Décision judiciaire de Conseil d'État, 1 mars 2016

Date de Résolution 1 mars 2016
JuridictionXIII
Nature Arrêt

CONSEIL D'ETAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF.

A R R E T

nº 233.996 du 1er mars 2016

A. 207.445/XIII-6472

En cause : 1. ROCHEMONT Patrice, 2. SOUBAI Rabha, 3. la Société privée à responsabilité limitée GRINGALET,

4. VAN ACHTER Marie-Josée, 5. LOGIE Philippe, 6. LOGIE André, ayant tous élu domicile chez Me Matthieu GUIOT, avocat, chaussée de Louvain 431-F 1380 Lasne,

contre :

1. la Commune de Lasne, ayant élu domicile chez Me Bernard FRANCIS, avocat, Vieux Chemin du Poète 11 1301 Bierges,

2. la Région wallonne, représentée par son Gouvernement, ayant élu domicile chez Me Etienne ORBAN de XIVRY, avocat, boulevard du Midi 29 6900 Marche-en-Famenne.

Parties intervenantes :

1. VANDEN BERGHE Pierre, 2. GAUTHIER Jeannine, ayant tous deux élu domicile chez Me Benoit HAVET, avocat, allée de Clerlande 3 1340 Ottignies-Louvain-la-Neuve. ------------------------------------------------------------------------------------------------------

XIII - 6472 - 1/21

LE CONSEIL D'ETAT, XIII e CHAMBRE,

Vu la requête introduite le 21 décembre 2012 par Patrice ROCHEMONT, Rabha SOUBAI, la société privée à responsabilité limitée (S.P.R.L.) GRINGALET, Marie-Josée VAN ACHTER, Philippe LOGIE et André LOGIE qui demandent l'annulation du permis d'urbanisme délivré le 8 octobre 2012 par le collège communal de Lasne à Pierre VANDEN BERGHE et Jeannine GAUTHIER pour la transformation d'une habitation sur un bien sis rue du Bois Impérial 60 à Lasne, et cadastré 2ème division, section B, nos 152k4, 152y2 et 152d3;

Vu la requête introduite le 15 février 2013 par laquelle Pierre VANDEN BERGHE et Jeannine GAUTHIER demandent à être reçus en qualité de parties intervenantes;

Vu l'ordonnance du 26 février 2013 accueillant cette intervention;

Vu les mémoires en réponse et en réplique régulièrement échangés;

Vu le mémoire en intervention;

Vu le rapport de Mme FRANCK, premier auditeur au Conseil d'Etat, établi sur la base de l'article 12 du règlement général de procédure;

Vu la notification du rapport aux parties et les derniers mémoires des parties requérantes, première partie adverse et parties intervenantes;

Vu l'ordonnance du 19 novembre 2015, notifiée aux parties, fixant l'affaire à l'audience du 7 janvier 2016 à 9.30 heures;

Entendu, en son rapport, Mme GUFFENS, conseiller d'Etat;

Entendu, en leurs observations, Me M. GUIOT, avocat, comparaissant pour les parties requérantes, Me B. FRANCIS, avocat, comparaissant pour la première partie adverse, Me E. ORBAN de XIVRY, avocat, comparaissant pour la seconde partie adverse, et Me B. HAVET, avocat, comparaissant pour les parties intervenantes;

Entendu, en son avis conforme, Mme FRANCK, premier auditeur;

XIII - 6472 - 2/21

Vu le titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées le 12 janvier 1973;

Considérant que les faits utiles à l'examen du recours se présentent comme suit :

1. Le 5 octobre 2010, les époux VANDEN BERGHE introduisent une demande de permis d'urbanisme ayant pour objet la régularisation d'une véranda, d'un garage supplémentaire, d'un escalier extérieur, de velux, de la modification d'un abri en bois contenant des boxes pour chevaux et d'une piste d'équitation en sable dont les barrières seront retirées et dont le sol en sable sera remplacé par de l'herbe, le tout dans une propriété sise rue du Bois Impérial 60 à Lasne.

Les travaux litigieux dans le cadre du présent recours se détaillent comme suit :

- ajout d'un box en 1981 à un bâtiment comprenant déjà deux boxes pour chevaux autorisé par un permis de bâtir daté du 23 août 1979, puis construction en 1991 de deux autres bâtiments dans le prolongement du premier de sorte qu'au total ces bâtiments peuvent accueillir 7 chevaux;

- aménagement d'une piste équestre en 1979; - construction en 1990 d'un escalier extérieur le long de la façade arrière de l'habitation.

Les requérants sont propriétaires de parcelles et d'habitations situées à proximité directe du projet.

Au plan de secteur de Nivelles adopté par arrêté royal du 1er décembre 1981, les boxes et la piste d'équitation sont situés en zone forestière.

2. Le 26 novembre 2010, le département de la nature et des forêts (D.N.F.) émet un avis défavorable de principe.

3. En 2010 puis en 2011, des compléments d'information sont demandés par la commune aux époux VANDEN BERGHE qui les fournissent, et deux enquêtes publiques sont organisées à propos du projet.

4. Le 6 août 2012, le collège communal émet un avis favorable sur la demande de permis.

XIII - 6472 - 3/21

5. Le fonctionnaire délégué n'émet ni avis ni décision dans le délai prescrit. Son avis et sa décision sont dès lors réputés favorables.

