Décision judiciaire de Conseil d'État, 22 janvier 2019

Date de Résolution22 janvier 2019
JuridictionXIII
Nature Arrêt

CONSEIL D'ÉTAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF.

XIIIe CHAMBRE

A R R Ê T

nº 243.454 du 22 janvier 2019

  1. 220.431/XIII-7808

    En cause : BLOMME Véronique, ayant élu domicile drève des Alliés 85 6530 Thuin,

    contre :

    la Ville de Thuin.

    Parties intervenantes :

    1. DETRAIT Bernard, 2. DELFORGE Anne, ayant tous deux élu domicile chez

      Mes Tangui VANDENPUT et

      Valérie ELOY, avocats, avenue Tedesco 7 1160 Bruxelles. ------------------------------------------------------------------------------------------------------

      I. Objet de la requête

      Par une requête introduite le 5 octobre 2016, Véronique BLOMME demande l'annulation de la décision du collège communal de la ville de Thuin du 4 juillet 2016 octroyant à Bernard DETRAIT et Anne DELFORGE un permis d'urbanisme pour la régularisation d'un logement en extension du bâtiment existant, sur un bien sis drève des Alliés 87 à Thuin et cadastré section C, nº 78x.

      II. Procédure

      Par une requête introduite, par la voie électronique, le 8 novembre 2016, Bernard DETRAIT et Anne DELFORGE demandent à être reçus en qualité de parties intervenantes.

      Leur intervention a été accueillie par une ordonnance du 18 novembre 2016.

      XIII - 7808 - 1/21

      ‡CCBTKFJBE-BDGBEEV‡

      Les mémoires ampliatif et en intervention ont été régulièrement échangés.

      Mme Valérie MICHIELS, premier auditeur au Conseil d'État, a rédigé un rapport sur la base de l'article 12 du règlement général de procédure.

      Le rapport a été notifié aux parties.

      Les parties requérante et intervenantes ont déposé un dernier mémoire.

      Par une ordonnance du 10 octobre 2018, l'affaire a été fixée à l'audience du 22 novembre 2018 à 9.30 heures.

      Mme Simone GUFFENS, président de chambre, a exposé son rapport.

      Me Valérie ELOY, avocat, comparaissant pour les parties intervenantes, a été entendue en ses observations.

      Mme Valérie MICHIELS, premier auditeur, a été entendue en son avis conforme.

      Il est fait application des dispositions relatives à l'emploi des langues, inscrites au titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'État, coordonnées le 12 janvier 1973.

      III. Faits

      1. Le 8 novembre 2011, les parties intervenantes introduisent auprès du collège communal de Thuin une demande de permis d'urbanisme ayant pour objet l'extension d'une salle de sports située drève des Alliés 87 à Thuin, et la construction d'un logement sur cette extension. Le bien est cadastré section C, nº 78x.

      La parcelle est inscrite en zone d'habitat au plan de secteur de Thuin- Chimay adopté par arrêté royal du 10 septembre 1979.

      La requérante est propriétaire du bâtiment voisin, situé drève des Alliés 85 (parcelle 78v), et dans lequel elle est domiciliée.

    2. Le 13 janvier 2012, le collège communal de la ville de Thuin délivre le permis sollicité.

      XIII - 7808 - 2/21

      ‡CCBTKFJBE-BDGBEEV‡

      Le 12 juin 2012, la requérante introduit une requête unique contre ce permis (A. 205.190/XIII-6257).

      Le 22 juin 2012, le collège communal de Thuin décide de retirer le permis d'urbanisme du 13 janvier 2012. L'arrêt nº 221.512 du 26 novembre 2012 constate le retrait et décide qu'il n'y a plus lieu de statuer.

    3. Le 6 juillet 2012, le collège communal de Thuin délivre un nouveau permis conditionnel.

      Le 17 septembre 2012, la requérante introduit une requête unique contre ce permis. Cette affaire, enrôlée sous le numéro A. 206.353/XIII-6367, donnera lieu à l'annulation de ce permis par un arrêt nº 221.774 du 17 décembre 2012.

    4. Le 4 décembre 2012, les demandeurs déposent un dossier complémentaire, en précisant davantage l'implantation et l'activité prévue.

    5. Le 7 décembre 2012, le collège communal de Thuin décide de retirer le permis d'urbanisme du 6 juillet 2012 et d'octroyer un nouveau permis conditionnel.

      Le 14 février 2013, la requérante introduit une requête unique contre ce permis. Cette affaire, enrôlée sous le numéro A. 207.974/XIII-6526, a donné lieu à l'annulation de ce permis par un arrêt nº 224.054 du 25 juin 2013.

    6. Le 16 août 2013, les parties intervenantes introduisent une nouvelle demande de permis d'urbanisme auprès de l'administration communale pour la construction d'un logement en extension d'une salle de sports existante. Les demandeurs renoncent à l'extension de la salle de sports au rez-de-chaussée, laquelle sera utilisée comme caves et réserves, pour limiter son projet à la seule construction d'un logement au premier étage. Au moment de l'introduction de la demande, les travaux, entamés sur le fondement du permis précédent, sont quasiment terminés.

    7. Une enquête publique est réalisée du 18 septembre au 2 octobre 2013. Elle suscite 4 réclamations, dont celle de la requérante.

    8. Le 4 novembre 2013, le collège communal de la ville de Thuin délivre le permis sollicité, sous conditions.

      À la suite du recours introduit par Véronique BLOMME (A. 211.473/XIII-6877), ce permis est annulé par l'arrêt nº 234.118 du 11 mars 2016.

