marchal,
Jean-François Marot, Marc-Antoine Poncelet, Véronique Tordeur et Luc Van Malcot, assistés et représentés par
Me X. Close, avocat au barreau de Bruxelles.
Ces affaires, inscrites sous les numéros 5913, 5922 et 5924 du rôle de la Cour, ont étéjointes.
(...)
II. En droit
(...)
Quant aux dispositions attaquées
B.1. La loi du 1
er
décembre 2013 réforme les arrondissements judiciaires et modie le Code judiciaire en vue de
renforcer la mobilitédes membres de lordre judiciaire.
Les parties requérantes dans les affairesn
os
5913 et 5922 demandent lannulation de larticle 26 de cette loi; la partie
requérante dans la première de ces affaires demande, en outre, lannulation de larticle 147 de la même loi.
Les parties requérantes dans laffaire n
o
5924 demandent lannulation de la loi du 1
er
décembre 2013 dans son
ensemble. Il ressort toutefois de la requête, comme des moyens soulevésàlappui du recours, que celui-ci porte sur les
dispositions de cette loi qui «concernent directement le principe de la mobilitédes magistrats ». Seraient ainsi visés,
selon les parties requérantes, les articles 3 à6, 16, 28, 30, 32, 37, 40 et 41, 63, 107 et 108, 136, alinéa 2, 147, 149, 150 et 152
de la loi du 1
er
décembre 2013.
Lobjet des dispositions attaquées peut, en substance, être décrit comme suit :
- larticle 3 concerne la mobilitédes juges de paix dans les différents cantons de larrondissement judiciaireétendu
(et complète larticle 59 du Code judiciaire);
- larticle 4 concerne lorganisation des tribunaux de police en divisions et leurs limites territoriales (et remplace
larticle 60 du Code judiciaire);
- larticle 6 réglemente notamment la mobilitédes juges de paix et de police dans les cantons de larrondissement
et éventuellement du ressort de la cour dappel (et remplace larticle 65 du Code judiciaire);
- larticle 16 concerne les différents tribunaux et leurs limites territoriales (et remplace larticle 73 du Code
judiciaire);
- larticle 26, entre autres objets, cone au président du tribunal la charge de répartir les juges parmi ses divisions,
après avoir entendu le juge désignédans une autre division, et en motivant sa décision (et remplace larticle 90 du Code
judiciaire);
- larticle 28 réglemente les délégations, par le premier président de la cour dappel, dun juge àun autre tribunal
du ressort (et remplace àcette n les alinéas 1
er
à5 de larticle 98 du Code judiciaire);
- larticle 30 réglemente la délégation, par le premier président de la cour dappel, dun juge de lun des tribunaux
du ressort àla cour dappel ou àla cour du travail (et insère àcette n un article 99ter dans le Code judiciaire);
- larticle 32 prévoit, notamment, la nomination des juges àtitre principal dans un tribunal et, àtitre subsidiaire,
dans les autres tribunaux du ressort de la cour dappel (et remplace àcette n larticle 100 du Code judiciaire, tel quil
aétémodifié par les lois des 15 juillet 1970 et 22 décembre 1998);
- larticle 37 concerne la mobilitédes conseillers des cours dappel et des cours du travail (et complète
larticle 113bis du Code judiciaire);
- larticle 40 réglemente la répartition, par le procureur du Roi, des substituts dans les différentes divisions du
parquet (et modieàcette n larticle 151 du Code judiciaire, tel quil a étémodifié en dernier lieu par la loi du
17 mai 2006);
- larticle 41 réglemente la répartition, par lauditeur du travail, des substituts dans les différentes divisions de
lauditorat du travail (et modieàcette n larticle 153 du Code judiciaire, tel quil a étémodifié en dernier lieu par
la loi du 12 avril 2004);
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MONITEUR BELGE 14.12.2015 BELGISCH STAATSBLAD
- larticle 63 prévoit la désignation simultanée, en fonction des besoins du service, dun juge dinstruction, dun
juge des saisies, ou dun juge «au tribunal de la famille et de la jeunesse »dans un autre tribunal du ressort (et complète
àcette n larticle 259septies du Code judiciaire, lequel a également étémodifié, ultérieurement, par la loi du 8 mai 2014
en ce qui concerne la dénomination de ce tribunal);
- larticle 107 détermine les limites territoriales des nouveaux tribunaux de police (et remplace àcette n larticle 3
de lannexe au Code judiciaire);
- larticle 108 détermine les limites territoriales des nouveaux arrondissements judiciaires (et remplace àcette n
larticle 4 de la même annexe);
- larticle 136, alinéa 2, supprime le supplément de traitement auparavant accordéaux juges de complément
(et abroge àcette n larticle 357, 6
o
, du Code judiciaire);
- larticle 147 prévoit la nomination des magistrats existants dans un tribunal ou parquet dun arrondissement
étendu;
- larticle 149 prévoit la délégation des juges de paix et des juges de police de complément pour exercer leurs
fonctions cumulativement dans un autre canton;
- larticle 150 prévoit : la nomination des juges et substituts de complément àtitre subsidiaire dans les différents
tribunaux et parquets du ressort de la cour dappel; la nomination des juges de complément auparavant déléguésàun
tribunal de commerce ou du travail, au tribunal de commerce ou au tribunal du travail du ressort de la cour dappel;
la nomination des substituts de lauditeur du travail de complément àlauditorat du travail du ressort de la cour du
travail;
- larticle 152 prévoit que les magistrats nommés en application de larticle 100 (ancien) du Code judiciaire àou près
de différents tribunaux de première instance du ressort de la cour dappel sont nommés de plein droitaux nouveaux
tribunaux ou parquets.
