Décision judiciaire de Conseil d'État, 6 mars 2014

Date de Résolution 6 mars 2014
JuridictionXIII
Nature Arrêt

CONSEIL D'ETAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF.

A R R E T

nº 226.625 du 6 mars 2014

A. 198.868/XIII-5779

En cause : KERCKHOFFS Luc, ayant élu domicile chez Me Dominique VERMER, avocat, avenue Tedesco 7 1160 Bruxelles,

contre :

  1. la Commune de Plombières, ayant élu domicile chez Mes Patrick HENRY et Nathalie VAN DAMME, avocats, place des Nations Unies 7 4020 Liège,

  2. la Région wallonne, représentée par son Gouvernement.

    Partie intervenante :

    SCHYNS Freddy, ayant élu domicile chez Mes Dominique DRION et Xavier DRION, avocats, rue Hullos 103-105 4000 Liège.

    ------------------------------------------------------------------------------------------------------ LE CONSEIL D'ETAT, XIIIe CHAMBRE,

    Vu la requête introduite le 17 janvier 2011 par Luc KERCKHOFFS qui demande l'annulation du permis d'urbanisme octroyé le 17 novembre 2010 par le collège communal de Plombières à Freddy SCHYNS en vue de régulariser l'extension d'une étable existante dont une partie sert de hangar agricole, le déplacement d'un silo et la suppression de deux silos, l'ajout d'une citerne en 2008 pour mise aux normes et l'installation d'un robot de traite sur un bien sis rue de Beusdael 158 à Sippenaeken;

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    Vu la requête introduite le 4 mars 2011 par laquelle Freddy SCHYNS demande à être reçu en qualité de partie intervenante;

    Vu l'ordonnance du 22 mars 2011 accueillant cette intervention;

    Vu les mémoires en réponse et en réplique régulièrement échangés;

    Vu le mémoire en intervention;

    Vu le rapport de Mme FRANCK, premier auditeur au Conseil d'Etat, établi sur la base de l'article 12 du règlement général de procédure;

    Vu la notification du rapport aux parties et les derniers mémoires des parties requérante, première partie adverse et intervenante;

    Vu l'ordonnance du 8 janvier 2014, notifiée aux parties, fixant l'affaire à l'audience du 13 février 2014 à 9.30 heures;

    Entendu, en son rapport, Mme GUFFENS, conseiller d'Etat;

    Entendu, en leurs observations, Me Anne-Sophie VERRIEST, loco Me D. VERMER, avocat, comparaissant pour la partie requérante, Me Catherine LEJEUNE, loco Mes P. HENRY et N. VAN DAMME, avocat, comparaissant pour la première partie adverse, Me Célia HECQ, loco Mes P. LAMBERT et B. HENDRICKX, avocat, comparaissant pour la seconde partie adverse, et Me Xavier DRION, avocat, comparaissant pour la partie intervenante;

    Entendu, en son avis conforme, Mme FRANCK, premier auditeur;

    Vu le titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées le 12 janvier 1973;

    Considérant que les faits utiles à l'examen du recours se présentent comme suit :

  3. Le requérant est propriétaire et réside dans le château de Beusdael, sis dans le périmètre d'un site classé par arrêté royal du 29 mars 1976.

    Dans le périmètre de ce site classé se trouve notamment une étable appartenant à Freddy SCHYNS, partie intervenante, agriculteur établi dans le voisinage immédiat du château. Le château et l'étable sont situés en zone agricole au

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    plan de secteur de Verviers-Eupen. L'étable a fait l'objet d'un permis délivré en 1994

    qui ne paraît pas avoir été contesté par le propriétaire précédent du château.

  4. Souhaitant agrandir ses installations, Freddy SCHYNS introduit une première demande de permis d'urbanisme en avril 2002, pour une extension de l'étable existante. Le gabarit demandé est de 30 m de long pour une largeur et une hauteur identiques à celle de l'étable; le bâtiment viendrait s'implanter dans l'exact prolongement de celle-ci.

    Au cours de l'enquête publique, le requérant introduit une réclamation et propose que le nouveau hangar soit construit à l'est de l'étable existante ou qu'il soit dissimulé derrière des arbres.

    Le 4 juin 2002, la commission consultative communale d'aménagement du territoire (C.C.A.T.) de Plombières émet à l'unanimité un avis favorable conditionnel, demandant la plantation d'un écran de verdure du côté de l'étang et du château, le long de l'ensemble de la construction (étable existante et nouvelle étable), afin de diminuer l'impact visuel des constructions.

    Le 6 juin 2002, la direction générale de l'agriculture émet également un avis favorable.

    Le 9 juillet 2002, le collège des bourgmestre et échevins de la commune de Plombières émet un avis défavorable dans lequel on peut lire ce qui suit :

    " [...] Considérant qu'il convient de préserver l'intérêt du monument classé et de son site classé (château de Beusdael et les terrains avoisinants), le projet tel que présenté ne peut être accepté considérant que les remblais à mettre en œuvre (non mentionnés ou de manière erronée) ainsi que l'impact visuel de la nouvelle extension seront de nature à dénaturer l'environnement immédiat du château et de son site. Le demandeur est invité à déposer un nouveau projet qui s'implantera derrière l'étable existante de manière parallèle ou perpendiculaire à celle-ci";

    Le 12 août 2002, le fonctionnaire délégué émet également un avis défavorable rédigé comme suit :

    " Vu les circonstances urbanistiques et architecturales locales;

    Les actes et travaux compromettent la destination générale de la zone et son caractère architectural pour les raisons suivantes :

    Le hangar projeté est très important et les remarques émises lors de la première extension (plantations d'un écran végétal, constitué d'une haie haute d'essences régionales, suppression des mentions publicitaires sur les silos) n'ont pas été rencontrées.

