Décision judiciaire de Conseil d'État, 5 novembre 2019

Date de Résolution 5 novembre 2019
JuridictionXIII
Nature Arrêt

CONSEIL D'ÉTAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF.

XIIIe CHAMBRE

A R R Ê T

nº 245.983 du 5 novembre 2019

A. 224.052/XIII-8222

En cause : 1. DRIESSEN Oscar, 2. HALMAN Margareta, 3. l'association sans but lucratif SIPPENAEKEN À SES HABITANTS, ayant tous élu domicile chez

Me Jean-Marc SECRETIN, avocat, rue des Augustins 32 4000 Liège,

contre :

  1. la Commune de Plombières, ayant, élu domicile chez

    Me Nathalie VAN DAMME, avocat, place des Nations Unies 7 4020 Liège,

  2. la Région wallonne, représentée par son Gouvernement, ayant élu domicile chez

    Me Bénédicte HENDRICKX, avocat, rue de Nieuwenhove 14 A 1180 Bruxelles,

    Partie intervenante :

    la Société anonyme MATEXI PROJECTS, ayant élu domicile chez

    Me France GUERENNE, avocat, chemin du Stocquoy 1 1300 Wavre.

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    I. Objet de la requête

    Par une requête introduite le 21 décembre 2017, Oscar DRIESSEN, Margareta HALMAN et l'association sans but lucratif (A.S.B.L.) SIPPENAEKEN À SES HABITANTS demandent l'annulation du permis d'urbanisation délivré le 23 octobre 2017 par la commune de Plombières à la société anonyme (S.A.)

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    MATEXI PROJECTS pour des terrains sis à Sippenaeken, rue de la Forge et Evenbaeg.

    II. Procédure

    Par une requête introduite le 21 mars 2018, la S.A. MATEXI PROJECTS, a demandé à être reçue en qualité de partie intervenante.

    Cette intervention a été accueillie par une ordonnance du 5 avril 2018.

    Le dossier administratif a été déposé.

    Les mémoires en réponse, en réplique et en intervention ont été régulièrement échangés.

    M. Lionel RENDERS, auditeur au Conseil d'État, a rédigé un rapport sur la base de l'article 12 du règlement général de procédure.

    Le rapport a été notifié aux parties.

    Les parties ont déposé un dernier mémoire.

    Par une ordonnance du 3 septembre 2019, l'affaire a été fixée à l'audience du 10 octobre 2019 à 09.30 heures.

    M. Luc DONNAY, conseiller d'État, a exposé son rapport.

    Me Séverine HOSTIER, loco Me Jean-Marc SECRETIN, avocat, comparaissant pour les parties requérantes, Me Nathalie VANDAMME, avocat, comparaissant pour la première partie adverse, Me Émilie LEBEAU, loco Me Bénédicte HENDRICKX, avocat, comparaissant pour la seconde partie adverse, et Me Kevin POLET, loco Me France GUERENNE, avocat, comparaissant pour la partie intervenante, ont été entendus en leurs observations.

    M. Lionel RENDERS, auditeur, a été entendu en son avis contraire.

    Il est fait application des dispositions relatives à l'emploi des langues, inscrites au titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'État, coordonnées le 12 janvier 1973.

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    III. Faits

    1. Le 16 juillet 2015, la S.A. MATEXI PROJECTS dépose à l'administration communale de Plombières une demande de permis d'urbanisation portant sur des terrains sis à Sippenaeken, rue de la Forge et Evenbaeg, cadastrés section A, numéros 266/N/2 et 384/W.

    Le projet vise la création d'un maximum de 27 lots à bâtir. Il prévoit également la création d'une cabine électrique, l'aménagement de voiries, de trottoirs, de parkings et de placettes et d'un bassin d'orage.

    La demande de permis est notamment accompagnée d'une étude d'incidences sur l'environnement.

  3. Le 24 juillet 2015, la commune de Plombières établit un accusé de réception de dossier incomplet.

  4. Le 1er octobre 2015, la S.A. MATEXI PROJECTS dépose des pièces complémentaires auprès de l'administration communale.

  5. Le même jour, un accusé de réception de dossier complet est délivré.

  6. Le 1er octobre 2015, le conseil communal adopte provisoirement la modification du plan d'alignement et de mesurage d'un tronçon de la rue de la Forge, à front des parcelles cadastrées section A, n° 266 N2 et 384 W.

  7. Le 19 octobre 2015, la société coopérative à responsabilité limitée (S.C.R.L.) association intercommunale pour le démergement et l'épuration des communes de la province de Liège (AIDE) émet un avis favorable conditionnel sur le projet.

  8. Le 22 octobre 2015, le service technique provincial de Liège rend un avis favorable conditionnel.

  9. Du 25 octobre au 23 novembre 2015, une enquête publique est organisée. Une pétition et huit réclamations sont déposées à cette occasion, dont celles des première et troisième parties requérantes.

  10. Le 26 octobre 2015, le conseil wallon de l'environnement pour le développement durable (CWEDD) estime que l'étude d'incidences sur

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    l'environnement contient les éléments nécessaires à la prise de décision et émet un avis défavorable quant à l'opportunité environnementale du projet.