Quant àla recevabilitédes recours et àl’étendue de la saisine de la Cour
B.2.1. Lors de lexamen de plusieurs dispositions, le Conseil des ministres conteste lintérêtàagir de certains
requérants personnes physiques et de lassociation sans but lucratif «Union professionnelle de la magistrature »
(ci-après l’« UPM »), première partie requérante dans laffaire n
o
5924.
B.2.2. Larticle 142, alinéa 3, de la Constitution et larticle 2, 2
o
, de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour
constitutionnelle imposent àune personne morale qui introduit un recours en annulation de justier dun intérêt.
Ne justient de lintérêt requis que les personnes dont la situation pourrait être affectéedirectement et défavorablement
par la norme attaquée. Laction populaire nest pas admissible.
Lorsquune association sans but lucratif qui ninvoque pas son intérêt personnel agit devant la Cour, il est requis
que son objet social soit dune nature particulière et, dès lors, distinct de lintérêt général; quelle défende un intérêt
collectif; que la norme attaquée soit susceptible daffecter son objet social; quil napparaisse pas, enn, que cet objet
social nest pas ou nest plus réellement poursuivi.
B.2.3. Aux termes de larticle 3 de ses statuts, lUPM a pour objet social «la promotion et lapplication de mesures
àmettre en oeuvre en vue dassurer un fonctionnement optimal de la Justice, garante des droits et des libertés des
citoyens »et «la défense des intérêts individuels de ses membres au regard de leurs intérêts collectifs »; cet objet vise
àla défense dun intérêt collectif et celui-ci est de nature particulière, distinct de lintérêt général. Par ailleurs, il nest
pas contestéque cet objet soit réellement poursuivi.
La loi du 1
er
décembre 2013 a en particulier pour objet de réformer les arrondissements judiciaires et de renforcer
la mobilitédes membres de lordre judiciaire. Ce faisant, elle est susceptible daffecter lobjet social de lUPM et les
intérêts collectifs que cette partie requérante défend.
Celle-ci dispose donc de lintérêt requis.
B.2.4. Dès lors que, dune part, lintérêtàagir de lUPM est établi, et que, dautre part, les autres parties requérantes
dont lintérêtàagir est contesténattaquent pas dautres dispositions que celles attaquées par lUPM, et ninvoquent
pas dautres moyens que ceux allégués par celle-ci, il ny a pas lieu dexaminer si ces parties requérantes justient,
elles aussi, de lintérêt requis.
B.3.1. Les principes essentiels de la réforme opérée par la loi du 1
er
décembre 2013, sagissant des aspects pertinents
en lespèce, peuvent être exposés comme suit.
B.3.2. En ce qui concerne le ressort territorial des tribunaux, le nombre darrondissements judiciaires,
qui constituent lassise territoriale des tribunaux de première instance, est réduit à12 (article 73 du Code judiciaire,
tel quil est remplacépar larticle 16 attaqué, et article 108 attaqué, qui remplace larticle 4 de lannexe au Code
judiciaire). En vertu de ces mêmes dispositions, les tribunaux du travail et de commerce ont désormais en principe pour
ressort territorial celui de la cour dappel, sans préjudice des exceptions prévues par le législateur. En ce qui concerne
les justices de paix, il y en a une par canton judiciaire mais, désormais, le juge de paix titulaire dans un canton est
nommé à titre subsidiaire dans chaque canton judiciaire de larrondissement judiciaire (article 59 du Code judiciaire,
tel quil est modifié par larticle 3 attaqué). Les tribunaux de police sont, pour leur part, désormais organisésàl’échelon
de larrondissement judiciaire (article 60 du Code judiciaire, tel quil est remplacépar larticle 4 attaqué, et larticle 107
attaqué, remplaçant larticle 3 de lannexe audit Code).
B.3.3. En ce qui concerne la répartition des magistrats entre ces tribunaux et en leur sein, les dispositions attaquées
conent aux chefs de corps et autorités quelles indiquent le soin de régler respectivement : la mobilitédes juges de paix
et de police dans les cantons de larrondissement et éventuellement du ressort de la cour dappel (article 6);
la délégation des juges de paix et des juges de paix de complément pour exercer éventuellement leurs fonctions
cumulativement dans un autre canton (article 149); la répartition des juges entre les divisions (article 26) et des
substituts au sein du parquet (article 40); la répartition des substituts dans les différentes divisions de lauditorat du
travail (article 41); la délégation dun juge àun autre tribunal du même ressort de la cour dappel (article 28);
la désignation simultanée, en fonction des besoins du service, de certains juges spécialisés dans un autre
arrondissement du ressort (article 63); la délégation dun juge de lun des tribunaux du ressort àla cour dappel ou à
la cour du travail (article 30); la délégation des conseillers des cours dappel et des cours du travail (article 37).
B.3.4. En ce qui concerne les modalités de désignation des magistrats dans le cadre de la réforme en cause, la loi
du 1
er
décembre 2013 distingue la situation des magistrats déjànommés lors de lentrée en vigueur de cette loi de celle
des magistrats nommés après cette entrée en vigueur.
Sagissant des nouveaux magistrats ànommer, larticle 32 attaqué, qui remplace larticle 100 du Code judiciaire,
prévoit, en son paragraphe 1
er
, dune part, que les juges nommés dans un tribunal de première instance sont nommés
àtitre subsidiaire dans les autres tribunaux de première instance du ressort de la cour dappel et, dautre part, que les
substituts nommés dans un parquet du procureur du Roi sont nommésàtitre subsidiaire dans les autres parquets du
procureur du Roi du ressort. Le deuxième paragraphe du même article 32 prévoit que la désignation dun magistrat
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