Décision judiciaire de Conseil d'État, 20 novembre 2019

Date de Résolution20 novembre 2019
JuridictionVI
Nature Arrêt

CONSEIL D'ÉTAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF.

VIe CHAMBRE

A R R Ê T

nº 246.130 du 20 novembre 2019

A. 221.371/VI-20.955

En cause : la société anonyme INFRASTRUCTURE &

CONSTRUCTION

ayant élu domicile chez

Me Charles BULLMAN, avocat, boulevard Mayence 17 6000 Charleroi,

contre :

la commune de Chastre,

ayant élu domicile chez

Mes Marc UYTTENDAELE et Anne FEYT, avocats, rue de la Source 68 1060 Bruxelles.

------------------------------------------------------------------------------------------------------ I. Objet de la requête

Par une requête introduite le 30 janvier 2017, la société anonyme INFRASTRUCTURE & CONSTRUCTION demande l'annulation de :

" la décision de la partie adverse du 21 octobre 2016, notifiée par courrier du

30 novembre 2016 […], reçue le 5 décembre 2016 […], par laquelle la requérante est avisée de : - La non-attribution à son égard du marché public de remise en état de la rue des XV Bonniers pour lequel elle avait soumissionné, dans la mesure où son offre contient une irrégularité matérielle et substantielle; - L'attribution à la SA ENTREPRISES PIRLOT du marché public de remise en état de la rue des XV Bonniers ayant remis l'unique offre régulière".

II. Procédure

Les droits visés à l'article 70 de l'arrêté du Régent du 23 août 1948 déterminant la procédure devant la section du contentieux administratif du Conseil d'État ont été acquittés.

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Le dossier administratif a été déposé.

Les mémoires en réponse et en réplique ont été régulièrement échangés.

Mme Geneviève MARTOU, premier auditeur au Conseil d'État, a rédigé un rapport sur la base de l'article 12 du règlement général de procédure.

Le rapport a été notifié aux parties.

La partie requérante a déposé un dernier mémoire.

Par une ordonnance du 26 juillet 2019, l'affaire a été fixée à l'audience du 16 octobre 2019.

Par des courriers du 3 octobre 2019, l'affaire a été remise à l'audience du 6 novembre 2019.

M. David DE ROY, conseiller d'État, a exposé son rapport.

Me Isabelle VAN KRUCHTEN, loco Me Charles BULLMAN, avocat, comparaissant pour la partie requérante, et Me Hélène DEBATY, loco Mes Marc UYTTENDAELE et Anne FEYT, avocats, comparaissant pour la partie adverse, ont été entendus en leurs observations.

Mme Geneviève MARTOU, premier auditeur, a été entendue en son avis contraire.

Il est fait application des dispositions relatives à l'emploi des langues, inscrites au titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'État, coordonnées le 12 janvier 1973.

III. Exposé des faits utiles

1. Le 15 juillet 2016, le conseil communal de la partie adverse décide d'approuver le cahier spécial des charges n° 50 1116 0002 relatif au marché « Remise en état de la rue des Quinze Bonniers », de choisir l'adjudication ouverte comme mode de passation et de procéder à la publication de l'avis de marché.

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2. Le 2 septembre 2016, jour de l'ouverture des offres, huit offres sont reçues par la partie adverse, dont celles de la requérante et de la société anonyme ENTREPRISES PIRLOT.

Les prix offerts par ces deux soumissionnaires sont respectivement de 227.691,38 euros (offre de la requérante) et de 250.120,18 euros (offre de la société ENTREPRISES PIRLOT).

3. L'auteur de projet communique son rapport d'analyse des offres à la partie adverse le 13 octobre 2016.

Il y est proposé d'attribuer le marché au seul soumissionnaire ayant remis une offre régulière, soit la société ENTREPRISES PIRLOT.

4. Le 21 octobre 2016, le collège communal de la partie adverse approuve le rapport d'analyse des offres, décide de ne considérer comme complète et régulière aucune offre autre que celle de la société ENTREPRISES PIRLOT et d'attribuer le marché à ce soumissionnaire.

5. Le 30 novembre 2016, la partie adverse communique à la requérante les motifs de "l'éviction de son offre", lesquels se lisent comme suit :

" - Prix globaux : l'entrepreneur n'a pas justifié le poste 54.

Pour la justification du poste 60, le soumissionnaire parle d'un projet semblable. Cette donnée est assez floue car il doit remettre prix pour ce projet.

Ces manquements constituent une irrégularité substantielle".

La délibération du collège communal du 21 octobre 2016, qui constitue l'acte attaqué par le présent recours, est annexée au courrier de notification du 30 novembre 2016. Il ressort de ses articles 4 et 5 que la partie adverse approuve et considère comme partie intégrante de cette délibération le rapport d'examen des offres établi par l'auteur de projet.

À la page 12 de ce rapport d'examen des offres, figure la mention suivante, qui se rapporte à l'offre de la requérante :

" L'entrepreneur n'a pas justifié le poste 54. Pour la justification du poste 60, il parle d'un projet semblable. Cette donnée est assez floue car il doit remettre prix pour ce projet. Nous considérons ce point comme une irrégularité substantielle vu l'incidence éventuelle sur le prix".

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Par ailleurs, la conclusion de ce rapport d'examen quant à la régularité matérielle des offres se présente comme suit :

IV. Moyen unique – Seconde branche

IV.1. Thèses des parties

A. Requête

La requérante expose son moyen dans les termes suivants :

" 16.

Le second moyen [sic] est pris de la violation de la loi du 29 juillet 1991 relative à la motivation formelle des actes administratifs, principalement ses articles 2 et 3, et du devoir de minutie.

En ce que la partie adverse décide que l'absence de justification des postes à prix globaux 54 et 60 de l'offre de la requérante constitue une irrégularité substantielle vu l'éventuelle incidence sur le prix qui pourrait en découler.

La partie adverse en déduit dès lors l'irrégularité matérielle et substantielle de l'offre sans autre motivation.

II.A.2.b. Développement du moyen

17.

De manière générale, relativement à l'exigence de motivation formelle, il ressort de Votre jurisprudence que :

(...) La motivation des actes administratifs soumis à l'obligation de motivation formelle doit répondre à une double exigence : elle doit non seulement

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permettre au destinataire de l'acte de comprendre les raisons qui ont amené l'autorité à adopter celui-ci, mais elle doit en outre permettre au Conseil d'État de contrôler l'exactitude, l'admissibilité et la pertinence des motifs exprimés dans la décision. Les motifs exprimés dans un acte administratif doivent être exacts et reposer sur les éléments du dossier administratif. Celui-ci doit permettre de vérifier que les éléments retenus ne sont pas manifestement inexacts ou contraires à la réalité

.

18.

Plus précisément dans la matière des marchés publics qui nous préoccupe, la doctrine nous enseigne qu' : « Un constat d'irrégularité entachant une offre exige une motivation plus poussée du pouvoir adjudicateur. (...) II est, en effet, exigé qu'une offre qui compte des irrégularités, substantielles ou non, fasse l'objet d'une motivation complète (...) ».

À...

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