Décision judiciaire de Conseil d'État, 8 février 2018

Date de Résolution 8 février 2018
JuridictionXIII
Nature Arrêt

CONSEIL D'ÉTAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF.

XIIIe CHAMBRE

A R R Ê T

nº 240.695 du 8 février 2018

A. 220.685/XIII-7830

En cause : DEGOSSELY Nadine, ayant élu domicile chez Me Jacques SAMBON, avocat, rue des Coteaux 227 1030 Bruxelles,

contre :

la Région wallonne, représentée par son Gouvernement, ayant élu domicile chez Me Pierre MOËRYNCK, avocat, avenue de Tervueren 34/27 1040 Bruxelles.

------------------------------------------------------------------------------------------------------ I. Objet de la requête

Par une requête introduite le 9 novembre 2016, Nadine DEGOSSELY demande l'annulation du permis d'urbanisme délivré le 26 août 2016 par le Gouvernement de la Région wallonne à Fabienne NOCERA pour la régularisation d'une terrasse en bois sur un bien sis route d'Ath 326 à Ghlin, cadastré section A, nº 269e5.

II. Procédure

Le dossier administratif a été déposé.

Les mémoires en réponse et en réplique ont été régulièrement échangés.

M. Lionel RENDERS, auditeur au Conseil d'État, a rédigé un rapport sur la base de l'article 12 du règlement général de procédure.

Le rapport a été notifié aux parties.

XIII - 7830 - 1/21

La partie adverse a déposé une demande de poursuite de la procédure et la partie requérante a déposé un dernier mémoire.

Par une ordonnance du 16 novembre 2017, l'affaire a été fixée à l'audience du 14 décembre 2017 à 09.30 heures.

M. Michel PÂQUES, conseiller d'État, a exposé son rapport.

Me Erim ACIKGOZ, loco Me Jacques SAMBON, avocat, comparaissant pour la partie requérante, et Me Natacha DIERCKX, loco Me Pierre MOËRYNCK, avocat, comparaissant pour la partie adverse ont été entendus en leurs observations.

M. Lionel RENDERS, auditeur, a été entendu en son avis conforme.

Il est fait application des dispositions relatives à l'emploi des langues, inscrites au titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'État, coordonnées le 12 janvier 1973.

III. Faits

1. Le 23 septembre 2015, Fabienne NOCERA introduit une demande de permis d'urbanisme auprès de l'administration communale de la ville de Mons pour la régularisation de la terrasse du bien sis route d'Ath 326 à Ghlin, cadastré section A, no 269e5.

Les documents suivants sont annexés à cette demande :

- la notice d'évaluation des incidences sur l'environnement, - les renseignements relatifs à la prévention incendie, - un rapport urbanistique, - un avis du 8 août 2012 de la direction générale opérationnelle de l'agriculture, des ressources naturelles et de l'environnement (DGO3), - des schémas d'implantation et de niveau du sol, - une documentation sur "des terrasses respectueuses de la nature", - un extrait du plan parcellaire cadastral, - un engagement de la demanderesse de permis, - des reportages photographiques.

Au plan de secteur de Mons-Borinage du 9 novembre 1983, la parcelle est située en zone d'habitat sur 70 mètres de profondeur à front de la voirie et au-delà en zone forestière dans le périmètre d'intérêt paysager.

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2. Le 27 octobre 2015, un accusé de réception de dossier complet est établi.

  1. Du 30 octobre au 15 novembre 2015, une première enquête publique se tient. Trois réclamations sont introduites.

    Du 25 novembre au 9 décembre 2015, une seconde enquête publique est organisée, en raison du non-respect des règles d'affichage lors de la première enquête. Trois réclamations sont introduites.

  2. Le 8 janvier 2016, la zone de police Mons-Quevy 5324 émet un avis favorable.

    Le 21 janvier 2016, le collège communal émet un avis favorable.

  3. Le 8 mars 2016, le fonctionnaire délégué refuse la dérogation au plan de secteur et, partant, émet un avis défavorable pour la régularisation de la terrasse.

  4. Le 14 avril 2016, le collège communal de la ville de Mons refuse le permis d'urbanisme sollicité.

  5. Par un pli recommandé du 18 mai 2016, Fabienne NOCERA introduit un recours administratif à l'encontre de cette décision devant le Gouvernement wallon.

    Le 30 juin 2016, la commission d'avis sur les recours émet, après avoir entendu Fabienne NOCERA, un avis favorable sur le recours.

  6. Le 26 août 2016, le Ministre de l'Environnement, de l'Aménagement du territoire, de la Mobilité, des Transports et du Bien-être animal délivre le permis d'urbanisme sollicité.

    Cet arrêté ministériel est rédigé de la manière suivante :

    " [...]

