Décision judiciaire de Conseil d'État, 4 février 2016

Date de Résolution 4 février 2016
JuridictionXIII
Nature Arrêt

CONSEIL D'ETAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF.

A R R E T

nº 233.738 du 4 février 2016

A. 208.581/XIII-6590

En cause : 1. TROQUET Bernadette, 2. TROQUET Frédéric, 3. TROQUET Bernard, ayant tous élu domicile chez Mes Etienne GREGOIRE et Antoine GREGOIRE, avocats, avenue Blonden 21 4000 Liège,

contre :

la Région wallonne, représentée par son Gouvernement, ayant élu domicile chez Me Xavier DRION, avocat, rue Hullos 103-105 4000 Liège.

Partie intervenante :

la Société anonyme de droit public PROXIMUS, anciennement société anonyme de droit public BELGACOM, ayant élu domicile chez Mes Herman DE BAUW et Bart MARTEL, avocats, avenue Louise 99 1050 Bruxelles.

------------------------------------------------------------------------------------------------------ LE CONSEIL D'ETAT, XIIIe CHAMBRE,

Vu la requête introduite le 18 avril 2013 par Bernadette TROQUET, Frédéric TROQUET et Bernard TROQUET qui demandent l'annulation de la décision du 24 décembre 2012 du Ministre de l'Aménagement du territoire, de l'Urbanisme et de la Mobilité de la Région wallonne, qui octroie, sur recours, à la société anonyme de droit public (S.A.D.P.) PROXIMUS un permis d'urbanisme ayant pour objet la modification d'une station-relais de télécommunication sur un pylône existant sis rue du Vieux Quartier 26 à Oupeye (Heure-le-Romain), sur une parcelle cadastrée section A, nº 752y;

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Vu la requête introduite le 12 juin 2013 par laquelle la société anonyme de droit public (S.A.D.P.) BELGACOM demande à être reçue en qualité de partie intervenante;

Vu l'ordonnance du 24 juin 2013 accueillant cette intervention;

Vu les mémoires en réponse et en réplique régulièrement échangés;

Vu le courrier du 3 juillet 2015 adressé au Conseil d'Etat par la partie intervenante;

Vu le mémoire en intervention;

Vu le rapport de Mme VANDERHELST, auditeur au Conseil d'Etat, établi sur la base de l'article 12 du règlement général de procédure;

Vu la notification du rapport aux parties, la lettre valant dernier mémoire des parties requérantes et le dernier mémoire de la partie intervenante;

Vu l'ordonnance du 15 décembre 2015, notifiée aux parties, fixant l'affaire à l'audience du 28 janvier 2016 à 09.30 heures;

Entendu, en son rapport, Mme BOLLY, conseiller d'Etat;

Entendu, en leurs observations, Me Sophie ORTEGA, loco Mes E. GREGOIRE et A. GREGOIRE, avocat, comparaissant pour les parties requérantes, Me X. DRION, avocat, comparaissant pour la partie adverse, et Me Danijela VULETIC, loco Mes H. DE BAUW et B. MARTEL, avocat, comparaissant pour la partie intervenante;

Entendu, en son avis conforme, Mme VANDERHELST, auditeur;

Vu le titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées le 12 janvier 1973;

Considérant que les faits utiles à l'examen de la cause se présentent comme suit :

1. La première partie requérante est propriétaire d'une parcelle située sur le territoire de la commune d'Oupeye, à Heure-le-Romain, rue du Vieux Quartier 26,

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et cadastrée section A, nº 752y. Elle est par ailleurs domiciliée au numéro 24 de la même rue.

Les deuxième et troisième parties requérantes sont exploitants agricoles. Leur activité est sise à titre principal rue Vinâve d'Ile 9 à Heure-le-Romain. Dans le cadre de leur activité, elles exploitent notamment la parcelle susvisée.

Cette parcelle est située en zone d'habitat à caractère rural et en zone agricole au plan de secteur de Liège adopté par arrêté du 26 novembre 1987.

2. En août 2011, la partie intervenante remplit une demande de permis d'urbanisme portant sur un bien sis sur la parcelle précitée ("rue du Vieux Quartier nº 26 cadastré 7ème division section A nº 752 y") et visant à "modifier une station de mobilophonie".

Il ressort du dossier de demande que celle-ci a plus précisément pour objet l'implantation sur un pylône existant de trois faisceaux hertziens, dont un de 60 centimètres de diamètre et deux de 30 centimètres de diamètre, ce juste endessous de deux nappes d'antennes existantes, et que l'objectif poursuivi est une amélioration des capacités de transmission du réseau de la partie intervenante.

La station de mobilophonie existante a été autorisée par un permis d'urbanisme délivré le 12 septembre 2002.

Conformément à l'article 5 du décret du 3 avril 2009 relatif à la protection contre les éventuels effets nocifs et nuisances provoqués par les rayonnements non ionisants générés par des antennes émettrices stationnaires, l'avis de l'Institut Scientifique de Service Public (ISSeP) a été sollicité et rendu le 11 juillet 2011. Il est favorable et est joint à la demande de permis.

D'autres documents sont également joints à la demande, dont une notice d'évaluation des incidences sur l'environnement.

