Décision judiciaire de Conseil d'État, 24 février 2017

Date de Résolution24 février 2017
JuridictionVI
Nature Arrêt

CONSEIL D'ÉTAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF.

VIe CHAMBRE

A R R Ê T

nº 237.492 du 24 février 2017

A.217.121/VI-20.581

En cause : ALOMENE Danielle,

ayant élu domicile chez

Me Joël BAUDOIN, avocat, rue de Neufchâteau 37 6600 Bastogne,

contre :

1. le bourgmestre de la ville de Virton, 2. la ville de Virton,

ayant élu domicile chez

Me Tangui VANDENPUT, avocat, avenue Tedesco 7 1160 Bruxelles.

------------------------------------------------------------------------------------------------------ I. Objet de la requête

Par une requête introduite le 29 septembre 2015, Danielle ALOMENE demande l'annulation de "l'arrêté de police du Bourgmestre de la commune de Virton du 29 juillet 2015 ordonnant la réalisation de travaux dans un immeuble, sis avenue Bouvier 118 à 6762 SAINT-MARD présentant un risque d'incendie, dont la requérante est propriétaire".

II. Procédure

Les droits visés à l'article 70 de l'arrêté du Régent du 23 août 1948 déterminant la procédure devant la section du contentieux administratif du Conseil d'État ont été acquittés.

Le dossier administratif a été déposé.

Les mémoires en réponse et en réplique ont été régulièrement échangés.

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M. Yves DELVAL, auditeur au Conseil d'État, a rédigé un rapport sur la base de l'article 12 de l'arrêté du Régent précité du 23 août 1948.

Le rapport a été notifié aux parties.

Les parties ont déposé des derniers mémoires.

Par une ordonnance du 5 janvier 2017, l'affaire a été fixée à l'audience du 1er février 2017.

M. Serge BODART, conseiller d'État, a exposé son rapport.

Me Hajer BEN HAMMOUDA, loco Me Joël BAUDOIN, avocat, comparaissant pour la partie requérante, et Me Jessica DAVILA, loco Me Tangui VANDENPUT, avocat, comparaissant pour les parties adverses, ont été entendus en leurs observations.

M. Yves DELVAL, auditeur, a été entendu en son avis conforme au présent arrêt.

Il est fait application des dispositions relatives à l'emploi des langues, inscrites au titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'État, coordonnées le 12 janvier 1973.

III. Faits

Les faits utiles à l'examen du recours sont les suivants :

La requérante est propriétaire d'un immeuble sis au n° 118 de l'avenue Bouvier à Virton qu'elle a rénové et divisé en appartements, studios et chambres qu'elle donne en location.

Le 29 juin 2009, elle a introduit auprès de la seconde partie adverse une demande de permis d'urbanisme et de location pour cet immeuble. Dans sa demande, elle fait référence à des échanges de courriers ainsi qu'à un précédent permis de location pour les petits logements accordé le 31 mai 2001 et à une demande de renouvellement introduite en 2008.

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Le 18 mars 2011, la seconde partie adverse délivre à la requérante un permis de location pour une chambre au rez-de-chaussée, trois chambres au premier étage, trois chambres au deuxième étage, deux studios au sous-sol et trois studios au rez-de-chaussée. Ce permis précise qu'il est accordé pour une personne maximum par logement et qu'il est valable pour cinq ans.

Le 24 août 2011, la seconde partie adverse délivre à la requérante un permis d'urbanisme de régularisation pour l'aménagement de studios, d'appartements, de chambres et de communs. Il est toutefois octroyé sous la condition de : a) respecter les conditions émises dans un avis du service des travaux du 4 mai 2011, à savoir : - qu’un ensemble compteur soit placé pour chaque appartement, studio ou communs; - que des emplacements de parkings soient prévus (1,5 par appartement et 1 par studio); b) respecter les conditions émises dans un avis du service régional d'incendie du 12 mai 2011, à savoir : - qu’une installation généralisée de détection automatique d'incendie soit placé vu le nombre de logements et l'impossibilité de compartimenter correctement le bâtiment; - que chaque niveau soit équipé d'un bouton poussoir asservissant une sirène audible par l'ensemble des habitants; - que le rappel automatique de la porte de la chaufferie soit refixé; - que la cuve à combustible soit entourée d'un muret de rétention; - que soit installé un éclairage de sécurité dans les chemins d'évacuation; - qu’au rez-de-chaussée, les communications entre le couloir d'accès aux studios 1 à

3 et le reste du bâtiment soient obturées par une paroi RF 1 heure; - qu’au 1er étage, la terrasse donnant accès à un escalier extérieur soit réparée; - que soient tenus à la disposition du Bourgmestre les certificats de conformité de l'installation électrique et de détection incendie; c) respecter les conditions émises dans un avis du ministère de l'Equipement et des Transports du 22 avril 2011, qui ne peuvent pas être déterminées sur la base du permis octroyé.