    Vu le Code wallon de l'aménagement du territoire, de l'urbanisme et du patrimoine;

    Considérant que Madame Fabienne NOCERA a introduit une demande de permis d'urbanisme relative à un bien sis à 7011 GHLIN, Route d'Ath, 326, cadastré section A numéro 269 E 5, ayant pour objet la régularisation d'une terrasse en bois;

    XIII - 7830 - 3/21

    Considérant qu'en date du 14 avril 2016, le Collège communal de Mons a refusé le permis d'urbanisme;

    Considérant que la décision du Collège communal a été réceptionnée par le demandeur en date du 29 avril 2016;

    Considérant que le demandeur a introduit un recours auprès du Gouvernement wallon en date du 18 mai 2016, réceptionné le 19 mai 2016; qu'il a été introduit dans les formes et les délais légaux; qu'il est recevable;

    Considérant que l'article 120 du Code institue une Commission chargée d'émettre un avis motivé sur les recours visés à l'article 119 dudit Code;

    Considérant que l'audition a eu lieu le 30 juin 2016;

    Considérant que cette Commission a émis, en date du 30 juin 2016, un avis favorable (voir annexe 1);

    Considérant que la DGO4 - Direction juridique, des recours et du contentieux, a transmis à l'autorité de recours, en date du 12 août 2016, une proposition d'octroi du permis d'urbanisme; que cette proposition repose sur les motifs suivants :

    Considérant que le bien est situé en zone d'habitat pour la majeure partie et en zone forestière pour le solde, dans un périmètre d'intérêt paysager au plan de secteur de Mons-Borinage, approuvé par l'arrêté de l'exécutif régional wallon du 9 novembre 1983 et qui n'a pas cessé de produire ses effets pour le bien précité;

    Considérant que le bien est situé en zone d'habitat suburbain et en zone forestière au schéma de structure communal entré en vigueur en date du 16 octobre 2000;

    Considérant que le bien est situé en aire D3 d'habitat suburbain et en aire G territoire d'espaces boisés au règlement communal d'urbanisme en vigueur depuis le 19 janvier 2001;

    Considérant que la demande de permis comprend une notice d'évaluation préalable des incidences sur l'environnement;

    Considérant qu'au vu de cette notice et au regard des critères de sélection pertinents visés à l'article D.66, § 2 du livre Ier du Code de l'environnement tel que modifié par le décret du 10 novembre 2006 précité, le projet n'est pas susceptible d'avoir des incidences notables sur l'environnement; qu'une étude d'incidences n'était donc pas requise;

    Considérant que la demande consiste en la régularisation d'une terrasse en bois;

    Considérant que la demande n'est pas conforme à la destination de la zone forestière telle que définie à l'article 36 du Code;

    Considérant que l'article 111, alinéa 1er, du Code prévoit que :

    [...]

    Considérant que l'article 114 du Code stipule que :

    [...]

    XIII - 7830 - 4/21

    Considérant que la demande a été soumise à des mesures particulières de publicité pour le motif suivant : application de l'article 330, 11º du Code; qu'une enquête publique a été réalisée du 30 octobre 2015 au 13 novembre 2015; que plusieurs réclamations ont été introduites; que l'une d'entre elles portait sur le non-respect des conditions d'affichage; qu'en effet l'enquête publique réalisée était viciée;

    Considérant que la demande a à nouveau été soumise à des mesures particulières de publicité pour le motif suivant : application de l'article 330, 11° du Code; qu'une enquête publique a été réalisée du 25 novembre 2015 au 9 décembre 2015;

    Considérant que plusieurs réclamations ont encore été introduites; que les griefs des réclamants peuvent être résumés comme suit :

    - l'ouverture d'un bar occasionne des nuisances au voisinage, notamment des nuisances sonores,

    - la terrasse est réalisée au mépris des règles en vigueur;

    Considérant l'avis émis par la zone de police Mons-Quévy en date du 8 janvier 2016 et qui établit que la parcelle de terrain concernée se trouve en domaine privé;

    Considérant que l'avis de la Direction Nature et Forêt (Service public de Wallonie) a été sollicité en date du 27 octobre 2015; que cet avis n'a pas été transmis dans le délai imparti et qu'il est dès lors réputé favorable par défaut; que toutefois, à titre informatif, l'avis transmis en date du 8 août 2012 dans le cadre d'une demande de permis d'environnement portant sur la régularisation de la terrasse était favorable;

    Considérant que les dérogations ne peuvent être accordées qu'à titre exceptionnel; que le caractère exceptionnel s'analyse comme la nécessité de chercher à appliquer la norme à laquelle il est envisagé de déroger;

    Considérant que, par leur nombre ou leur ampleur, les dérogations ne peuvent vider de leur substance les normes auxquelles il est prévu de déroger; qu'une dérogation se justifie pour la réalisation optimale d'un projet déterminé en un lieu précis;

    Considérant que le Fonctionnaire délégué a refusé la dérogation sollicitée et que sa décision du 8 mars 2016 est notamment motivée comme suit :

    " [...] Vu le rapport favorable du 21/01/2016 du Collège communal proposant la dérogation au plan de secteur précité étant donné notamment :

    - que la demande porte sur la régularisation d'une terrasse; - que cette terrasse est en dérogation au plan de secteur, que cette dernière s'inscrit sur 3 mètres en zone forestière; - que le projet a été soumis à enquête publique et que celle-ci a suscité deux réclamations mettant en avant les points suivants : tapage nocturne et diurne, heures d'ouverture non respectées, parking intempestif, démarrage de véhicules dans les allées, éclairage perturbant le voisinage et la zone forestière, etc; - que ces réclamations visent l'exploitation du lieu et non l'objet de la demande; - qu'en ce qui...

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