Décision judiciaire de Conseil d'État, 19 février 2019

Date de Résolution19 février 2019
JuridictionXIII
Nature Arrêt

CONSEIL D'ÉTAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF.

XIIIe CHAMBRE

A R R Ê T

nº 243.749 du 19 février 2019

A. 216.733/XIII-7407

En cause : CASSART Bernard, ayant élu domicile chez Me Gautier BEAUJEAN, avocat, rue Jean-Baptiste Brabant 56 5000 Namur,

contre :

  1. la Commune de La Bruyère, 2. la Région wallonne, représentée par son Gouvernement, ayant élu domicile chez Me Pierre MOËRYNCK, avocat, avenue de Tervueren 34/27 1040 Bruxelles.

    Parties intervenantes :

  2. FEDUNIAK Alexandre, 2. RAFFI Nadimé Diana, ayant tous deux élu domicile chez Mes Daniel DESSARD et Renaud DEHIN, avocats, rue Denis Lecocq 35 4031 Liège.

    ------------------------------------------------------------------------------------------------------ I. Objet de la requête

    Par une requête introduite le 18 août 2015, Bernard CASSART demande l'annulation du permis d'urbanisme délivré le 8 avril 2015 par le collège communal de La Bruyère à Alexandre FEDUNIAK et Nadimé Diana RAFFI pour la construction d'une maison unifamiliale sur un bien sis rue Grand'Mère, cadastré ou l'ayant été à Emines, section B, nos 243d, 241x et 241d2.

    XIII - 7407 - 1/23

    II. Procédure

    Par une requête introduite le 9 octobre 2015, Alexandre FEDUNIAK et Nadimé Diana RAFFI demandent à être reçus en qualité de parties intervenantes.

    Cette intervention a été accueillie par une ordonnance du 9 novembre 2015.

    Le dossier administratif a été déposé.

    Les mémoires en réponse, en réplique et en intervention ont été régulièrement échangés.

    M. Yves DELVAL, auditeur au Conseil d'État, a rédigé un rapport sur la base de l'article 12 du règlement général de procédure.

    Le rapport a été notifié aux parties.

    Les parties ont déposé un dernier mémoire.

    Par une ordonnance du 18 décembre 2018, l'affaire a été fixée à l'audience du 24 janvier 2019 à 9.30 heures.

    Mme Simone GUFFENS, président de chambre, a exposé son rapport.

    Me Lionel-Albert BAUM, loco Me Gautier BEAUJEAN, avocat, comparaissant pour la partie requérante, et Me Natacha DIERCKX, loco Me Pierre MOËRYNCK, avocat, comparaissant pour la seconde partie adverse, et Me Alexandre BORSUS, loco Mes Daniel DESSARD et Renaud DEHIN, avocat, comparaissant pour les parties intervenantes, ont été entendus en leurs observations.

    M. Yves DELVAL, auditeur, a été entendu en son avis conforme.

    Il est fait application des dispositions relatives à l'emploi des langues, inscrites au titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'État, coordonnées le 12 janvier 1973.

    XIII - 7407 - 2/23

    III. Faits

    1. Le 22 décembre 2014, les parties intervenantes introduisent une demande de permis d'urbanisme pour la construction d'une habitation unifamiliale rue Grand-Mère à Emines sur une parcelle cadastrée section B, n° 243 d pie ou l'ayant été.

    La demande précise que le bien est sis en zone d'habitat à caractère rural et qu'"un chemin communal longe la limite droite du terrain "intramuros", soit, qu'il existe une servitude liée à ce chemin. Il est indiqué qu'"un aménagement de la partie donnant accès à la voirie Grand-Mère sera effectué pour permettre de conserver un cheminement indépendant du passage des véhicules en partie privée". 2. Tant le service voirie que le service cours d'eau du service technique provincial (S.T.P.) émettent un avis favorable. Le service cours d'eau précise ce qui suit :

    " J'attire votre attention sur la présence d'un axe de ruissellement concentré dans cette zone. La localisation cartographique exacte de l'axe n'est pas actualisée avec les récentes modifications des reliefs, dues à l'urbanisation. Il est dès lors conseillé de ne pas implanter le nouveau bâtiment dans cet axe et/ou de prévoir des aménagements qui dévient des eaux potentielles de ruissellement en provenance de l'amont de la parcelle, en prenant garde de ne pas impacter les propriétés situées à l'aval".

  3. Le 18 février 2015, le collège communal émet un avis favorable conditionnel. Il prévoit notamment la condition "de faire la demande au S.T.P. de déviation de sentier dès obtention du permis d'urbanisme". 4. Le 24 mars 2015, le fonctionnaire délégué émet un avis défavorable pour les motifs suivants :

    " [...]

    Considérant que le projet doit avoir un lien suffisamment large avec le domaine public pour qu'un véhicule puisse passer sans empiéter sur le chemin communal existant;

    Considérant que dans ce but un avis a été demandé au STP et qu'un avis préalable favorable a été remis;

    Considérant pourtant qu'il semble prématuré de délivrer un permis d'urbanisme sans avoir la certitude que ce sentier sera effectivement dévié; que, pour rappel, un permis d'urbanisme ne peut être délivré en le conditionnant à l'octroi d'autres autorisations;

    Considérant de plus que la déviation d'un chemin communal, vu le décret «voiries» du 06/02/2014, doit être soumis à l'avis du Conseil communal;

    XIII - 7407 - 3/23

    Considérant que mis à part ce problème d'accès, le projet s'intègre au cadre bâti par son implantation, son gabarit et ses matériaux;

    Considérant qu'il y a lieu de demander l'avis du Conseil communal sur la modification du chemin communal; qu'ensuite la procédure de permis pourra reprendre son cours;

    Considérant qu'il est donc prématuré de rendre un avis sur la demande".