3. Le 14 septembre 2011, le fonctionnaire délégué accuse réception du dossier de demande de permis.

4. Le 20 septembre 2011, l'Intercommunale d'Incendie de Liège et Environs indique ne pas avoir "de remarque particulière à émettre concernant ce projet, si ce n'est la conformité de l'installation électrique avec la réglementation en vigueur. Cette conformité sera attestée par le rapport de contrôle de ladite

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installation par un organisme agréé par le Service Public Fédéral Economie, P.M.E., Classes Moyennes et Energie".

5. Une enquête publique est organisée du 17 au 31 octobre 2011.

Elle donne lieu à une réclamation, introduite le 28 octobre 2011, pour les parties requérantes par leur conseil qui fait valoir ce qui suit :

" [...]

Dans le cadre de l'enquête dont références sous rubrique, ces derniers me demandent de vous faire part de leurs observations : - Ils sont agriculteurs et occupent de la parcelle dont question. L'antenne Belgacom qui s'y trouve est alimentée en courant électrique via l'exploitation de mes clients; - Depuis de nombreuses années, ils subissent des courants électriques vagabonds dans leur exploitation agricole qui ont causé - et causent encore actuellement - des dizaines de décès dans leur cheptel par électrocution et électrisation et un dépérissement du bétail (retard de croissance chute de la production laitière, taux d'infertilité hors norme...);

- Une procédure judiciaire est d'ailleurs en cours actuellement devant le Tribunal de 1ère instance de Liège et oppose mes clients à la Scrl Tecteo. La responsabilité de cette dernière est mise en cause et une importante indemnisation est réclamée. Cette procédure est toujours pendante devant le Tribunal;

- La réalité des courants vagabonds ressort de rapport d'experts judiciaires, ainsi que d'un rapport du bureau Dapesco établi préalablement à la procédure judiciaire. Il y a des courants de fuite au départ d'une cabine électrique. La Scrl Tecteo n'a rien fait pour remédier au problème;

- Cette pollution électrique cause des dommages considérables pour mes clients et il est à craindre que la modification apportée à l'antenne Belgacom accroisse les dommages et continue d'être une source de danger.

Dans la mesure où aucun contrôle n'a été effectué par Belgacom, que la Scrl Tecteo n'a pris aucune mesure pour résoudre le problème des courants de fuite et que le Tribunal de 1ère instance n'a pas tranché le litige, mes clients s'opposent à ce permis.

[...]".

6. Le 17 novembre 2011, le collège communal d'Oupeye, vu la réclamation précitée, décide d'émettre un avis défavorable sur la demande de permis d'urbanisme "tant qu'aucune décision n'a été prise en ce qui concerne la procédure en justice".

7. Le 9 janvier 2012, le fonctionnaire délégué refuse le permis d'urbanisme sollicité au vu de la réclamation précitée. Cette décision est motivée comme suit :

" [...]

Considérant que les réclamations sont fondées pour les raisons suivantes :

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- l'antenne Belgacom se trouve sur la parcelle des réclamants et est alimentée en courant électrique via leur exploitation agricole;

- depuis de nombreuses années, ils subissent des courants électriques vagabonds dans leur exploitation agricole qui ont causé - et causent encore actuellement -des dizaines de décès dans leur cheptel par électrocution et électrisation et un dépérissement du bétail (retard de croissance, chute de la production laitière, taux d'infertilité hors norme, ...);

- une procédure en justice est en cours actuellement devant le Tribunal de 1ère

Instance de Liège opposant Mr et Mme TROQUET-NOËL et Mr TROQUET à la SCRL TECTEO. La responsabilité de cette dernière est mise en cause et une importante indemnisation est réclamée; - la réalité des courants vagabonds ressort de rapport d'experts judicaires, ainsi que d'un rapport du bureau DAPESCO établi préalablement à la procédure judicaire. Il y a des courants de fuite au départ d'une cabine électrique. La Scrl TECTEO n'a rien fait pour remédier au problème; - il est à craindre que la modification apportée à l'antenne BELGACOM accroisse les dommages et continue d'être une source de danger;

Considérant que la demande de permis ne concerne pas un projet figurant sur la liste arrêtée par le Gouvernement et qui, en raison de sa nature, de ses dimensions ou de sa localisation, est soumis à étude d'incidences sur l'environnement, compte tenu des critères de sélection visés à l'article D.66 du Code de l'environnement;

Considérant que la demande de permis est accompagnée d'une notice d'évaluation des incidences sur l'environnement, que cette notice est complète en identifiant, décrivant et évaluant de manière appropriée, les effets directs et indirects, à court, à moyen et à long terme, de l'implantation et de la mise en œuvre du projet sur l'homme, la faune et la flore; le sol, l'eau, l'air, le climat et le paysage; les biens matériels et le patrimoine culturel; l'interaction entre les facteurs visés ci-avant;

Considérant que la demande de permis n'est pas accompagnée d'une étude d'incidences, que l'autorité estime au vu de la notice précitée et des plans, que tenant compte des critères de sélection pertinents visés à l'article D.66, § 2, le projet n'est pas susceptible...

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