Le 8 septembre 2011, le service "permis de location" de la direction des Etudes et de la Qualité du Logement du département du Logement du service public de Wallonie écrit à la première partie adverse afin de l'informer d'une plainte d'un des locataires de la requérante et de lui demander d'envisager de prendre les mesures nécessaires en vue de l'assainissement de l'immeuble et de l'obtention du permis de

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location. Ce dernier répond, par un courrier daté du 10 octobre 2011, que l'immeuble est en ordre sur la base d'une visite du 28 février 2011 et que des permis de location ont été délivrés.

Le 27 juillet 2012, la première partie adverse écrit à la requérante pour lui demander d'effectuer les travaux d'aménagement et d'assainissement nécessaires pour que l'ensemble de l'immeuble réponde pleinement à la réglementation en vigueur, car elle a été informée de problèmes d'humidité, d'électricité dangereuse et non conforme, de champignons et de plafond fissuré dans des logements de la requérante. Elle précise qu'elle a la possibilité d'être entendue pour exposer ses observations.

Le service salubrité du département précité du service public de Wallonie informe la première partie adverse, par un courrier daté du 19 mars 2013, que ses services ont réalisé une enquête de salubrité dont il ressort que "le logement ne présente aucun manquement aux critères minimaux de salubrité".

Le 25 octobre 2013, le bureau zonal de prévention incendie procède à une visite de contrôle et relève, dans un rapport daté du 27 novembre 2013, ce qui suit : - les détecteurs d'incendie ne sont pas reliés à la centrale, seuls les boutons poussoirs le sont ; - il n'y a pas de bouton poussoir au second étage ; - l'obturation des communications n'est réalisée qu'en partie ; - si la terrasse a été réparée, il n'y a plus d'escalier extérieur ; - les certificats auraient été déposés à l'administration communale ; - un extincteur polyvalent d'une unité d'extinction sera placé sur chaque niveau.

Ce rapport est transmis à la requérante par un courrier daté du 10 avril 2014. La première partie adverse estime que le rapport du service régional d'incendie du 12 mai 2011 reste d'application car certaines demandes de ce rapport n'ont pas été réalisées et la requérante est invitée à "prendre toutes dispositions pour que ces travaux soient réalisés et [l'] informer de la réalisation de ceux-ci".

Le 26 juin 2014, la seconde partie adverse adopte un "règlement incendie pour les immeubles de logement".

Par un courrier daté du 27 juin 2014, la première partie adverse envoie un rappel à la requérante puisque son courrier du 10 avril 2014 est resté sans réponse.

Ce rappel étant également resté sans réponse, la première partie adverse

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demande au Bureau zonal de prévention incendie de faire une visite de contrôle. La requérante en est informée.

Le 6 février 2015, le service "permis de location" précité envoie à la première partie adverse les conclusions d'un rapport d'enquête et lui demande de mettre en œuvre la procédure visée à l'article 7 du Code wallon du Logement. Le rapport estime que le logement du troisième étage à droite est "habitable" et "améliorable", relève un éclairage naturel et une largeur d'escalier insuffisants et renseigne comme travaux à réaliser une modification de la cage d'escalier, précisant qu'"un escalier en colimaçon d'une hauteur aussi importante […] à cet endroit semble inapproprié en cas de problème (incendie, évacuation…)".

Par un courrier recommandé avec accusé de réception du 12 février 2015, la première partie adverse communique ce rapport à la requérante et la met en demeure d'effectuer les travaux d'assainissement et d'aménagement nécessaires pour que l'ensemble du bâtiment réponde pleinement à la réglementation en vigueur et d'entreprendre ensuite les démarches nécessaires afin d'obtenir un permis de location. Ce courrier lui rappelle la possibilité d'être entendue pour présenter ses observations.

Par un courrier du 16 février 2015, la première partie adverse demande à la zone de police de diligenter une enquête. Sur la copie versée au dossier administratif, une mention manuscrite indique ceci: "Ce 08/03/2015, nous avons constaté que des travaux sont en cours à cette adresse".

Un courrier ne mentionnant ni adresse ni destinataire annonce une visite de tous les logements de l'immeuble de la requérante le 20 mars 2015. A la suite de cette visite, un rapport de prévention est rédigé le 25 mars 2015 qui estime que seuls les studios du rez-de-chaussée répondent de manière satisfaisante à la réglementation en vigueur. Ce rapport relève que les combles sont aménagés en un appartement et deux chambres et que le rapport du 27 novembre 2013 reste d'application car certaines demandes n'ont pas été réalisées, à savoir l'absence de bouton poussoir au deuxième étage, celui du premier étage étant, en outre, hors service, l'absence d'éclairage de sécurité dans l'accès à l'appartement sous comble et dans l'escalier vers le sous-sol, l'obturation des communications partiellement réalisée, l'absence d'escalier extérieur et de poignée sur la porte donnant accès à la terrasse, la rendant inutilisable. Il note également que le rapport de l'installation électrique des communs date du 21 novembre 2000...

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