  4. Au terme d'un échange de courriels le 2 avril 2015 entre les services de la commune et l'agent traitant le dossier au sein des services du fonctionnaire délégué, ce dernier marque finalement son accord sur le projet dans les termes suivants :

    " Si le demandeur démontre en effet au dossier qu'il est bien propriétaire du morceau de parcelle voisin - de matière à permettre un accès pour un véhicule à sa parcelle - et explique que l'accès au chemin sera laissé libre, il n'y a plus lieu en effet de demander son déplacement au Conseil communal. Par contre le plan d'implantation devrait être revu en figurant le tracé réel et actuel du chemin sans montrer le souhait de déplacement (puisque dans ce cas on retombe dans la procédure «conseil»)".

    Une copie de l'acte notarié du 22 mai 2014 par lequel les parties intervenantes ont acquis cette parcelle, est transmise par un courriel du 15 avril 2015.

  5. Le 8 avril 2015, la première partie adverse accorde le permis sollicité. Il s'agit de l'acte attaqué dont le requérant affirme avoir eu connaissance par affichage le 13 juillet 2015. Il est rédigé comme suit :

    " [...]

    [...] Attendu que Monsieur et Madame FEDUNIAK-RAFFI demeurant 3, rue du Centre à Emines ont introduit une demande de permis d'urbanisme relative à un bien sis rue Grand'Mère - [...] Emines, cadastré ou l'ayant été Emines section B n° 243 D, 241 X et 241 D2 et ayant pour objet la construction d'une habitation unifamiliale;

    Attendu que la demande de permis a été transmise à l'Administration communale contre récépissé daté du 22 décembre 2014.

    Attendu que la demande semble [sic] contenir l'ensemble des pièces et documents énumérés dans le CWATUPE;

    Vu la jurisprudence du Conseil d'État et notamment son arrêt n° 157.204 du 30 mars 2006, qui précise que d'éventuelles lacunes dans la composition du dossier de demande de bâtir ne sont en principe pas de nature à affecter la légalité du permis accordé lorsqu'il est établi que, malgré ces lacunes, l'autorité compétente a pu se prononcer en pleine connaissance de cause;

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    Vu la circulaire ministérielle du 1er février 2010 relative à la composition de la demande des permis d'urbanisme qui précise que le contenu de la demande de permis d'urbanisme ne peut donc être considéré comme une finalité en soi, qui serait indépendante de la qualité, de l'exactitude et de l'utilité de l'information qui est fournie à propos d'un projet et d'un environnement précis;

    Attendu qu'outre les documents fournis dans le cadre de la présente demande de permis d'urbanisme, l'Autorité communale, assistée de ses services, dispose d'une connaissance du terrain qui lui permet d'appréhender de manière circonstanciée les différentes problématiques liées à ladite demande;

    Attendu que le dossier a été déclaré complet et recevable en date du 23 décembre 2014;

    [...]

    Attendu que le projet peut être décrit comme suit :

    - un bâtiment principal de 8,50 mètres de profondeur sur 12,50 mètres de largeur, pour des hauteurs sous gouttière de 5,35 mètres et de 9,19 mètres au faîte;

    - un garage, de 6,00 mètres sur 6,50 mètres, vient s'accoler, en volume secondaire, à la façade latérale droite pour des hauteurs sous gouttière de 2,65 mètres et de 6,47 mètres au faîte;

    Attendu que les matériaux utilisés sont :

    - pour les élévations : des briques de ton rouge-brun moyen; - pour la toiture : une couverture en tuiles de ton anthracite; - des menuiseries en PVC de ton blanc; - des seuils de fenêtres et de portes en pierre bleue; - un bardage de cheminée en ardoises artificielles;

    Attendu que la demande de permis comprend une notice d'évaluation des incidences sur l'environnement renseignant :

    - que le projet ne comportera pas de déboisement; - qu'un remblai de maximum 50 centimètres est prévu autour du bâtiment; - que le terrain n'est pas situé dans un lotissement; - qu'il n'est pas dans un périmètre de protection et/ou inscrit sur une liste de sauvegarde, ni dans un périmètre de protection visé par la loi du 12 juillet 1973 sur la conservation de la nature (site Natura 2000) pas plus qu'à proximité d'un tel périmètre;

    Attendu que la même notice ajoute que le projet ne donnera lieu qu'à des rejets raisonnables et normaux dans l'atmosphère et qu'il n'y aura aucun rejet liquide dans les eaux de surface ; que les eaux usées (débit normal pour un ménage de 3-7 EH) seront évacuées via l'égout public après passage dans une fosse SANICLAIR;

    Attendu que le projet prévoit l'installation d'une citerne à eau de pluie de 5.000 litres;

    Attendu que la notice d'évaluation des incidences, les plans et autres documents constitutifs du dossier synthétisent les principaux paramètres écologiques du projet sur l'environnement; que la population intéressée a pu recevoir l'information qu'elle était en droit...

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