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    De plus, aucun plan détaillé de neutralisation et d'aménagement d'abords du hangar n'est joint.

    Dans l'état actuel du dossier, mon avis est défavorable.

    Cependant, vu les arguments d'exploitation exposés par la Direction générale de l'Agriculture, un dossier comprenant un plan détaillé de l'aménagement des abords de l'ensemble de l'exploitation (plantations, nettoyage du site, remise en état) visant à améliorer la qualité visuelle actuelle et à rendre au site classé sa valeur esthétique et patrimoniale, pourra faire l'objet d'une nouvelle étude".

    Freddy SCHYNS renonce alors à sa demande, tout en annonçant la réintroduction d'une nouvelle demande plus complète. 3. En janvier 2003, il introduit une deuxième demande de permis d'urbanisme pour construire un hangar agricole en extension de l'étable existante.

    Une réunion est organisée sur place entre le demandeur de permis, un représentant de la commune, de la direction générale de l'aménagement du territoire, du logement et du patrimoine (D.G.A.T.L.P.) et de la Commission royale des Monuments, Sites et Fouilles (C.R.M.S.F.).

    Le hangar projeté serait toujours dans le prolongement de l'étable existante, mais décalé d'environ 2 m vers l'est par rapport à celle-ci. Par ailleurs, la largeur et la hauteur sont réduites de 1 m par rapport à celles de l'étable.

    L'enquête publique est organisée du 31 janvier au 17 février 2003.

    Le requérant exprime à nouveau son désaccord, considérant que la valeur du château serait amoindrie et le site dénaturé.

    Le 11 février 2003, la direction générale de l'agriculture émet un nouvel avis favorable.

    Le 13 février 2003, la C.C.A.T. de Plombières émet également un avis favorable dans lequel elle demande qu'un écran de verdure composé d'arbres d'essences régionales soit placé devant l'étable existante afin d'atténuer l'impact visuel du site par rapport au château.

    Le 4 mars 2003, la C.R.M.S.F. émet un avis favorable conditionnel libellé comme suit :

    " Les derniers plans présentés prennent en compte les remarques formulées précédemment.

    Toutefois, le remblai côté Château reste trop «agressif».

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    Condition :

    La pente du remblai devra être réduite, afin d'être aussi douce que possible.

    La CRMSF avait souhaité que le niveau du faîte soit réduit de 1 mètre. Cette condition est remplie. Cependant, afin d'ancrer davantage le bâtiment au sol et de conserver le volume utile de départ, la CRMSF demande que la dalle de sol soit également abaissée d'1 mètre.

    Sans fermer la rue vers le Nord, quelques plantations (essences locales variées) devront avantageusement accompagner ce très long bâtiment. [...]".

    Le 10 mars 2003, le collège des bourgmestre et échevins de Plombières réitère son avis défavorable et invite cette fois le demandeur à déposer un nouveau projet qui s'implantera derrière l'étable existante de manière parallèle à celle-ci. L'option de l'implantation perpendiculaire est donc abandonnée.

    Le 18 avril 2003, après une nouvelle visite des lieux, le fonctionnaire délégué émet cette fois un avis favorable conditionnel, rédigé comme suit :

    " Vu les circonstances urbanistiques et architecturales locales;

    Considérant qu'une demande de permis précédente a été déposée à l'administration communale en date du 14 mai 2002 et a reçu un avis défavorable en date du 12 août 2002;

    Vu la visite sur place de septembre 2002 et les propositions de modification du projet, résultant des contraintes techniques (talus, infiltrations d'eau, zones de manœuvre et pente d'accès des tracteurs), du respect du site classé et de la localisation des terrains du demandeur autour des bâtiments de ferme :

    - Bâtiment déplacé vers l'Est; - Niveau différencié par rapport au bâtiment d'étable existant; - Non alignement des faîtes; - Décrochage dans le volume projeté à la jonction de l'ancien bâtiment; ceci afin de casser l'effet de masse de l'ensemble des deux bâtiments.

    Vu les matériaux préconisés (bardage bois, ton naturel, toiture ton noir) du projet dont objet;

    Considérant que l'implantation en parallèle préconisée par le Collège entraînera : - La démolition du silo existant; - La reconstruction d'un silo à l'arrière de l'étable en lieu et place du bâtiment projeté; - La création d'une aire de manœuvre pour les tracteurs et remorques à l'arrière des bâtiments et devant le silo ainsi déplacé, ce qui aura des conséquences encore plus perturbantes pour l'environnement et la qualité paysagère du site".

    Par une lettre du 26 mai 2003, la division de la police de l'environnement de la direction générale des ressources...

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