Décision judiciaire de Conseil d'État, 10 octobre 2018

Date de Résolution10 octobre 2018
JuridictionXV
Nature Arrêt

CONSEIL D’ÉTAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF.

LE PRÉSIDENT DE LA XVe CHAMBRE SIÉGEANT EN RÉFÉRÉ

A R R Ê T

nº 242.599 du 10 octobre 2018

A.226.305/XV-3874

En cause : la société privée à responsabilité limitée

KLEINE BIEN, ayant élu domicile chez

Mes Olivia VAN der KINDERE et Eric RWAMUCYO, avocats, avenue Lloyd George 16 1000 Bruxelles,

contre :

la ville de Bruxelles, représentée par son collège des bourgmestre et échevins, ayant élu domicile chez

Mes Jean-Paul LAGASSE,

Frédéric VAN DE GEJUCHTE et Gaëtan VANHAMME, avocats, place de Jamblinne de Meux 41 1030 Bruxelles. ------------------------------------------------------------------------------------------------------

I. Objet de la requête

Par une requête introduite le 2 octobre 2018 la société privée à responsabilité limitée KLEINE BIEN demande, d’une part, la suspension, selon la procédure d’extrême urgence, "de l’exécution de l’arrêté du bourgmestre de la Ville de Bruxelles du 14 septembre 2018 réformant l’arrêté du bourgmestre de la Ville de Bruxelles du 7 septembre 2018 ordonnant la fermeture partielle et provisoire de l’établissement le “Bonnefooi” exploité par la partie requérante, pour une période d’un mois à compter du 8 octobre 2018, chaque jour à partir de 2 heures du matin", et, d’autre part, l’annulation de cette décision.

II. Procédure

Par une ordonnance du 2 octobre 2018, l’affaire a été fixée à l’audience publique du 8 octobre 2018 à 10 heures.

La partie adverse a déposé une note d’observations et le dossier administratif.

Mme Diane DÉOM, conseiller d’État, président f.f., a fait rapport.

Mes Olivia VAN der KINDERE et Sophie VAN KERCKHOVE, avocats, comparaissant pour la partie requérante, et Me Gaëtan VANHAMME, avocat, comparaissant pour la partie adverse, ont été entendus en leurs observations.

M. Yves DELVAL, auditeur au Conseil d’État, a été entendu en son avis conforme.

Il est fait application des dispositions relatives à l’emploi des langues, inscrites au titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d’État, coordonnées le 12 janvier 1973.

III. Faits

La partie requérante exploite notamment, sous l’enseigne le Bonnefooi, un établissement situé rue des Pierres n° 8 à 1000 Bruxelles. Celui-ci est habituellement ouvert de 20 heures à six heures du matin en semaine et de 20 heures à huit heures du matin les weekends. Il accueille notamment des concerts et événements musicaux pouvant se dérouler jusqu’à cinq heures du matin. Depuis 2013, la partie requérante a ouvert un second établissement à Ixelles.

La partie requérante indique que, par un jugement du 13 février 2016, le Tribunal de commerce francophone de Bruxelles, qu’elle avait saisi d’une requête en ce sens, a déclaré ouverte la procédure de réorganisation judiciaire. Elle précise que le plan de redressement a été homologué après la revente du fonds de commerce de l’établissement ixellois et qu’elle s’efforce de le respecter, ayant dû mettre fin à certains contrats et se séparer d’une partie de ses partenaires.

Entre janvier et mai 2018, dix procès-verbaux dressés par les services de police font état de nuisances sonores liées à l’activité de l’établissement. Le 17 août, la gérante de la société requérante se voit transmettre un projet d’arrêté ordonnant la fermeture partielle et temporaire de l’établissement; elle est invitée à une audition le 29 août et avisée de la possibilité de se faire assister d’un conseil, de venir consulter le dossier et de déposer une note écrite. Elle est entendue ce jour-là par le secrétaire communal et signe le procès-verbal de son audition sans formuler de remarques.

Le 7 septembre, le bourgmestre adopte une décision de fermeture partielle et temporaire de l’établissement, à partir de deux heures du matin, pour une durée d’un mois avec effet immédiat à dater de sa notification. Cette décision est remise à un employé de la partie requérante le jour même à 22 heures. Elle est rédigée comme suit (traduction libre non contestée par les parties) :

"Le Bourgmestre,

Vu la Nouvelle Loi Communale, et en particulier les articles 133, al. 2 et 135, § 2;

Vu que la commune a pour mission de garantir une bonne police dans l’intérêt des habitants, notamment en matière de propreté, de santé, de sécurité et de tranquillité sur les voies et lieux publics ainsi que dans les bâtiments publics;

Vu le rapport administratif de la zone de police de Bruxelles-Capitale- Ixelles du 28 janvier 2018, qui indique que l’établissement “Bonnefooi”, situé rue des Pierres 8, à 1000 Bruxelles, exploité par la s.p.r.l. KLEINE BIEN, a fait l’objet de 12 procès-verbaux en 2016, 21 procès-verbaux en 2016 et 10 procès-verbaux en 2017 pour cause de tapage nocturne;

Vu les 15 procès-verbaux nouvellement dressés pour l’établissement “Bonnefooi” depuis janvier 2018 pour cause de tapage nocturne : [...];

Considérant que l’établissement a déjà été fermé administrativement par le Collège pour cause de tapage nocturne;

Qu’ainsi, le Collège a décidé, dans le cadre de ses délibérations du 16 décembre 2010, du 29 septembre 2011, du 10 mai 2012, du 12 décembre 2013 et du 20 novembre 2014, de procéder à la fermeture administrative de l’établissement “Bonnefooi” pour une durée d’un weekend sur la base de l’article 45 de la loi du 24 juin 2013 relative aux sanctions administratives communales et des articles 143 et 123 du règlement général de police de la ville de Bruxelles;

Considérant que, malgré les sanctions précitées, la police a à nouveau constaté l’existence de tapage nocturne;

Que, par conséquent, le Collège a décidé, dans le cadre de ses délibérations du 16 juillet 2015, et sur la base de l’article 45 de la loi du 24 juin 2013 relative aux sanctions administratives communales, et de l’article 123 du Règlement général de Police de la ville de Bruxelles et de la commune d’Ixelles, de procéder à la fermeture administrative de l’établissement “Bonnefooi” pour une durée de deux semaines;

Considérant qu’en 2016, sur la base de la loi du 24 juin 2013 relative aux sanctions administratives communales et de l’article 143 du Règlement général de Police, une amende administrative d’un montant de 350 euros a été infligée à l’établissement “Bonnefooi”;

Considérant qu’en 2017, sur la base de la loi du 24 juin 2013 relative aux sanctions administratives communales et de l’article 143 du Règlement général de Police de la Ville de Bruxelles et de la commune d’Ixelles, deux amendes administratives, d’un montant total de 500 euros, ont été [infligées] à l’établissement “Bonnefooi”;

Considérant que, malgré les sanctions prononcées, les nuisances sonores ont persisté;

Considérant qu’à chaque intervention pour l’établissement “Bonnefooi”, les services policiers ont pu constater que le bruit excédait manifestement le

niveau de bruit ambiant et qu’il pouvait être entendu à une distance d’une...

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