  11. Le 3 novembre 2015, la zone de secours de Vesdre-Hoëgne et Plateau émet un avis favorable conditionnel.

  12. Le 3 novembre 2015, la commission consultative communale d'aménagement du territoire et de mobilité (C.C.A.T.M.) rend un avis favorable.

  13. Le 4 novembre 2015, une réunion publique est organisée.

  14. Le 5 novembre 2015, le département de la nature et des forêts (D.N.F.) du S.P.W. de Wallonie émet un avis favorable conditionnel.

  15. Le 12 novembre 2015, la direction des cours d'eau non navigables émet un avis favorable conditionnel.

  16. Le 21 janvier 2016, le collège provincial de Liège émet un avis favorable sur le projet d'alignement modificatif pour un tronçon de la rue de la Forge.

  17. Le 25 février 2016, le collège communal adopte définitivement le plan d'alignement modificatif et de mesurage. Cette décision fait l'objet d'un affichage à partir du 3 mars 2016.

  18. Le 29 mai 2017, le collège communal émet un avis favorable conditionnel.

  19. Le 8 juin 2017, le conseil communal autorise l'élargissement sollicité des voiries communales. Cette décision fait l'objet d'un affichage à partir du 14 juin 2017.

  20. Le 14 juin 2017, la commune sollicite l'avis du fonctionnaire délégué.

  21. Le 13 juillet 2017, le fonctionnaire délégué émet un avis favorable conditionnel, notamment afin de "respecter les remarques émises par le Collège communal dans son rapport émis en séance du 29/05/2017 reprises aux points 1° à 12°".

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    21. Le 25 juillet 2017, la commune invite la S.A. MATEXI PROJECTS à modifier sa demande de permis d'urbanisation au regard de l'avis favorable conditionnel du collège communal, de la délibération du conseil communal et de l'avis favorable conditionnel du fonctionnaire délégué.

  22. Dans les semaines qui suivent, la S.A. MATEXI PROJECTS dépose des documents complémentaires et des plans modificatifs afin de répondre aux conditions émises dans l'avis favorable conditionnel du 29 mai 2017 émis par le collège communal.

  23. Le 21 septembre 2017, la S.A. MATEXI PROJECTS informe la commune de son refus de suivre la recommandation du fonctionnaire délégué d'établir une charte urbanistique sur le site.

  24. Le 23 octobre 2017, le collège communal délivre le permis d'urbanisation sollicité. Il s'agit de l'acte attaqué.

    IV. Premier moyen

    IV.1. Thèse des parties requérantes

    A. La requête en annulation

    Les parties requérantes prennent un premier moyen de la violation de l'article 1er du Code wallon de l'aménagement du territoire, de l'urbanisme et du patrimoine (CWATUP), de la loi du 29 juillet 1991 relative à la motivation formelle des actes administratifs, du principe général de motivation adéquate, de l'absence ou de l'inexactitude des motifs de droit et de fait, de la contradiction des motifs et de l'erreur manifeste d'appréciation.

    Elles indiquent avoir déposé une réclamation au cours de l'enquête publique, dans laquelle elles faisaient notamment valoir l'inadéquation du plan de secteur qui inscrit les parcelles faisant l'objet du projet en zone d'habitat à caractère rural, et de manière plus générale, différents problèmes liés au bon aménagement des lieux.

    Elles reproduisent un large extrait de l'acte attaqué, dont elles déduisent que son auteur s'en est remis aux conclusions générales et aux conclusions du chapitre 5 consacré à l'urbanisme et au paysage de l'étude d'incidences sur l'environnement, pour ensuite rappeler les options d'aménagement prévues par la demanderesse de permis avant de reprendre partiellement les termes de l'étude

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    d'incidences relatifs au point « 2.3 Qualité paysagère et urbanistique interne du projet » du chapitre 5.

    Elles soutiennent que l'acte attaqué ne traduit pas fidèlement la pensée de l'auteur de l'étude d'incidences dont l'avis était nettement plus nuancé que ce que veut bien faire apparaître l'acte attaqué. Elles reproduisent un extrait de l'étude d'incidences où sont analysées en détails les composantes du paysage en question et ses enjeux par rapport au projet.

    Elles considèrent que l'acte attaqué ne répond que partiellement aux recommandations de l'auteur de l'étude d'incidences. Elles précisent que la recommandation P24 ne préconisait certainement pas "une plus grande liberté dans l'implantation du front bâti", mais bien au contraire dénonçait cette "flexibilité d'implantation" et préconisait que les implantations soient davantage maîtrisées. Elles constatent que, selon l'auteur de l'étude d'incidences, le fait de laisser aux futurs constructeurs le choix de l'implantation de leurs constructions pourrait conduire à ce qu'un choix identique soit réalisé par eux, en sorte que, au final, l'ensemble présentera un "désordre paysager". Elles en déduisent que la recommandation visait à cadenasser ce choix en imposant des zones d'implantation qui éviteraient immanquablement ce désordre paysager. Elles concluent qu'en laissant entendre que la demande de permis est conforme à la recommandation P24, l'acte attaqué viole les dispositions reprises au moyen.

    Par ailleurs, elles sont d'avis que la recommandation P25 ne préconisait pas la suppression des ouvertures paysagères comme le suggère l'acte attaqué, puisque celles-ci sont soulignées tout au long de l'étude comme étant un élément positif du projet, même si des nuances sont apportées à...

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