Décision judiciaire de Conseil d'État, 24 mars 2016

Date de Résolution24 mars 2016
JuridictionVIII
Nature Arrêt

CONSEIL D'ÉTAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF.

A R R Ê T

no 234.241 du 24 mars 2016

  1. 217.480/VIII-9874

    En cause : DUFRASNE Arnaud, ayant élu domicile chez

    Me Juan CASTIAUX, avocat, drève du Sénéchal 19 1160 Bruxelles,

    contre :

    la commune de Molenbeek-Saint-Jean, représentée par son collège des bourgmestre et échevins, ayant élu domicile chez

    Me Emmanuel GOURDIN, avocat, boulevard Louis Schmidt 56 1040 Bruxelles.

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    LE PRÉSIDENT DE LA VIII e CHAMBRE DES RÉFÉRÉS,

    Vu la requête introduite le 6 novembre 2015 par Arnaud DUFRASNE tendant, d'une part, à la suspension de l'exécution de "la décision du Conseil communal de Molenbeek du 21 octobre 2015 [de lui] infliger la sanction disciplinaire de démission" et, d'autre part, à l'annulation de cette décision;

    Vu la note d'observations et le dossier administratif;

    Vu le rapport de Gabrielle JOTTRAND, premier auditeur au Conseil d'État, rédigé sur la base de l'article 12 de l'arrêté royal du 5 décembre 1991 déterminant la procédure en référé devant le Conseil d'État;

    Vu l'ordonnance du 19 février 2016 fixant l'affaire à l'audience publique du 22 mars 2016;

    Vu la notification de l'ordonnance de fixation et du rapport aux parties;

    Entendu, en son rapport, Jacques VANHAEVERBEEK, président de chambre;

    Entendu, en leurs observations, Me Juan CASTIAUX, avocat, comparaissant pour la partie requérante, et Me Emmanuel GOURDIN, avocat, comparaissant pour la partie adverse;

    Entendu, en son avis conforme, Gabrielle JOTTRAND, premier auditeur;

    Vu le titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'État, coordonnées le 12 janvier 1973;

    Considérant que les faits utiles à l'examen du recours se présentent comme suit :

    1. Le requérant est professeur de chant et de musique de chambre vocale, nommé à titre définitif à l'Académie de Musique et des Arts de la Parole de Molenbeek-Saint-Jean depuis le 1er septembre 1994. Il a été nommé le 1er novembre 1998 pour dix périodes.

    2. Le 20 mai 2010, il s'est vu infligé une sanction de mise en disponibilité par mesure disciplinaire pour une durée de trois ans pour des faits de harcèlement téléphonique en date du 17 décembre 2009. Cette sanction a pris effet le 28 mai 2010 et s'est terminée le 27 mai 2013. Le requérant a repris ses fonctions le 28 mai 2013.

    3. Par un courrier du 13 juin 2013, la commune de Watermael-Boitsfort informe la partie adverse de ce qu'une décision de suspension préventive a été prise par elle contre le requérant pour des faits de harcèlement téléphonique.

    4. Par un courrier du 27 juin 2013, le Procureur du Roi de Nivelles avertit la partie adverse qu'une information a été ouverte concernant une plainte en cause du requérant du chef de harcèlement au préjudice d'une élève rencontrée lors d'un stage à l'académie de musique de Boitsfort, que les faits portés à sa connaissance seraient survenus entre le mois d'août 2010 et le 1er juillet 2012, qu'il estime avoir suffisamment d'éléments pour citer prochainement le requérant devant le Tribunal correctionnel de Nivelles sur la base de la prévention de harcèlement et que l'attitude de ce dernier est d'autant plus interpellante que le requérant semble avoir bénéficié, le 23 février 2011, d'une mesure de faveur (suspension du prononcé) à l'occasion de poursuites devant le Tribunal correctionnel de Bruxelles du chef de harcèlement téléphonique.

      5. Le 21 août 2013, la partie adverse décide d'entamer une procédure disciplinaire à l'encontre du requérant en raison des manquements révélés par les deux courriers.

    5. Le 25 septembre 2013, elle décide d'engager une procédure de suspension préventive à l'encontre du requérant, en raison des poursuites pénales dont il fait l'objet, qui aboutit, le 9 octobre 2013, à une décision de suspension préventive avec réduction du traitement.

    6. Le 19 novembre 2013, la commune de Watermael-Boitsfort inflige au requérant la sanction de la mise en disponibilité par mesure disciplinaire pour une durée de trois ans pour des faits de harcèlements téléphoniques envers des élèves ou anciennes élèves du requérant et la rupture de confiance entre l'intéressé et certains parents et élèves ainsi qu'entre l'intéressé et son pouvoir organisateur. Cette décision n'a fait l'objet d'aucun recours.

    7. La sixième chambre correctionnelle du Tribunal de première instance du Brabant Wallon a rendu, le 25 avril 2014, un jugement définitif motivé comme suit :

      " La prévention est établie à suffisance par les pièces du dossier, le tribunal relevant, notamment : - que mademoiselle WYBOU a décrit de manière précise et circonstanciée, dans ses diverses auditions, les agissements dont elle était victime, - que dans son audition du 9 mai 2012, elle indiquait avoir reconnu la voix très particulière du prévenu qui était son ancien professeur de chant, - que ses dires sont corroborés par les résultats de la téléphonie mais aussi par l'audition d'un de ses voisins, Luc VANDEN BULCKE, qui, entendu le 9 mai 2012, a confirmé avoir reçu la veille un appel d'un inconnu lui demandant le numéro de sa jeune voisine.

      Le prévenu est en aveu des faits qui lui sont reprochés.

      Pour apprécier la hauteur et la nature de la peine, il convient de prendre en considération : - la gravité des faits et les conséquences qui en ont résulté pour la partie civile qui a dû entamer un suivi psychologique, - l'angoisse que cette situation a généré tant pour la partie civile elle-même que pour les proches de celle-ci - la longueur de la période infractionnelle, - le fait que le suivi psychiatrique dont le prévenu fait l'objet depuis de nombreuses années n'a manifestement pas servi de rempart à ses agissements, - le fait que le prévenu n'a pas hésité à poursuivre son comportement alors même qu'il faisait l'objet de poursuites devant le tribunal correctionnel de Bruxelles pour des faits de même nature.

      Cette première comparution en justice n'a pas amené le prévenu à modifier son comportement.

      Il n'a pas non plus saisi la chance qui lui avait alors été octroyée par le biais d'une mesure de suspension du prononcé de la condamnation. […]

      Condamne le prévenu, DUFRASNE Arnaud, du chef de cette prévention à une seule peine d'1 an d'emprisonnement et à une amende de 100,00 euros majorée de 50 décimes en vertu de la loi du 5 mars 1952 modifiée et portée à 600,00 euros.

      Dit qu'à défaut de paiement dans le délai de la loi, l'amende sera remplacée par un emprisonnement de 15 jours

      Et attendu que ce condamné n'a pas encouru de condamnation antérieure à une peine...

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