6. Le collège communal délivre le permis d'urbanisme le 8 octobre 2012. Il s'agit de l'acte attaqué. Il est notifié aux demandeurs et au fonctionnaire délégué le 23 octobre 2012.

Le permis ne se limite pas à justifier les régularisations accordées mais examine chacune des 18 autres infractions urbanistiques et les 57 violations de servitudes conventionnelles dénoncées par les réclamants lors des enquêtes publiques, parmi lesquels certains requérants de la présente affaire. L'acte attaqué ne juge les réclamations pertinentes sur aucun de ces points;

Considérant que les requérants prennent un premier moyen de la violation des articles 36, 37, 40, 111, 114 et 452/22 du Code wallon de l'aménagement du territoire, de l'urbanisme, du patrimoine et de l'énergie (CWATUPE), des articles 2 et 3 de la loi du 29 juillet 1991 relative à la motivation formelle des actes administratifs, du principe de bonne administration qui implique que l'autorité doit procéder à l'examen complet des circonstances de la cause et de l'erreur manifeste d'appréciation; que ce moyen a trait aux boxes pour chevaux;

que, dans une première branche, les requérants soutiennent que l'acte attaqué n'établit pas que l'abri de jardin qui a été agrandi et transformé en boxes pour chevaux a existé dans les faits et que cette existence était légale, alors que l'article 111 du CWATUPE et la jurisprudence du Conseil d'Etat exigent, pour l'application de cette disposition, une construction, une installation ou un bâtiment existant légalement;

que, dans une deuxième branche, subsidiaire par rapport à la première et intitulée "agrandissement disproportionné", ils soutiennent que l'acte attaqué autorise des travaux qui ne correspondent pas à la notion de transformation ou d'agrandissement puisque les boxes présentent une superficie d'environ 11,5 m sur 7 m pour le premier volume, une superficie de 9,75 m sur 5 m pour le deuxième volume et d'une dizaine de m2 pour le volume de liaison, soit un total d'environ 140 m² (environ 170 m² avec la dalle) par rapport à l'abri de jardin autorisé qui présentait une surface de 6 m sur 3 m, soit 18 m²; qu'à leur estime, il s'agit d'une nouvelle construction qui n'est pas l'accessoire de l'abri initial et non d'une transformation, d'un agrandissement ou d'une reconstruction de celle-ci;

XIII - 6472 - 4/21

que, dans une troisième branche, ils soutiennent que l'acte attaqué ne contient pas de motivation suffisante du caractère exceptionnel de la dérogation, celle-ci étant accordée par rapport à la zone forestière et à la zone d'espaces verts du plan de secteur sans définir dans quelle zone se situent les boxes, ce qui traduit, selon eux, le fait que l'autorité n'a pas cherché à appliquer ce plan mais plutôt à entériner une situation existante en étant influencée par le poids du fait accompli; qu'ils affirment, par ailleurs, que l'évocation d'activités équestres "originairement autorisées" serait erronée puisque le permis de 1979 n'a autorisé, selon eux, qu'un abri de jardin en bois et non des boxes pour chevaux, comme relevé dans la première branche; que, quant à la piste d'équitation également invoquée dans la motivation, ils estiment qu'elle est illégale parce que, d'abord, elle nécessitait un déboisement préalable qui a été exécuté sans permis, qu'ensuite, elle nécessitait elle-même un permis car elle entraînait une modification sensible du relief du sol et, qu'enfin, elle contrevient au plan de secteur puisqu'elle est partiellement établie en zone forestière;

que, dans une quatrième branche, ils soutiennent que l'acte attaqué contient une motivation insuffisante et erronée en ce qui concerne l'intégration paysagère des boxes autorisés; qu'ils font valoir qu'en effet, la propriété des époux VANDEN BERGHE-GAUTHIER ne serait pas ou plus extrêmement boisée, que les boxes ne se noient pas totalement dans cet environnement puisqu'ils ne sont pas situés dans, mais devant une zone boisée, et qu'en outre, ils ne sont pas totalement invisibles depuis la voie publique puisqu'il ressort d'un constat d'huissier établi à la demande des intervenants eux-mêmes que ces boxes sont visibles depuis la chaussée au niveau du portail qui donne accès à la grange;

Considérant que, quant à la première branche, les requérants répliquent qu'il apparaît clairement de la motivation et des documents du dossier de demande de permis de 1979 que celui-ci a autorisé la construction d'un abri de jardin et non de boxes pour chevaux; qu'ils soutiennent qu'il n'est dès lors pas nécessaire d'interpréter ce permis à la lumière des plans qui lui étaient annexés; qu'ils estiment que l'acte attaqué contient donc une erreur dans ses motifs lorsqu'il affirme que le permis de 1979 a autorisé des boxes pour chevaux; qu'ils relèvent qu'aucun des boxes actuels ne correspond à l'abri de 18 m² autorisé par le permis de 1979, que celui-ci imposait un recul de 5 m du bâtiment par rapport à la limite du fond du jardin et que son coin arrière gauche soit situé à 15 m - calculés le long de la limite séparative - de l'ancienne borne située en fond de parcelle et qu'il n'est pas possible d'affirmer que l'abri de jardin a été construit en respectant ces distances; qu'ils ajoutent que les photographies déposées par les parties intervenantes ne démontreraient pas que l'abri de jardin a été légalement construit; qu'ils font...

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