      XIII - 7808 - 3/21

      ‡CCBTKFJBE-BDGBEEV‡

      8. Le 4 juillet 2016, le collège communal de Thuin procède à la réfection de l'acte annulé et octroie un nouveau permis conditionnel aux parties intervenantes. Il s'agit de l'acte attaqué en l'espèce, motivé comme suit :

      " [...]

      Considérant qu'en date du 16 août 2013, les époux Detrait-Delforge ont introduit une nouvelle demande de permis d'urbanisme, dont l'objet est distinct de la demande originairement introduite;

      Que cette nouvelle demande de permis d'urbanisme a pour seul objet la construction d'un logement au premier étage et d'une cave semi-enterrée;

      Qu'un récépissé fut adressé aux pétitionnaires en date du 19 août 2013; que le dossier fut déclaré complet en date du 4 septembre 2013 et que le permis d'urbanisme sollicité fut délivré sous conditions en date du 4 novembre 2013;

      Qu'ensuite de l'introduction, par Madame Véronique Blomme, d'une requête unique devant le Conseil d'État, tendant à obtenir la suspension des effets puis l'annulation dudit permis d'urbanisme du 4 novembre 2013, celui-ci fut annulé par un arrêt du Conseil d'État nº 234.118, prononcé le 11 mars 2016, au motif d'une erreur manifeste d'appréciation dans le chef du Collège communal; Que ledit arrêt est notamment motivé dans les termes suivants :

      Considérant que le permis attaqué affirme que 'la situation de [la parcelle] sur l'angle de deux voiries justifie une urbanisation le long de ces deux voiries et par là-même la profondeur du projet - profondeur qui ne saurait dès lors être uniquement analysée par rapport à la seule Drève des Alliés; (...)';

      Considérant qu'affirmer que 'la situation de la parcelle à l'angle de deux voiries justifie une urbanisation le long de ces deux voiries' constitue en l'espèce une erreur manifeste d'appréciation compte tenu de la configuration en triangle de la parcelle; qu'en effet, une telle conception a pour conséquence que, comme en l'espèce, c'est la quasi-totalité de la parcelle qui est urbanisée, ce qui, eu égard à l'environnement immédiat, notamment celui de la requérante, ne peut manifestement pas constituer un bon aménagement des lieux;

      Considérant, dès lors, qu'il est inadéquat de soutenir, comme le fait [le collège communal] dans la motivation de l'acte attaqué, que la parcelle litigieuse 'ne comprend aucune arrière-zone' du fait qu'elle est bordée sur deux de ses trois côtés par une voirie publique et de justifier ainsi l'occupation de la parcelle litigieuse sur quasiment toute sa profondeur à partir du front de bâtisse de la Drève des Alliés;

      Considérant que, en outre, la circonstance que l'implantation des constructions situées sur les parcelles entre le chemin du Haut-Trieux et le chemin du Bois de Lobbes manque d'homogénéité et présente un décalage est sans incidence à cet égard, aucune de ces parcelles ne présente au demeurant un bâti sur quasiment toute sa profondeur comme c'est le cas de la parcelle litigieuse

      ;

      Considérant qu'ensuite de l'arrêt du Conseil d'État nº 234.118, tel qu'annulant le permis d'urbanisme délivré en date du 4 novembre 2013, le Collège communal se retrouve saisi de la demande de permis d'urbanisme introduite par les pétitionnaires en date du 16 août 2013;

      Que conformément à la jurisprudence du Conseil d'État, l'autorité de chose jugée qui s'attache à un arrêt d'annulation interdit à l'autorité de reprendre le même acte

      XIII - 7808 - 4/21

      ‡CCBTKFJBE-BDGBEEV‡

      sans en corriger l'irrégularité qui a entraîné l'annulation; Que lorsque l'autorité procède à la réfection de l'acte, elle peut soit reprendre la procédure ab initio, soit la reprendre au stade de l'irrégularité constatée, afin de corriger celle-ci;

      Qu'en l'espèce, l'irrégularité sanctionnée par le Conseil d'État consiste en une erreur manifeste d'appréciation commise par le Collège communal, en sorte que la procédure d'instruction du dossier de demande ne doit pas être recommencée ab initio; Qu'il n'existe au demeurant aucune circonstance factuelle particulière qui justifierait que la demande d'autorisation doive être actualisée ou que de nouvelles mesures particulières de publicités et/ou consultations doivent être une nouvelle fois mises en place; Que la demande de permis d'urbanisme peut donc être instruite en l'état;

      Considérant que les travaux ayant été achevés à ce jour, sur base d'autorisations soit retirée, pour l'une d'entre elles, soit annulées mais ayant en tout état de cause, et pour chacune d'entre elles, disparu de l'ordonnancement juridique, la demande d'autorisation doit dorénavant être analysée au titre de demande de permis d'urbanisme de régularisation dont l'objet est limité à une affectation résidentielle, sans lien technique, ni fonctionnel avec la salle de sports existante;

      Que les pétitionnaires renoncent en effet à l'extension de la salle de sport existante, telle que prévue dans la première demande d'autorisation introduite; que les espaces sur lesquels ladite extension de la salle de sport existante était originairement projetée, seront dorénavant utilisés à l'usage de cave et de réserve à destination strictement résidentielle, ainsi que l'impose au demeurant...

Pour continuer la lecture

SOLLICITEZ VOTRE ESSAI

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT