Décision judiciaire de Conseil d'État, 29 juin 2017

Date de Résolution29 juin 2017
JuridictionXV
Nature Arrêt

CONSEIL D’ÉTAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF

XVe CHAMBRE

A R R Ê T

nº 238.736 du 29 juin 2017

218.657/XV-3032

En cause : BRUNO Giacomo, ayant élu domicile chez Mes Sacha GRUBER et Jacques SAFRAN, avocats, rue des Colonies 56/6

1000 Bruxelles,

contre :

la Région de Bruxelles-Capitale, ayant élu domicile chez Me Jean-Paul LAGASSE, avocat, place de Jamblinne de Meux 41

1030 Bruxelles.

Partie intervenante :

la Société de Logement de la Région de Bruxelles-Capitale, ayant élu domicile chez Mes Philippe COENRAETS, et Lara THOMMÈS, avocats, boulevard de la Cambre 36

1000 Bruxelles.

------------------------------------------------------------------------------------------------------ I. Objet du recours

Par une requête introduite le 4 mars 2016, Giacomo BRUNO poursuit l’annulation du «permis d’urbanisme délivré par le Fonctionnaire délégué de la Région de Bruxelles-Capitale à la s.a. Société de Logement de la Région de Bruxelles-Capitale (S.L.R.B.), l’autorisant à construire un ensemble de 59 logements avec emplacements de parking (22 en sous-sol et 35 en surface), une crèche et une maison médicale sur un bien sis avenue des Archiducs, square des Archiducs et Berensheide».

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II. Procédure

Une ordonnance du 14 juin 2016 a accueilli la requête en intervention introduite le 4 mai 2016 par la Société de Logement de la Région de Bruxelles-Capitale.

Le dossier administratif a été déposé.

Les mémoires en réponse, en réplique et en intervention ont été régulièrement échangés.

Mme Isabelle LEYSEN, premier auditeur, a rédigé un rapport sur la base de l’article 12 du Règlement général de procédure.

Le rapport a été notifié aux parties.

Les derniers mémoires ont été régulièrement échangés.

Par une ordonnance du 6 juin 2017, l’affaire a été fixée à l’audience publique du 20 juin 2017 à 9 heures 30.

Mme Diane DÉOM, conseiller d’État, a fait rapport.

Me Sacha GRUBER, avocat, comparaissant pour le requérant, Me Gaëtan VANHAMME, loco Me Jean-Paul LAGASSE, avocat, comparaissant pour la partie adverse, et Me Lara THOMMÈS, avocat, comparaissant pour la partie intervenante, ont été entendus en leurs observations.

Mme Isabelle LEYSEN, premier auditeur, a été entendue en son avis conforme.

Il est fait application des dispositions relatives à l’emploi des langues, inscrites au titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d’État, coordonnées le 12 janvier 1973.

III. Faits

Le 27 octobre 2014, la s.a. Société de Logement de la Région de Bruxelles-Capitale (S.L.R.B.) introduit auprès du fonctionnaire délégué de la Région de Bruxelles-Capitale une demande de permis d’urbanisme ayant pour objet la

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construction d’un ensemble de 59 logements avec parkings souterrains et en surface,

d’une crèche et d’une maison médicale, square des Archiducs à Watermael-Boitsfort.

Le 8 décembre, le service d’Incendie et d’Aide médicale urgente émet un avis sur cette demande.

Le 6 mars 2015, l’Institut bruxellois pour la Gestion de l’Environnement (I.B.G.E.) délivre à la S.L.R.B. un permis d’environnement pour un parking couvert de 22 véhicules, un parking à ciel ouvert de 35 véhicules et deux chaudières au gaz en cascade sur un bien sis avenue des Archiducs à Watermael-Boitsfort.

Le 2 avril, l’administration de l’Aménagement du Territoire et du Logement accuse réception de la demande de permis d’urbanisme introduite le 27 octobre 2014, et complétée les 19 décembre 2014 et 18 mars 2015.

Le 30 avril, la Commission royale des Monuments et des Sites (C.R.M.S.) émet des remarques sur le projet. Une enquête publique est organisée du 26 mai au 9 juin. Elle suscite 12 lettres de réclamation qui dénoncent notamment des problèmes de circulation et de stationnement.

Le 1er juillet, la commission de concertation émet un avis favorable conditionnel sur la demande.

Le 14 décembre, l’auteur du projet transmet au fonctionnaire délégué ses réponses aux remarques relatives aux aménagements en zone de recul et aux risques de conflits entre les voitures transitant par le Berensheide et les véhicules sortant du futur parking et le clos Hanse.

Le 24 décembre, le fonctionnaire délégué délivre le permis sollicité, moyennant le respect de certaines conditions. Il s’agit de l’acte attaqué.

Le requérant précise, sans être contredit à cet égard, que l’administration communale de Watermael-Boitsfort lui a délivré une copie de cette décision le 5 janvier 2016, date à laquelle il en a effectivement pris connaissance.

IV. Moyen unique

A. Argumentation du requérant

Considérant que le requérant prend un moyen unique de la violation de la loi du 29 juillet 1991 relative à la motivation formelle des actes administratifs, de l’article 143, 5°, du Code bruxellois de l’Aménagement du Territoire (CoBAT), de

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l’article 7 du Titre VIII du Règlement régional d’urbanisme (R.R.U.), de l’absence d’effet utile de l’enquête publique, du défaut d’examen effectif et complet des circonstances de l’espèce, de la violation du principe de bonne administration et du devoir de minutie, de l’erreur manifeste d’appréciation et de l’excès de pouvoir; qu’il soutient que les riverains du projet ont attiré l’attention de l’autorité sur la problématique du stationnement et de la mobilité dans la zone et qu’on ne trouve dans l’acte attaqué qu’une réponse manifestement erronée aux réclamations, sans que la motivation de l’acte attaqué témoigne que l’autorité a appréhendé de manière correcte lesdites problématiques; qu’il souligne que celles-ci se posent notamment au regard du cumul du projet litigieux avec les autres activités ou les autres projets autorisés et prochainement mis en œuvre, problématiques traitées de manière lacunaire et erronée dans le rapport d’incidences; que, selon lui, l’autorité admet dans l’acte attaqué que le rapport d’incidences comportait des erreurs mais estime à tort qu’il s’agit d’erreur matérielles et qu’elles n’ont pas eu d’incidence sur sa bonne compréhension des impacts du projet (page 7 de l’acte attaqué); qu’en ce qui concerne plus spécifiquement l’absence ou, à tout le moins, l’insuffisance de prise en compte, dans le rapport d’incidences, de la réaffectation de l’immeuble «Hector Denis» et du nouveau commissariat des Tritomas, il estime la réponse de l’autorité surprenante puisqu’elle indique, d’une part, que l’évaluation des incidences doit se faire au regard de la situation existante et, d’autre part, que les riverains confondent «la notion de situation existante avec les projets non encore réalisés ou non encore aboutis (commissariat) au moment où l’évaluation des incidences a été opérée» (page 7); qu’il fait valoir que la rénovation de l’immeuble «Hector Denis» (63 appartements) est imminente, un permis d’urbanisme ayant été délivré le 9 mai 2014, que le commissariat Tritomas (145 travailleurs) est occupé depuis le 13 décembre 2013, et que le rapport d’incidences réalisé au mois d’octobre 2014 ne pouvait donc pas faire abstraction de ces projets; qu’à son sens, la motivation erronée et l’absence de prise en compte des deux projets précités montre que l’autorité n’a pas appréhendé de manière adéquate la problématique du stationnement et de la mobilité dans le voisinage et qu’elle a été induite en erreur quant à la nécessité de prévoir des emplacements spécifiques pour les activités annexes au logement et le charroi qu’elles génèrent (parents déposant leurs enfants à la crèche, patientèle des cabinets médicaux, fournisseurs) ainsi que quant à l’octroi de la dérogation au R.R.U. pour ne pas respecter le ratio de 1 à 2 emplacements par logement; qu’il considère que l’autorité affirme qu’il n’est pas impératif de prévoir des emplacements de stationnement liés à ces activités annexes alors qu’il y a en réalité une charge potentielle supplémentaire sur le stationnement et la mobilité de près de 250 véhicules que le rapport d’incidences et l’autorité n’ont pas examiné; qu’ainsi, nonobstant le nouveau parking des Pépinières de Boitsfort, il est manifeste que les parents des enfants fréquentant la crèche, les membres du personnel de celle-ci, ses fournisseurs, les médecins, le personnel, la patientèle et les fournisseurs des cabinets médicaux vont devoir se garer dans un quartier déjà engorgé, de sorte que c’est un non-sens de ne pas prévoir d’emplacement spécifique sur le site du projet litigieux pour le charroi relatif à ces activités annexes; qu’il estime que si le rapport d’incidences avait tenu compte des projets précités et avait évalué correctement les incidences du projet litigieux en matière de stationnement et de mobilité, l’autorité aurait pu mieux apprécier la situation et répondre de manière adéquate aux inquiétudes manifestées par les riverains à l’occasion de l’enquête publique; qu’il soutient qu’en agissant comme elle l’a fait, l’autorité ne s’est pas comportée comme l’aurait fait une autre autorité normalement

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prudente et diligente, placée dans les mêmes circonstances de fait et a commis une erreur manifeste d’appréciation; qu’en réplique, le requérant ajoute que : - les emplacements de parking sur le square ainsi que dans les rues avoisinantes sont déjà très régulièrement occupés en raison des activités du commissariat, et ce alors qu’actuellement, les Pépinières disposent encore de deux parkings pour leur clientèle, ce qui ne sera plus le cas après la réalisation du projet litigieux puisque le...

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